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Full text of "Les sanatoria, traitement et prophylaxie de la phtisie pulmonaire"

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25   JANVIER   1927 


PRIX    QAN3   MAJORATION 

32    fr. 

MASSON    &    C" 


YALE 
MEDICAL  LIBRARY 


HISTORICAL  LIBRARY 

The  Gift  of 

MEDICAL  LIBRARY 
ASSOCIATION  EXCHANGE 


1 

LABORARE 

EST 

ORARE 

(  'So  llûork  is  to  Tray  ) 

EX  LIBRIS 

S.  ADOLPHUS  KNOPF 

' 

NEW  YORK 

WAF 


LES  SANATORTA 


*è 


PUBLICATIONS   DU   MEME   AUTEUR 


Dress  Reform  and  its  Relation  to  Medicine  Southern  Californis  Practi- 
tioner,  july  1889. 

Les  Sanatoria;  Traitement  et  prophylaxie  de  la  phtisie  pulmonaire. 
Thèse  de  Paris  :  Mention  honorable  de  1  Académie  de  médecine  (Georges 
Carré,  éditeur,  Paris,  iSg5). 

Sanatoria  for  the  Treatment  and  Prophylaxis  of  Pulmonary  Tuber- 
culosis.  New  York  Med.  Journal,  5  el   12  oct.   1893. 

Les  Sanatoria  des  phtisiques  sont-ils  un  danger  pour  le  voisinage  ? 
Revue  de  la  Tuberculose,  vol.  III,  1895. 

Should  we  treat  Pulmonary  Tuberculosis  as  a  Contagious  or  as  a 
Communicable  Disease?  Southern  California  Practitioner,    may  1896. 

Are  Sanatoria  for  Consuniptives  a  Danger  tho  the  Neighborhood  ? 
New  York  Médical  Record,  ">  oct.  1896. 

La  Phtisio- Thérapie   et   les   Sanatoria    Presse  Médicale,    Paris,  14  ocl 

1896. 

The  Hygienic,  Educational  and  Symptomatic  Treatment  of  Pulmonary 
Tuberculosis.  New  York  Médical  Record,  1  !  fcbr.  1897. 

Antistreptococcic  Sérum  in  the  Mixed  Infection  of  Tuberculosis  Jour- 
nal of  the  American  Med.  Association,  16  sept.   1897. 

The  Présent  Status  of  Préventive  Means  against  the  Spread  of  Tuber- 
culosis in  the  Various  States  of  the  Union  Critically  Reviewed. 
■tournai  of  the  American  Med.  Association,  Jo  oct.   1897. 

The  Urgent  Need   of   Sanatoria  for    the    Consumptive  Poor    of   our 

Large  CitieS    New   York  Med.  Record,  X]  nov.    1897. 

Ein  neues  binaurales  Stethoskop  mit  Armentarium  fur  vollstandige 
Auscultation  und  Percussion.  Zeitschrift  fur  Krankenpflege  und  Aerzt- 
liche  Polytechnik,  Mârz  1898. 

State  and  Municipal  Care  of  Consuniptives  New  York  Med  Record, 
1 J  sept.   1898. 

The  Tuberculosis  Problem  in  the  United  States.  North  American  Review, 
february  1899. 

Pulmonary  Tuberculosis;  its  Modem  Prophylaxis  and  Treatment  in 
Spécial  Institutions  and  at  Home  Alvàrenga  Prize  Essay  of  the  Col- 
lège of  Physir.ians  of  Philadelphie,  for  the  year  1898  (P.  Blakislon's  Son 
et  C".,  Philadelphia). 


LES  SANATORIA 


TRAITEMENT   ET   PROPHYLAXIE 


LA  PHTISIE  PULMONAIRE 


P  A  11 

S.-A.  KNOPF 
»»» 

de  la  Faculté  do  Paris  et  de  Bellevue  Hospital  Médical  Collège  (New- York), 

Médecin   du  Département  pulmonaire    du   New  York  Throat  and  Nose  Hospital 

Ancien  Assistant  du  Professeur  Dettweiler  au  Sanatorium  de  Falkenstein  ; 

Membre  de  l'Académie   de  Médecine  de  New-Y'ork  ;   Lauréat  de  l'Académie 

de  Médecine  de  Paris. 


Aux  grandes  âmes,  hommes,  femmes, 
médecins,  hygiénistes  et  philanthropes, 
qui  ont  à  cœur  le  sort  des  phtisiques 
malheureux. 


DEUXIEME     EDITION' 


PARIS 

Georges    CARRÉ    et    C.    NAUD,    Éditeurs 

3  ,     RUE     RACINE,     3 
I9OO 


Digitized  by  the  Internet  Archive 

in  2012  with  funding  from 

Open  Knowledge  Commons  and  Yale  University,  Cushing/Whitney  Médical  Library 


http://www.archive.org/details/lessanatoriaaiOOknp 


PRÉFACE   DE    LA  PREMIERE   EDITION 


Msyiixtov  8»  xai  yzAzTZMZono'i ,  xa!  itXîîiTTO'Jî 
Existve  "ô  "oO'.vcûSs;. 

De  toutes  les  maladies,  la  plus  grande,  la  plus 
difficile  et  celle  qui  emporta  le  plus  de  monde, 
fut  la  phtisie. 

Hippocrate.T.  III.  Trad.de  Littré,  p.  g3. 

O'jto^  r]v  i\  àpyjrtz  8Epocrcâu97J  ÔY"fc  Y'VETa'- 
Le  malade  (phtisique),  s'il  est  traité  dès  l'ahord, 
g-uérit. 

Hippocratk.  T.  VII.  Trad.  de  Littré,  p.  77. 

En  choisissant  pour  ma  thèse  inaugurale  devant  la  Faculté 
de  Paris  un  sujet  si  vaste,  si  important  que  celui  du  trai- 
tement de  la  tuberculose,  je  sens  vivement  la  difficulté  de 
ma  tâche.  Mais  depuis  des  années  cette  question  me  préoc- 
cupe. 

Déjà,  dans  la- lointaine  Californie  du  Sud  où  j'ai  com- 
mencé mes  études  médicales,  j'ai  vu  chaque  hiver  des 
milliers  de  tuberculeux  venir  en  foule  de  tous  les  coins  des 
Etats-Unis.  L'impuissance  où  nous  nous  trouvons,  en  pré- 
sence de  cette  maladie  meurtrière,  m'a  profondément  im- 
pressionné. Dans  cet  admirable  climat  de  Californie,  où 
fleurissent  les  orangers,  où  les  roses  s'épanouissent  en 
janvier,  où  les  rigueurs  de  l'hiver  sont  inconnues  comme 
les  chaleurs  extrêmes  de  l'été,  les  malades  peuvent  demeu- 
rer nuit  et  jour  dehors  pendant  323  jours  de  l'année,  et 
cependant  ils  y  meurent  encore  en  très  grand  nombre. 
Pourquoi  ce  pays  si  merveilleusement  doté  par  la  nature 


v;  PREFACE  DE  LA   PREMIERE  EDITION 

ne  répond-il  pas  davantage  à  l'espoir  que  Ton  met  en  lui  ? 
Pourquoi  le  «  paradis  des  phtisiques  »,  comme  le  nomment 
là-bas  nies  confrères,  reste-t-il  si  souvent  impuissant  ?  Nous 
essayerons  de  le  dire  plus  loin. 

Sous  ce  ciel  d'une  rare  clémence,  les  malades  riches 
peuvent  épuiser  toutes  les  ressources  du  traitement,  et 
cependant  beaucoup  succombent.  Quant  aux  pauvres 
atteints,  ils  s'éteignent  en  foule  dans  les  hôpitaux,  comme 
j'ai  pu  le  constater  pendant  mon  année  d'internat  à  Los 
Angeles  County  Hospital  (Californie  du  Sud). 

Plus  tard,  dans  les  hôpitaux  de  New- York  et  de  Paris, 
j'ai  retrouvé,  aussi  nombreuses,  les  victimes  de  la  tuber- 
culose :  ici  encore   les  pauvres  payent  le  plus  lourd  tribut. 

Faut-il  donc  attendre  le  remède,  tuberculine  ou  sérum, 
œuvre  d'un  Koch,  d'un  Behring  ou  d'un  Poux? 

Je  saluerai  avec  joie  le  jour  où  un  semblable  trésor  sera 
donné  à  la  science  et  aux  malheureux.  .Mais  on  ne  saurait 
laisser  venir  cette  heure,  peut-être  lointaine  encore,  sans 
demander  le  secours  de  remèdes  dont  l'efficacité  est  cer- 
taine et  le  danger  nul,  sans  tenter  des  réformes  hospitalières 
dont  l'utilité  n'est  plus  à  démontrer. 

Le  but  de  ce  travail  sera  donc  : 

L  étude  approfondie  du  seul  traitement  qui  jusqu'à  ce 
jour  ait  fourni  de  bons  résultats  :  la  cure  hygiénique  et 
diététique  dans  les  sanatoria  ;  je  m'efforcerai  de  faire 
mieux  connaître  et  mieux  apprécier  la  valeur  de  cette  théra- 
peutique. 

La  lecture  des  livres  ne  pouvait  suffire  à  me  préparer  à 
cette  tâche  difficile  :  il  fallait  étudier  sur  place.  Dans  trois 
longs  voyages,  j'ai  parcouru  les  différents  pays  d'Europe  et 
d'Amérique.  J'ai  visité  et  j'ai  étudié  avec  soin  22  sanatoria 
ou  hôpitaux  spéciaux.  Là  ne  s'est  pas  bornée  ma  mission  : 
il  fallait  apporter  des  statistiques  exactes  et  récentes. 
Plusieurs  centaines  de  lettres   ont  été  adressées  aux  méde- 


PRÉFACE  DE  LA   PREMIÈRE  ÉDITION  VIr 

cins  de  France  et  de  l'étranger,  leur  demandant  le  chiffre 
des  insuccès,  des  guérisons  ou  des  améliorations  qu'ils 
avaient  constatés.  '  Cent  d'entre  eux  environ  m'ont  ré- 
pondu. 

La  partie  économique  n'a  pas  moins  attiré  mon  attention  : 
quelles  dépenses  peut  nécessiter  le  traitement  dans  un 
sanatorium  pour  les  pauvres  ?  J'ai  cherché  des  documents 
près  des  directeurs  des  sanatoria  existant  ou  en  Aoie  de 
construction.  Presque  tous  m'ont  donné  les  renseignements 
nécessaires.  Je  remercie  ici  tous  ces  messieurs  de  leur 
grande  obligeance. 

Je  faillirais  à  la  coutume  et  à  mes  propres  sentiments  si 
j'allais  plus  loin  sans  dire  à  mes  maîtres  des  Hôpitaux  tout 
ce  que  me  dicte  une  sincère  et  juste  gratitude. 

Pendant  cinq  ans  et  demi  j'ai  entendu  les  maîtres  de  la 
Faculté  de  Paris  ;  c'est  à  eux  que  j'adresse  les  premiers 
remerciements. 

De  mes  maîtres  des  Hôpitaux,  Messieurs  les  professeurs 
Potain,  Tillaux,  Tarnier,  je  garderai  toujours  un  souvenir 
précieux  ;  qu'ils  veuillent  accepter  ici  l'expression  de  ma 
reconnaissance  profonde  pour  leurs  enseignements  éclai- 
rés, pour  l'exemple  que  nous  donne  à  nous,  jeunes  méde- 
cins, leur  inépuisable  bonté  envers  leurs  malades  et  leurs 
élèves. 

Je  dois  à  M.  le  professeur  Straus  d'avoir  pu  acquérir 
quelques  connaissances  microbiologiques  nécessaires  dans 
l'étude  de  la  phtisio-thérapie.  En  m'ouvrant  son  labora- 
toire, il  m'a  donné  la  marque  d'une  bienveillance  dont  je 
lui  ai  une  vive  gratitude. 

Parmi  MM.  les  professeurs  agrégés  et  médecins  des 
Hôpitaux  auxquels  je  dois,  pour  leurs  renseignements, 
une  reconnaissance  toute  particulière  ,  je  désire  citer 
MM.  Jalaguier,  Gaucher,  Walther,  et  Ménard  de  Berck-sur- 
Mer. 


vin  PREFACE  DE  LÀ  PREMIERE  EDITION 

Je  ne  saurais  trop  dire  à  M.  le  professeur  agrégé  Letulle 
combien  je  suis  heureux  d'avoir  été  honoré  des  conseils 
qu'il  m'a  prodigués.  Je  lui  sais  le  plus  grand  gré  de  l'inté- 
rêt toujours  soutenu  qu'il  m'a  témoigné  pour  ce  travail. 
11  a  été  pour  moi  plus  qu'un  maître,  qu'il  me  laisse  le  lui 
dire. 

11  me  faut  rendre  maintenant  hommage  à  M.  le  professeur 
Grancher,  dont  les  œuvres  sur  la  tuberculose  m'ont  con- 
firmé dans  l'idée  de  prendre  ce  sujet  de  thèse  inaugurale- 
devant  la  Faculté  de  Paris.  Ses  leçons  sur  les  maladies  de 
l'appareil  respiratoire  me  l'ont  fait  choisir  comme  le  meilleur 
guide,  et  dès  lors  m'est  venue  la  pensée  d'entreprendre  ce 
travail  sous  ses  auspices. 

M.  le  professeur  Grancher  m'a  accueilli  avec  une  rare 
bienveillance;  se  rendant  à  mon  désir,  il  a  accepté  la  pré- 
sidence de  cette  thèse.  Sa  carte,  qu'il  avait  eu  la  générosité 
de  me  confier,  m'a  fait  recevoir  dans  tous  les  sanatoria  de 
l'Europe  avec  la  plus  grande  cordialité. 

Le  prestige  de  son  nom  m'a  valu  la  réponse  des  plus 
hautes  personnalités  médicales  de  France  et  de  l'étranger, 
et  je  lui  dois  ainsi  une  part  des  importants  renseignements 
que  j'ai  pu  recueillir. 

Ses  conseils  m'ont  guidé  dans  l'embarras,  et  si  mon 
travail  a  quelque  valeur,  si  je  réussis  à  faire  connaître  un 
peu  le  traitement  des  tuberculeux  dans  les  établissements 
fermés,  enfin  si  j'ai  le  bonheur  d'attirer  l'attention  des  gou- 
vernements sur  la  question  des  sanatoria  pour  les  pauvres, 
je  devrai  à  M.  le  professeur  Grancher  la  plus  grande  partie 
du  succès.  Qu'il  me  considère  donc  toujours  comme  son 
élève  profondément  reconnaissant  et  dévoué. 

Faisant  retour  vers  des  temps  plus  éloignés,  je  reporte  ma 
pensée  vers  mes  premiers  maîtres  :  ceux  de  la  Faculté  de 
médecine  de  l'Université  de  la  Californie  du  Sud. 

J'allie  dans  le    même    sentiment  de  respectueuse  sym 


PRÉFACE  DE  LA   PREMIÈRE  ÊDITIOS  ik 

pathie  M.  le  doyen  Widney,  MM.  les  professeurs  Lindley 
et  Kurtz,  dont  la  bonne  amitié  ne  m'a  pas  fait  défaut,  et 
qui  tant  de  fois  m'ont  fait  part  de  leurs  renseignements 
personnels. 

Depuis  la  première  année  de  mes  études,  M.  le  professeur 
Nadeau,  directeur  de  la  clinique  médicale  de  Los  Angeles, 
s'est  intéressé  à  moi  avec  une  sollicitude  paternelle.  Son 
aide  efficace  et  sûre  m'a  toujours  soutenu  aux  heures  cri- 
tiques de  ma  carrière  médicale,  de  la  vie  même. 

Que  ce  maître,  que  cet  ami,  croie  à  la  filiale  affection  de 
son  élève  dévoué  ! 

Qu'il  me  soit  permis  de  rappeler  ici  le  nom  de  Bellevue- 
Hospital  Medical-College  et  de  dire  à  mes  maîtres  de  New- 
York,  surtout  à  MM.  les  professeurs  Lusk,  Flint,  Janeway, 
Biggs,  Sayre,  Dennis,  A.  A.  Smith  Bryant  et  Doremus, 
combien  leur  souvenir  m'est  cher. 

Le  cordial  et  bienveillant  accueil  que  j'ai  partout  reçu 
dans  mes  voyages  me  fait  un  agréable  devoir  de  remercier 
ici  MM.  Sabourin  du  Canigou,  Petit  d'Ormesson,  Achter- 
mann,  Rompler,  Weicker  de  Goersbersdorf,  Hess,  Blu- 
menfeld  et  Nahm  de  Falkenstein,  Wolff  de  Reiboldsgrûn, 
Haufe  de  Saint-Blasien,  Turban  de  Davos,  Lauth  de  Leysin, 
Meissen  de  Hohenhonnef,  Lewis  de  Ventnor,  Philip  d'Edim- 
bourg, Perkins  de  Brompton  (Londres) ,  Ménard  de  Berck-sur- 
Mer,  Panzeri  de  Milan. 

Je  suis  également  très  reconnaissant  à  M.  le  Dr  Napias, 
inspecteur  général  des  services  administratifs  du  ministère 
de  l'intérieur,  de  l'amabilité  avec  laquelle  il  m'a  fourni  des 
renseignements  précieux  pour  mes  chapitres  sur  les  lois 
sanitaires  et  les  sanatoria  pour  les  pauvres. 

Avant  de  terminer,  je  tourne  ma  pensée  vers  un  des  maî- 
tres de  l'Allemagne,  dont  le  nom  est  aujourd'hui  connu  de 
la  France  et  du  monde  entier.  J'ai  cité  M.  le  professeur 
Dettweiler,  de  Falkenstein,   qui  a  tout  fait   pour   faciliter 


x  PREFACE  DE  LA   PREMIERE  EDITION 

ma  tâche  et  rendre  plus  fructueuses  mes  études  sur  les 
sanatoria  et  le  traitement  hygiénique  et  diététique  de  la 
tuberculose. 

Pendant  mon  court  séjour  à  Falkenstein,M.  le  professeur 

Dettweiler  a  mis  à  ma  disposition  ses  aides,  sa  bibliothè- 
que, sa  personne  même.  Durant  île  longues  heures,  il  m'a 
fait  partager  son  expérience,  sa  science  profonde  de  la 
tuberculose. 

A  mon  départ  de  Falkenstein,  il  a  voulu  me  donner  une 
nouvelle  marque  de  bienveillance  et  d'intérêt.  11  m'a  invité 
à  revenir  faire  un  stage  dans  ce  célèbre  sanatorium,  quand 
la  Faculté  de  médecine  de  Paris  aura  agréé  la  tliése  que  je 
soutiens  ici. 

Que  ce  maître  vénéré  reçoive  avec  ceux  de  France  et 
d'Amérique  l'expression  de  mes  hommages,  de  mon  pro- 
fond respect  et  de  ma  gratitude,  qu'il  croie  avec  eux  tous 
que  le  précieux  souvenir  de  la  bonté  que  Ton  m'a  témoi- 
gnée îestera  gravé  dans  mon  cœur. 


Piiris.  le  20  juin    1895. 


PREFACE   DE   LA  DEUXIÈME   EDITION 


«  Il  est  dans  le  pouvoir  de  l'homme  de  faire 
disparaître  toutes  les  maladies  parasitaires  du 
monde.  » 

Louis  Pasteur. 


Pour  faire  paraître  une  deuxième  édition  d'un  ouvrage 
quelconque,  l'auteur  doit  avoir  des  raisons  sérieuses,  des 
motifs  urgents,  car  en  médecine  comme  dans  toute  autre 
science  les  livres  abondent.  On  écrit  trop  rapidement  et 
trop  facilement  dans  notre  âge  d'imprimerie  électrique. 
Si  j'ai  donc  enfin  cédé  aux  sollicitations  de  plusieurs 
de  mes  confrères'  d'Europe  et  d'Amérique  et  de  mes 
éditeurs,  il  faut  que  je  donne  les  raisons  qui,  selon  moi, 
justifient  la  publication  de  cette  deuxième  édition.  Le  suc- 
cès de  la  première  édition  de  mon  traité  :  Les  Sanatoria  ; 
Traitement  et  prophylaxie  de  la  phtisie  pulmonaire,  fut 
un  succès  inattendu.  Ainsi  que  la  préface  de  la  première 
édition  l'indique,  j'ai  présenté  ce  travail  comme  thèse  inau- 
gurale devant  la  Faculté  de  médecine  de  Paris.  Le  jury 
devant  lequel  j'ai  soutenu  ma  thèse  était  composé  d'hommes 
illustres,  tels  que  Bouchard,  Grancher,  Letulle,  Marie,  et 
ces  messieurs  m'ont  accordé  la  note  «  extrêmement  satis- 
fait »  pour  mon  travail.  L'Académie  de  médecine  de  Paris 


xii  PRÉFACE  DE  LA   DEUXIEME  ÉDIT/0.\ 

décernait  à  ce  travail,  dans  sa  séance  solennelle  du  i5  dé- 
cembre 1896,  la  mention  honorable  (Prix  Monbinne).  Le 
même  ouvrage  écrit  en  langue  anglaise  (1)  fut  couronné 
Tannée  dernière  par  le  Collège  des  médecins  de  Philadel- 
phie (Alvarenga  Prize) . 

La  première  édition  française,  quoique  tirée  à  un  nom- 
bre exceptionnel  d'exemplaires,  était  épuisée  en  quelques 
mois,  et  mes  éditeurs  m'écrivaient  à  plusieurs  reprises 
que  mon  livre  continuait  à  être  demandé.  Bien  que  très 
encourageantes,  ces  raisons  seules  ne  suffiraient  pas  pour 
entreprendre  une  tache  demandant  un  travail  tel  que  le 
renouvellement  d'un  livre  sur  un  sujet  d'une  semblable 
importance,  par  un  praticien  occupé. 

Dans  la  préface  de  la  première  édition  de  mon  ouvrage,  je 
disais  :  «  Le  but  de  ce  travail  sera  l'étude  approfondie  du 
seul  traitement  qui  jusqu'à  ce  jour  ait  donné  de  bons 
résultats,  la  cure  hygiénique  et  diététique  dans  les  sana- 
toria.  »  Mais  dans  la  même  page  je  disais  aussi  :  «  Je 
saluerai  avec  joie  le  jour  où  il  sera  donné  aux  malheureux 
phtisiques  un  trésor,  un  remède  qui  guérit,  un  sérum  ou 
tuberculine,  œuvre  d'un  Koch,  d'un  Behring  ou  d'un  Roux.  » 
Ce  jour  est-il  venu  ?  Nous  parlerons  plus  tard  des  travaux 
de  nos  grands  bactério  -  phtisio -thérapeutes  ;  ici  nous 
voulons  simplement,  en  justification  c'.e  la  deuxième  édition 
de  notre  livre,  faire  la  déclaration  suivante. 

Quatre  ans  se  sont  écoulés  depuis  que  j'ai  exprimé  le  vœu 
que  nos  grands  bactério-thérapeutes  viennent  à  l'aide  de 
nos  malheureux  phtisiques.  Ils  ont  fait  de  leur  mieux  leur 
devoir,  l'illustre  Koch  aussi  bien  que  ses  imitateurs,  et  nous 
autres  cliniciens  avons  essayé  leurs  produits.  Les  résultats 
décourageants  de  ces  essais  institués   par   des  milliers  de 


(1)  S.  A.  Knopf.  Pulmonary  Tuberculosis  ;  Modem  prophylaxis  and  ils 
treatment  in  spécial  institutions  and  at  Home  (P.  Blakiston's  Son  et  C°, 
Philadelphia). 


PREFACE  DE  LA  DEUXIEME  EDITIOS 


médecins  dans  presque  tous  les  pays  civilisés,  sont  le  vrai 
motif  cpii  me  fait  céder  au  désir  de  mes  confrères  et  de 
mes  éditeurs  en  publiant  cette  seconde  édition.  Dans 
ce  travail  augmenté,  mieux  documenté  et  je  dirai  même 
encore  plus  approfondi  que  le  premier,  je  m'efforcerai  de 
faire  mieux  connaître  et  mieux  apprécier  la  valeur  de  la 
cure  hygiénique  et  diététique  des  tuberculeux  dans  les 
sanatoria  ou  au  moins  dans  les  milieux  hygiéniques,  sous  la 
surveillance  d'un  médecin  au  courant  de  la  phtisio-thérapie 
moderne.  Depuis  la  publication  de  ma  thèse,  dans  laquelle 
j'ai  décrit  mes  visites  et  mes  études  sur  place  d'une 
vingtaine  de  sanatoria  et  d'hôpitaux  spéciaux,  j'ai  rendu 
visite  à  des  sanatoria  d'Europe  et  d'Amérique  cpii  n'ont  pas 
encore  été  décrits.  J'ai  fait  de  plus  un  stage  prolongé 
comme  assistant  de  mon  vénéré  maître  le  professeur  Dett- 
weiler  dans  le  célèbre  sanatorium  de  Falkenstein.  A  mon 
retour  en  Amérique,  j'ai  fait  quelques  expériences  intéres- 
santes avec  le  sérum  de  Marmorek  dans  les  infections 
mixtes  de  la  tuberculose,  d'abord  dans  le  laboratoire  de 
la  ville  de  New-York,  puis  dans  le  service  de  mon  distingué 
maître  le  professeur  Biggs,  à  l'hôpital  Bellevue.  Nommé 
médecin  du  service  des  maladies  pulmonaires  du  New 
York  Hospital  pour  les  maladies  de  la  gorge  et  du  nez,  je 
me  suis  attaché  surtout  à  étudier  la  meilleure  manière 
d'appliquer  le  traitement  hygiéno-diététique  aux  tuber- 
culeux ambulants  de  nos  consultations  [Dispensary  Service). 
Dans  ma  clientèle  privée  et  aussi  à  l'hôpital,  j'ai  étudié 
pendant  plusieurs  mois  les  effets  du  «  cabinet  pneumatique  » . 
Cet  appareil  m'a  donné  de  si  bons  résultats,  que  je  me  fais 
un  devoir  d'introduire  une  description  un  peu  détaillée  de 
ce  cabinet  et  de  son  emploi  dans  mon  chapitre  sur  l'aéro- 
thérapie.  Comme  membre  de  la  Société  de  médecine 
publique  et  d'hygiène  professionnelle  de  Paris,  de  la 
Société  américaine  pour  la  santé  publique  [American  Public 


PREFACE  DE  LA   DEUXIEME  EDITIOX 


Health  Association)  et  de  la  Société  pour  la  prévention  de 
la  tuberculose  de  l'Etat  de  Pensylvanie  [Pennsylvania 
Society  for  the  Prévention  of  Tuberculosis) ,  je  me  suis  tenu 
au  courant  des  mesures  prophylactiques  instituées  dans  les 
pays  civilisés  en  général,  et  j'ai  eu  occasion  d'étudier 
quelques  nouveaux  problèmes  à  ce  sujet.  Quant  à  la 
question  des  sanatoria  pour  phtisiques  pauvres,  laquelle 
m'a  toujours  particulièrement  intéressé,  j'en  ai  fait  depuis 
mon  retour  dans  mon  pays  l'objet  d'une  étude  spéciale.  Je 
vois  la  récompense  de  mes  plaidoyers  répétés  pour  ces 
institutions  dans  la  fondation  récente  de  plusieurs  établis- 
sements de  ce  genre  par  quelques-unes  des  grandes  villes 
des  Etats-Unis. 

Je  me  suis  informé  des  projets  établis  dans  les  pays  que 
je  n'ai  pu  visiter  sur  tout  ce  qui  intéresse  la  phtisio-thé- 
rapie  moderne  et  les  sanatoria  pour  tuberculeux,  en  adres- 
sant des  lettres  aux  phtisio-thérapeutes  les  plus  distingués 
de  ces  diverses  contrées.  Les  réponses  n'ont  pas  manqué  et 
je  tiens  à  remercier  ici  tous  ces  messieurs  de  leur  grande 


obligeance. 


J'ai  puisé  d'utiles  renseignements  dans  la  Revue  de  In 
Tuberculose,  ce  journal  excellent,  rédigé  par  notre  savant 
confrère,  M.  le  docteur  L.-II.  Petit,  de  Paris,  secrétaire 
général  de  l'Œuvre  de  la  Tuberculose. 

Presque  tous  les  chapitres  ont  reçu  quelques  pages  d'ad- 
ditions importantes,  et  si  l'on  considère  que  la  deuxième 
édition  contient  en  plus  la  description  et  la  reproduction 
photographique  de  plusieurs  sanatoria,  qu'elle  donne  en  un 
mot  l'état  actuel  de  la  phtisio-thérapie  moderne  et  ration- 
nelle dans  tous  les  pays  civilisés,  je  puis  espérer  pour  cette 
seconde  édition,  de  la  part  du  public  médical,  un  aussi 
bon  accueil  que  celui  qu'il  a  accordé  à  la  première. 

De  même  que  le  premier  traité  :  Les  Sanatoria  ;  Traite- 
ment et  prophylaxie  de  la  phtisie  pulmonaire,  ce  nouveau 


PREFACE  DE  LA  DEUXIEME  EDITIOS  xv 

travail  est  le  résultat  d'une  expérience  acquise  auprès  des 
phtisiques,  au  milieu  desquels  j'ai  beaucoup  vécu.  Les 
quatre  années  que  j'ai  passées,  depuis  la  publication  de  la 
première  édition,  avec  les  tuberculeux  de  toutes  conditions 
sociales,  chez  eux  ou  dans  les  sanatoria  et  les  hôpitaux 
généraux,  m'ont  permis  d'augmenter  considérablement  le 
nombre  de  mes  observations. 

J'ai  dédié  ce  livre  à  ceux  cpii  ont  à  cœur  le  sort  des  phti- 
siques malheureux,  comptant  ainsi  appeler  leur  attention 
sur  une  classe  si  intéressante  de  malades,  à  la  bonne  direc- 
tion et  au  bon  traitement  desquels  la  société  en  général 
est  si  étroitement  intéressée. 


New- York,  le  icr  octobre  1899. 


LES  SANATORIA 

TRAITEMENT    ET   PROPHYLAXIE   MODERNE 
DE   LA   PHTISIE   PULMONAIRE 


CHAPITRE  PREMIER 
Historique. 

Écrire  l'histoire  du  traitement  de  la  tuberculose,  c'est  faire 
celle  de  la  maladie  elle-même,  car  aux  diverses  époques  du 
passé  la  thérapeutique  des  modalités  de  cette  affection  varie 
parallèlement  à  sa  conception  étiologique  et  pathologique. 

Pour  ne  pas  trop  étendre  ce  chapitre,  nous  relèverons  seu- 
lement les  faits  qui  nous  ont  paru  offrir  le  plus  d'intérêt  et  se 
rapporter  le  mieux  au  sujet  de  notre  travail. 

Ici  comme  presque  toujours,  quand  il  s'agit  d'histoire  de 
la  médecine,  c'est  à  Hippocrale  qu'il  faut  demander  le  premier 
mot. 

Vivant  à  deux  nulle  ans  de  nous  (460-377  avant  Jésus- 
Christ),  cet  immortel  précurseur  nous  a  laissé  les  premières 
indications  heureuses  du  traitement  de  la  tuberculose  pulmo- 
naire. 

Une  vie  sobre,  un  régime  approprié,  des  exercices  modérés, 
tels  sont  ses  conseils  (i)  :  «  Ce  malade  marchera,  dit-il,  si  la 
«  marche  lui  est  utile,  sinon  il  gardera  le  repos  autant  que 
«  possible.  »  Ne  retrouve-t-on  pas  là  les  promenades  réglées 
de  Brehmer  de  Goerbersdorf,  la  cure  par  le  repos  sur  des 
chaises  longues,  la  «  Liegekur  »  de  Dettweiler  de  Falkenstein  .' 

L'hérédité  de  la  phtisie  ne  lui  a  pas  échappé,  il  l'indique 
dans  ses  aphorismes  (sect.  IV,  8).  La  contagion,  en  revanche, 


(i)    Hippocrati;    (Lrad.    française    de  Litlré,    1848),    t.    VII,    §  49,    p.    73,    el 
§  10,  p.   190. 

Kxoit.  Sanatoria,  i 


■i  UISTOBIQIE 

n'est  nulle  pari  signalée  par  lui.  11  croil  à  la  curabilité  du  mal 
pris  an  début. 

Un  remarquable  nosographe,  Arétée  i  ,  venu  vers  25o  avant 
Jésus-Christ,  nous  a  laissé  un  tableau  exact  el  saisissant  de  la 
phtisie.  Dans  son  œuvre  ci  De  la  cure  de  la  phtisie  •>  on  voit 
préconiser  l'air  marin,  l'exercice,  les  promenades  en  nier,  sui- 
vies de  repos  et  de  frictions.  Quant  au  régime,  le  lait  y  tient  le 
premier  rang;  c'est,  dit-il,  «  une  excellente  boisson  pour  les 
phtisiques  ».  Un  peu  plus  loin  il  ajoute  :  «  Celui  qui  boit  beau- 
.    coup  de  lait  peut  se  passer  d'autres  aliments  ;  les  peuples  qui 

s'en  nourrissent  n'ont  pas  besoin  de  blé.  » 

Un  siècle  et  demi  après.  Celse  .5o  ans  avant  Jésus-Christ  à 
5o  après  ,  l'Hippocrate  latin,  recommandait  aux  uns  la  cam- 
pagne en  été,  a  d'autres,  plus  robustes,  des  voyages  en  mer; 
enfin  le  séjour  le  meilleur  était,  à  sa  pensée,  celui  d'Alexan- 
drie. 

De  -?>  à  -aô  avant  Jésus-Christ.  Pline  l'Ancien,  tout  empi- 
rique, de  médiocre  science  médicale  2  .  donne  au  soleil  une 
large  part,  compte  pour  le  reste  sur  l'air  que  l'on  respire  dans 
les  forêts  de  pins    3  . 

Galien  (i3i-2oo  après  Jésus-Christ  préfère  les  stations  éle- 
vées :  l'air  des  montagnes  dessèche  l'ulcération  des  poumons. 
La  cure  de  lait  a  en  lui  un  partisan.  11  envoie  ses  malades  au 
mont  Augré,  voisin  de  Naples.  11  accuse  l'air  confiné  d'être 
une  puissante  cause  du  mal  :  le  premier,  il  songe  à  la  conta- 
gion possible  par  la  cohabitation  avec  les  phtisiques  Pericu- 
losum pneterea  est  consuescere  cum  fus  qui  tabv  trnnittir     j  . 

Nous  devons  ici  passer  quelques  siècles  et  laisser  la  civilisa- 
tion latine  pour  la  civilisation  arabe  du  x"  siècle. 


(1)  Arétée  De  uiorborum  diulurnorum  el  acutorum  causis,  signis  el  cura- 
lione  (trad.  française  de  Renard).  Paris',  i834,  ch.  ni,  p.  3oi. 

Il  en  esl  d' Arétée  comme  de  plusieurs  illustres  écrivains  de  l'antiquité  dont 
les  ouvrages  sont  maintenant  connus  et  admirés  do  tous,  mais  dont  la  vie  el 
l'époque  même  où  ils  out  vécu  restent  ensevelies  dans  une  obscurité  profonde. 
Préface  de  Littré  dans  la  trad.  française  de  1  histoire  de  Pline    18  |8). 

(  t)  Destkez    Thèse,  1888. 

(j)  Boisseau.  Historique  de  la  contagion  de  la  phtisie  pulmonaire.  Recueil 
de  mémoires   de  médecine,  chirurgie  et  pharmacie  militaires,     i'   série,   un, 

nui  1869. 


HISTORIQUE  3 

Avicenne  (i)  et  d'autres  de  ses  célèbres  contemporains 
croyaient  à  la  contagion. 

Suivant  les  préceptes  de  Galien,  ils  recherchent  l'air  et  le 
climat  propices  :  c'est  à  l'île  de  Crète  (aujourd'hui  Candie)  que 
s'adresse  Avicenne,  et  nous  trouvons  dans  les  écrits  de  cette 
Ecole  des  cas  fréquents  de  guérison  définitive  (2). 

L'histoire  médicale  est  muette  du  xic  au  xvi°  siècle  :  la  tuber- 
culose pas  plus  que  les  autres  maux  ne  sortent  de  l'ombre 
pendant  cette  période. 

La  Renaissance  n'est  pas  seulement  le  réveil  de  la  Poésie,  de 
l'Art,  mais  encore  de  la  Science. 

Venu  de  l'Université  de  Leyde  au  Collège  de  France,  le 
savant  Jacobus  Sylvius  (1478-1 555)  (3)  donne  une  description 
précise  du  tubercule  ;  il  semble  avoir  pressenti  les  points  de 
contact  et  d'union  de  la  scrofule  et  de  la  tuberculose. 

Son  contemporain  Fallope  (i5a3-i562)  reconnaît  qu'il  n'y  a 
pas  un  même  climat  pour  tous  les  malades,  mais  que  le  choix 
doit  en  être  subordonné  à  leur  tempérament,  à  leur  constitution. 

La  même  époque  (i55o)  a  vu  dans  Montano  le  partisan  le 
plus  convaincu  de  la  contagion  qui  ail  jamais  été  :  il  suffit, 
dit-il,  pour  contracter  la  maladie  «  de  passer  pieds  nus  sur  les 
crachats  expectorés  par  un  phtisique  ». 

Au  même  siècle,  Lazare  Rivière  (i58c)-i6j5)  de  Montpellier, 
de  science  plus  rigoureuse,  d'opinion  moins  exagérée,  sou- 
tient avec  conviction  la  transmission  de  la  tuberculose  par  la 
cohabitation  et  diminue  au  profit  de  la  contagion  l'influence 
de  l'hérédité  (4)  • 

Il  faut  encore  citer  nombre  de  thérapeutes  engendrés  par  ce 
siècle  fécond.  Van  Helmont  (1077-1644)1  se  ralliant  à  l'opinion 
de  beaucoup  de  maîtres  antiques,  croit  à  l'efficacité  des  mon- 
tagnes et  des  climats  chauds  ;  surtout  il  se  montre  novateur 
hardi  en  recommandant  le  vin  dans  la  fièvre  (5). 


(1)  Avicenne  (980-1037),  célèbre  médecin  arabe,  né  en  Perse.  Son  vrai  nom 
fut  Abou-Iba-Sina-Avicenna.  —  Voir  Boisseau  :  Arabum  medicorum  principis 
canon  medicinse. 

(■i)  Manasse.  Die  Heilung  der  Lungentuberkulose. 

(3)  Son  vrai  nom  fut  Dubois.  —  Voir  Pkedùhl  :  Die  Geschichtc  der  Tuber- 
kulose,  1888. 

(4)  Boisseau.  Historique  de  la  contagion  de  la  phtisie  pulmonaire.  Loc.  cit. 

(5)  Destrez.  Thèse,  1888. 


i  HISTORIQUE 

La  croyance  à  l'influence  <lu  climal  guidait  aussi  le  médecin 
de  Londres,  Willis  1622-1675).  Chaque  hiver,  il  envoyail  en 
foule  ses  compatriotes  atteints  dans  la  région  méridionale  <lc 
la  France  qu'il  regardait  connue  privilégiée. 

La  même  pensée  animait  Baglivi  1669-1707}  <|ui,  déplorant 
l'inefficacité  des  remèdes,  nous  a  laisse''  une  longue  description 
des  contrées  propices  aux  tuberculeux  en  les  classant  <l  après 
leur  efficacité  (1). 

Citerons-nous  l'illustre  Sydenham  1624-1689),  médecin  du 
faubourg  de  Westminster  à  Londres,  qui  nous  rapporte,  sans 
élever  le  moindre  doute,  avoir  sauvé  plusieurs  phtisiques  par 
l'exercice  du  cheval  (2)? 

Parmi  les  maîtres  qui  appartiennent  aussi  bien  au  xvn''  qu'au 
xviii0  siècle,  nous  devons  mentionner  Frédéric  Hoffmann 
(1660-1742  •  Morgagni  et  Boerhaave   3). 

Le  premier,  étudiant  avec  beaucoup  de  soin  celle  partie  de 
la  thérapeutique,  mel  sa  confiance  dans  un  air  d'humidité 
modérée.  Il  reprend  l'idée  de  contagion,  mais  en  ajoutanl 
qu'elle  n'est  possible  que  par  un  contact  prolongé  et  chez  des 
sujets  prédisposés. 

Nul  ne  s'accorde  mieux  avec  Montano  que  Morgagni  [1682- 
1771)  (4)  :  il  était  hanté  par  l'idée  de  contagion  au  point  qu'il 
ne  voulut  jamais  pratiquer  l'autopsie  d'un  sujet  mort  de  ce 
mal.  11  n'a  cependant  apporté  à  l'appui  de  celte  croyance  popu- 
laire qu'il  subissait  aucun  fait  qui  pût  justifier  ses  craintes 
excessives. 

Au  contraire,  Boerhaave  (  1 6(38- 1 7  >^  "•'  parle  pas  de  conta- 
gion; cependant  il  écarte  ses  malades  du  lieu  où  ils  ont  pris  le 
mal  et  les  envoie  sous  un  nouveau  ciel. 

Son  élève  Van  Swieten  (1700-1772  apporte  le  même  éclec- 
tisme dans  le  choix  du  climat;  son  traitement  ne  diffère  en  rien 
de  celui  de  Boerhaave,  mais  il  esl  convaincu   de  la  contagion. 


ilrine,  connues   sous  le  nom 


(1)  Dodiëau.  Thèse,  1889. 

(■x)  Dupké  de  Lisle.  Traité  îles  maladies  de  la  p< 
<le  la  phtisie  pulmonaire.   Paris,  1769. 

(  >     Boisseau.  Historique  de  la  contagion  de  la  phtisie  pulmonaire,  loc.  cit. 

(4)   Morgagni.    Opéra  omnia   physico-medica,  t.   III  :    De  afTectione  phtisici 
sive  tabe. 


HISTORIQUE  5 

Dupré  de  Lisie,  dans  son  livre  paru  en  1769,  écrit  en  parlant 
de  l'exercice  du  cheval  :  «  Cet  exercice  doil  être  dirigé  par  la 
prudence  du  médecin  »  ;  il  ajoute  :  «  La  vie  champêtre  est 
encore  préférable  au  séjour  de  la  ville  pour  le  phtisique  à  raison 
de  l'air  qu'on  respire,  lequel  est  ordinairement  plus  sain  et 
plus  léger  (p.  260).  » 

Dans  la  bibliothèque  du  chirurgien  général  de  l'armée  des 
Etats-Unis  se  trouve  un  ouvrage  daté  de  Londres  (1747)1  dont 
l'auteur  est  inconnu.  Il  est  intitulé  :  «  A  lelter  from  a  physician 
in  the  Highlands  to  his  friend  in  London»    (1). 

Nous  y  rencontrons,  pour  la  première  l'ois,  une  idée  qui  con- 
corde avec  une  de  celles  que  nous  avons  l'intention  de  défendre 
bientôt  : 

i°  Le  traitement  hygiénique  et  diététique  est  le  véritable 
traitement  de  la  tuberculose  ; 

•j°  Le  climat  et  les  médicaments  ne  sont  que  des  adjuvants 
[dus  ou  moins  précieux. 

L'auteur  s  est  donné  pour  tâche  de  démontrer  qu'un  régime 
strict,  joint  à  une  vie  sobre,  à  des  exercices  modérés,  peut 
amener  une  guérison  presque  certaine  sans  le  secours  des 
médicaments  et  du  climat. 

Il  cite  alors  des  succès  incontestables  obtenus  malgré  l'hu- 
midité  et  les  intempéries  de  certaines  contrées. 

La  croyance  en  la  contagion  de  la  phtisie  pulmonaire  était 
aussi  très  répandue  dans  quelques  pays  d'Europe  à  cette  épo- 
que. Jeannet  des  Longrois  relate  que  «  en  1700,  à  Nancy, 
les  magistrats  firent  brûler  sur  la  grande  place  de  cette  ville  le 
mobilier  d'une  femme  pulmonique.  Quoique  bien  constituée 
auparavant,  cette  femme  avait  été  atteinte  de  la  pulmonie,  pour 
avoir  couché  souvent  dans  le  même  lit  avec  une  femme  poitri- 
naire (2)  ».  A  Naples,  un  édit  royal  du  20  septembre  1782  pres- 
crivait la  séquestration  des  phtisiques,  la  désinfection  des 
locaux,  effets,  meubles,  livres,  etc.,  avec  du  vinaigre,  de  l'ean- 
de-vie,  du  jus  de  citron,  de  l'eau  de  mer,  des  fumigations,  etc., 
le  tout  sous  peine  de  trois  ans  de  galères  pour  les  vilains,  de 


(1)  Index   catalogue   of  llie  library  of  the    Surgeon-General's    Office  U.   S. 
Army,  t.  VIII,  p.   70. 

(2)  Jeannet  des  Longrois.  Traité  de  la  pulmonie,   1781. 


C  HISTORIQUE 

trois  ;ms  de  château  fort  el  de  3oo  ducats  d'amende  pour  les 
nobles.  Le  médecin  <|ui  ne  faisait  pas  connaître  un  malade 
phtisique  s'exposait  à  une  amende  de  3oo  ducats  pour  La  pre- 
mière lois  et,  pour  la  deuxième,  à  un  bannissement  de  ili\  ans  ; 
celui  qui  facilitait  l'évasion  d'un  phtisique  était  condamné  à  six 
mois  de  prison.  Portai  rapporte  qu'en  Espagne  et  en  Portugal 
la  loi  forçail  les  parents  d'un  phtisique  à  en  faire  la  déclaration 
lorsqu'il  était  arrivé  à  la  dernière  période,  afin  de  procéder  à 
l'enlèvement  de  ses  hardes  el  les  brûler;  il  en  était  de  même 
dans  le  Languedoc   i  . 

La  fin  du  xvnr  siècle,  le  commencement  du  xix",  ont  vu  se 
produire,  dans  toutes  les  Ecoles  du  monde,  des  discussions 
sans  nombre  sur  l'étiologie,  la  pathologie  et  le  traitement  de  la 
tuberculose.  Loin  de  faire  éclater  la  lumière,  la  controverse 
obscurcissait  la  question. 

Quelques  noms  de  cette  période  sont  cependant  à  retenir. 

Un  des  illustres  professeurs  du  Collège  de  France,  Portai 
(i^42-I832  .  conseille,  dans  chacune  des  nombreuses  variétés 
de  phtisie  qu'il  décrit,  des  voyages  en  des  contrée  diverses. 

Dans  son  livre  ci  Observations  sur  La  nature  el  le  traitement 
de  la  phtisie  pulmonaire  »,  nous  lisons  :  «  Dans  toute  espèce  de 
phtisie,  le  même  air  pourrait  bien  aussi  ne  pas  convenir  éga- 
lement; par  exemple,  l'air  de  la  mer  réussit  aux  phtisiques 
de  naissance  et  aux  scroi'uleux,  mais  pas  aux  scorbutiques, 
et  celui  de  nos  provinces  méridionales  convient  beaucoup 
mieux  a  ces  derniers  »   2  . 

Peu  après,  Broussais  î—a-iS.iS  .  appliquant  sa  théorie 
générale  de  l'inflammation  aux  maladies  du  poumon,  recon- 
naît deux  (lasses  de  phlegmasies  chroniques  de  «et  organe  : 
les  capillaires  sanguins  d'un  côté,  les  réseaux  lymphatiques 
de  l'autre  dominent  par  leur  phlogose  la  pathogénie  de  ces  deux 
ordres. 

La  déduction  logique  du  traitement  fut  pour  Broussais  la 
saignée. 

In  étonnement   profond  nous  saisit  en  lisant  ses  œuvres  : 


m    Straus.  La  tuberculose  et  son  bacille.  Paris,  iSi,">. 

(2)  Portai..  Observations  sur  la  nature  et  le  traitement  «le  la  phtisie  pulmo- 
naire, (.  III.  p.    jo5. 


HISTORIQUE  1 

non  seulement  il  applique  sa  méthode  au  premier  degré  de  la 
phtisie,  mais  dans  le  chapitre  «  Traitement  du  deuxième  degré 
de  l'inflammation,  force  du  pouls,  faiblesse  de  l'individu  »  (i), 
il  écrit  :  «  J'ai  saigné  dans  ce  degré  de  phlegmasie  et  les 
malades  sont  morts;  j'ai  épargné  leur  sang  et  je  n'ai  pas  été 
plus  heureux  ;  j'ai  cependant  obtenu  plus  de  guérisons  avec 
la  saignée  que  sans  le  secours  de  ce  moyen.  » 

A  Londres,  Thomas  Reid,  dans  son  ouvrage  «  An  essay  on 
tbe  nature  and  cure  of  phtisis  pulmonalis  »  (Londres,  1785), 
revenant,  pour  les  combattre,  sur  les  idées  que  le  xvc  siècle 
avait  admises  avec  Jacobus  Sylvius,  met  une  barrière  entre  la 
scrofule  et  la  tuberculose  (2).  La  contagion  est  rare,  dit-il,  et 
ne  survient  que  par  cohabitation.  La  diète  végétale,  l'usage  du 
lait,  des  saignées  modérées,  telle  est  sa  thérapeutique.  En 
parlant  de  la  saignée  il  écrit  cependant,  au  traitement  de  la 
phtisie,  chap.  vi  :  «  De  toutes  les  maladies  dont  le  corps  humain 
est  le  sujet,  aucune  n'a  été  aussi  généralement  combattue  par 
des  saignées  fréquemment  répétées  que  la  phtisie  et  je  crains 
bien  qu'on  ait  trop  souvent  vérifié  l'ancienne  observation  (3), 
que  la  lancette  tue  plus  de  monde  que  la  lance.  » 

11  se  montre  optimiste  dans  son  pronostic,  et  conclut 
ainsi  :  «  Je  pense  que  la  consomption  pulmonaire  est  sus- 
ceptible  de  guérison  comme  les  maladies  des  autres  vis- 
cères. » 

Nous  trouvons  dans  Cullen  d'Edimbourg  (1700-1790)  une 
opinion  singulière  sur  la  contagion  :  elle  ne  se  produit,  d'après 
lui,  que  dans  les  pays  chauds. 

Sans  rien  apporter  de  nouveau  aux  connaissances  acquises, 
Hufeland  en  Allemagne  (1781-1827)  admet,  dans  son  ouvrage 
«  Sur  la  nature,  le  diagnostic  et  le  traitement  de  la  maladie 
scrofuleu.se  »,  l'influence  de  l'hérédité  et  de  la  prédisposition 
à  cette  maladie.  Il  recommande  de  se  défier  prudemment  de  la 


contagion. 


Son  œuvre  prend  une   plus  haute  portée  quand  il  envisage 
le  traitement.  Nous  associerons  ici  sou  nom  à  celui  de  Schœn- 


(1)  Broussais.  Histoire  des  phlegmasies  chroniques,  4e  éditv  1826,  p.  253, 

(2)  Reid.  Trad.  française,  p.   i3o,  1792. 

(3)  Boisseau.  Loc.  cit. 


S  HISTORIQUE 

lein  i  i-i)!l- iS(i  j  .  Tous  deux  remarquèrent  l'immunité  des 
habitants  des  contrées  montagneuses  donl  la  vie  l < > 1 1 1  entière 
s'écoulait  dans  leur  pays  natal.  Us  instituèrent  une  méthode  de 
traitement  <|iii  a  acquis  une  grande  importance. 

Parmi  les  médecins  viennois  de  la  même  époque,  citons 
Vetter   2)  (i8o3  .  li  décrit  trois  types  de  phtisie  : 

1"  Phtysis  pulmonalis  ; 

20  Tabès  pulmonum  ; 

il"  Phtysis  tuberculosa    Knotige  Lungenschwindsuchl  . 

La  première  variété  est,  dit-il,  d'origine  inflammatoire  el 
d'un  pronostic  assez  favorable. 

La  deuxième  est  un  effet  de  l'épuisement  général  el  d'excès 
de  (oui  genre. 

La  troisième  forme  se  localise  avec  prédominance  dans  les 
ganglions  bronchiques. 

Sauvage  ii-o(3-i-ii-  distinguait  vingt  espèces  de  phtisie 
pulmonaire    3). 

Portai  (  17  j'- iXT<  n'en  reconnaît  que  quatorze.  Citons  la 
phtisie  scrofuleuse,  nerveuse,  dartreuse,  pleurétique,  scorbu- 
tique, \  énérienne,  etc. 

Tel  est  le  chaos  des  idées,  jusqu'au  jour  ou  s'ouvre  1ère  que 
Virchow  a  justement  nommée  :  «  Die  interessanteste  Entwicke- 
lungszeil  der  franzôsischen  Medicine  ».  la  période  la  plus 
intéressante  di\  développement  de  la  médecine  en  France. 

Ce  temps  remarquable  de  l'histoire  a  vu  s'accomplir  les  plus 
grands  progrès  et  toute  la  nosologie  île  la  tuberculose  s'éclai- 
rer d'un  jour  nouveau. 

Bayle  i"4-ir!(i(i).  le  maître  de  Laënnec,  s'attache  à  l'étude 
du  tubercule  pulmonaire  qui  avait  été  décrit,  pour  la  première 
l'ois,  sous  ce  nom  par  le  médecin  anglais  Baillie,  en  1  —  » j i  1 . 

A  Laënnec  (4)  (1781-1827  revient  l'honneur  d'avoir  le  premier 
admis  et  enseigné  l'unité  de  la  phtisie  pulmonaire.  Malgré 
l'opposition  de   l'école   allemande,  de   Virchow  surtout,    (elle 


I  I  1  Dodie.vu.   /.Oc.  cit. 
I  2  I   l'ill  IMiill  .   hoc.   Cit. 

1  li  Straus.  La  tuberculose  el  son  bacille,  189?. 

(  i)  Laennki  .  Traité  de  I  auscultation  médiate  el   «les  maladies  tin  poumon  el 
du  cœur  (éd.  de  la  Faculté  1 


HISTORIQUE  g 

unité  est  restée  intacte,  et  nous  en  devons  rendre  hommage 
aux  mémorables  travaux  de  notre  éminent  maître  M.  le  profes- 
seur Graneher  (i). 

Laënnec,  phtisique  lui-même,  trouvant  dans  l'air  des  régions 
maritimes  le  meilleur  spécifique  du  mal,  avait  fait  joncher  de 
varechs  le  sol  de  sa  chambre,  espérant  ainsi  respirer  quelque 
peu  de  l'air  marin. 

A-t-il  cru  à  la  contagion  ?  Nous  ne  saurions  l'affirmer.  Nulle 
part  il  ne  tranche  nettement  la  question;  mais,  s'étant  blessé  au 
doigt  en  faisant  une  autopsie,  il  avait  pu  voir  le  tubercule  se 
développer  et  accomplir  sous  ses  yeux  toute  son  évolution.  Ne 
semble-t-il  pas  qu'il  ait  dû  croire  l'inoculation  possible  (2)  ? 
Vingt  ans  plus  tard,  Laënnec  mourait  du  mal  qu'il  avait  si  bien 
étudié.  Il  avait  créé  de  toutes  pièces  l'auscultation  du  pou- 
mon. 

Depuis  Laënnec,  les  plus  grands  progrès  qu'on  ait  accom- 
plis regardent  l'étiologie,  la  prophylaxie,  le  traitement  de  la 
tuberculose. 

Ils  sont  donc  tout  particulièrement  intéressants  pour  nous. 

Ville  min  apporte  le  premier  une  notion  capitale  appuyée  sur 
des  faits  irréfutables  :  le  5  décembre  1 865,  il  démontre  à  l'Aca- 
démie de  Médecine  que  la  tuberculose  est  inoculable  et  rentre 
dans  la  classe  des  maladies  virulentes. 

Poursuivant  ses  travaux,  Villemin  (1869^  met  en  lumière,  avec 
une  clairvoyance  et  une  précision  qu'on  ne  saurait  trop  admi- 
rer, le  rôle  probable  que  jouent  les  crachats  desséchés  dans  la 
dissémination  de  là  tuberculose  (3). 

Nombre  de  fois  la  clinique,  et  bien  souvent  aussi  le  labora- 
toire, ont  depuis  lors  corroboré  cette  hypothèse. Ci  tons,  parmi  les 
expérimentateurs  connus  en  France  :  Graneher,  Cornil,  Straus, 
Verneuil,  Constantin-Paul,  Chauveau,  Hérard,  Iiippolyte  Mar- 
tin, Clado.  —  En  Allemagne  :  Tappeimer,  Koeh.  Klebs, 
Cohnheim,    Cornet.    —    En    Angleterre    :    Williams,    Clarke, 


(1)  Grancher.  De  l'unité  de  la  phtisie.  Thèse,  1873.  —  Maladies  de  l'appareil 
respiratoire,    1890. 

(2)  Note  prise    au   cours    de  pathologie  comparée  et  expérimentale  de   M.  le 
Pr  Straus.  Semestre  d'hiver  1894-95. 

('3)  Straus.  La  tuberculose  et  son  bacille,  Paris,  189Î. 


,,,  HISTORIQUE 

Wilson  Fox. —  En  Amérique  :  Welch,  Biggs,  Loomis,  Prudden 
el  llodenpj  1. 

Enfin,   le  i>4   mars  1882,   la  grande  découverte  de  Koch     1 
apporta    la    preuve   irréfragable   de   la    nature   contagieuse   el 
microbienne   tic   la     tuberculose.   Pendant   que    le   laboratoire 
Huns  apprenait   la  nature  et  les  causes  de  cette  maladie,  1rs 
thérapeutes  cherchaient  un  nouveau  traitement. 

11  faudrait  un  long-  ouvrage  pour  énumérer  tous  les  médica- 
ments qu'a  vus  naître  la  dernière  moitié  de  ce  siècle  et  dont  les 
vertus  spécifiques  ont  été  l'objet  de  panégyriques  aussi  nom- 
breux que  peu  mérités. 

Nous  avons  vu  dans  ces  dernières  années  ingérer  ou  injecter 
tour  à  loin-  les  bactéricides  les  plus  divers,  renouveler  sans 
cesse  les  tentatives  d'immunisation.  .Vous  avons  vu  enfin  le 
dernier,  le  plus  célèbre,  mais  non  le  moins  néfaste  de  ces 
agents,  la  tuberculinc  de  Koch,  échouer  sans  retour,  ne  lais- 
sant que  le  souvenir  de  l'espoir  décevant  qu'elle  avait  fait 
éclore. 

Toute  l'élude  à  laquelle  nous  venons  de  nous  livrer  nous 
montre  combien  est  vaine  la  recherche  d'un  médicament  spéci- 
fique ;  nous  avons  alors  résolu,  après  mûre  réflexion  et  en  nous 
fondant  sur  l'expérience  de  nombreux  maîtres,  de  mettre  notre 
confiance  et  notre  conviction  dans  la  prophylaxie,  dans  l'hy- 
giène, dans  un  régime  approprié  et  surtout  dans  les  établisse- 
ments fermés. 

C'est  après  Laènnee  qu'ont  été  posées  les  premières  indica- 
tions de  cette  thérapeutique. 

May  (2)  (1791  .  à  la  fin  du  siècle  dernier,  s'était  efforcé  de 
trouver  la  guérison  dans  le  seul  régime  alimentaire  :  ce  n'était 
la  qu'une  ébauche.  Poursuivant  la  même  idée,  Curchot  et  Car- 
rière demandèrent  le  succès  à  la   cure  de  petit-lait  et  de  raisin. 

Un  de  nos  meilleurs  thérapeutes.  Benne!  de  Menton,  dut  la 
guérison  à  la  tentative  qu'il  fit  sur  les  conseils  d'une  infirmière 
géniale,  miss  Florence  Nightingale  :  la  vie  en  plein  air  et  un 
régime  reconstituant  l'arrachèrent  à  la  phtisie. 


(il  II.    Koch.  Die  .Tïtiologie   der   Tuberkulose.   Berliner  klin.   Wochenschr.. 

n    i5,  188a. 

(2)  Hérard,  Cornil  et  Ha.not.  La  phtisie  pulmonaire,  1888. 


HISTORIQUE  ■  i 

La  cure  hygiéno-diélélique  clans  des  «  établissements  fermés», 
exclusivement  destinés  aux  phtisiques,  fut  définitivement  insti- 
tuée par  Hermann  Brehmer,  de  Goerbersdorf. 

Le  titre  de  sa  thèse  inaugurale  (i856)  dit  assez  sa  pen- 
sée :  «  Tiiberculosis  primis  in  stadiis  scmper  curabilis.  »  Il 
ne  reçut  l'autorisation  de  fonder  un  sanatorium  qu'en  i85c), 
grâce  à  l'influence  puissante  de  ses  amis  Humboldt  et  Sehœn- 
lein. 

Dettweiler,  son  élève  le  plus  distingué,  apporta  quelques 
modifications  importantes  à  la  méthode  de  son  maître. 

En  France,  en  Allemagne,  en  Angleterre,  en  Suisse,  et 
presque  dans  tous  les  pays  d'Europe,  aux  Etats-Unis  d'Amé- 
rique et  même  en  Australie,  les  pratiques  de  Brehmer  et 
Dettweiler  comptent  aujourd'hui  de  nombreux  partisans  clans 
le  monde  médical. 

Les  sanatoria  pour  le  traitement  des  phtisiques  payants  se 
sont  multipliés  partout  depuis  quelques  années.  L'historique  des 
sanatoria  et  hôpitaux  spéciaux  pour  les  phtisiques  pauvres  est 
encore  assez  récent,  sauf  peut-être  pour  l'Angleterre.  Là  le 
premier  hôpital  pour  les  phtisiques  pauvres  fut  ouvert  pendant 
l'année  1814  sous  le  nom  de  «  Royal  Hospital  for  diseases  oftlie 
cites t  ».  Le  premier  «  Cottage  sanatorium  »  (système  de  petits 
pavillons  isolés),  où  les  malades  peu  aisés  ne  paient  qu'une 
partie  des  dépenses,  était  établi  aux  Etats-Unis  il  y  a  quinze 
ans  par  le  docteur  Trudeau,  à  Saranac  Lake,  sous  le  nom  d'  «  Adi- 
rondack  Cottage  Sanitarium  ».  Le  premier  sanatorium  pour  le 
traitement  des  phtisiques  pauvres  selon  le  principe  deBrehmer- 
Dettweiler  est  celui  de  Buppertshain,  qui  ne  date  que  de  dix 
ans,  et  dont  les  commencements  furent  particulièrement  diffi- 
ciles. Voici  un  petit  fait  historique  dont  j'ai  été  témoin,  étant 
à  cette  époque  l'assistant  du  professeur  Dettweiler.  Le  sana- 
torium pour  les  phtisiques  pauvres  fonctionnait  déjà  depuis 
quelques  années;  il  était  situé  non  loin  du  grand  sanatorium 
de  Falkenstein  pour  les  malades  payants.  Le  nombre  des 
malades  augmentait  et  l'établissement  devenait  trop  petit.  Après 
avoir,  non  sans  beaucoup  de  peine,  recueilli  les  fonds  néces- 
saires à  la  construction  d'un  autre  sanatorium  plus  spacieux, 
on  vit  une  clame  noble,  très  riche,  s'opposer  à  ce  projet.  Cette 
clame,    qui    craint   les   microbes,  possède    une   villa   dans   les 


,  ,  a/STORTQl  I 

environs  de  Falkenslein,à  une  distance  assez  éloignée  du  sanr.- 
torium  projeté. 

La  peur  «les  bacilles  a  néanmoins  porté  bonheur  cette  fois 
aux  phtisiques  pauvres  :  cette  daim'  acheta  le  terrain  destiné 
au  nouveau  sanatorium,  le  paya  forl  cher,  et  donna  en  plus  une 
somme  considérable  pour  contribuer  à  celle  oeuvre  philanthro- 
pique; mais  elle  imposa  la  condition  que  1'établissemenl  ne 
sérail  liàti  qu'à  une  certaine  distance  de  sa  propriété.  Depuis  le 
ià  octobre  i8o,5,  les  malades  pauvres  sont  enl  rés  à  Ruppertshain 
dans  un  superbe  sanatorium  dont  l'étendue  dépasse  de  beau- 
coup les  prévisions  des  premiers  plans,  grâce  à  la  générosité 
de  la  personne  en  question. 

Le  premier  sanatorium  pour  les  phtisiques  pauvres  en 
Autriche  subit  une  épreuve  presque  analogue.  Là,  toute  une 
municipalité  prés  de  Vienne  s'opposa  fortement  à  la  fondation 
d'un  pareil  établissement.  C'étail  une  station  bien  connue  pour 
son  doux  climat  et  en  laveur  parmi  les  phtisiques  riches  autri- 
chiens. De  plus,  un  grand  phtisio-thérapeute  envoyait  souvent 
ses  malades  aristocratiques  à  cet  endroit.  Les  habitants,  crai- 
gnant de  perdre  leur  clientèle  riche  par  la  proximité  d'un  sana- 
torium pour  les  phtisiques  pauvres,  se  refusèrent  à  sa  création. 
Mais  le  même  médecin  était  à  la  Lète  ùu  sanatorium  projeté 
pour  les  phtisiques  pauvres.  Voyant  cette  opposition,  il  choisit 

une  autre  localité,  et  au  grand  étonne nt  des  lions  villageois 

de  la  place  désignée  auparavant,  les  clients  du  grand  profes- 
seur vont  à  présent  dans  le  voisinage  du  sanatorium  érigé  pour 
les  pauvres. 

Je  suis  heureux  de  pouvoir  constater  que  depuis  la  publica- 
tion de  la  première  édition  de  ce  livre,  les  sanatoria  pour  les 
pauvres  s'élèvent  un  peu  partout.  Mais  nous  verrons,  dans  le 
chapitre  qui  sera  consacré  a  ce  sujet,  combien  il  v  a  encore  à 
l'aire  pour  les  phtisiques  malheureux  et  sans  moyens. 

Axant  d'en  finir  avec  ce  chapitre  historique  du  traitement  el 
delà  prophylaxie  de  la  phtisie  pulmonaire,  il  convient  de  noter 
encore  quelques  événements  littéraires,  scientifiques  et  huma- 
nitaires des  plus  importants  au  point  de  vue  de  l'étude  de  la 
phtisio-thérapie  moderne.  Il  y  a  a  peine  dix  ans  que  Yer- 
neuil.  déjà  président  de  l'Œuvre  de  la  tuberculose,  fondait  le 
journal   L'Etude  expérimentale  el  clinique  de  la   tuberculose. 


HISTORIQUE  i3 

L'œuvre  était  en  plein  fonctionnement,  et  le  premier  fascicule 
de  ce  journal  avait  paru,  lorsqu'un  vétérinaire  très  distingué  île 
province,  M.  Bu  tel  (dp  Meaux),  eut  l'idée  de  réunir  dans  un 
Congrès  les  vétérinaires  et  les  médecins,  afin  d'y  discuter  les 
questions  qui  touchent  aux  rapports  de  la  tuberculose  chez 
l'homme  et  chez  les  animaux.  A  cette  époque  on  se  préoc- 
cupait vivement  des  dangers  qui  pouvaient  provenir  pour 
l'homme  de  l'usage  de  la  viande  et  du  lait  des  animaux  tuber- 
culeux. De  là  certaines  mesures  à  prendre  pour  prohiber  cet 
usage,  et  surtout  des  études  à  faire  sur  l'éliologie  de  la  mala- 
die. Le  Congrès  d'organisation  eut  lieu  en  1888,  et  avec  un  tel 
succès  que  plus  de  5oo  membres  se  rendirent  à  l'appel.  Le 
professeur  Chauveau  fut  le  premier  président  du  Congrès 
pour  l'étude  de  la  tuberculose. 

En  avril  1893,  parut  pour  la  première  fois  la  Revue  de  la 
tuberculose,  sous  la  direction  de  MM.  les  professeurs  Verneuil, 
président  de  l'Œuvre  de  la  tuberculose  ;  Bouchard  et  Chau- 
veau, vice-présidents  de  l'Œuvre  de  la  tuberculose  ;  Brouardel, 
Charcot,  Cornil,  A.  Fournier,  J.  Grancher,  Lannelongue, 
Nocard  (d'Alfort),  Potain,  Richet,  I.  Straus,  Tarnier,  membres 
fondateurs  de  l'Œuvre  de  la  tuberculose  ;  Kelsch,  directeur  de 
l'Ecole  de  santé  de  Lyon;  L.  Landouzy,  N.  Gamaleia  (de  Saint- 
Pétersbourg),  etc  ,  et  M.  le  D1'  L. -IL  Petit,  comme  rédacteur  en 
chef. 

Le  icr  janvier  1897  parut,  à  Berlin,  sous  la  direction  du 
D''  Gotthold  Pann.witz  ,  la  Correspondence  des  Sanatoria 
(Heilstàttén  Korrespondenz) ,  organe  du  Comité  central  allemand 
pour  la  fondation  de  sanatoria  pour  phtisiques.  Au  moyen  de 
ce  journal  on  peut  se  tenir  particulièrement  au  courant  de  tout 
ce  qui  concerne  le  mouvement  en  faveur  des  sanatoria  pour 
les  phtisiques  pauvres. 

Le  i5  février  1898  a  commencé  à  paraître  La  Tuberculose 
infantile,  revue  bimestrielle,  consacrée  à  l'étude  de  toutes  les 
questions  relatives  à  la  pathologie,  l'hygiène  et  le  traitement  des 
maladies  tuberculeuses  médicales  et  chirurgicales  de  l'enfance. 
Ce  journal  est  publié  sous  la  direction  de  MM.  les  Dls  Léon 
Derecq,  médecin  de  l'hôpital  d'Ormesson  et  Georges  Petit, 
médecin  du  dispensaire  de  l'Œuvre  des  Enfants  tuberculeux. 

Elle  compte  parmi  ses  collaborateurs   MM.   Blache,  Castex, 


,  |  HISTORIQUE 

De  Lavigerie,  Hamonic,  Kazimir,  Lagrange,  Launois,  Ménard, 
Metton-Lepouze,  Léon  Petit,  Thibierge,  Vaquier  et  Gautrelet. 

Le  «  Journal  of  tuberculosis  »,  le  premier  journal  de  lan- 
gue anglaise  exclusivement  consacré  à  la  question  de  la 
tuberculose,  a  paru  pour  la  première  fois  aux  États-Unis  le 
ier  janvier  1899.  Il  est  r- <  1  i t ('■  par  le  Dr  von  Ruck  et  paraît 
tous  les  trois  mois  à  Asbeville,  clans  l'étal  de  la  Caroline  du 
Nord. 

Gomme  événement  humanitaire  des  plus  importants  au 
point  de  vue  de  l'histoire  de  la  phtisio-thérapie  moderne,  il 
faut  noter  enfin  le  dernier  Congrès  de  Berlin,  qui  a  eu  lieu 
du  24  au  1-  mai  1899.  Ce  «  Congrès  international  pour  la 
lutte  contre  la  tuberculose,  maladie  endémique  »  (Kongress 
zur  Bekâmpfung  der  Tuberkulose  als  Volkskrankheit),  doit  sa 
création  à  l'initiative  du  «  Comité  cent  rai  allemand  pour 
la  création  d'établissements  destinés  au  traitement  des  mala- 
dies du  poumon  ».  Le  Gouvernement  de  l'empire  allemand 
avait  invité  les  Gouvernements  étrangers  à  se  faire  repré- 
senter à  ce  Congrès.  Le  Gouvernement  tramais  était  repré- 
senté par  une  délégation  des  ministères  de  l'Intérieur  et  de 
l'Instruction  publique,  avant  à  sa  tète  le  professeur  Brouardel, 
et  parmi  les  membres  de  laquelle  figuraient  nombre  de 
savants  et  d'hygiénistes,  entre  autres  MM.  Grancher.  Lan- 
douzy,  Lannelongue,  Metchnikoff,  Napias,  Nocard,  .1  .-A.  .Martin. 
Voisin,  Honoré,  Spillmann,  Pic.  Thoinot  et  Méry.  La  Russie. 
l'Angleterre,  l'Autriche,  la  Turquie,  l'Italie  et  les  Etats-Unis 
étaient  aussi  bien  représentes  par  des  savants  et  des  hygié- 
nistes distingués. 

Le  Congrès  se  réunit  sous  le  patronage  de  Sa  Majesté 
l'Impératrice  d'Allemagne.  Le  prince  de  Hohenlohe-Schil- 
lingsfiïrsl  était  président  d'honnsur,  le  dur  ds  Ratibor  pre- 
mier président  et  le  professeur  E.  von  Leyden  deuxième 
président.  Les  ministres  Losse  et  Posadowski,  ainsi  que  le 
maire  de  Berlin  ont  prononcé  les  discours  d'ouverture. 

Nous  reviendrons  dans  les  chapitres  suivants  sur  les  com- 
munications les  plus  importantes  faites  par  les  divers  délé- 
gués. Ici  nous  désirons  seulement  dire  que  la  question  prin- 
cipale traitée  ii  ce  Congrès  était  celle  îles  Sanatoria  populaires. 
Des  délégués  ouvriers  ont  été  conviés  à  la  séance  d'ouverture. 


HISTORIQLE  1 5 

L'ouverture  de  ce  Congrès  a  été  marquée  par  un  incident 
des  plus  intéressants,  qui  mérite  d'être  signalé  à  l'attention 
des  riches  philanthropes  de  tous  les  pays.  Un  don  de  3  mil- 
lions de  marks  a  été  offert  par  le  député  Heyl,  grand  indus- 
triel allemand,  à  l'œuvre   des  Sanatoria  populaires. 


CHAPITRE  II 
Mortalité  par  phtisie  pulmonaire. 


De  ! < >u l < ■>-  les  maladies,  la  plus  grande,  la  plus  difficile  et 
celle  qui  emporta  le  plus  do  monde  fui  La  phtisie.  « 

Nous  avons  choisi  ces  paroles  d'Hippocrate  comme  épigraphe 
de  notre  travail,  car  aujourd'hui  comme  aux  temps  antiques  la 
mortalité  par  la  phtisie  esl  terrible. 

Un  septième  de  ions  les  décès  est  <lù  à  la  phtisie. 

Dans  le  livre  classique  de  notre  regretté  maître  Straus  i  . 
on  trouve  une  statistique  allant  jusqu'en  îcS^v.  el  un  exposé 
complet  de  la  distribution  géographique  de  la  tuberculose,  de 
l'influence  dos  professions,  de  l'âge,  etc.,  etc.  Je  me  contente 
simplement  de  donner  la  statistique  de  la  mortalité  par 
phtisie  dans  les  principales  villes  de  France,  d'Europe  et 
d'Amérique,  en  iS()_j. 

J'ai  envoyé  plusieurs  centaines  dv  lettres  aux  diverses 
autorités  pour  obtenir  une  statistique  plus  récente.  Les  répon- 
ses uni  été  nombreuses,  mais  néanmoins  incomplètes,  et  j'ai 
cru  qu  il  était  mieux  dv  reproduire  une  statistique  générale  de 

la  mortalité  par  tuberculose  pul nain',  dressée  par  un  journal 

allemand  2)  au  commencement  do  l'année  1896.  Elle  montre 
les  proportions  de  cette  mortalité  sur  1  000  habitants  dans 
toutes  los  grandes  villes  du  monde  où  cette  constatation  a  pu 
être  faite  pour  l'année  1H94. 


(1)  Straus.  La  tuberculose  el  son  bacille.  Taris.  1893. 
(a    Munchener  med.  Woekenschrifl,  janvier  1896,  ]>.  28. 


MORTALITE  PAR  PHTISIE  PCLMOXA/RE 


Mortalité  par  tuberculose  pulmonaire  pour  i  ooo  vivants. 


HABITANTS 


'894 


Le  Havre.    .    . 
Rouen  .    .    .    . 
Paris.    ... 
Nancy   .    .    .    . 

Lyon 

Reims   ... 
Nantes  .    .    . 
Roubai.v.   .    . 
Lille.    .    .    . 
Bordeaux.    .    . 
Saint-Etienne 
Marseille.    .    , 
Toulouse.    .    . 
Alger.   .    .    . 


116  000 

I  1 1  000 
2  424  °°° 

86  000 
43i  000 
io5  000 
122  000 

I I  5  000 
70  000 

252  000 
i3i  000 
406  000 
148  000 
83  000 


5o,3 

45 

4i,6 

33,7 

33,6 

32,6 

3o,  1 

29,7 
28,2 
25,  5 
23, 5 
21,8 

I7>7 

16,  5 


ALLEMAGNE 


Wurzbourg. 
Xuremberg  . 
Breslau.  .  . 
Augsbourg  . 
Munich .  .  . 
Cologne  .  . 
Francfort.  . 
Elberfeld.  . 
Dresde.  .  . 
Alloua  .  .  . 
Leipzig.  .  . 
Gorlitz.  .  . 
Chemnitz.  . 
Berlin  .  .  . 
Hambourg  . 
Lubeck     .    . 


65  000 
161  000 
36i  000 

81  000 
3g3  000 
3oc)  000 
201  000 
i38  000 
3 16  000 
149  000 
404  000 

67  000 

1  âo  000 

[  703  000 

604  000 

69  000 


52,4 
39,3 

34.9 

33,5 

3o,8 

28,2 

27,2 

26,6 

26 

24,7 

24 

24,3 

22,7 

22,  3 

ai,  1 

16, 1 


VILLES     DIVERSES 


Budapest 

Vienne 

Saint-Pétersbourg. 

Moscou 

Varsovie 

New-York 

Philadelphie    .    . 

Glasgow 

Naples 

Buenos-Ayres.    .    . 
Manchester .    .    .    . 

Londres 

Chicago 


132  OOO 

j  465  000 

g54  000 

753  000 

5oo  000 

1  925  000 

1  1 1 5  000 

686  000 

5  Ï5  000 

58o  000 

3  22  000 

5  3oo  000 

1  600  000 


49-3 
45,4 
44.3 
42,9 
25,7 
24,i 
a3,7 
22,6 
ai,  1 
20,7 
19.6 
17.3 
i3,4 


Knopf.   Sanaioria. 


i8  MORTALITE  PAR  PHTISIE  PULMONAIRE 

Mais,  parmi  les  réponses  que  j'ai  reçues,  quelques-unes  onl 
une  valeur  toute  particulière  pour  le  présent  travail. 

Les  rapports  les  plus  défavorables  me  sont  parvenus  du 
Portugal.  Selon  des  renseignements  récents,  pour  une  popula- 
tion de  4  5oo  ooo  habitants,  il  ne  meurt  pas  moins  de  ao  ooo  tuber- 
culeux par  année.  C'est  avec  raison  que  les  auteurs  consta- 
tent qu'il  n'est  pas  de  maladie  qui  nuise  davantage  aux  forces 
et  à  la  prospérité  des  nations. 

Egalement  tristes  sont  les  conditions  dans  la  république 
du  Chili,  où,  d'après  une  lettre  que  le  Dr  Mamerto  Cadi/.  a 
bien  voulu  m'adresser,  la  mortalité  par  phtisie  pulmonaire, 
pendant  l'année  189a,  fut  de  6677  pour  une  population  de 
moins  de  trois  millions  d'âmes. 

Mais  dans  beaucoup  île  pays  et  surtout  dans  quelques  grandes 
villes  d'Europe  et  des  Etats-Unis,  telles  que  Vienne,  Berlin, 
New- York,  Philadelphie,  etc.,  la  mortalité  par  phtisie  pulmo- 
naire a  notablement  diminué  dans  ces  dernières  années.  Nulle 
part  cependant  cette  diminution  n'est  aussi  frappante  qu'en 
Angleterre,  où  depuis  plus  de  quatre-vingts  ans  existent  des 
établissements  spéciaux  pour  le  traitement  de  la  phtisie  :  la 
mortalité  par  tuberculose  pulmonaire  y  a  été  réduite  d'une 
façon  tout  à  fait  remarquable.  Cette  grande  diminution  progrès 
sive  de  la  mortalité  s'explique  sans  doute  aussi  par  une  orga- 
nisation presque  parfaite  des  services  d'hygiène  générale  en  ce 
pays. 

Voici  un  résumé  de  la  statistique  que  M.  le  Dr  Tatham,  ins- 
pecteur général  des  statistiques  au  bureau  du  «  Registrar 
gênerai  »,  a  bien  voulu  me  communiquer: 

La  mortalité  par  phtisie  pulmonaire  et  pour  1000  000  d'ha- 
bitants, en  Angleterre  et  dans  le  pays  de  Galles,  était  : 

Années. 

1870.    Mortalité  par  phtisie  pulmonaire  pour  1  000  000  d'habitants.  2  410 

1H7Ï.  —  —  —  1  ÏOl 

1880.  1  869 


i885 


110 


1890.  —                              —           1  682 

i893.  —           1  468 

1894.  —  1  ;,s-, 

1895.  1  398 

1896.  —  1  307 


MORTALITÉ  PAR  PHTISIE  PULMONAIRE  19 

Pour  Londres  même,  je  n'ai  pu  recueillir  que  la  statistique 
Je  quelques  années  ;  je  la  dois  à  l'obligeance  de  M.  le  D1'  Shurly 
F.  Murphy,  inspecteur  du  bureau  sanitaire  (Public  Health  De- 
partment). 

En  1891,  la  mortalité  par  phtisie  était,  à  Londres,  pour 

1  000  000  d'habitants ,  de 2200 

En  i8g3,  seulement  de 1  900 

—  1894 , 1  743 

—  189J 1  8a5 

—  1896 1  ^3i 

Ces  chiffrés  sont  certainement  intéressants  au  point  de  vue 
des  progrès  qu'il  est  possible  de  réaliser  par  l'hospitalisation 
des  tuberculeux  et  par  une  bonne  hygiène  publique. 

Nous  sommes  arrivés,  grâce  aux  progrès  de  la  science,  à 
faire  reculer  des  maladies  telles  que  la  peste,  la  variole,  qui 
autrefois  décimaient  les  populations  autant  et  plus  que  la 
tuberculose  aujourd'hui  ;  la  phtisie  pulmonaire  n'est  pas  plus 
difficile  à  combattre  si  nous  voulons  mettre  en  usage  tous  les 
moyens  qui  sont  entre  nos  mains. 


CHAPITRE    III 

Preuves  anatomo-pathologiques   de    la  curabilité 
de  la  tuberculose  pulmonaire. 


Opinion  d'Hippocrate,  de  Celse,  de  Galien  et  de  Laennec. 
—  La  phtisie  pulmonaire  est  curable.  Hippocrate  en  a  la  con- 
viction, nous  lavons  déjà  vu.  Celse  et  Galien  partagent  son 
opinion,  nous  le  savons.  Du  Ve  au  x1'  siècle  celle  idée  est  battue 
en  brèche  :  lous  les  médecins  croient  la  tuberculose  mortelle  ; 
il  faut  venir  jusqu'à  l'Ecole  arabe  pour  retrouver  l'idée  hippo- 
cratique.  Il  s'est  rencontré  depuis  lors,  à  toutes  les  époques, 
des  homme  de  grande  valeur  qui  ont  contesté  la  possibilité  de 
la  guérison  (i). 

Laennec  fut  un  des  premiers  anatomo-pathologistes  qui  ne 
douta  pas  que  la  guérison  de  la  phtisie  pulmonaire  lut  possible. 
Il  s'est  exprimé  ainsi  :  «  Un  assez  grand  nombre  de  faits  m'ont 
prouvé  que,  dans  quelques  cas,  un  malade  peut  guérir  après 
avoir  eu  dans  les  poumons  des  tubercules  qui  se  sont  ramollis 
et  ont  formé  une  cavité  ulcéreuse  (2).  » 

Opinion  de  Hérard,  de  Cornu.,  de  Carswei.l,  de  Crweilhier, 
de   Charcot,    de   Grancher.    —   Hérard    et   Corail   ajoutent   : 

«  Tous  les  observateurs  ont  partagé  l'opinion  du  maître,  tous 
sont  d'avis  que  non  seulement  la  phtisie  est  curable,  mais 
encore  qu'elle  est  curable  dans  toutes  ses  périodes  (3)  ». 


(1)  Voir  les  noies  sur  les  expériences  de  von  Ziemsscn,  Ollivier  et  Loomis, 
dans  le  Traité  de  médecine  de  Charcot,  Bouchard  et  Brissaud,  (Art.  Phtisie 
pulmonaire). 

(2)  Laennec.  Traité  de  l'auscultation  médiate,  etc.,  1879,  p.  38 1 . 
(  i)  Hérard,  CoKMi.  et  IIanot.  La  Phlisie  pulmonaire.    1888. 


CURABILITE  DE  LA  TUBERCULOSE  PULMONAIRE  21 

Garswell  (de  Londres)  a  dit,  en  i838  :  «  L'anatomie  patholo- 
gique n'a  peut-être  jamais  donné  de  preuves  plus  décisives  de 
la  guérison  d'une  maladie  que  celles  qu'elle  a  données  pour  la 
phtisie  pulmonaire  (1).  » 

Cruveilhier  (2)  écrivit  cette  phrase  décisive  :  «  Non,  les 
tubercules  ne  sont  pas  une  maladie  essentiellement  incurable, 
même  les  tubercules  pulmonaires  ». 

Le  plus  grand  maître  de  l'époque,  l'immortel  Charcot  (3), 
affirmait,  avec  son  autorité  incontestable,  que  la  phtisie  est 
susceptible  de  guérir  complètement  et  définitivement,  même  à 
la  période  des  cavernes. 

Charcot,  et  notre  maître  M.  le  professeur  Grancher,  ont 
éclairé  par  des  recherches  anatomo-palhologïques  le  méca- 
nisme de  la  guérison  de  la  tuberculose  pulmonaire,  et  nous 
lisons  dans  les  leçons  cliniques  de  Grancher  (4)  sur  les  mala- 
dies de  l'appareil  respiratoire,  cette  phrase  consolante  : 

«  Nous  affirmons  la  curabilité  naturelle  du  tubercule  ;  nous 
affirmons  qu'au  lieu  d'être  un  néoplasme  misérable  et  inca- 
pable d'organisation,  le  tubercule  tend  naturellement  à  l'orga- 
nisation fihreuse  »,  c'est-à-dire  à  la  cicatrisation   ou  guérison. 

Dans  notre  premier  tableau  statistique,  nous  exposons  le 
nombre  des  lésions  tuberculeuses  anciennes  guéries  que  l'au- 
topsie a  révélées  chez  des  sujets  morts  d'autres  affections. 

Un  second  chapitre  sera  réservé  au  chiffre  des  guérisons 
relevées  dans  les  sanatoria,  d'après  les  données  de  la  clinique 
et  de  la  bactériologie. 

Tous  ces  chiffres  ont  été  recueillis  soit  au  cours  de  notre 
voyage  personnel,  soit  au  cours  de  l'enquête  que  nous  avons 
faite  par  lettres  circulaires,  soit  à  la  suite  de  recherches  biblio- 
graphiques. Si  nous  n'accordons  pas  le  premier  rang  à  la 
statistique  clinique,  c'est  qu'elle  peut  être  le  sujet  de 
controverses.  Tout  le  monde  ne  comprend  pas  de  la  même 
façon  la    guérison    des    tuberculeux,   et  beaucoup   contestent 


(1)  Carswell.  Pathological  Analomy.  Londres,  i S3S. 

(2}  Cruveilhier.  Traité  d'anatomic  générale,  t.  IV,  p.  538. 

(3)  Charcot.  Traité  de  médecine  (art.  Phtisie  pulmonaire). 

(4)  Grancher.  Leçons  cliniques  sur  les   maladies  de  l'appareil  respiratoire  : 
Tuberculose  et  Auscultation,  1880,  p.  ifi . 


22  Crii.tBU.ITJ-:  DE  LA   TUBERCULOSE  PULMOXAIRE 

qu'elle  puisse  être  définitive  :  mais  comment  ne  pas  admettre 
la  curabilité  quand  on  se  trouve  en  présence  de  cavernes  pul- 
monaires dont  les  parois  se  sont  transformées  en  une  gangue 
cicatricielle  ? 

Or,  bien  souvent,  cette  lésion  se  rencontre  chez  des  indi- 
vidus qu'une  maladie  aiguë  différente  de  la  tuberculose  a  em- 
portés à  un  âge  plus  ou  moins  avancé. 

Voici  les  résultats  de  notre  enquête  : 


K.U'pni!  rri'its 


Baudet  de  Paris 

Beaux  de  Paris 

Bennot  de  Menlon  .  .  .  . 
Bollinger  de  Munich    .    .    . 

Boudel  de  Paris 

Chiary  de  Prague  .  .  .  . 
Klini  de  New- York  .    .    .    . 

Heitler  de  Vienne 

Letulle  de  Paris 

Loomis  de  New- York.    .    . 

Marsini  de  Bàle 

Ormeroth  de   Londres    .    . 

Viberl  de  Paris 

F. -P.  Weber  de  Londres. 
Bugge  de  Christiania.  .  . 
Fûrbringer  de   Berlin.    .    . 

rhomas  Harris 

Renvers  de  Berlin   .    .    .    . 

Roger  de  Paris 

Standacher 

Walker(i)  de  Chicago  .  . 
Kowler  de  Londres.  .  .  . 
Martin  de  Londres.  .  .  . 
Coats  de  Glasgow  .  .  .  . 
Biggs  de  New- York.   .    .    . 


NOMBRE 

d'autopsies 

faites . 


'97 

166 

73 
400 
1  v» 
701 
670 
16  Ï72 

l8q 
7°3 
228 

i3i 


NOMBRI 
d'individus  morts  d'autres  af- 
fections qur  la  tuberculose 
avant  présenté  à  L'autopsie 
des  lésions  tuberculeuses  ci- 
catrisées. 


■1 S 

69 
116 

78 

7> 
789 

92 

71 
89 

">o 

1  7 

".1 

27   ]i.    100 

10       — 

39 

3o       — 

"il 

27     — 

i     — 

9 
10     — 

24     — 

So       — 


(1)  Relevé  à  la  Morgue  de  la  ville  de  Chicago;  mais  M.  Walker  pense  que  ce 
chiffre  n'est  pas  suffisant  et  qu'on  a  souvent  négligé  de  noter  l'étal  exact  des 
poumons. 


En  dehors  des  données  précises  fournies  par  les  auteurs 
cités,  Amiral,  Meckel,  Rokitansky,  Ullsperger,  Virchow,  Werd- 
miiller  ont  également  rapporté  des  cas  nombreux  d'individus 
morts  d'autres  maladies  ou   d'un    accident,  chez  lesquels    les 


PREUVES  AXATOMO-PAT/IOLOGIOUES  23 

autopsies  ont  révélé  des  lésions  tuberculeuses  cicatrisées  ou 
calcifiées  (i). 

Réponses  reçues  de  MM.  Brouardel  et  Letulle.  — Parmi 
les  réponses  que  j'ai  reçues  aux  lettres  adressées  à  un  très 
grand  nombre  de  pathologistes  et  médecins  légistes  de  la 
France  et  de  l'étranger,  je  tiens  à  citer  d'abord  celle  de 
M.  Brouardel,  professeur  de  médecine  légale  et  doyen  de  la 
Faculté  de  Médecine  de  Paris.  Sur  la  question  :  Quelle  propor- 
tion de  tuberculoses  méconnues  et  guéries  (cicatrisées  ou  cal- 
cifiées) avez-vous  constatée  dans  les  autopsies  de  sujets  morts 
d'autres  affections  ?  il  me  répondait  : 

«  Il  n'y  a  guère  d'autopsies  pratiquées  sur  des  individus 
morts  de  cause  violente  et  habitant  Paris  depuis  plus  de  dix 
années,  qui  ne  montrent  pas  de  lésions  tuberculeuses  souvent 
guéries,  soit  par  transformation  crétacée  soit  par  cicatrisation 
fibreuse.  »  C'est  à  la  fois  une  preuve  de  la  tuberculose  pulmo- 
naire et  de  sa  guérison .  Mais ,  comme  M .  le  professeur 
Brouardel  l'a  très  justement  fait  remarquer  :  «  Il  ne  faut  pas 
oublier  que  la  clientèle  delà  Morgue  n'est  pas  très  choisie.  » 

Les  observations  détaillées  de  M.  Letulle  à  ce  point  de  vue 
sont  tellement  intéressantes  que  je  crois  bien  faire  de  repro- 
duire en  entier  la  note  suivante  qu'il  a  bien  voulu  me  trans- 
mettre en  réponse  à  ma  question.  C'est  le  résumé  des  résultats 
fournis  par  ses  «  cahiers  d'autopsies  »  pour  les  années  1892, 
1893,  1894  et  1890,  jusqu'au  ierjuin  exclusivement. 

«  Sur  189  autopsies  pratiquées  pour  des  affections  autres  que 
la  tuberculose  pulmonaire,  les  protocoles  dictés  à  l'amphi- 
théâtre me  donnent  : 

A.  Cas  exempts  de  toute  lésion  tuberculeuse  (plèvres,  poumons 

et  ganglions  trachéo-bronehiques) 79 

B.  Tuberculose  des  voies  respiratoires  latente,  ou  guérie  (sclé- 
rose anthracosique,  tubercules  fibreux,  caséo-plâlreux,  cal- 
cifiés)            92 

C.  Cas  suspects  (adhérence  des  sommets,  pneumonie  chronique 
ardoisée,  ramollissement  anthracosique  des  ganglions  trachéo- 
bronehiques  ,  cicatrices  rayonnées  du  parenchyme  pulmo- 
naire, etc.) 18 


(1)  P.  Manasse.  Heilung  der  Lungentuberkulose.  Berlin,  1891 


24  CURABILITÉ  DE  LA   TUBERCULOSE  PULMONAIRE 

T  A  U  1.  E  A  U 

Nombre  d'autopsies iKcj 

Appareil  respiratoire  indemne 79 

Tuberculose  ancienne  hdente  (tubercules  de  guéri- 
son) 92 

Lésions   suspectes iS 

Total 189 

En  ne.  tenant  pas  compte  des  cas  suspects,  on  voit  que  la 
tuberculose  éteinte  équivaut  à  peu  prés  à  5o  p.  100.  La  propor- 
tion est  cependant  plus  forte,  car,  dans  plusieurs  laits  réputés 
suspects  à  l'œil  nu,  le  microscope  m'a  montré  qu'il  s'agissail 
bien  de  lésions  tuberculeuses,  le  plus  souvent  éteintes,  gué- 
ries au  sens  anatonio-patholo^ique  du  mot. 

Trois  exemples  en  rendront  compte  :  1"  dans  une  fièvre 
typhoïde  compliquée  de  broncho-pneumonie,  les  poumons 
contenaient  une  vingtaine  de  noyaux  fibroïdes,  disséminés, 
qui  furent  reconnus  bacillaires  sur  les  coupes  histologiques  ; 
20  de  même,  une  pneumonie  lobaire  étendue,  terminée  par  lié- 
patisation  grise,  englobait  au  milieu  de  ses  blocs  fibrino-leuco- 
cytiques  cinq  ou  six  nodules  anthracosiques qui,  au  microscope, 
étaient  sûrement  tuberculeux  ;  3°  enfin,  chez  un  homme  ayant 
succombé  à  un  cancer  de  l'estomac  généralisé  au  péritoine  et 
aux  poumons,  j'ai  trouvé  de  nombreux  nodules  tuberculeux, 
fibro-caséeux,  entremêlés  aux  noyaux  cancéreux  greffés  dans 
les  lymphatiques  sous-pleuraux. 

Ces  trois  cas,  seulement  suspects  à  la  vue  (et  comptés  plus 
haut  comme  tels),  sont  donc  positifs  et  mériteraient  de  grossir 
le  chiffre  des  tuberculoses  éteintes  du  poumon. 

Un  dernier  point  me  parait  mériter  d'être  signalé.  J'ai  noté 
comme  tuberculoses  éteintes  quelques  observations  où  la  cause 
de  la  mort,  manifestement  indépendante  de  lésions  bacillaires 
cicatrisées  dans  le  poumon,  se  rattachait  à  une  Localisation 
extra-respiratoire  des  bacilles  de  Koch.  Ces  derniers,  cultivés 
à  nouveau,  avaient  infecté  à  distance  des  organes  importants, 
d'où  une  tuberculisation  secondaire  plus  ou  moins  rapidement 
mortelle. 

Ainsi,  j'ai  recueilli  jusqu'à  ce  jour  trois  observations  de  sym- 


PREUVES  AXATOHO-PATIIOLOGIQVES  i'-, 

physe  cardiaque  tuberculeuse  (péricardite  chronique  fibro- 
caséeuse)  dans  lesquelles  la  tuberculose  pulmonaire  était  abso- 
lument devenue  stérile.  L'infection  bacillaire  de  la  séreuse 
péricardique  s'étant  laite  secondairement,  les  malades  succom- 
bèrent à  l'asystolie  chronique. 

Mêmes  remarques  à  propos  d'un  cas  de  mort  subite,  due  à 
la  tuberculose  des  capsules  surrénales.  Dans  cette  observation 
(publiée  ailleurs),  les  lésions  tuberculeuses  de  la  plèvre  et  du 
poumon  étaient  minimes,  anthracosiques.  Les  foyers  caséeux 
des  glandes  surrénales,  en  pleine  évolution,  avaient  occasionné, 
selon  toute  vraisemblance,  la  syncope  terminale. 

Enfin,  il  m'a  été  encore  donné  d'observer  une  hématémèse 
foudroyante,  causée  par  la  rupture  d'un  anévrisme  de  l'artère 
bronchique  développé  à  l'intérieur  d'un  abcès  caséeux  gan- 
glionnaire. Ce  ganglion  tuberculeux,  ramolli,  était  sous-tra- 
chéo-bronchique  et  communiquait  par  un  trajet  fistuleux  avec 
la  cavité  œsophagienne.  Ici  encore  les  tubercules  pulmonaires 
étaient  guéris,  morts  depuis  de  longues  années  ;  puis,  sourde- 
ment, l'adénopathie  chronique  avait  produit  une  série  com- 
plexe de  désordres,  mortels  en  dernière  analyse. 

Concluons  de  ce  qui  précède  que  la  tuberculose  des  voies 
respiratoires  (plèvres,  poumons,  ganglions  traehéo-bronchi- 
ques)  est  très  communément  curable. 

Elle  peut,  toutefois,  déterminer  à  distance  et  à  longue 
échéance  des  manifestations  chroniques,  voire  même  aiguës, 
de  même  nature,  susceptibles  de  causer  la  mort.  La  lin  peut 
survenir  par  différents  procédés  pathogéniques,  ne  relevant 
pas  tous  nécessairement  de  l'infection  bacillaire. 

H.  Weber  (de  Londres)  relate,  dans  son  livre  :  Traitement 
hygiénique  et  climatérique  de  la  phtisie  pulmonaire  (i),  un  cas 
extrêmement  intéressant.  Il  s'agit  de  la  nécropsie  d'un  individu 
mort  de  fièvre  typhoïde,  sept  ans  après  la  deuxième  guérison 
d'une  tuberculose  pulmonaire  qui  avait  été  reconnue  antérieu- 
rement par  un  examen  physique  des  plus  minutieux;  à  l'au- 
topsie on  ne  trouva  cpie  les  cicatrices  des  anciennes  lésions 
tuberculeuses  guéries. 


(i)  Webek.  Hygienische  und  klimatische   Behandlung  der  chronischen   Liin- 
genschwindsucht. 


26  CVRABILITE  DE  LA   TUBERCULOSE  PULMONAIRE 

Réponses  reçues  de  MM.  Stra.ssma.nn,  Goodhart,  Whittakkb 
et  Nicolas.  —  M.  le  professeur  Fritz  Strassmann,  médecin 
légiste  de  Berlin,  me  répondait  de  la  façon  suivante  : 

«  J'ai  trouvé  très  souvent  d'anciens  foyers  de  tuberculose 
pulmonaire  cicatrisés  ou  crétacés  chez  des  individus  morts 
accidentellement.  » 

M.  le  professeur  James  Goodhart,  médecin  de  Guy's  IIos- 
pital,  à  Londres,  m'écrivait  :  «  Je  puis  vous  dire  que  rien  n'est 
plus  fréquent  que  de  trouver  à  l'autopsie  d'individus  morts 
d'autres  affections  des  traces  évidentes  d'une  ancienne  phtisie 
guérie,  ou  encore  des  transformations  calcaires  dans  les  divers 
ganglions.  Bien  plus,  dans  beaucoup  de  cas  de  mort  par  tuber- 
culose, on  trouve  des  traces  d'une  tuberculose  antérieure 
guérie.  Aussi  j'ai  l'habitude  de  dire  qu'il  n'y  a  pas  de  maladie 
ayant  une  tendance  plus  évidente  à  guérir  que  la  phtisie  pul- 
monaire. » 

M.  le  professeur  James  T.  Whittaker  (de  Cincinnati),  sans  se 
prononcer  sur  la  valeur  de  la  cicatrisation  ou  de  la  calcification 
des  anciennes  lésions  tuberculeuses,  au  point  de  vue  de  la 
guérison,  me  dit  «  qu'il  est  exceptionnellement  rare  qu'il  ne 
trouve  pas,  à  toutes  ses  autopsies  de  poumons,  des  traces  évi- 
dentes d'une  tuberculose  en  voie  d'évolution  ou  d'une  tuber- 
culose préexistante.  » 

Enfin,  M.  le  docteur  Nicolas,  médecin  en  chef  de  l'hôpital  de 
Neuchâtel  (Suisse),  m'écrivait  :  «  Il  m'est  fréquemment  arrivé 
de  constater  à  l'autopsie  des  cicatrices  ardoisées  avec  ou  sans 
noyaux  crétacés  aux  sommets  des  poumons;  mais  faute  de  notes 
spéciales,  je  ne  saurais  en  indiquer  la  proportion.  » 

Recherches  de  Kurbow  et  de  Dejerine.  —  II  faut  admettre 
que  quelques-uns  de  ces  anciens  foyers  représentent  souvent 
une  tuberculose  devenue  latente.  Mais  Kurbow  (i),  le  collabo- 
rateur de  Bollinger,  a  pu  constater  que  les  tubercules  dont  la 
transformation  fibro-calcaire  est  complète  ne  sont  pas  viru- 
lents. Sur  ioo  cas  de  lésions  d'apparence  latente  il  a  montré 
par  inoculation  que  27  avaient  perdu  leur  pouvoir  infec- 
tieux. 


(1)  Kurbow.  Arch.  /'.  klin.  Med.,  1 8 8 < >  ;  t.  .j|,  fasc.  5-6. 


PREUVES  AXAT0M0-PAT1I0L0G1QUES  2_ 

Dejerine  (i)  n'a  jamais  pu  trouver  de  bacilles  tuberculeux 
dans  les  foyers  calcifiés. 

Abstraction  faite  de  toutes  erreurs  possibles,  nous  croyons 
avoir  recueilli  des  documents  suffisants,  et  avoir  vu  nous-mème 
des  cas  assez  nombreux  dans  les  salles  d'autopsie  des  hôpitaux 
d'Europe  et  d'Amérique,  pour  répéter  avec  Carswell  (2)  que 
«  V  anatomie  pathologique  ri  a  peut-être  jamais  donné  de  preuves 
plus  décisives  de  la  guérison  d'une  maladie  que  celles  quelle  a 
fournies  pour  la  phtisie  pulmonaire  ». 


(1)  Dejerine.  Recherche  du  bacille  de  Koch.   Compi.  rend,  des  séances  de  la 
Soc.  de  biol.,  1884,  n°  3o. 

(2)  Carswell.  I.oc.  cit. 


CHAPITRE  IV 

Preuves  cliniques  de  la  curabilité  de  la  tuberculose 
pulmonaire. 


La  guérison  île  la  phtisie  pulmonaire  a  été  constatée  un  très 
grand  nombre  de  fois  pendant  la  vie  d'individus  antérieure- 
ment reconnus  phtisiques.  Des  cliniciens  célèbres  de  tous  les 
pays  en  ont  recueilli  et  publié  des  observations,  et  j'ose  dire 
qu'il  n'est  guère  de  médecin  pratiquant  à  la  ville  ou  à  la  cam- 
pagne qui  n'ait  vu  çà  et  là  une  guérison  spontanée. 

Opinion  de  Bouchard,  de  Jaccoud,  deWeber,  devonLeyden. 
—  Parmi  les  cliniciens  distingués  de  notre  époque  qui  ont 
affirmé  par  leur  expérience  les  preuves  cliniques  de  la  cura- 
bilité de  la  phtisie  pulmonaire,  je  tiens  à  citer  M.  le  professeur 
Bouchard,  qui,  en  1888,  terminait  ainsi  son  cours  sur  la  tuber- 
culose, à  la  Faculté  de  médecine  de  Paris  : 

«  Cette  maladie  qui  s'acharne  sur  l'humanité  est  curable  dans 
le  plus  grand  nombre  des  cas.  » 

M.  le  professeur  Jaccoud,  plus  optimiste  encore,  va  jusqu'à 
dire  :  «  La  phtisie  est  curable  dans  tontes  ses  périodes  (1).  » 

Le  Dr  Hermann  Weber,  dans  ses  célèbres  conférences  faites 
devant  le  Royal  Collège  ofPhysicians,  à  Londres  (2),  en  citant 
plusieurs  guérisons  appuyées  sur  des  faits  cliniques  incon- 
testables, dit  :  «  Même  la  présence  d'une  cavité  n'exclut 
pas  la  possibilité  de  la  guérison.  Les  meilleurs  observateurs 


(1)  Jaccoud.  Curabilité  de  la  phtisie  pulmonaire,  1888. 

(2)  H.  V\  eber.  Croonian   Lectures   on  chronic  pulmonary  phthisis,  Londres, 
i885. 


PREUVES  CLINIQUES  DE  LA   CURABILITÊ  DE  LA   TUBERCULOSE  29 

de  l'Ang:leterre  et  du  continent  ont  été  témoins  de  ce  fait.  » 
M.  le  professeur  von  Leyden  s'exprimait,  dans  son  discours 
au  dernier  Congrès  international,  à  Moscou  (i),  de  la  façon 
suivante  :  «  La  thérapeutique  d'aujourd'hui  n'est  pas  du  tout 
impuissante  envers  la  phtisie  pulmonaire.  La  croyance  que 
la  maladie  est  incurable  n'a  plus  raison  d'être  depuis  Brehmer 
qui,  après  une  longue  existence  consacrée  au  travail  le  plus 
ardu,  démontrait  la  eurabilité  de  cette  maladie.  »  La  physio- 
thérapie moderne,  inaugurée  par  Brehmer  et  perfectionnée 
par  Dettweiler,  est  acceptée  aujourd'hui  comme  le  meilleur 
traitement  par  la  majorité  des  médecins. 

Sans  vouloir  critiquer  les  autres  méthodes  thérapeutiques,  il 
faut  reconnaître  que  le  plus  grand  nombre  de  guérisons  a  été 
observé  là  où  ce  traitement  a  été  rigoureusement  appliqué, 
c'est-à-dire  dans  les  sanatoria  ou  établissements  fermés  consa- 
crés exclusivement  à  la  cure  de  la  phtisie  pulmonaire.  A 
l'appui  de  cette  assertion,  je  reproduis  ici  une  statistique  inté- 
ressante de  Manasse  sur  les  résultats  obtenus  durant  une 
période  de  dix  3113(1876  à  1886)  dans  le  traitement  de  5  o32  ma- 
lades qui  ont  été  soignés  au  sanatorium  de  Brehmer. 

Statistique  de  Mimasse. 


DEGRÉS 
DE  LA  MALADIE 

NOMBRE 

DE  MALADES 

GUÉRIS 

PRESQU 

E      GUÉRIS 

GUÉRIS 

ET 
PRESQUE     GUÉRIS 

I 

II 

III 

p.     1O0 

1  3gO        (27,62) 

2  225        (44,21) 
l4l7        (28,17) 

387 

152 
12 

55 1 

p.  100 

(27,8  ) 

(  6,83) 
(  0,48) 
(11,00) 

43o 

325 

33 

p.    100 

(3 1,00) 
(14,6  ) 
(  2,3  ) 

p.    100 

817     (58,8) 

477     (21,43) 
45     (  3,14) 

5  o3i 

788 

(i5,6  ) 

1  339     (26,6  ) 

Voici     d'autre     part   les    statistiques    que     j'ai    recueillies 
dans    mes   visites    aux    sanatoria.    Je    tiens    celles    des    éta- 


(1)  E.  von  Leyden.  Ucbcr  den  gegenvàrtigen  Sland  der  Behandlung  Tuber- 
kuloscr  und  die  staallichc  Fiirsorgc  fur  dieselben.  Berlin,   1898. 


(0 


<  ciiaiiiu/ï;  de  la  tuberculose  pulmonaire 


Statistique  de  A'/<«/</'. 


NOMS    DES    SA.NATOIIIA 


Falkcnstcin  i  Allemagne) 

llohcnhonnef       — 

Ruppertshain      — 

Muskoka  (Ontario)   .    . 

Sharon,  Mass.  (Etals- 
Unis) 

Goerbersdorf  (Allema- 
gne)   

Goerbersdorf,  Sanat  . 
Brehmer 

Goerbersdorf,  Sanat. 
Rômpler 

Goerbersdorf,  Sanat. 
Pûckler 

Reiboldsgrûn  (Allema- 
gne) .    ._ 

Davos    (Suisse)   .    .    .    . 

Nordrach   (Allemagne). 

Halila   (Finlande)  .    .    . 

Canigou  (France).    .    . 

Adirondacks  Cottage- 
Sanitar.  (Etats-Unis). 

Loomis,  Liberty  (New- 
York)    

Chestnut  Hill  (Pensyl- 
vauie) 

\\  inyah  ,  As  h  ville 
(N.   C.)  _ 

I.<\  sin  (Suisse)  .    .    .    . 

Rehburg  (Allemagne)    . 

Ventnor  (Angleterre)    . 


22  Haufe    Sanat.    Si .    lila- 

sien 

2  5  Scbômberg  (Allemagne) 
2  j  Malchow,  pris  Berlin   . 


It.W'l'iim  I  l  lis 


Dettweiler  . 
Moisson  .  . 
Nalun  .  .  . 
Elliol  .    .    . 

Bowdilch     . 


Achtermann  . 

Rômpler.   .  . 

VVeicker.   .  . 

Wolff.    .    .  . 

Turban    .    .  . 

Walll.er.    .  . 
Gabrilowitch. 

Sabourin.   .  . 

Trudeau .     .  . 


Slubbcrt.  .  . 
Cohen  et  Ba- 
con .... 
Von  Ruck  .  . 
Burnier  .  .  . 
Thornspcck  . 


Sander.  . 
Baudach. 
Renier.   . 


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OR  1  AI  ni 

p.    100 

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lioré. 

17 

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43 

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Abso- 
lues. 

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16 


Rela- 
tives. 


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Guérisons . 

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(1)  Bowditch  n'emploie  pas  le  mot  de  guérison.  11  ne  parle  que  des  cas  «  arrê- 
tés i  [arresied  cases):  il  veut  dire  quela  maladie  est  arrêtée  quand  tous  les  symp- 
tômes pathologiques  ont  disparu. 


blissements  que   je    n'ai    pu    visiter  de  MM.  les   Directeurs. 

.1  ai    relevé  les  numéros    19,    20   et  ai  dans  la  thèse  de  Beau- 


PREUVES     CLISiqUES  il 

lavon  (i).  J'ai  trouvé  les  numéros  22,  23  et  24  dans  le  livre  de 
Hohe  (2). 

Il  faut  ajouter  que  les  sanatoria  de  Ruppertshain,  Malchow, 
Chestnut  Hill  et  Halila  sont  pour  les  pauvres.  Aux  sanatoria  des 
Adirondaeks,  de  Loomis,  de  Sharon  et  deVentnor,  les  malades 
ne  paient  qu'une  partie  (à  peu  près  les  deux  tiers)des  dépenses. 

Les  sanatoria  de  Ruppertshain,  de  Davos,  cl' Adirondaeks  et 
de  Liberty  ne  prennent  que  des  sujets  aux  premiers  degrés 
de  la  maladie. 

Une  telle  statistique  ne  saurait  avoir  de  valeur  scientifique 
que  si  les  observateurs  qui  ont  constaté  la  guérison  se  sont 
placés  dans  des  conditions  identiques. 

Tous  ont-ils  une  même  conception  ;  tous  apprécient-ils  de 
même  façon  les  signes  objectifs  fournis  par  l'auscultation,  la 
bactériologie  et  l'état  général  du  malade  ? 

Non  :  les  entretiens  que  nous  avons  eus  avec  les  phtisio- 
thérapeutes  les  plus  distingués  nous  ont  permis  de  compren- 
dre que  le  concept  de  «  guérison  »  donnait  lieu  pour  presque 
tous  à  une  interprétation  différente. 

Nous  ne  saurions  mieux  le  démontrer  qu'en  relatant  ici  les 
conclusions  de  quelques  auteurs. 

Concept  de  «  guérison  »  selon  Daremberg.  —  Daremberg 
est  cité  comme  il  suit  par  Marfan,  qui  adopte  ses  idées  (3)  : 
«  On  peut  déclarer  guéri  un  ancien  tuberculeux  qui,  pendant 
dix  ans,  a  repris  ses  occupations  sans  avoir  un  crachement  de 
sang,  un  accès  de  fiè.vre  imputable  à  une  poussée  tuberculeuse, 
un  crachat  bacillaire.  S'il  a  résisté  pendant  dix  ans  à  quelques 
bacilles  perdus  dans  un  coin  de  son  poumon  et  probablement 
morts  (car  nous  avons  vu  que  les  bacilles  morts  sont  aussi 
infectieux),  il  n'y  a  aucune  raison  pour  qu'il  redevienne  phti- 
sique, s'il  ne  se  replace  pas  dans  les  conditions  où  il  a  subi  sa 
première  atteinte. 


(1)  Beaulayon.    Contribution   à  lélude  do  lu  tuberculose   pulmonaire,   etc. 
Thèse,  Paris,  1896. 

(2)  Hohe.  Die  Bekâmpfung  und  Heilung  der  Lungcnschwindsucht,  etc.  Munich. 

(3)  Marfan.  Art.  «  Phtisie  pulmonaire  »,  in  Traité   de   médecine  de  Charcot, 
Brissaud  et  Bouchard,  t.  IV,  p.  722. 


;.  CURABIL1TE  DE  LA   TUBERCULOSE  PULMONAIRE 

Il  no.  faul  pas  oublier,  en  effet,  que  le  bacille  tuberculeux  est 
incapable  d'infecter  tous  les  organismes  humains;  que  l'homme 
est  un  être  relativement  réfracta  ire  à  l'infection  tuberculeuse; 
qu'il  importe  de  considérer  la  virulence  comme  l'expression 
des  modalités  diverses  de  la  vie  des  microbes,  sans  cesse 
influencée  par  les  qualités  physico-chimiques,  essentiellement 
changeantes,  des  milieux  organiques. 

«  Le  médecin  sait  que  le  bacille  tuberculeux  ne  prospère  que 
sur  les  terrains  qui  lui  sont  favorables,  qu'il  ne  suffit  pas  d'un 
microbe  pour  faire  un  tuberculeux,  et  qu'à  côté  des  maladies 
il  v  a  des  malades  qui  moulent  la  matière  morbide  suivant  leurs 
dispositions  héréditaires  ou  acquises.  » 

GuÉRISON      ABSOLUE,      GUERISON      RELATIVE      (DeTTWEILER).      

Dettweiler  distingue  la  «  guérison  absolue  »  et  la  «  guérison 
relative  ».  Il  définit  la  «  guérison  absolue  »  le  rétablissement 
des  fonctions  normales  de  tous  les  organes,  la  disparition 
absolue  des  bacilles.  Il  y  a  «  guérison  relative  »  si  le  malade 
recouvre  le  bien-être;  si  les  organes  fonctionnent  bien,  malgré 
quelques  accès  de  toux  et  quelques  expectorations  matuti- 
nales. 

Ses  élèves,  Meisscn  (de  Hohenhonnef)  et  Turban  (de  Davos), 
font  les  mêmes  distinctions  que  leur  maître. 

Sabourin  (du  Canigou)  divise  ses  malades  en  :  i°  curables; 
a"  améliorables  ;  l\°  incurables.  II  ne  prononce  pas  le  mot  de 
guérison  tant  que  la  toux  et  les  expectorations  (crachements 
sans  toux)  n'ont  pas  complètement  disparu. 

Guérison  dans  le  sens  de  «  restltutio  ad  integrum  ».  - 
Weicker  de Goerbersdorf)  considère  la  guérison,  prise  dans  le 
sens  de  «  restitutio  ad  integrum  »,  comme  un  miracle;  il  divise 
ses  résultats  curatifs  en  :  i°  amélioration  perceptible  par  le 
malade  même  ;  i"  amélioration  permettant  au  malade  de 
reprendre  ses  occupations,  soit  :  a  travail  manuel,  ,3  travail  intel- 
lectuel;   !"  simple  amélioration  par  le  séjour  au  sanatorium. 

W'oKf  (de  Reiboldsgrùn)  pense  comme  Weicker  ;  mais  il 
reconnaît  que.  l'amélioration  peut  être  assez  remarquable  pour 
permettre  à  beaucoup  de  malades  de  reprendre  leurs  occupa- 
tions et  parvenir  à  un  âge  très  avancé. 


PREUVES  CLINIQUES  33 

Quelle  valeur  saurait  donc  avoir  la  statistique  que  nous 
venons  de  lire  ? 

Aucune,  si  nous  lui  demandons  de  trancher  rigoureuse- 
ment la  question  de  la  guérison  ;  mais  une  réelle  valeur,  si 
nous  voulons  interpréter  les  chiffres  dans  un  sens  non  moins 
intéressant,  hien  qu'un  peu  différent. 

Nombre  des  invalides  hospitalisés  par  200  sanatoria.  —  La 
liste  qui  suit  montre  qu'il  y  a  à  l'heure  actuelle  en  Europe  et 
aux  États-Unis  près  de  200  sanatoria  et  hôpitaux  spéciaux  en 
plein  fonctionnement.  Bien  que  ce  nombre  soit  très  insuffi- 
sant si  on  le  compare  à  celui  des  phtisiques,  il  y  a  tout  de 
même  dans  chaque  établissement  à  peu  près  3oo  malades  trai- 
tés par  année,  soit  en  tout  60  000. 

Ces  60  000  tuberculeux,  riches,  auraient  disséminé  leurs 
bacilles  dans  les  stations  hivernales.  Pauvres,  ils  les  auraient 
semés  dans  la  rue,  parmi  nous;  chez  eux,  parmi  les  leurs;  à 
l'hôpital  général,  parmi  les  malades  atteints  d'autres  maladies 
ou  convalescents. 

A  leur  sortie  du  sanatorium,  ils  ne  seront  plus  un  danger 
permanent  pour  leurs  semblables  :  ils  auront  appris  l'hygiène 
et  sauront  en  observer  les  règles. 

On  ne  saurait  apprécier  la  valeur  de  cette  prophylaxie  de 
chacun  pour  tous  :  le  malade  connaîtra,  par  l'enseignement 
pratique  du  sanatorium,  les  causes  de  sa  maladie  ;  il  saura 
éviter  d'aggraver  son  état  s'il  n'est  pas  guéri  complètement  ; 
s'il  est  guéri,  les  règles  de  sa  vie  lui  seront  tracées  :  hors  d'elles 
est  le  danger. 

Un  tuberculeux,  dira-t-on,  n'est  jamais  guéri  :  derrière  le 
tubercule  fibreux  ou  cicatrisé  le  mal  est  «  endormi  »,  il  peut 
s'éveiller  encore. 

Le  chapitre  précédent  a  été  consacré  à  des  discussions  ana- 
tomo-palhologiques  que  nous  ne  reprendrons  pas  ici  :  nous 
voulons  répéter  seulement  que  la  phtisie  peut  apparaître  dans 
un  poumon  portant  des  cicatrices,  sans  qu'aucun  des  anciens 
foyers  se  soit  ranimé.  Pourquoi  n'y  aurait-il  pas  là  une  nou- 
velle tuberculose  ?  Nous  avons  vu  nous-même  des  poumons 
présenter  des  lésions  très  distinctes  de  deux  atteintes  qui, 
vraisemblablement,    n'étaient   pas   des   poussées  successives, 

Kxopf.  Sanatoria.  3 


•) 


!j  CVRABILITÉ  DE  LA  TL11ERCLLOSE  PULMONAIRE 

car  Le    temps    les   avait   séparées    par   un    1res  long  intervalle. 

Les  expériences  de  Kurbow  et  de  Dejerine  ont  prouvé  cette 
fréquente  stérilité,  des  anciens  loyers  fibreux  ou  crétacés. 
H.Weber(de  Londres)  a  vu  mourir  de  fièvre  typhoïde  un  malade 
qui  avait  guéri  deux  fois  de  la  phtisie  pulmonaire. 

Pourquoi  ne  pas  admettre  la  guérison  de  la  phtisie  ?  N'est-ce 
pas  assez  qu'un  poumon  qui  l'a  jadis  subie  ait  acquis  de  ce  fait 
une  prédisposition  spéciale  et  soit  devenu  un  «  loeus  minoris 
resistentise  »  ? 

Celle  faiblesse  vient-elle  de  la  réduction  du  champ  de  l'héma- 
tose ?  d'une  insuffisante  activité  du  parenchyme  pulmonaire  ? 
de  quelque  autre  cause  inconnue.' —  Ce  qui  est  vrai  pour  tous 
les  organes,  ne  l'est-il  pas  pour  le  poumon  ?  La  première 
déchéance  d'un  organe  n'est  pas  le  signe  fatal  de  sa  déchéance 
finale,  et  s'il  y  a  là  une  cause  de  moindre  résistance,  cette  cause 
n'est  pas  plus  puissante  pour  le  poumon  que  pour  tout  autre 
viscère. 

L'intestin,  après  la  dothiénentérie,  est  parsemé  de  cicatrices 
des  plaques  de  Peyer,  comme  le  poumon  l'est  tic  nodules 
fibreux  après  la  cicatrisation  des  tubercules.  Faut-il  dire  que  ni 
l'un  ni  l'autre  ne  sont  guéris,  ou  que  tous  deux,  au  contraire, 
sont  revenus  à  l'état  physiologique  absolu? 

Il  semble  que  ces  deux  opinions  soient  également  exagérées, 
et  si  personne  n'ose  affimer  aujourd'hui  que  la  fièvre  typhoïde 
est  incurable,  pourquoi  conteste-t-on  si  vivement  la  guérison 
réelle  de  la  tuberculose  ? 

Un  phtisique  commence  à  augmenter  de  poids  ;  la  toux  el 
l'expectoration  diminuent  notable  ment,  les  douleurs  s'apaisent  ; 
les  lumoptysics,  la  fièvre,  les  sueurs  nocturnes  disparaissent  ; 
il  reprend  peu  à  peu  ses  occupations  :  on  est  autorisé  alors  à  le 
considérer  comme  guéri  et  il  pourra  demeurer  en  bonne  santé 
en  évitant  avec  prudence  toute  cause  d'affaiblissement,  de 
dépression,  d'infection. 

Appliquons  ici  la  division  de  Dettweiler  en  guérison 
absolue,  guérison  relative,  amélioration,  à  notre  statistique 
générale. 

Souvenons-nous  qu'il  ne  s'agit  pas  tant  de  la  statistique  elle- 
même  que  de  la  constatation  des  effets  du  traitement. 

Nous  ne  prendrons   pas   le   chiffre   maximum  ni   même    le 


PREUVES  CLIXIQUES  35 

chiffre  moyen  des  bons  effets  obtenus,  mais  bien  le  chiffre 
minimum. 

Le  total  minimum  des,  guérisons  absolues,  des  guérisons 
relatives  et  des  améliorations  dues  au  traitement  hygiéno- 
diététique  de  la  tuberculose  dans  les  établissements  fermés  est 
de  70  p.  100. 

Ces  70  p.  100  se  répartissent  ainsi  entre  les  trois  ordres  de 
modifications  favorables  : 

Guérisons  absolues 14  p.    100 

—  relatives 14       — 

Améliorations 42        — 

Si  nous  appliquons  ces  chiffres  à  nos  60  000  malades,  qui  ont 
en  moyenne  séjourné  six  mois  dans  l'un  des  200  sanatoria,  nous 
trouvons  : 

Guérisons  absolues 8  400 

—  relatives 8400 

Améliorations 2S  200 

Sur  ces  60  000  malades,  il  en  reste  donc  18000  encore,  ou  en 
traitement  non  améliorés,  ou  morts. 

Ni  dans  les  stations  hivernales,  ni  dans  la  clientèle  privée, 
moins  encore  dans  les  hôpitaux  généraux,  nous  ne  pourrions 
obtenir  un  tel  résultat. 

Mais  avant  d'accepter  cette  statistique,  on  est  en  droit  de  se 
demander  :  ces  guérisons  dans  les  sanatoria  sont-elles  du- 
rables ? 

Durée  des  guérisons.  —  Dettweiler  a  publié,  dès  1886,  un 
rapport  de  72  cas  de  guérisons  complètes  d'une  durée  de 
.')  à  9  ans  (1).  Voici  cette  importante  statistique,  que  je 
reproduis  avec  quelques  détails  :  on  a  soigné  dans  l'espace 
de  dix  ans  à  Falkenstein  1  022  cas  de  phtisie  confirmée,  bien 
démontrée.  Sur  ces  malades,  i32  ont  été  renvoyés  comme 
absolument  guéris,  1 10  comme  relativement  guéris  (2).  En  1886, 


(1)  Dettweiler.   Bericht   ûber   72   seit  drei  bis   ncun  Jahren  vollig  geheilte 
Faite  von  Lungenscliwindsucht.  Francfort,  1886. 

(2)  Voir  plus  haut  pour  la  définition  de  ces  ternies. 


3,5  (  VRABILITÊ  DE  LA  TUBERCULOSE  PULMONAIRE 

Dettweiler  écrivit  à  99  des  i32  malades  sortis  absolumenl  guéris 
depuis  un  temps  variant  de  trois  à  neuf  ans.  Il  recul  98  ré- 
ponses.  Nous  n'allons  nous  occuper  que  de  celles-là  :  1 1  malades 
étaient  morts,  la  plupart  de  maladies  autres  que  la  tuberculose 
cette  mortalité,  comparée  à  la  mortalité  générale,  ne  saurait 
surprendre);  12  avaient  eu  une  rechute  suivie  de  guérison  ; 
3  étaient  encore  malades.  Nous  voyons  donc  que  sur  ces  98  cas 
la  guérison  s'était  maintenue  chez  72  malades,  soit  une 
moyenne  d'environ  72,5  p.  100  de  guérisons  confirmées. 

Wolff  (de  Reiboldsgrùn),  autrefois  à  Goerbersdorf,  qui  n'ac- 
cepte pas  le  mot«  guérison  absolue  »,  a  recherché  en  1890  ce  qu  é- 
laienl  devenus  les  malades  qui,  en  1876,  avaient  quitté  le  sana- 
torium de  Brehmer  «  relativement  guéris  ».  Sur  ceux  qu'il  put 
retrouver,  5g  p.  100  survivaient  en  pleine  santé  apparente  (1). 

M.  le  docteur  von Ruck,  directeur  du  sanatorium  de  Winyah 
à  Ashville  (N.  C),  Etals-Unis,  a  écrit  à  6o5  malades  qui  ont 
quitté  son  sanatorium  depuis  un  à  trois  ans.  Il  a  reçu  4^7  ré- 
ponses, d'après  lesquelles  : 

67  anciens  pensionnaires  se  sentaient  absolument  guéris; 
70       —  —  guéris    relativement, 

la  maladie  n'ayant  fait  aucun  progrès  ; 
a58  se  sentaient  toujours  améliorés  ; 
62  avaient  vu  leur  étal  empirer  ou  étaient  morts. 

Au  Sanatorium  de  Saranac  LaUe  (Adirondack  Cottage 
Sanitarium  on  est  en  correspondance  permanente  avec 
1 1 5  malades  qu'on  a  renvoyés  chez  eux  dans  les  dix  der- 
nières années  Quelques-uns  parmi  eux  mil  eu  des  rechutes 
légères,  mais  la  majorité  écrivenl  qu  ils  se  portent  parfaite- 
ment bien. 

Bowditch  de  Boston  rapporte  de  son  petit  Sanatorium  que, 
sur  34  eas  traités  depuis  l'ouverture,  0'  sont  morts,  -->.\  sont 
vivants  et   se  portent  bien,  et  4  ont  eu  des  rechutes  légères  (2). 


i  1  1  Wolfi  et  Saugmann.  Ucber  dauernde  Heilung  der  Lungentuberkulose.  Ber- 
gmann,  Wiesbadon,  1891. 

(■2)  Baldwik   et   Bowditch.    Subsequenl    Historiés    of  «  Arrcsted    Cases 
of  Phthisis.  New  York  Med.  Record,  vol.  LV,  Nr.  19. 


CHAPITRE    V 

La  contagion  de  la  tuberculose  et  les   moyens  d'éviter 
sa  propagation.  Prophylaxie  individuelle. 


La  contagion  de  la  tuberculose  se  fait  par  trois  moyens  : 
inhalation,  ingestion  et  inoculation.  Nous  allons  traiter  sépa- 
rément chacun  de  ces  modes  de  propagation  de  la  tubercu- 
lose. 

I.     CONTAGION     PAR    INHALATION 

Ce  mode  de  contagion  s'effectuant  par  les  voies  respiratoires 
est  aujourd'hui  bien  connu.  Il  n'y  a  plus  le  moindre  doute  que 
la  poussière  bacillifère,  qui  se  trouve  clans  les  locaux  fréquentés 
par  les  phtisiques,  est  très  fréquemment  la  cause  de  la  dissémi- 
nation des  germes.  Les  expériences  faites  sur  les  animaux  par 
Villemin  (i),  Tappeiner  (2),  Koch  (3),  Straus  (4),  Sawitzky  (5), 
Hance  (6),  et  beaucoup  d'autres  ont  bien  démontré  le  dan- 
ger qui  réside  dans  les  crachats  desséchés  des   tuberculeux. 


(1)  Villemin.  Cause  cl  nature  de  la  tuberculose.  Bulletin  de  l'Académie  de 
médecine,  i865,  5  décembre. 

(2)  Tappeiner.  Uebcr  eine  ncue  Méthode  ïubcrkulose  zu  erzeugen.  Vir- 
chow's  Arcliiv,  1878,  t.  74.  P-  3g3. 

(3)  Koch.  Die  /Etiologie  der  Tubcrkulose.  Mittlieilungen  a.  d.  k.  Gesund- 
heitsamte,  t.  1,  1884. 

(4)  Straus:  Sur  la  présence  du  bacille  de  la  tuberculose  dans  les  cavités 
nasales  de  l'homme  sain.  Bulletin  de  l'Académie  de  médecine,   1894,  p.  633. 

(5)  Sawitzky.  Zur  Fragc  ùber  die  Dauer  der  infectiôsen  Eigenschaflen  des 
gelrockneten  tuberkulôsen  Sputums.  Thèse,  Saint-Pétersbourg,  1891,  et  Cen- 
lialbl.  f.  Bacteriol..  t.  11,  1892. 

(6)  Hance.  A  study  of  the  infectiousness  of  the  dust  in  the  Adirondack 
Cottage  Sanitarium  New  York  Med.  Record,  iSg5,  28  Décembre. 


38  contagion  de  la  tuberculose 

Nombre   i»e   bacilles   expectorés    quotidiennement    par   un 

PHTISIQUE   ;    LEUR    DANGER  ET  LEUR  VIRULENCE.   — ■  D'après   lleller, 

il  n'y  a  pas  moins  de  -  milliards  aoo  millions  de  bacilles  de  la 
tuberculose  expectorés   quotidiennement  par   un  phtisique  (i). 

Tous  ceux  qui  ont  l'ail  la  culture  artificielle  savent  avec  quelle 
facilité  le  bacille  se.  cultive  et  se  multiplie. 

M.  le  professeur  Grancher,  en  collaboration  avec  M.  Ledoux- 
Lebard,  a  institué  de  belles  expériences  sur  la  virulence  do 
ces  crachats.  D'après  ces  auteurs,  les  cultures  de  tuberculose 
humaine,  préalablement  desséchées  et  soumises  à  la  chaleur 
sèche  àjo0  pendant  2,  6  et  7  heures,  conservent  leur  virulence. 
Le  professeur  Straus  et  son  collaborateur  Gamaleia  ont  mon- 
tré que  les  bacilles  de  la  tuberculose,  soumis  non  pas  seulement 
aune  ou  deux  ébullitions  momentanées,  mais  au  séjour  à  l'auto- 
clave à  ii5°,  1200  ou  i3o°  pendant  un  grand  nombre  d'heures, 
sont  encore  susceptibles,  quoique  morts,  de  provoquer  des 
abcès  au  point  d'inoculation,  et  que  les  bacilles  se  retrouvent 
dans  le  pus  avec  leur  réaction  colorante  caractéristique. 

Soumis  à  la  chaleur  sèchede  ioo°  pendant  1,  2,  3  heures,  leur 
virulence  s'affaiblit  graduellement,  mais  sans  s'éteindre  (2). 

Les  recherches  de  Germano  cl  de  Flûgge  ont  tendu,  en  ces 
derniers  temps,  à  dépouiller  les  poussières  d'une  partie  de  leur 
caractère  infectieux  et  à  substituer  à  leur  danger  celui  qui 
résulte  de  la  projection  dans  l'air  de  globules  extrêmement  fins 
de  salive,  quand  le  tuberculeux  tousse  ou  qu'il  parle.  A  la 
Société  tic  médecine  berlinoise  (séance  du  i(j  mars  1898), 
M.  Cornet  a  exposé  le  résultat  des  expériences  qu'il  a  faites  sur 
ce  sujet  à  l'Office  sanitaire  impérial.  11  a  étendu  \t\i  lapis 
dans  une  petite  chambre  et  versé  sur  ce  tapis  des  crachats 
tuberculeux  qu'il  a  abandonnés  à  la  dessiccation  pendant  deux 
jours.  Il  a  ensuite  placé  des  groupes  de  cobayes  soit  sur  le 
tapis,  soit  sur  des  étagères  à  différentes  hauteurs  ;  enfin,  il  a 
fait  balayer  le  tapis  avec  un  balai  rude  pour  dégager  la  poussière 
de  ces  crachats.   Sur  48  animaux  ainsi  exposés  à    l'infection, 


(1)  Xote  prise  en  i8y5,  au  cours  du  professeur  Straus. 

(a)  Grancher  et  Ledoux-Leis.vrd.  Action  de  la  chaleur  sur  la  fertilité  cl  la  viru- 
lence du  bacille  tuberculeux.  Arch.  de  méd.  expérim.  et  d'atiat. patkol.,  1892. 
p,  1. 


COXTAGIOX  PAR  INHALATION  39 

46  sont  devenus  tuberculeux.  M.  Cornet  n'avait  pas  voulu 
exposer  une  autre  personne  au  danger  inhérent  à  cette  expé- 
rience ;  il  n'entrait  dans  la  chambre  où  lui-même  frottait  le  tapis 
que  revêtu  d'une  blouse  ajustée  eten  appliquant  sur  son  visage 
une  plaque  d'ouate  percée  de  deux  trous  pour  les  yeux.  Malgré 
ces  précautions,  il  constata  la  présence  de  bacilles  tuberculeux 
dans  le  mucus  de  ses  fosses  nasales,  et  ce  mucus  inoculé  à  un 
cobaye  rendit  l'animal  tuberculeux.  Cette  observation  montre 
bien  qu'il  n'y  a  pas  de  doute  à  avoir  au  sujet  du  danger  que 
présentent  les  poussières  de  crachats  tuberculeux. 

En  dehors  des  travaux  de  laboratoire  démontrant  que  l'infec- 
tion tuberculeuse  par  inhalation  est  très  possible,  les  faits 
cliniques  abondent  qui  prouvent  la  fréquence  de  la  phtisie 
pulmonaire  acquise  par  la  voie  respiratoire. 

Les  observations  cliniques  où  la  tuberculose  pulmonaire  a 
été  contractée  par  des  individus  exposés  à  respirer  l'air  conta- 
miné par  les  poussières  provenant  des  produits  de  l'expecto- 
ration desséchée,  sont  trop  nombreuses  et  trop  connues  pour 
que  nous  fassions  autre  chose  que  les  mentionner. 

D'autres  travaux  de  Cornet  (1),  ceux  de  Weber  (a),  Krue- 
ger  (3),  de  Musgrave-Clay  (4),  Debove  (5),  Laveran  (6),  Kirch- 
ner  (7),  Murrel  (8),  etc.,  ainsi  que  mes  observations  person- 
nelles, montrent  la  fréquence  de  la  tuberculose,  par  suite  des 
inhalations  de  la  poussière  bacillifère,  parmi  les  sœurs  de 
charité,   les  infirmiers  militaires,  les  prisonniers,  dans  les  fa- 


(1)  Cor.net.  Die  Sterblichkeitsverhaltnisse  in  den  Krankeupflegeerden. 
Zeitschr.  f.  Hygiène,  1889,  t.  YI,  p.  65.  —  Die  Tuberkulose  in  den  Strafan- 
stalten.  Zeitschr.  f.  Hygiène,   1891,  t.  X,  p.  455. 

(2)  Weber.  On  the  communicability  of  consumption  from  husband  to  wife. 
Clin.  Society's  Transaet.  Londres,  1874.  t.  VII,  p.  144. 

(3)  Krueger.  Einige  Untersuchungen  des  Staubniederschlags  der  Luft  in 
Bezug  auf  tub.  Bacillen.  Baugmarteiis  Jahresbuch,  1889,  p.  277. 

(4)  De  Musgrave-Clay.  Elude  sur  la  contagiosité  de  la  phtisie  pulmonaire. 
Thèse,  Paris,  1897,  p.  99. 

(5)  Debove.  Leçons  sur  la  tuberculose  parasitaire.  Paris,  1884,  p.  22. 

(6)  Laveran.   Traité    des    maladies    épldémiques    des    armées.   Paris,    1875, 

p.   3l2. 

(7)  Kirch.ner.  Ueber  die  Notwendigkeit  und  die  beste  Art  der  Sputiundesin- 
fection,  etc.  Centralbl.  f.  Bactériologie,  1891,  t.  IX,  p.  7. 

(8)  Murrel.  The  Lancet,  1897,  10  avril,  p.  1018. 


io 


COSTAGIO.X  DE  LA    TrBF.lICll.OSE 


nulles  de  phtisiques,  et  parmi  les  individus  demeurant  dans  les 
stations  libres  fréquentées  par  des  phtisiques.  Pour  rendre  les 
ciachats  inoffensifs  et  les  empêcher  de  répandre  autour  d'eux 
les  microbes  qu'ils  contiennent,  il  suffit  d'en  prévenir  la  des- 
siccation. Dans  ce  but,  nous  n'avons  qu'à  les  recevoir  dans  des 
vases  et  les  traiter  de  façon  à  détruire  les  bacilles.  De  celte 
manière  nous  procédons  à  la  partie  la  plus  importante  de  la  pro- 
phylaxie de  la  phtisie  pulmonaire.  Nous  allons  donc  aborder  dès 
maintenant  l'importante  question  de  la  prophylaxie  individuelle. 


Un  tuberculeux,  à  n'importe  quel  degré  de  sa  maladie,  ne  doit 

jamais  expectorer  là  où    celte  expectoration  peut   devenir  un 

danger  pour  son  semblable.  A  cet  effet  et  en  règle  générale,  le 

tuberculeux    doit    toujours    se  servir  d\\n 

crachoir. 

Crachoir  de  poche  de  Dettweiler.  — 
Comme  crachoir  de  poche  un  des  meilleurs 
est  celui  qu'a  imaginé  Dettweiler  et  dont  je 
donne  le  dessin  :  c'est  un  flacon  en  verre 
bleu,  de  forme  ovale,  ouvert  à  ses  deux  extré 
mités.  L'une,  la  plus  grande,  servant  pour 
cracher,  se  ferme  hermétiquement  au  moyen 
d'un  couvercle  métallique  à  ressort  garni 
d'un  tampon  de  caoutchouc  ;  elle  est  munie 
d'une  sorte  d'entonnoir  métallique  'analogue 
au  système  des  encriers  irrenversables»  plon- 
geant dans  le  flacon,  de  façon  à  empêcher  le 
liquide  des  expectorations  de  venir  souiller 
le  couvercle.  L'autre,  d'un  diamètre  plus 
petit,  est  obturée  par  un  couvercle  de 
métal,  se  vissant  sur  elle  et  pouvant  être 
enlevé;  on  peut  ainsi  vider  le  flacon  et  faire  passer  un  fort 
courant   d'eau    chaude  au  travers  pour  le  désinfecter. 

Ce  crachoir  est  maniable  d'une  seule  main  et  mesure  io  cen- 
timètres 1/2  de  longueur  sur  5  centimètres  dans  son  plus 
grand  diamètre. 

Après  chaque  nettoyage,  le  ressort  doit  être  huilé  pour  assu- 
rer son  bon  fonctionnement. 


Fig.    1.  —  Crachoir  de 
poclic  de  Dettweiler. 


CONTAGION  PAR  INHALATION 


4i 


Crachoir  de  poche  de  Knopf. —  Mais  ce  crachoir  a  quelques 
désavantages.  J'ai  essayé  de  les  supprimer  en  apportant  quel- 
ques modifications  au  principe  du  crachoir  de  Dettweiler. 
D'abord,  j'ai  fait  fabriquer  le  crachoir  en  aluminium,  ce  qui  en 
fait  un  vase  incassable,  contrairement  au  crachoir  de  verre  de 
Dettweiler,  dont  les  débris  mettent  le  malade,  ou  ceux  qui  l'ap- 
prochent, en  danger  d'inoculation  si  par  hasard  il  se  brise  (i). 


1 


LP 


Fig.  2.  —  Crachoir  de  Knopf.    (Aluminium.) 

Au  lieu  d'être  composé  de  trois  pièces,  le  mien  ne  l'est  que  de 
deux,  et  par  conséquent  plus  facile  à  désinfecter,  moins  com- 
pliqué, et  beaucoup  plus  léger.  Celui  de  Detvweiler  pèse 
180  grammes,  le  mien  60  grammes  seulement.  Quoique  la 
forme  de  ce  dernier  soit  plutôt  cylindrique  et  que  son  plus 
grand  diamètre  n'ait  que  4  centimètres  et  sa  hauteur  10  centi- 
mètres, il  contient  plus  de  liquide  que  celui  de  Dettweiler, 
lequel  est  beaucoup  plus  volumineux  d'apparence,  son  plus 
grand  diamètre  mesurant  5  centimètres  et  sa  hauteur  10  centi- 
mètres  1/2. 

Le  protège-ressort  du  crachoir  en  verre  est  tranchant  et 
peut  être  la  cause  d'une  inoculation  du  pouce;  le  ressort  du 
mien  est  assez  fort  pour  qu'on  puisse  le  dispenser  de  protec- 
teur. La  forme  cylindrique  du  crachoir  en  aluminium  est  plus 
commode  à  dissimuler  dans  le  mouchoir  que  la  forme  ovale. 


(1)  Dernièrement  j'ai  fait  fabriquer  ces  crachoirs  en  uickel.  Ce  métal  a  l'avan- 
tage de  se  corroder  moins  facilement  que  l'aluminium. 


js  CO.\TAGIO.\  DE  LA   TUBERCULOSE 

Si  l'on  considère  la  susceptibilité  de  la  plupart  dos  phtisiques 
au  point  de  vue  de  leur  maladie,  il  faut  chercher  autant  qu'il 
est  permis,  tout  en  leur  enseignant  la  prophylaxie,  à  leur  pres- 
crire comme  moyens  ou  instruments  préventifs  des  mesures  ou 
des  objets  attirant  le  moins  possible  l'attention. 

Les  deux  modèles  sont  construits  de  façon  qu'ils  s'ouvrent 
facilement  à  l'aide  d'une  seule  main,  en  appuyant  le  pouce 
sur  les  ressorts.  Ils  se  fermenl  aussi  très  aisément  en  appuyant 
l'index  sur  le  couvercle.  Des  rondelles  en  caoutchouc  amiantées 
disposées  ad  hoc  s'opposent  efficacement  à  l'écoulement  acci- 
dentel du  liquide  contenu  dans  les  petits  réceptacles. 

J'ai  observé  dans  la  construction  démon  crachoir  le  principe 
de  l'encrier irrenversable.  L'application  de  ce  principe  adapté  au 
crachoir  de  poche  est  de  l'invention  de  mon  maître  le  professeur 
Dettweiler,  qui  a  eu  le  premier  l'idée  d'un  objet  de  ce  genre. 

Désinfection  des  crachoirs.  —  Il  est  bon  d'avoir  toujours 
un  peu  de  liquide  dans  les  crachoirs,  et  de  préférence  une  solu- 
tion antiseptique  quelconque  (de  vinaigre  de  bois  ou  d'acide 
phénique  à  5  p.  ioo).  Pour  nettoyer  le  crachoir  0:1  doit  le  plonger 
avec  son  contenu  dans  de  l'eau  bouillante.  Afin  de  rendre  la 
destruction  des  bacilles  et  la  désinfection  encore  plus  certaines, 
il  faut,  selon  la  recommandation  du  professeur  Grancher,  ajouter 
à  cette  eau  un  peu  de  carbonate  de  soude  (1).  La  température 
de    l'ébullition  atteint  ainsi    102  à    io3   degrés   centigrades. 

Quand  l'expectoration  est  abondante  et  que  le  malade  vit  au 
dehors,  ce  traitement  des  crachats  devient  un  peu  plus  com- 
pliqué. 11  convient  de  se  rappeler  encore  que  plus  les  instruc- 
tions au  point  de  vue  de  la  prophylaxie  sont  simples,  plus  il  y 
a  de  chances  de  les  voir  suivre  par  les  patients.  On  peut  donc 
sans  crainte  permettre  au  malade  de  vider  simplement  son 
crachoir  de  poche  dans  les  latrines  où  les  microbes  saprophytes 
empêchent  le  développement  des  bacilles  de  la  tuberculose. 
De  plus,  il  faut  savoir  que  la  dissémination  des  bacilles  par 
les  individus  se  fait  surtout  par  des  tuberculeux  ambulants, 
c'est-à-dire  des   tuberculeux   qui   ne  sont  pas  alités,  ou  même 


(1)  Gkaxchek.  Maladies  de  L'appareil  respiratoire,  1890,  p.   iH;. 


CONTAGION  PAR  INHALATION  43 

qui  se  trouvent  en  pleine  activité.  C'est  à  ces  sujets  qu'il  im- 
porte de  l'aire  comprendre  le  péril  de  la  réinfection  pour 
eux-mêmes,  et  le  danger  de  l'infection  nouvelle  pour  d'autres, 
provenant  de  leurs  crachats  non  détruits.  En  ce  qui  concerne 
les  malades  alités  et  trop  faibles  pour  faire  usage  du  crachoir 
fixe  ou  d'un  crachoir  de  poche,  ils  auront  toujours  près  de  leur 
lit  de  petits  linges  ou  chiffons  mouillés  dans  lesquels  ils  pour- 
ront expectorer.  Ces  linges  devront  être  brûlés  après  usage. 

Crachoirs  fixes.  —  Pour  les  crachoirs  communs  ou  lixes,  il 
semble  que  nous  ne  devrions  plus  employer  les  crachoirs  de 
porcelaine,  de  verre  ou  d'argile.  En  outre,  il  faudrait  aban- 
donner l'habitude  de  placer  les  crachoirs  par  terre.  Les 
raisons  qui  doivent  faire  rejeter  l'emploi  des  crachoirs  fragiles 
sont  les  suivantes  :  le  liquide  contenu  dans  les  crachoirs  en 
porcelaine,  par  exemple,  placés  au  dehors  en  hiver,  peut  se 
congeler,  briser  ainsi  les  vases  et  en  conséquence  causer 
l'écoulement  du  liquide  dangereux. 

Or,  nous  savons  que  le  froid  ordinaire  ne  tue  pas  le  bacille. 
Galtier  (i)  et  plus  tard  Cadéac  et  Malet  (2)  ont  montré  que  la 
congélation  des  produits  tuberculeux  soumis  à  des  tempéra- 
tures de  — 3°  à  —  8°  C.  alternant  avec  des  dégels  successifs  et 
des  températures  diurnes  de  -+-  3"  à  -\-  8°,  pendant  plusieurs 
semaines,  ne  détruit  pas  la  virulence  de  ces  produits. 

De  plus,  il  se  pourrait  que  des  animaux  domestiques  mangeas- 
sent les  produits  tuberculeux  ainsi  accidentellement  répandus. 

Une  autre  raison  qui  devrait  faire  repousser  les  crachoirs  cas- 
sables, est  le  danger  d'inoculation  qui  peut  en  résulter  pour  les 
personnes  auxquelles  sont  confiés  le  nettoyage  et  la  désinfection 
de  ces  vaisseaux.  Mon  objection  à  l'habitude  de  mettre  les  cra- 
choirs par  terre  est  fondée  à  la  fois  sur  des  raisons  hygiéniques 
et  esthétiques.  A  l'exception  de  quelques  cracheurs  expérimen- 
tés, surtout  de  nationalité  américaine,  j'ai  vu  peu  de  gens 
atteindre  le  but,  dans  leurs  efforts  d'expectoration,  surtout 
quand  l'orifice  n'est  pas  exceptionnellement  large.  Ces  cra- 
choirs   sont,    en    règle    générale,    rarement   propres,    et    leur 


(1)  Galtier.  Congrès  pour  l'étude  de  la  tuberculose.  Paris,  1888. 

(2)  Straus.  La  tuberculose  et  sou  bacille.  Paris,  i8g5. 


.j  j  CONTAGION  DE  LA    TUBERCULOSE 

pourtour  offre  La  triste  preuve  de  l'inexpérience  du  cracheur, 
ce  qui  justifie  ainsi  La  définition  fantaisiste  :  Crachoir,  petit 
meuble  autour  duquel... 

Le  dessèchement  de  ces  substances  sur  le  pourtour  du  cra- 
choir est,  bien  entendu,  pour  les  raisons  données  ci-dessus, 
absolument  dangereux.  Sans  compter  que  les  mouches  vien- 
nent s'imprégner  du  liquide  virulent  qu'elles  peuvent  ensuite 
disséminer  dans  les  aliments,  sur  les  blessures,  etc. 

Dissémination  des  bacilles  par  lks  mouches.  —  Les  belles 
expériences  de  Spillmann  et  Haushalter  (i)  et  celles  de 
Hoffman  (2)  ont  bien  démontré  la  facilité  de  la  dissémination 
des  bacilles  de  la  tuberculose  par  les  mouches.  Ces  observa- 
teurs s'assurèrent  que  le  contenu  de  l'abdomen  de  mouches 
ayant  séjourné  autour  des  lits  des  tuberculeux  et  s'élant 
posées  sur  les  crachoirs  de  ces  malades,  renfermait  en 
quantité  notable  des  bacilles  de  la  tuberculose.  Ils  retrou- 
vèrent de  même  le  bacille  de  Koch  dans  les  excréments  de 
mouches  raclés  sur  les  fenêtres  ou  sur  les  murs  d'une  salle 
d'hôpital.  «  En  somme,  concluent-ils,  la  cavité  abdominale  de 
mouches  qui  ont  absorbé  des  crachats  tuberculeux  contient 
des  bacilles  tuberculeux.  Après  leur  mort,  ces  insectes  se 
dessèchent  et  tombent  en  poussière  ;  les  bacilles  qu'ils  con- 
tenaient sont  mis  en  liberté,  et,  comme  les  mouches  vont 
mourir  sur  les  plafonds,  sur  les  tentures,  sur  les  tapisseries, 
elles  peuvent  aller  semer  partout  les  germes  de  la  tubercu- 
lose. Ces  germes,  elles  peuvent  les  disséminer  encore  parleurs 
excréments,  dont  elles  vont  imprégner  bien  des  substances 
alimentaires  dont  elles  sont  si  friandes  ». 

Pour  so  mettre  à  l'abri  de  tous  les  dangers  (pie  peinent  faire 
courir  ces  insectes,  il  est  donc'  nécessaire  de  n'employer  aucun 
réceptacle  destiné  à  recevoir  des  substances  tuberculeuses 
(crachats  ou  autres  sécrétions)  sans  couvercle. 

J'ai  essayé,  il  y  a  trois   ans,  clans  la    première   description 


(1)  Spillmann  cl  Haushalter.    Comptes  rendus  de  l'Académie  des  Sciences, 
1886,  t.  CV,  p.  35î. 

(2)  E.  Hoffmann,  liber  die  Verbreitung  der  Tuberkulose   durch  misère  Stu- 
benfliegen.  Baumgartens'Jahresbuch,  1888,  p.  191. 


COXT AGIOS  PAR  IXIIALATIOX 


45 


d'an  sanatorium  idéal  (i),  de  décrire  un  crachoir  élevé  et  fixe, 
qui  remplit  peut-être  toutes  les  conditions  nécessaires  pour 
empêcher  la  congélation  en  hiver  et  l'impossibilité  pour  les 
animaux  domestiques  ou  les  insectes  de  venir  en  contact  avec 
son  contenu. 

Ce  crachoir,  mis  dans  une  niche  de  mur  ou  enfermé  dans  une 
boite  de  profondeur  suffisante,  est  situé  à  mi-hauteur  du  corps, 
afin  que  le  tousseur  n'ait  qu'à  se  pencher  un  peu  pour  diriger 
sûrement  le  produit  de  son  expectoration 
dans  le  vase  destiné  à  le  recevoir. 

Crachoir  de  Proedohl.  —  Je  reproduirai 
la  description  de  ce  crachoir  idéal  pour 
sanatorium  dans  les  pages  suivantes.  Pour 
le  moment,  je  tiens  à  décrire  un  crachoir 
que  M.  Proedohl  (2)  a  construit  d'après  le 
principe  que  je  viens  de  rappeler.  Ce  cra- 
choir est  surtout  à  recommander  pour  les 
hôpitaux,  fabriques,  usines,  etc.  Ilesten  mé- 
tal émaillé,  étala  forme  d'une  hotte  ;  il  peut 
se  fixer  facilement  au  mur  au  moyen  d'un  clou 
à  crochet.  Le  couvercle  dépasse  les  parois 
de  la  hotte,  de  façon  à  pouvoir  être  facilement  et  rapidement 
soulevé  par  le  tousseur.  Aucune  partie  n'est  saillante,  tous  les 
angles  sont  arrondis,   ce   qui  rend  le  nettoyage  très  facile. 

Le  mouchoir,  l'a  barbe  et  les  linges  des  tuberculeux.  — 
Un  autre  mode  par  lequel  les  bacilles  de  la  tuberculose  sont 
réinspirés  par  les  malades  mêmes,  ou  disséminés,  mettant  en 
danger  d'autres  existences,  est  l'emploi  du  mouchoir.  J'ai  vu 
souvent  des  gens  tuberculeux  tousser  et  cracher  dans  leur 
mouchoir.  Quelques  heures  après,  quand  le  crachat  était 
desséché,  le  même  individu  dépliait  son  mouchoir,  en  imitant 
les  mouvements  rapides  des  blanchisseuses  pour  faire  dispa- 
raître les  plis  du  linge.  Il  n'est  guère  possible  d'imaginer  une 


Fig.  3. 
Crachoir   de    Proedohl. 


(1)  Knopf.  Les  Sanatoria  ;  Traitement   et   prophylaxie  de    la  phtisie  pulmo- 
naire. Thèse,  Paris,  1893.  Carré,  éditeur. 

(2)  Proedohl.  Der  Spucknapf.  Mûnchener  med.  Wochenschr.,    i8g5,  22  oct., 
p.  i3;. 


.'■ 


CONTAGION  DE  LA    TUBERCULOSE 


meilleure  méthode  pour  la  dissémination  du  crachai  bacillifère. 
Le  mouchoir  comme  réceptacle  des  (rachats  tuberculeux  de- 
vrait être  condamné  une  Ibis  pour  toutes,  et  tous  les  tuber- 
culeux devraient  se  munir  d'un  crachoir  de  poche  et  se  servir 
de  mouchoirs  pour  tout  autre  usage.  Je  recommande  a  mes 
malades  tuberculeux  de  porter  toujours  deux  mouchoirs,  l'un 
pour  se  moucher,  l'autre  pour  dissimuler,  s'ils  veulent,  le 
crachoir  de  poche,  pour  se  nettoyer  les  lèvres  après  l'expecto- 
ration, et  enfin  pour  tenir  devant  la  bouche,  pendant  les  accès 
de  toux,  car  souvent,  pendant  une  quinte,  de  petites  par- 
celles de  crachats  se  trouvent  expulsées.  Afin  d'éviter  l'accu- 
mulation des  bacilles  dans  la  moustache  ou  dans  la  barbe,  il  est 
bon  (pie  les  tuberculeux  hommes  portent  la  barbe  courte. 
De  celte  manière  on  fait  tout  ce  qu'il  est  possible  pour  éviter 
la  tuberculose  par  suite  d'inhalations  de  poussière  bacilli- 
fère, cl  l'on  se  protège  en  même  temps  contre  une  infection 
de  la  muqueuse  nasale. 

Là  oii  se  trouvent  beaucoup  de  phtisiques,  comme  par 
exemple  dans  les  hôpitaux  spéciaux,  il  nous  semble  lion  de 
suivre  le  conseil  de  B.  Fraenkel,  de  Berlin,  qui  l'ait  porter  à  ses 
malades  tuberculeux  de  l'hôpital  de  la  Charité  un  masque  de  son 

invention,  dont  nous  don- 
nons le  dessin  (fig.  3  bis  . 
Les  malades  s'habituent 
rapidement  à  l'usage  de  ce 
masque.  La  gaze,  retenue 
par  le  masque,  qui  a  pour 
but  d'arrêter  les  goutte- 
lettes bacillifères  que  le 
tuberculeux  lance  quand 
il  tousse,  élernue  ou  parle, 
est  imprégnée  par  une 
substance  antiseptiq ue 
quelconque.  Le  malade. 
croyant  ainsi  porterie  masque  dans  un  but  thérapeutique, 
ne  fait  aucune  objection  à  son  emploi.  Afin  de  protéger  l'en- 
tourage contre  l'infection  qui  pourrait  provenir  de  cette 
source,  il  est  nécessaire  de  recommander  aux  phtisiques, 
sinon    de    porter    un    masque,   tout   au  moins   de   mettre    iwx 


Fig.  3  bis.  —  Masque  de  Fraenkel. 

'7.  Cadre  métallique.  —  b.  Soutien.  —  c,  Selle. — 
il.  Bande  élastique.    —  e,  Amicaux   pour  attachement . 


CONTAGION  PAR  INHALATION  _j7 

mouchoir  devant  leur  bouche  quand  ils  toussent;  ensuite,  on 
évitera  de  s'approcher  inutilement  à  moins  de  un  mètre  de  dis- 
tance du  phtisique  pendant  qu'il  tousse  et  tant  qu'il  n'aura  pas 
mis  son  mouchoir  devant  sa  bouche  ;  enfin,  on  exigera  que,  dans 
les  ateliers  et  les  bureaux,  les  têtes  des  ouvriers  et  des  employés 
soient  éloignées  de  plus  de  un  mètre   les  unes  des  autres. 

Chaque  ibis  que  le  malade  rentre  chez  lui,  il  doit  mettre  ses 
mouchoirs  souillés  dans  un  vase  contenant  de  l'eau,  jusqu'au 
moment  où  le  linge  est  rassemblé  pour  le  blanchissage.  Non 
seulement  les  mouchoirs  du  tuberculeux,  mais  encore  ses 
autres  linges  demandent  un  traitement  spécial.  Ils  ne  devraient 
jamais  être  gardés  à  l'état  sec,  attendu  que  le  linge  d'un 
tuberculeux  peut  se  trouver  en  contact  avec  des  crachats 
surtout  pendant  la  nuit,  et  la  sueur  elle-même  peut  contenir 
des  bacilles  (i).  Combien,  en  général,  on  a  peu  de  souci  à  cet 
égard  !  Je  m'en  suis  rendu  compte  au  cours  d'une  visite  que 
j'ai  laite  à  un  asile  américain  pour  phtisiques.  Je  parlerai  plus 
tard  du  véritable  danger  que  présentent  ces  asiles  sans  mé- 
decin [Homes  foi'  consumptives) .Ici, je  veux  simplement  décrire 
ce  que  j'ai  vu.  Au  cinquième  étage,  on  m'a  montré  «  la  chute  », 
une  espèce  de  cheminée  ou  glissoire  communiquant  avec  tous 
les  étages,  et  dans  laquelle  on  jette  tous  les  linges.  Ces  linges 
s'accumulent  au  fond  de  «  la  chute  »  jusqu'au  jour  du  blan- 
chissage, que  l'on  l'ait  une  fois  par  semaine.  Il  ne  faut  pas 
beaucoup  d'imagination  pour  comprendre  avec  quelle  facilité 
les  microorganismes  séjournant  dans  ces  linges,  mouchoirs 
inclus,  se  disséminent  dans  cette  «  maison  de  santé  ».  A 
chaque  étage  se  trouve  une  porte  communiquant  avec  la  chute, 
et  un  courant  d'air  assez  fort  déterminé  parla  disposition  même 
de  celte  «  oubliette  »  ainsi  que  par  le  passage  des  paquets  qu'on 
y  précipite,  soulève  un  nuage  de  poussière  chaque  fois  qu'une 
des  portes  s'ouvre  pour  recevoir  une  pièce  de  linge. 

Propagation  de  la  tuberculose  par  les  vers  de  terre. 
—   Enfin,  d'après  MM.  Lortet  et  Despeignes  (2),  il  faut  encore 


(1)  A.  Saltek.  The  Lancet,  1898,  i5  janvier,  p.  i52. 

(2)  Lortet  et  Despeignes.  Les  vers  de  terre  et  le  bacille   de  la  tuberculose. 
Comptes  vendus  de  l'Académie  des  Sciences,  1892,  25  janvier  et  /(juillet. 


[8  CONTAGIOX  DE  LA    TUBERCULOSE 

citer  comme  mode  probable  de  dissémination  de  la  tubercu- 
lose les  bacilles  amenés  à  la  surface  du  sol  par  les  vers  de 
terre.  L'incinération  de  toutes  les  viandes  saisies  comme  tuber- 
culeuses el  la  vulgarisation  de  la  crémation  des  cadavres 
feraient  probablement  disparaître  ce  danger  de  propagation. 

II.    —    CONTAGION    PAR    INGESTION. 

Fréquence  de  la  tuberculose  par  ingestion.  —  Après  la 
tuberculose  acquise  par  inhalation  de  la  poussière  bacillifère, 
vient  la  tuberculose  acquise  par  ingestion  de  substances  tuber- 
culeuses. Les  premières  expériences  démontrant  que  l'infection 
tuberculeuse  peut  s'effectuer  par  la  voie  digestive  furenl  laites 
par  Chauveau.  Depuis,  de  nombreux  expérimentateurs,  et  des 
cliniciens  tel  que  Bollinger  i),  Toussaint  V,  Baumgarten  (3), 
Nocard(4  .  Biedert  (5),  d'autres  encore,  ont  confirmé  au  labo- 
ratoire ou  par  la  clinique  les  conclusions  de  Chauveau,  qui 
montrent  à  la  fois  la  facilité  et  la  fréquence  avec  lesquelles  se 
l'ail  l'infection  tuberculeuse  par  la  voie  digestive. 

Mes  recherches  au  point  de  vue  de  l'étiologie  de  la  tubercu- 
lose pulmonaire  dans  ces  dernières  années  m'ont  convaincu 
que  chez  l'homme,  la  tuberculose  par  ingestion  est  à  peu  près 
aussi  fréquente  que  la  tuberculose  par  inhalation.  J'ai  étudié 
l'histoire  de  nombreux  cas  île  phtisie  parmi  des  fermiers,  jar- 
diniers, abatteurs  de  bois,  et  d'autres  individus  qui  mènent 
une  vie  à  l'air  libre, et  pour  lesquels  la  contagion  par  inhalation 
était  presque  impossible,  car  ils  n'avaient  jamais  été  en  contact 
avec  des  phtisiques.  Quoiqu'il  soit  vrai  que  la  tuberculose  ini- 


(ii  Bollinger.  Lober  kùnstliche  Tuberkulose,  erzeugl  durch  don  Genuss  der 
Milch  tuberkuloser  Kuhe.  Deutsche  Zeitschrifï  /'.  Thiermed.,  t.  VI.  1879, 
||.   io3. 

(2)  Toussaint.  Contribution  à  l'étude  de  la  transmission  de  la  tuberculose. 
Comptes  rendus  de  l'Académie  des  Sciences,  18S0,  1.  XC,  p.  ~r>\. 

(3)  Baumgakten.  Ueber  die  Uebei'tragbarkeit  der  Tuberkulose  durch  die 
.Nalirung,  etc.  Centralbl.  /'.  klin.  Med,,  1S8J.  p.  jî. 

li)  Nocard  Des  dangers  auxquels  expose  l'usage  de  la  viande  el  du  lait  des 
animaux  tuberculeux.  Congrès  pour  l'étude  de  la  tuberculose.  Paris,  1888, 
I1-  i'.i- 

l">>  Biedekt.  Die  Tuberkulose  des  Darms  und  des  lymphatischen  Apparales. 
Jahrbuch  d  Kinderheilkunde,  1884,  1.  XXI.  p.  1 58. 


CONTAGION  PAR  INGESTION  4g 

tiale  des  intestins  soit  rare  chez  l'adulte,  et  beaucoup  plus 
fréquente  chez  l'enfant  où  l'épithélium  intestinal  est  plus 
délicat,  cela  peut  s'expliquer  par  deux  raisons:  un  adulte  prend 
rarement  du  lait  pour  repas  exclusif  comme  le  fait  l'enfant. 
Chez  ce  dernier  le  milieu  le  plus  favorable  pour  l'arrêt  et  la 
culture  des  bacilles  est  l'intestin  et  le  mésentère  (phtisie  mésen- 
térique  ou  carreau).  Quant  à  l'adulte,  même  s'il  prend  du  lait 
ou  d'autres  substances  tuberculeuses  en  assez  grande  quantité, 
son  épithélium  semble  plus  réfractaire  aux  bacilles,  et  dans  la 
majorité  des  cas  ces  microorganismes  passent  par  le  système 
lymphatique  dans  la  circulation  pour  ensuite  se  fixer  en  un 
point  plus  favorable  à  leur  développement,  point  qui  est  le  plus 
souvent  le  sommet  du  poumon.  On  sait,  d'après  les  expériences 
de  Falk  (i),  Wesener  (2),  Straus  et\Vurtz(3)  et  d'autres  auteurs, 
que  le  pouvoir  bactéricide  du  suc  gastrique  est  presque  nul. 

Si  l'on  considère  que  le  lait,  le  beurre  et  la  viande  provenant  de 
la  race  bovine  constituent  les  aliments  le  plus  universellement 
employés,  et  si  l'on  veut  considérer  d'un  autre  côté  que  les  lois 
contre  la  propagation  de  la  tuberculose  par  la  race  bovine  sont 
presque  toutes  récentes  et  encore  peu  strictement  appliquées, 
on  devra  admettre  qu'un  grand  nombre  de  cas  de  phtisie  pulmo- 
naire ont  pour  origine  l'ingestion  de  substances  tuberculeuses. 

Le  fait  même  de  la  diminution  de  la  mortalité  par  la  tuber- 
culose pulmonaire  dans  les  pays  où  la  prophylaxie  de  la  tuber- 
culose dans  la  race  bovine  est  le  plus  rigoureusement  exécutée 
est  la  meilleure  confirmation  de  ce  que  nous  venons  d'avancer 
au  sujet  de  la  fréquence  de  la  tuberculose  par  ingestion 
comme  facteur  étiologique  de  la  phtisie  pulmonaire.  J'ai  fait  à 
ce  point  de  vue  une  enquête  (4)   sur    les    lois    et   règlements 


(1)  Falk.  Ueber  das  Yerhalten  von  Infeclionssloffen  im  Verdauungskanalc . 
Virchow's  Archiv,  i883,  t.  XCIII,  p.  144. 

(2)  Wesener.  Beilriige  zur  Lchre  von  der  Fûtterungs  tubcrkulose.  Fribourg-e:i- 
Brisgau,  i885,  p.  55-6o. 

(3)  Straus  et  Wurtz.  De  l'action  du  suc  gastrique  sur  le  bacille  de  la  tuber- 
culose. Congrès  pour  ï étude  de  la  Tuberculose.  Vans,  1888,  p.  33o.  —  De  l'ac- 
tion du  suc  gastrique  sur  quelques  microbes  pathogènes.  Arch.  de  méd.  expé- 
rim.  et  d'anat.  palhol.,  1889,  p.  3;o. 

(4)  S.  A.  Knopf.  The  présent  status  of  préventive  means  against  the  spread  of 
tuberculosis  in  the  various  states  of  the  Union,  etc.  Journal  of  the  American 
M  éd.  Association,  1897,  3o  octobre. 

Knopf.  Sanatoria.  : 


5o  CONTAGION  DE  LA   TUBERCULOSE 

dans  les  diverses  régions  des  Etats-Unis.  Certains  Etais  de 
l'Union  n'ont  pas  encore  adopté  les  moindres  précautions  contre 
la  propagation  de  la  phtisie  pulmonaire  par  les  irai  liais  îles 
tuberculeux,  mais  ils  ont  édicté  des  lois  rigoureuses  relative- 
ment à  la  tuberculose  dans  la  race  bovine.  Lue  réduction  notable 
des  cas  de  phtisie  pulmonaire  chez  l'homme  est  le  résultat  de  cette 
lutte  contre  la  pommelière,   cette  phtisie  de  l'espèce  bovine. 

Le  danger  lies  laits  non  stérilisés.  — ■  Là  où  Ton  ne  peut 
s  assurer  que  le  lait  n'est  pas  tuberculeux,  il  faut  conseiller, 
soit  l'achat  des  laits  stérilisés  du  commerce,  soit  la  stérilisation 
à  domicile,  au  moyen  d'un  appareil  spécial  (i).  A  défaut  d'un 
appareil  stérilisateur,  on  peut  se  contenter  de  chauffer  le  lait 
à  70°  pendant  dix  minutes.  Par  ce  procédé  le  lait  n'acquiert 
point  le  goût  particulier  du  lait  ayant  longtemps  bouilli,  et  la 
plupart  des  bacilles  et  autres  inicroorganism.es  dangereux 
sont  tués.  La  viande  suspecte  ne  devrait  pas  être  mangée  sai- 
gnante ;  pour  se  garantir  contre  tout  danger,  il  suffit  que 
l'intérieur  du  morceau  cuit  ait  une  couleur  gris  rose.  Le  dan- 
ger, en  mangeant  du  beurre  et  du  fromage  de  provenance 
inconnue,  est  moins  grand;  car  si  ces  aliments  renferment 
des  bacilles  de  la  tuberculose,  ils  ne  les  contiennent  qu'en  très 
petit  nombre.  El  il  faut,  surtout  pour  l'adulte,  l'ingestion  d'une 
grande  quantité  d'éléments  virulents  pour  contaminer  la  voie 
digeslive. 

Infection  intestinale  par  des  crachats  avalés  .  —  En 
dehors  de  celle  source  de  la  tuberculose  par  contagion  à  la  suite 
de  l'ingestion  des  substances  alimentaires  viande,  lait,  etc., 
provenant  d'animaux  tuberculeux  ,  sur  laquelle  nous  revien- 
drons en  parlant  de  la  prophylaxie  publique  ou  officielle,  il 
existe  d'autres  sources  d'infection  et  île  réinfection  par  inges- 
tion de  bacilles  tuberculeux.  Pour  les  exiler,  la  prophylaxie 
individuelle  seule  peut  agir  avec  succès.  11  faut  que  lout  tuber- 


(11  Beaulavon.  La  phtisie;  hygiène;  cuit;  guérison.   Paris,  1897,  p.   ii-i. 

Emile  Mauchamp.  L'allaitement  artificiel  des  nourrissons  par  le  lail  stérilisé  : 
conditions  :  pratique;  résultats;  indications.  Paris,  itfyS  (Georges  Carré  et 
il    Xaud,  éditeurs). 

l'.-A.  Mlsn.uih.   I.a  Presse  médicale,  iSyg,  12  avril,  p.  1 7  J. 


COSTAGIOX  PAR  INGESTION  5l 

culeux  sache  que  non  seulement  son  expectoration,  mais  encore 
sa  salive  et  toutes  les  autres  sécrétions,  peuvent  être  bacilli- 
fères.  Un  malade  ne  doit  jamais  avaler  son  crachat,  car  il  s'ex- 
pose ainsi  à  une  infection  du  canal  alimentaire.  Mosler  (i)  a 
signalé  le  fait  intéressant  que  les  phtisiques  aliénés,  qui  avalent 
presque  constamment  leurs  crachats,  présentent  relativement 
aux  phtisiques  ordinaires  une  proportion  notablement  plus 
grande  de  tuberculose  intestinale,  laquelle  produit  chez  eux 
des  lésions  exceptionnellement  étendues. 

La  salive  bacillifère.  —  Dans  beaucoup  de  pays  où  l'on  a 
encore  l'habitude  du  baiser  sur  les  lèvres,  la  transmission  de 
la  tuberculose  peut  se  faire  ainsi.  L'a  coutume  en  vogue  en 
France,  où  l'on  s'embrasse  sur  le  front  ou  sur  les  joues,  est  plus 
hygiénique  et  devrait  être  suivie,  par  tous  les  tuberculeux  du 
monde.  Néanmoins,  je  suis  de  l'avis  de  mon  excellent  confrère 
et  ami  le  D''  Beaulavon,  lorsqu'il  dit  (a)  :  «  Malgré  tout,  comme, 
on  ne  saurait  prendre  trop  de  précautions,  il  vaut  mieux 
ne  pas  laisser  embrasser  les  enfants  par  des  personnes  qu'on 
ne  connaît  pas  bien.  »  Il  faut,  bien  entendu,  éviter  de  porter 
à  la  bouche  des  objets  qui  ont  touché  à  celle  d'un  phti- 
sique, tels  que  porte-plumes,  cuillers,  verres,  ou  autres  usten- 
siles. Les  observations  où  la  muqueuse  buccale  a  servi  de 
porte  d'entrée  aux  bacilles  sont  très  nombreuses.  Les  adé- 
nites sous-maxillaires  de  nature  tuberculeuse  sont  assez 
communes  chez  les. enfants.  Mais,  de  véritables  phtisies  ont 
éclaté  à  la  suite  de  l'infection  de  la  muqueuse  buccale.  Je  veux 
rappeler  ici  le  cas  intéressant  du  Dr  L.-H.  Petit,  cité  dans  la 
Revue  de  la  tuberculose  pour  l'année  1894,  d'une  infection  buc- 
cale par  l'intermédiaire  d'un  porte-plume  (3).  Des  substances 
alimentaires  touchées  par  la  bouche  d'un  tuberculeux  ne  de- 
vraient plus  servir  (4),   et  il  est  dangereux  de  manger  ou  de 


(1)  Mosler.  Ucber  die  Infection  der  Darmschleimhaut  nach  Verschlucken 
luberkulûser  Sputa.  Deutsche  med.  Wochènschr.,  188 3 ,  n0iç). 

(a)  Beaulavon.  La  phtisie;  hygiène  :  cure  ;  guérison.  Paris,  1897. 

(3)  L.-H.  Petit.  Revue  de  la  tuberculose,  1894,  p-  a36. 

(4)  Demme.  Tuberkulôse  Infection  rnehrerer  Siiuglinge  seitens  einerTuberku- 
jiisen  Warlefrau.  i~  er  Bericht  itber  die  Th'itigkeit  des  Jenner  schen  Kinder- 
spitals  in  Bern  ini  Jahr  1889,  p.  61. 


52  COXTAGIOX  DE  LA    TIBICIICLI.OSE 

faire  manger  le  résidu  laissé  dans  l'assiette  par  un  phtisique. 
Il  faut  détruire  ces  restes  alimentaires,  et  laver  à  l'eau  bouil- 
lante les  assiettes,  fourchettes,  couteaux,  verres,  etc.,  qui  onl 
servi  à  ces  malades.  11  n'y  a  pas  de  doute  que  les  ouvriers  tuber- 
culeux qui  font  les  cigares  à  la  main  ne  puissent  introduire  des 
bacilles  de  la  tuberculose  clans  ces  cigares.  C'est  surtout  l'ha- 
bitude de  coller  la  dernière  touille  avec  la  salive  qui  rend 
cette  pratique  dangereuse.  Ainsi  le  D''  J.-C.  Spencer,  ^\n  Bureau 
de  santé  de  la  ville  de  San  Francisco,  a  pu  déceler  des  bacilles 
deKoch  dans  des  cigares  à  lui  soumis  pour  l'examen  bactério- 
logique. L.-H.  Petit  a  trouvé,  en  outre,  dans  des  «  mégots  (i)  » 
provenant  de  tuberculeux,  et  dans  des  cigarettes  laites  à  la 
main  et  à  l'aide  de  la  salive,  des  bacilles  de  Koch.  L'idée  que 
la  nicotine  rend  la  présence  de  ces  microorganismes  inoffen- 
sive  est  malheureusement  Causse.  Lors  même  que  le  tabac  a 
eu  le  temps  de  tuer  les  bacilles,  leurs  cadavres  restent  dan- 
gereux. 

Tous  les  doutes  possibles  à  ce  sujet  ont  été  écartés  par  les 
expériences  répétées  de  MM.  Straus  et  Gamaleia,  qui  sont 
arrivés  aux  conclusions  suivantes  :  «  Les  cadavres  des  bacilles 
tuberculeux  n'ont  pas  seulement  la  propriété  de  se  conserver 
pendant  longtemps  dans  le  corps  des  animaux.  Ils  présentent 
une  autre  particularité  :  c'est  de  garder,  quoique  morts,  une 
grande  partie  des  propriétés  pathogènes  caractéristiques  du 
bacille  vivant  (2)  ». 

MM.  (  !  ranche r  et  Lcdoux-Lebard,  qui  ont  fait  des  expériences 
analogues,  désignent  sous  le  nom  de  «  nécro-tuberculose  »  les 
réactions  cellulaires  des  tissus  vivants  contre  le  bacille  tuber- 
culeux mort  qui  agit  surtout  par  ses  qualités  proléiques,  comme 
un  corps  étranger  spécial  (3). 

Pour  se  mettre  à  l'abri  de  tout  danger,  M.  L.-IL  Petit  pro- 


(1)  Mégots  :  petits  bouts  de  cigares  ou  de  cigarettes  ramassés  par  les  men- 
diants, puis  vendus  comme  tabac  neuf  pour  les  cigarettes. 

(ii)  Straus  et  Gamaleia.  Contribution  à  l'étude  du  poison  tuberculeux.  Arck. 
de  méd.  expérim.  et  d'anat.  pathol.,  1891. 

(3)  Grancher  cl  Ledoux-Lebard.  Tuberculose  aviaire  et  humaine.  Arcli.  de 
méd.  expérim.  et  d'anat.  pathol. 

Prudden  et  Hodenpyl.  .Studies  on  llie  action  of  dead  bacteria  in  tbe  living 
body.  New  York  Med.  Journal,  189'i,  6  et  20  juin. 


CONTAGION  PAR  INGESTION  53 

pose  de  ne  fumer  de  cigares  ou  de  cigarettes  qu'avec  un 
bout  en  bois  ou  en  ambre  ou  toute  autre  substance  ana- 
logue. Et  encore  ne  serait-il  pas  superflu  de  placer  dans  le 
fond  de  ces  porte-cigares  ou  cigarettes  un  petit  tampon  d'ouate, 
pour  intercepter  plus  sûrement  l'arrivée  des  microbes  dans  la 
bouche. 

N'étant  pas  fumeur  moi-même,  je  ne  saurais  apprécier  si 
l'interposition  d'un  tampon  d'ouate  —  moyen  qui  me  semble 
exagéré  —  ne  diminue  pas  le  plaisir  du  fumeur.  En  tout  cas,  il 
me  semble  que  faire  tirer  la  fumée  à  travers  un  tampon  d'ouate 
demande  des  efforts  d'aspiration  trop  grands  et  trop  souvent 
répétés  pour  ne  pas  devenir  nuisibles  à  un  fumeur  invétéré. 

La  tuberculose  parmi  les  petits  animaux  homestiques.  — 
L'infection  par  la  salive  tuberculeuse  peut  également  s'effec- 
tuer quoique  celle-ci  ne  provienne  pas  d'un  être  humain.  Je 
parle  de  la  tuberculose  du  perroquet  et  d'autres  petits  animaux 
domestiques.  Bien  que  la  tuberculose  se  manifeste  chez  le  per- 
roquet surtout  par  une  lésion  tuberculeuse  de  la  peau,  chez 
d'autres  animaux  domestiques,  tels  que  le  chien  ou  le  chat,  par 
exemple,  la  tuberculose  pulmonaire  se  rencontre  encore  assez 
souvent.  Il  faut  donc  éviter  de  caresser  ces  animaux  de  trop 
près,  et  surtout  de  les  embrasser.  Cette  interdiction  s'applique 
principalement  aux  tuberculeux. 

Les  dangers  de  contagion  par  les  excréta  des  tuberculeux 
semblent  être  moins  grands.  Néanmoins,  la  désinfection  des 
selles  et  des  urines  d'un  malade  atteint  de  tuberculose  intes- 
tinale est  fortement  indiquée.  Il  n'est  pas  sans  danger  non  plus 
d'enterrer  superficiellement  des  excréments,  des  crachats  ou 
d'autres  substances  tuberculeuses.  Que  la  propagation  de  la 
tuberculose  par  les  vers  de  terre  soit  possible,  voilà  un  fait 
bien  démontré  par  MM.  Lortet  et  Despeignes  (1)  dans  leurs 
expériences.  Les  lombrics  rejettent  les  bacilles  qu'ils  amènent 
à  la  surface  du  sol  ;  les  animaux,  en  paissant,  peuvent  manger 
les  herbes  sur  lesquelles  les  vers  ont  disséminé  les  substances 
tuberculeuses. 


(1)  Lortet  et  Despeignes.  Les  vers  de  terre  et  les  bacilles  de  la  tuberculose. 
Comptes  rendus  de  l'Acad.  des  Sciences,  1892,  i5  janvier  et  4  juillet. 


-,  j  COXTAGIOlt  DE  LA   TUBERCULOSE 

Infection  par  l'ancienne  méthode  de  la  respiration  artifi- 
cielle.—  Un  mode  d'infection  par  La  salive  assez  rare,  niais  trop 
importanl  pour  ne  pas  être  cité,  est  celui  qui  peut  s'effectuer  par 
un  médecin  ou  une  sage-femme  tuberculeux,  dans  les  efforts  faits 
pour  ramener  à  la  vie  un  enfant  né  en  état  d'asphyxie.  Malheu- 
reusement il  y  a  plusieurs  cas  de  cette  infection  dans  la  litlé- 
ralure.  Le  plus  important  est  celui  qu'a  observé  Reich  i  :  une 
sage-femme  du  village  de  Neuenberg  (Allemagne]  devint  phti- 
sique en  i <Sj4-  Elit'  mourut  en  juillet  iS-(i.  Elle  avait  l'habitude 
de  mettre  sa  bouche  sur  celle  du  nouveau-né,  pour  aspirer  les 
mucosités  qui  gênaient  la  respiration.  Dix  enfants  soignés  par 
cette  sage-femme,  du  mois  d'avril  i8y5  au  mois  de  niai  1876, 
moururent  de  tuberculose.  Aucun  de  ces  entants  n'avait  de 
parents  tuberculeux.  L'emploi  du  tube  recommandé  par 
Tarnier  et  Lusk,  ou  de  l'insufflateur  de  Ribemont-Dessaignes, 
ou  encore  la  traction  rythmique  selon  la  méthode  de  Laborde, 
sont  des  moyens  à  préférer  à  la  succion  de  bouche  à  bouche. 

III.  —    CONTAI!  ION    PAR    INOCULATION 

Ai  To-iNocuLATioN.  —  Les  cas  les  plus  fréquents  decontagion 
par  suite  d'une  inoculation  des  matières  tuberculeuses  sont 
des  auto-inoculations.  Un  malade  phtisique  se  blesse  au  doigt, 
il  porte  l'organe  blessé  à  sa  bouche,  et,  par  l'intermédiaire  de 
la  salive  bacillifère,  il  en  résulte  une  inoculation  sous  forme  de 
tuberculose  locale  ou  cutanée  (2).  Si  donc  un  tuberculeux  se 
fait  une  blessure,  il  devra  appliquer  un  pansement  antisep- 
tique sur  la  plaie,  et  au  cas  où  cela  serait  impossible  immédia- 
tement, celle-ci  devra  être  lavée  à  l'eau  ordinaire,  mais  le 
contact  de  la  partie  blessée  avec  la  salive  sera  rigoureusement 
évité. 

Inoculation  par  crachoirs  cassés,  etc.  —  Les  domestiques 
ou  infirmiers  auxquels   on  confie    le  nettoyage  des  crachoirs 


(1)  Reich.  Berliner  med .  Wochenschr . ,  1878,  n°  37. 

(a)  Cutancous  tuberculosis  by  auto-infection.  New  York  Lancet,   1898,   avril. 
p.  i36. 


C0STAG10X  PAR  IXOCULATIOX  55 

s'infectent  souvent  par  inoculation.  La  moindre  écorchure  à  la 
main  peut  servir  de  porte  d'entrée  aux  substances  tubercu- 
leuses et  entraîner  les  conséquences  les  plus  désastreuses.  Jai 
toujours  insisté  pour  que  les  infirmiers  qui  font  ce  travail  se 
munissent  de  gants  de  caoutchouc. 

Une  source  analogue  d'infection  locale  à  laquelle  les  mé- 
decins et  les  infirmiers  sont  exposés,  est  le  traitement  ou  pan- 
sement des  plaies  tuberculeuses.  J'ai  pu  observer  moi-même 
cette  infection  dans  le  service  d'un  collègue.  In  infirmier 
s'fnocula  le  doigt  par  suite  de  pansements  répétés  d'une  tuber- 
culose osseuse  avancée.  La  plus  grande  prudence  delà  part  do 
médecin  et  des  infirmiers  est  donc  nécessaire  pour  éviter  ces 
accidents.  L'antisepsie  chirurgicale  actuelle  nous  protège  dans 
une  large  mesure  contre  le  péril  d'une  infection  par  des  ins- 
truments ayant  servi  à  opérer  des  sujets  tuberculeux. 

Piqûres  anatomiques.  — Le  danger  des  piqûres  anatomiques, 
souvent  de  nature  tuberculeuse,  est  connu  depuis  Laënnec  ;  je 
n'ai  donc  pas  besoin  d'insister  sur  les  soins  à  prendre  pendant 
la  dissection  ou  à  l'autopsie.  Il  est  bon,  en  faisant  l'autopsie 
d'un  phtisique,  de  mettre  des  gants  de  caoutchouc. 

Transmission  de  la  tuberculose  d'enfant  a  nourrice.  — 
Nous  parlerons  plus  tard  des  relations  entre  les  mères  ou  nour- 
rices tuberculeuses  et  leurs  enfants.  Mais  ici,  au  chapitre  de  la 
contagion  par  inoculation,  il  faut  mentionner  ce  l'ait,  à  savoir 
qu'un  enfant  tuberculeux  peut  infecter  une  nourrice  saine.  Le 
cas  du  D1'  Weber  (de  Londres)  (i)  montre  bien  que  cette  ino- 
culation peut  s'effectuer  assez  facilement.  Il  est  donc  du  devoir 
du  médecin  d'examiner  très  soigneusement  un  enfant  de 
souche  tuberculeuse  avant  de  le  confier  à  une  nourrice,  et  de 
s'assurer  qu'il  n'y  a  pas  le  moindre  danger  pour  elle  à  allaiter 
cet  enfant. 

Dangers  de  la  circoncision  selon  les  rites  Israélites  ortho- 
doxes. —  Un  autre  mode  d'infection  tuberculeuse  par  l'inocu- 
lation de  salive  bacillifère  est  malheureusement  trop  fréquent 


(i)  Weber  et  Hermann.  Croonian  Lectures.  Londres,  i885. 


56  CONTAGION  DE  LA  TUBERCULOSE 

encore  dans  nombre  ilo  pays.  Je  veux  parler  de  l'infection 
tuberculeuse  par  suite  de  la  circoncision  rituelle  chez  les 
Israélites.  Chez  nous,  en  Amérique,  cette  inoculation  n'est  |>as 
rare.  Tout  récemment,  le  l)r  Ware  (i  présentait  à  la  Metropo- 
litan Médical  Society  ofNew  York  un  enfant  rendu  phtisique 
à  la  suite  de  la  succion  préputiale  par  un  rabbin  phtisique.  Le 
Dr  \Yill  Meyer  (de  New-York  (2  rapportait  un  cas  analogue, 
il  v  a  quelques  années,  et  le  Dr  A.  Jacobi,  professeur  des  mala- 
dies des  enfants  à  l'Université  de  Golumbia,  à  New- York,  m'as- 
surait qu'il  avait  vu  à  peu  prés  une  douzaine  de  cas  d'infection 
tuberculeuse  due  à  l'application  de  ce  rite,  par  des  rabbins 
tuberculeux.  D'autres  médecins  américains  m'ont  parlé  d'expé- 
riences pareilles,  mais  ils  n'ont  à  ce  sujet  pris  aucune  note, 
précise.  Le  Dr  Hadges  Bey  d'Alexandrie  d'Egypte  a  commu- 
niqué à  la  Semaine  médicale  du  3o  septembre  1896  le  cas  d'un 
enfant  victime  d'une  inoculation  tuberculeuse  ayant  pour  ori- 
gine cette  succion,  que  la  tradition  maintient  dans  tout  l'Orient. 
Les  parents  étaient  très  bien  portants  et  n'avaient  point  d'anté- 
cédents tuberculeux.  A  l'âge  de  douze  mois,  l'enfant  présentait 
un  gonflement  des  deux  testicules,  auquel  on  ne  prêta  pas 
d'abord  grande  attention.  Du  consulta  plus  tard  un  médecin 
qui  lit  suivre  pendant  cinq  mois  un  traitement  antisyphilitique 
sans  succès.  Rien  du  cote  des  poumons,  du  système  lympha- 
tique, etc.  Les  testicules  étaient  douloureux,  avaient  doublé  de 
volume,  et  l'on  sentait  des  noyaux  durs,  roulant  sous  la  pres- 
sion du  doigt.  Au  testicule  gauche,  un  noyau  plus  volumineux 
était  fluctuant.  Le  D1'  Hadges  lit  une  ponction  exploratrice  avec 
une  seringue  de  Pravaz  et  constata  dans  la  plaie  de  nombreux 
bacilles  de  Koeh.  Une  empiète  prouva  que  le  rabbin  qui  avait 
circoncis  l'enfant  avec  succion  de  la  plaie  était  phtisique  à  un 
degré  avancé. 

La  littérature   à  ce   sujet  est  abondante   dans   tous  les   pays 
ou  les  Israélites  pratiquent  encore  ce  rite    3  . 


1  1  1  Y\  are.  A  case  ol  inoculation  aller  circumeision.    New  York  Mai.  Journal. 
1898.  26  février. 

im  Meyer.  New  York  .'/<■./.  Presse,  1887.  juin. 

I  i|   t'.-C.  Remondino.    History   of  Circumeision   from   earlicst    lime   to    I lie 
présent,   1891.  —  Hofmokl.    Ein  Fall  von  Tuberkul.   Geschwûr  nach  der  Cir- 


CO.XTAGIO.X  PAR  LXOCCLATIO.X  5; 

Nous  ne  parlons  pas  ici  des  nombreux  cas  d'inoculation 
syphilitique  et  mémo  diphtéritique,  des  gangrènes  (i)  et  des 
hémorragies  secondaires  qui  ont  suivi  l'opération  de  la  circon- 
cision faite  par  des  rabbins  malades,  maladroits  ou  ignorants 
des  premiers  principes  de  la  chirurgie. 

En  France,  le  Consistoire  israélite  de  Paris  a  prohibé  depuis 
plusieurs  années  la  succion  de  la  plaie  préputiale  après  la  cir- 
concision, en  vue  d'empêcher  l'inoculation  syphilitique  ou  tuber- 
culeuse de  cette  plaie.  En  Hollande  et  en  Allemagne,  sur  les 
conseils  de  von  Pettenkofer,  les  rabbins  pratiquent  depuis  1888 
la  succion  indirecte  sur  la  plaie  du  circoncis  à  l'aide  d'un 
tube  de  verre  portant  un  renflement  rempli  d'ouate.  De  la 
sorte,  même  en  cas  de  lésions  syphilitiques  ou  tuberculeuses  à 
la  bouche  de  l'opérateur,  tout  danger  de  contagion  directe  est 
évité. 

Que  faut-il  faire  dans  les  pays  ou  les  rabbins  ne  consentent 
pas  à  apporter  une  modification  si  importante  et  hygiénique  au 
rite  de  la  circoncision  ?  En  Amérique,  où  il  n'existe  pas  de  con- 
sistoire ou  d'autorité  ecclésiastique  capable  d'imposer  un  tel 
règlement,  j'ai  proposé  qu'il  ne  soit  permis  à  aucun  rabbin  de 
faire  l'acte  de  la  circoncision  s'il  ne  présente  pas  un  certificat 
de  bonne  santé  signé  par  un  médecin  désigné  par  le  Conseil  de 
santé.  Ce  certificat  devra  attester  que  le  porteur  n'a  ni  tubercu- 
lose, ni  syphilis,  ni  diphtérie.  Le  rabbin  sera  soumis  à  un 
examen  médical  un  jour  avant  l'opération,  et  les  parents,  ou 
mieux  encore  les  autorités,  exigeront  la  remise  de  ce  certificat 
avant  qu'il  soit  procédé  à  là  circoncision.  Si  les  parents  insistent 
pour  que  cette  opération  soit  faite  selon  l'ancien  rite  et  les  tra- 
ditions orientales,  sans  les  modifications  instituées  en  France 
et  en  Allemagne,  les  précautions  devront  être  doublées.  L'exa- 
men d'un  rabbin  non  seulement  au  point  de  vue  de  sa  santé, 
mais  aussi  de  son  aptitude  comme  «  circonciseur  »,  c'est-à-dire 


cumcision.  Wiener  Med.  Presse,  1886,  n°  11.  —  Elsenberg.  Inokulation  der 
Tuberkulose  bei  einem  Kinde.  Berliner  klin.  Wochenschr.,  1886,  n°  35.  — 
Loewenstein.  Die  Bescbneidung  im  Licbte  der  heutigen  med.  Wissenschaft. 
Archiv  f.  klin.  Chir.,  t.  LIV,  1897. 

(1)  A.  Brothers.  Gangrené  of  the  pénis  after  rilual  circumcision.  New  York 
Med.  Record,  1897,  3o  janvier. 


58  CONTAGION  DE  l.A    TUBERCULOSE 

de  sa  capacité  chirurgicale  pour  faire  correctement  ladite  opé- 
ration, et  au  point  de  vue  de  sa  connaissance  des  méthodes 
antiseptiques,  devrait  devenir  une  condition  sine  (jua  non. 

Infection  tuberculeuse  par  voie  génitale.  —  Que  l'in- 
fection tuberculeuse  puisse  s'effectuer  par  voie  génitale,  cela 
n'est  plus  à  discuter.  Le  fait  est  démontré  par  le  labora- 
toire i  et  par  la  clinique.  Presque  tous  les  phtisio-théra- 
peutes  rencontrent  de  temps  en  temps  des  cas  où  ce  mode 
d'inoculation  est  évident.  La  littérature  médicale  montre  aussi 
la  fréquence  relative  de  ces  faits.  Je  citerai  seulement  les 
travaux,  les  plus  réc<  nls  à  ce  sujet.  île  Reclus  2  .  de  Schu- 
chardt  3  .  de  Carrera  \  et  de  Petit  5).  Les  conseils  du  méde- 
cin d'une  famille  où  l'un  îles  deux  conjoints  est  tuberculeux 
peuvent  rendre  les  plus  grands  services  au  point  de  vue  de  la 
prophylaxie.  Dans  les  cas  spéciaux  où  la  police  sanitaire  a  le 
droit  d'intervenir,  la  tuberculose  devra  être  mise  au  même 
rang  que  la  syphilis  et  les  autres  maladies  vénériennes. 

Ikfectios  rvi!  les  dekts  malades.  —  L'inoculation  ou  1  auto- 
inoculation  peut  se  faire  également  par  les  dents  malades,  et 
les  tuberculeux  devraient  soigner  leurs  dents  non  seulement 
en  vue  de  la  mastication  nécessaire  à  une  bonne  digestion,  mais 
aussi  en  raison  du  danger  de  l'inoculation  tuberculeuse  par  une 
carie  dentaire. 

Infection  pah  la  vaccination. —  11  me  reste  encore  à  parler 
de  L'inoculation  tuberculeuse  possible  par  suite  de  La  vaccina- 
tion. Quoique  rare  et  même  disculée  par  beaucoup  d'auteurs,  il 


in  Cobkil  et  DobROKLAssKi.  Sur  la  tuberculose  des  muqueuses  considérées 
comme  portes  d'eiilrée  du  virus  tuberculeux.  Congrès  pour  l  élude  de  la  tuber- 
culose.   Paris.  1888,  p.   ï5g. 

(a)P.  Ru  us.  Cliniques  chirurgicales  de  1  Hôtel-Dieu.  Paris,  1888.  p.  314-  >-C- 
•  K.  Si  buchakdt.  Die  Uebertragung  derTuberkulose  auf  déni  YYege  des  ge- 
schlechllichen  Verkchrs.  Arch.  f.  klin.  Med.,  Berlin,  iScju,  t.  XLIY. 

1  ii  Carrera  y  Mibo.  Conlagio  tuberculoso  por  la  via  génital,  Gac.  med. 
calai.   Barceloue,  1888.  t.  XI.  p.  J85. 

L.-II.  Petit.  Tuberculose   et  rapports  ai  oie.  Revue    de   la   tuberculose, 
t.  II.  p.  234. 


CONTAGION  PAR  INOCULATION  59 

me  semble  bon  de  suivre  la  pratique  conseillée  par  Brouardel 
et  qui  est  en  vogue  à  l'Institut  vaccinogène de  Bruxelles,  dirigé 
par  M.  Degive.  Là  on  a  soin,  immédiatement  après  la  récolle  du 
vaccin,  de  sacrifier  la  génisse  et  d'en  pratiquer  l'autopsie  à 
l'Institut  même  pour  s'assurer  que  l'animal  n'était  pas  tuber- 
culeux, auquel  cas  le  vaccin  recueilli  serait  détruit. 

En  ce  qui  concerne  la  vaccination  et  la  revaccination  chez  les 
tuberculeux  en  pleine  évolution  de  leur  maladie,  il  me  parait 
indiqué  de  suivre  le  conseil  de  Verneuil,  de  Hervieux  et  de  notre 
distingué  collègue  Daremberg.  Ces  auteurs  sont  arrivés  à  cette 
conclusion,  dans  le  cas  de  tuberculose  en  état  d'activité,  qu'il  y  a 
lieu  de  suspendre  temporairement  la  revaccination.  Hervieux  dit 
à  ce  propos  :  «  La  vaccination  et  la  revaccination  sont  assez  fré- 
quemment suivies  d'adénite  axillaire  ;  or,  si  le  sujet  était  en  ce 
moment  en  état  de  tuberculose  active,  celle-ci,  trouvant  clans 
les  ganglions  enflammés  un  lieu  de  moindre  résistance,  s'y 
installerait  probablement  et  ainsi  seraient  créés  de  nouveaux 
foyers  tuberculeux  ». 

Ixfection  par  tatouage.  —  Que  le  tatouage  de  la  peau 
puisse  devenir  un  sport  dangereux  et  qu'on  doive  se  méfier 
des  «  tatoueurs  »,  c'est  ce  que  démontre  le  cas  de  MM.  Gol- 
lings  et  Murray,  rapporté  dans  le  British  Médical  Journal,  et 
cité  dans  la  Revue  de  la  tuberculose,  t.  III,  p.  182.  Trois 
sujets  âgés  de  dix,  treize  et  quinze  ans,  ont  été  inoculés  par 
la  même  personne,  morte  peu  de  temps  après  de  tuberculose 
pulmonaire:  l'opérateur  avait  employé  sa  salive  comme  véhi- 
cule des  matières  colorantes;  dans  ce  cas,  l'origine  de  la  tuber- 
culose inoculée  est  donc  incontestable.  Le  tatouage  a  été  bien 
vite  suivi  de  la  formation  de  lésions  locales  qu'un  spécialiste 
n'a  pas  hésité  à  rapporter  à  la  tuberculose. 


CHAPITRE    VI 

Les  lois  sanitaires  et  la  lutte  contre  la  tuberculose 
dans  les   divers  pays. 


Dans  les  chapitres  précédents  nous  avons  parlé  de  la  prophy- 
laxie individuelle.  Avant  d'aborder  la  discussion  de  la  prophy- 
laxie publique  de  la  phtisie  pulmonaire  et  d'exposer  les 
réflexions  qu'elle  nous  a  suggérées,  nous  allons  passer  en 
revue  les  lois  sanitaires  et  les  efforts  ayant  pour  but  île  com- 
battre la  propagation  de  la  tuberculose  clans  les  pays  où  il  nous 
a  été  possible  de  recueillir  des  renseignements. 

Allemagne.  —  Il  existe  en  Allemagne,  depuis  le  20  mai  189a, 
une  circulaire  du  ministre  adressée  à  tous  les  préfets  et  ainsi 
conçue  : 

«  Sc-liuizinassregeln  gegen  dit-  Yerbreitung  Jer  Tuberculose.  »  — 
Mesures  protectrices  contre  lu  propagation  de  la  tuberculose. 

Cette  lettre  circulaire  recommande,  partout  où  il  y  a  des  aggloméra- 
tions de  population,  surtout  dans  les  stations  pour  phtisiques,  hôpitaux, 
casernes,  écoles  : 

1"  Des  crachoirs  d'une  certaine  profondeur  et  en  forme  de  terrine 
(pour  empêcher  le  dessèchement  rapide  de  l'eau  et  le  renversement  des 
crachoirs)  ; 

■j."  Pour  éviter  que  le  liquide  ne  gèle  dans  les  crachoirs,  on  doit  les 
placer,  autant  que  possible,  à  l'abri,  et  y  verser  du  chlorure  de  chaux  ou 
du  chlorure  de  sodium  ; 

3°  Pour  empêcher  les  animaux  domestiques  de  boire  le  contenu  des 
crachoirs,  ceux-ci  doivent  avoir  une  ouverture  d'une  forme  spéciale,  et  on 
ajoute  au  liquide  du  sel  ou  du  chlorure  de  chaux. 

En  dehors  de  ces  instructions  émanant  du  ministre,  beaucoup 


ANGLETERRE  61 

de  villes  allemandes  prennent  des  initiatives  individuelles  en 
publiant  des  instructions  populaires.  Ainsi  une  petite  plaquette 
fort  intéressante  et  très  facile  à  comprendre  est  distribuée  gra- 
tuitement par  le  Collège  médical  de  Hambourg.  Nous  ne  repro- 
duirons pas  dans  leur  entier  ces  instructions,  qui  sont  d'ordre 
général  ;  on  peut  les  trouver  dans  la  Mùnchenev  mediciiiische 
Wochenschrift,  1896,  n°  37,  et  dans  la  Revue  de  la  tuberculose 
d'avril  1897,  P-  94-  Nous  désirions  seulement  mettre  en  relief 
une  petite  note,  qui  manque  dans  beaucoup  de  circulaires  et 
qui  me  semble  assez  importante  pour  être  reproduite  ici. 

«  Les  enfants  sont  particulièrement  exposés  au  danger,  non 
seulement  parce  que  la  réceptivité  pour  la  maladie  est  très 
grande  à  leur  âge,  mais  parce  que,  jouant  souvent  par  terre  et 
habitués  à  porter  à  la  bouche  leurs  mains  sales  et  leurs  jouets, 
ils  sont  plus  facilement  en  contact  avec  l'expectoration  réduite 
en  poussière. 

«  La  réceptivité  s'accroît  quand  l'organisme  est  affaibli  par 
une  cause  quelconque  (accouchement,  maladie,  et,  chez  les 
enfants  en  particulier,   pendant  la  rougeole  et  la  coqueluche). 

»  Les  germes  de  la  maladie  peuvent  pénétrer  chez  les  gens 
sains  par  toutes  les  petites  plaies  (éruptions  humides  de  la 
peau,  écorchures,  dues  à  la  présence  de  parasites,  dents 
malades).  » 

Mais  il  y  a  dans  la  même  circulaire  une  recommandation  que 
je  ne  crois  pas  bonne.  Il  y  est  dit  :  «Pour  remplir  les  crachoirs 
on  se  servira  de  préférence  de  sciure  de  bois  humide  ».  Cette 
pratique  nous  semble  dangereuse.  S'il  n'y  a  pas  une  surveillance 
constante,  la  sciure  de  bois  peut  se  dessécher,  et  ensuite  par 
le  moindre  courant  d'air  se  répandre  et  devenir  une  source 
d'infection. 

De  nombreux  sanatoria  pour  les  phtisiques  riches,  pour  ceux 
de  la  classe  moyenne  et  pour  les  phtisiques  pauvres  se  fondent 
partout  en  Allemagne.  Jusqu'aujourd'hui  j'ai  pu  en  compter  en 
tout  4o  en  plein  fonctionnement,  et  un  nombre  considérable  en 
voie  de  construction  ou  à  l'état  de  projet. 

Les  lois  contre  la  tuberculose  bovine  sont  rigoureusement 
exécutées  dans  tous  les  Etats  de  l'empire  allemand. 

Angleterre.  —  En  Angleterre,  d'après  les  informations  que 


I3i  LOIS  SANITAIRES   ET  LUTTE   CONTRE  LA    TVRERCULOSE 

j'ai  reçues  de  M.  le  Dr  Murphy,  inspecteur  sanitaire  de  la  ville 
de  Londres,  il  n'existe  ni  lois  ni  règlements  contre  la  conta- 
gion de  la  tuberculose  chez  l'homme  ;  la  phtisie  pulmonaire 
n'est  pas  comprise  dans  les  maladies  reconnues  contagieuses 
par  la  loi. 

Mais  ce  pays  a  depuis  le  commencement  de  ce  siècle  des 
hôpitaux  spéciaux  qui  se  sont  multipliés  d'une  façon  notable 
depuis  une  trentaine  d'années,  et  dans  ces  derniers  temps  plu- 
sieurs sanatoria  où  on  traite  les  malades  selon  le  principe 
Brehmer-Dettweiler  ont  été  établis.  Dans  les  cercles  médicaux 
on  s'occupe  beaucoup  en  ce  moment  du  danger  provenant  de 
l'expectoration  des  malades  tuberculeux  au  dehors  des  hôpi- 
taux. 

Pour  combattre  la  tuberculose  bovine,  le  gouvernement 
anglais  a  nommé  une  commission  composée  de  savants  choisis 
dans  les  professions  médicale  et  vétérinaire,  chargée  d'étu- 
dier les  mesures  administratives  à  prendre  pour  empêcher  la 
contagion  par  l'usage,  connue  aliment,  de  la  chair  ou  du  lait 
d'animaux  tuberculeux,  et  de  rechercher  quelles  sont  les  consi- 
dérations qui  pourraient  guider  les  autorités  pour  la  proscrip- 
tion des  os  ou  chairs  des  animaux  destinés  à  la  boucherie  et 
reconnus  tuberculeux    r  . 

Australie.  —  Dans  une  partie  de  l'Australie  on  semble  être 
bien  avancé,  car  la  ville  de  . Sydney  2  inflige  une  amende  de 
:>.')  francs  à  toute  personne  coupable  d'avoir  craché  sur  le  par- 
quet d'un  bâtiment  public  ou  dans  la  rue.  En  ce  qui  concerne 
la  tuberculose  bovine,  une  loi  a  été  décrétée  par  le  gouverne- 
ment colonial  en  date  du  -j.S  décembre  i8i).">,  et  ainsi  désignée  : 
«  An  act  to  provide  for  the  inspection  of  life  stock  and  méat, 
intended  for  export,  and  to  regulate  the  exportation  thereof  ». 
Une  autre  loi,  en  date  du  22  juillet  1896,  est  appelée  :  «  An  act 
to  prevenl  the  introduction  and  spread  of  tuberculosis  in 
stock .    » 

Par  ces  deux  lois,  l'inspection  des  animaux  destinés  à  la  con- 
sommation (bœufs,   moutons,    porcs,   etc.'  se  trouve    assurée. 


(il  Revue  de  la  tuberculose,  1896,  1.  IV.  p.  26a. 

1  m  New  York  Médical  Record,  cité  par  la  Revue  de  lu  tuberculose. 


AUTRICHE,  BELGIQUE  63 

La  surveillance  de  l'exportation  de  ces  animaux,  ou  du  beurre 
et  de  la  viande,  est  également  visée  par  ces  dispositions. 

D'après  la  lettre  que  M.  le  D1'  Jackson  a  bien  voulu  m'en- 
voyer,  il  y  a  en  ce  moment  deux  sanatoria  pour  phtisiques 
pauvres,  l'un  à  Dalby,  l'autre  à  Roma,  et  le  gouverneur  de  la 
colonie  a  affecté  la  somme  de  12J  ooo  francs  pour  la  construc- 
tion d'un  troisième. 

Autriche.  —  En  ce  qui  concerne  l'Autriche,  je  n'ai  pu  obte- 
nir de  renseignements  précis  au  point  de  vue  des  lois  ou 
règlements  sanitaires  ayant  pour  but  d'empêcher  la  propagation 
de  la  tuberculose  par  l'homme  ou  les  animaux.  De  nombreux 
médecins  viennois,  et  à  leur  tète  le  distingué  professeur  von 
Schroetter,  s'occupaient  depuis  des  années  de  la  fondation  de 
sanatoria.  Enfin,  en  1892,  ils  réussirent  à  constituer  une  société 
composée  de  médecins,  de  philanthropes,  de  financiers  et  d'in- 
dustriels, sous  le  protectorat  de  l'archiduc  Charles-Louis,  en 
vue  de  créer  un  établissement  pour  le  traitement  climatérique 
des  maladies  de  poitrine  (Verein  zur  Errichlung  und ErhaUung 
einer  klimaiischen  HeilanstaU  fui1  Brustltvanke).  D'après  des 
nouvelles  que  je  dois  à  l'obligeance  de  M.  le  professeur  von 
Schroetter  et  de  M.  le  D1'  von  Weissneyer,  il  existe  aujourd'hui 
à  Alland,  en  plein  fonctionnement,  un  très  beau  sanatorium, 
assez  vaste  pour  recevoir  3oo  phtisiques  pauvres  ;  les  malades 
ne  paient  rien  et  l'entreprise  est  sous  le  protectorat  de  Sa 
Majesté  l'empereur  d'Autriche. 

Belgique.  —  Gomme  partout  ailleurs,  la  tuberculose  exerce 
en  Belgique  plus  de  ravages  que  toutes  les  autres  affections 
transmissibles.  Aussi  le  gouvernement  belge  s'est-il  ému  de  cet 
état  de  choses  et,  après  avoir  pris  avis  du  Conseil  supérieur  d'hy- 
giène publique,  a-t-il  publié  en  1S96  deux  instructions  pratiques 
à  l'usage  des  administrations  et  du  public,  l'une  contre  les 
principales  maladies  épidémiques  et  transmissibles,  suivie 
d'une  notice  sur  la  désinfection,  l'autre  pour  prévenir  et  com- 
battre la  tuberculose. 

Les  instructions  relatives  à  la  tuberculose  sont  d'une  clarté 
remarquable  ;  elles  visent  toutes  possibilités  d'infection,  ino- 
culation, ingestion,  inhalation.  Très  intéressant  est  le  para- 


graphe  qui  traite  de  la  désinfection.  Il  y  est  dit  :  «  La  désin- 
fection obligatoire  s'appliquera  non  seulement  au  logement  des 
phtisiques  décèdes,  mais  aussi  aux  chambres  d'hôtels,  auberges, 
maisons  de  logement,  wagons-lits  et  cabines  de  navires,  cel- 
lules de  prisonniers,  où  auront  séjourné  des  tuberculeux  et 
avant  que  ces  locaux  soient  réoccupés.  » 

En  ce  qui  regarde  la  prophylaxie  de  la  tuberculose  bovine, 
ce  pays  a  un  règlement  prescrivant  une  série  démesures  pour 
parer  aux  dangers  que  peut  faire  naître  le  bétail  tuberculeux. 
Pour  les  animaux  du  pays,  ce  règlement  détermine  quand,  com- 
ment et  par  qui  il  pourra  être  fait  usage  de  la  tuberculine  ;  il 
établit  les  mesures  de  prophylaxie  à  prendre,  et  fixe  les  indem- 
nités à  payer  aux  éleveurs.  Quant  aux  animaux  présentés  à 
l'importation,  s'ils  sont  suspects  de  tuberculose  ils  seront 
renvoyés  dans  leur  pays  d'origine,  et,  si  leur  propriétaire 
n'obtempère  pas  à  ces  prescriptions,  ils  seront  saisis  et  abattus 
sans  indemnité.  Si  les  animaux  paraissent  sains,  mais  pro- 
viennent d'un  pays  ou  règne  la  tuberculose,  ils  seront  refoulés 
ou  bien  soumis  à  la  tuberculine  et,  s'ils  réagissent,  saisis  et 
abattus. 

Beaucoup  de  médecins  belges  sont  partisans  des  établisse- 
ments fermés  pour  le  traitement  des  phtisiques  riches  ou 
pauvres.  La  propagande  en  laveur  de  cette  idée  a  été  menée,  il 
y  a  quelques  années,  par  un  phlisio-lhérapeute  distingué, 
M.  le  l)1  Mœller  (de  Bruxelles).  Voici  les  vœux  qui  ont  été 
adoptés  par  le  Congrès  d'hydrothérapie,  réuni  à  Ostende, 
il  y  a  trois  ans  :  «  Le  Congrès  d'hydrothérapie  marine,  réuni 
à  Ostende  le  26  août  1895,  émet  le  vœu  de  voir  les  admi- 
nistrations communales,  les  gouvernements  de  tous  les  pays, 
ainsi  que  les  particuliers  philanthropes,  établir  au  bord  de  la 
mer  les  établissements  nécessaires  à  la  guérison  des  malades 
pauvres.  »  Déjà  il  existe  pour  le  traitement  des  enfants  tuber- 
culeux quelques  hôpitaux  dont  on  trouvera  le  nom  dans  notre 
liste  des  sanatoria  et  hôpitaux  spéciaux. 

Les  instructions  publiques  auxquelles  nous  avons  fait  allu- 
sion plus  haut  disent  en  outre  :  «  En  attendant  la  création  de 
sanatoria  populaires  où  les  malades  seraient  traités  au  grand 
air,  il  y  a  lieu  d'examiner  si  l'on  pourrait  organiser  pour  eux 
des   services  spéciaux   dans  les  hôpitaux  ;     outre    que    celle 


CANADA  65 

mesure  d'isolement  garantirait  mieux  les  autres  patients  contre 
la  transmission  des  germes  tuberculeux,  elle  permettrait  de 
soumettre  les  phtisiques  à  l'action  des  moyens  d'hygiène 
thérapeutique  et  de  désinfection  recommandés  aujourd'hui  et 
qui  sont  d'une  application  difficile  ou  impossible  lorsque  les 
individus  atteints  de  consomption  sont  disséminés  dans  les 
salles  communes.  » 

Les  autres  villes  de  Belgique  ne  restent  pas  non  plus  indif- 
férentes à  la  lutte  contre  la  tuberculose,  si  l'on  en  juge  d'après 
un  très  intéressant  rapport  sur  les  travaux  des  commissions 
médicales  provinciales  pour  l'année  i8cp,  publié  dans  le 
numéro  d'octobre  du  Bulletin  de  l'Académie  de  médecine  de 
Belgique  par  M.  le  D'  van  Bastelaer. 

Canada.  —  Au  Canada,  l'idée  de  la  contagiosité  de  la  tuber- 
culose pulmonaire  est  bien  entrée  dans  l'esprit  du  public. 
Ainsi,  à  Toronto  (i),  le  médecin  chargé  par  la  municipalité  de 
veiller  à  ce  qu'aucun  enfant  atteint  de  maladie  contagieuse  ne 
fréquente  les  écoles,  refusa  l'admission  scolaire  à  un  enfant 
phtisique.  Les  parents  intentèrent  une  action  judiciaire,  mais  le 
tribunal  rendit  un  jugement  en  faveur  du  médecin,  la  décision 
du  juge  se  fondant  sur  la  nature  contagieuse  de  cette  maladie. 

Les  règlements  contre  la  tuberculose  bovine  semblent  bons, 
et  la  propagande  pour  l'établissement  de  sanatoria  destinés 
au  traitement  des  phtisiques  a  commencé.  Le  sanatorium  de 
Gravenhurst  est  le  premier  de  ce  genre  érigé  dans  le  Dominion 
du  Canada. 

L'utilité  des  sanatoria  pour  le  traitement  des  phtisiques  est 
bien  comprise  par  le  Corps  médical  de  cet  Etat.  Le  D1'  Camille 
Laviolette  a  obtenu  du  gouvernement  de  Québec,  par  une 
loi  en  date  du  19  juillet  1894,  la  concession  gratuite  d'une 
grande  étendue  de  terrain  (147^0  acres)  afin  d'y  construire 
un  sanatorium  au  nom  d'une  Société  dont  il  était  le  repré- 
sentant. Il  existe  aussi  une  Association  Canadienne  pour  la 
santé  publique,  présidée  par  le  D1'  Persillier-La  Chapelle  (de 
Montréal),  qui  s'était  affiliée  il  y  a  trois  ans  à  la  Ligue  Française 
contre  la  tuberculose. 


(1)  The  Médical  Week,    1894,  14  septembre. 
Krs'OPF.  Sanatoria. 


66  LOIS  SANITAIRES  ET  LOTTE  CONTRE  LA   TVBERCCLOSE 

Chili.  - —  Le  gouvernement  de  la  République  du  Chili  nous  a 
l'ait  demander  dernièrement  des  renseignements  par  sou  chargé 
de  mission,  M.  le  D*  Mamerto  Cadiz.  En  raison  de  la  morta- 
lité effrayante  causée  par  la  tuberculose,  on  a  projeté  de  créer 
au  Chili  îles  sanatoria  pour  le  traitement  de  cette  maladie. 
Comme  nous  l'avons  déjà  dit  dans  notre  chapitre  sur  la  morta- 
lité par  phtisie,  celte  petite  république,  avec  une  population 
d'à  peine  trois  millions  d'âmes,  a  perdu,  pendant  l'année  i  S  »  |  ."> , 
(i  6-~  sujets  par  la  phtisie  pulmonaire.  11  est  à  souhaiter  que 
des  lois  rigoureuses  et  des  règlements  hygiéniques  intelli- 
gents, combinés  avec  l'érection  de  sanatoria,  réussissent  à  ré- 
duire  cette  terrible  mortalité  d'une  façon  notable. 

Danemark.  —  En  Danemark  la  lutte  contre  la  tuberculose 
est  assez  énergique.  D'après  des  renseignements  que  je  dois  au 
Dr  Saugmann,  la  prophylaxie  se  l'ait  en  partie  par  le  gouver- 
nement, et  en  partie  par  l'initiative  privée.  Il  y  a  quelque 
temps,  une  petite  plaquette,  rédigée  par  MM.  Scheppelern, 
Traubneret  Saugmann,  de  la  Société  des  médecins  danois,  était 
répandue  à  profusion  dans  le  public.  Celle  circulaire  donne  une 
description  de  la  tuberculose  et  des  instructions  pour  éviter  la 
contagion.  Le  sujet  y  est  traité  de  telle  façon  que  tout  lecteur 
puisse  bien  comprendre  l'importance  de  la  prophylaxie  indivi- 
duelle : 

<(   i°  D'où  viennent  les  bacilles  tuberculeux  ? 

«  2°  Que  peut-on  faire  pour  diminuer  le  danger  de  la  matière 
contagieuse  tuberculeuse  ? 

«  3°  Tous  les  hommes  ont-ils  une  prédisposition  également 
grande  à  la  tuberculose  '.' 

«  4"  Peut-on  guérir  la  tuberculose  ?  » 

Telles  sont  les  diverses  questions  sur  lesquelles  l'attention 
du  public  est  appelée.  Au  Parlement,  le  ministère  a  présenti'' 
une  proposition  de  loi  sur  les  mesures  à  prendre  contre  la 
tuberculose  :  celles-ci  ne  concernent  que  la  désinfection 
gratuite  après  décès  :  le  Dr  Rôrdam,  député,  a  déposé  une 
autre  proposition  contenant  des  mesures  beaucoup  plus  elli- 
caces,  mais,  à  certains  égards  peut-être,  un  peu  trop  restric- 
tives pour  la  liberté  individuelle.  En  attendant,  dans  toutes  les 
voitures   de  tramways  à  Copenhague  et  dans  les  wagons  de 


ESPAGNE,  ÉTATS-UNIS  frj 

troisième  classe  des  chemins  de  fer  de  l'Etat,  on  a  dès  mainte- 
nant affiché  la  mention  :  Défense  de  cracher  sur  le  plancher. 

Sur  l'instigation  de  M.  Bang,  professeur  à  l'Ecole  vétérinaire 
de  Copenhague,  une  loi  du  i4  avril  1893  a  été  décrétée  par  le 
Parlement  et  ratifiée  par  le  roi,  sous  le  titre  :  Loi  concernant  la 
subvention  accordée  par  V  Etat  pour  combattre  la  tuberculose  du 
bétail.  Une  somme  de  70  000  francs  a  été  mise  annuellement, 
et  pendant  cinq  ans,  à  la  disposition  du  ministre  de  l'Intérieur, 
pour  venir  en  aide  aux  propriétaires  de  bestiaux  qui  désire- 
raient employer  la  tubereuline  ou  autres  moyens  de  diagnostic 
en  vue  de  combattre  la  tuberculose  parmi  le  bétail.  La  tuber- 
euline est  fournie  gratuitement  et  les  vétérinaires  sont  indem- 
nisés par  l'Etat  pour  effectuer  les  injections  et  surveiller  la 
température  avant  et  après  l'injection. 

Une  Société  sanitaire  pour  phtisiques  se  formait  en  1896  sous 
la  présidence  de  M.  le  professeur  Reiss  ;  on  construit  actuel- 
lement un  grand  sanatorium,  et  grâce  à  une  concession  de 
i3o  800  francs  fournie  par  l'État,  un  certain  nombre  de  lits 
sera  réservé  pour  les  phtisiques  pauvres. 

Espagne.  —  L'Espagne  a  compris  que,  pour  épargner  à 
ses  colonies  la  tuberculose  pulmonaire,  il  fallait  que  la  loi 
défendit  aux  tuberculeux  avérés  d'émigrer.  Je  n'ai  pu  avoir  de 
renseignements  au  point  de  vue  de  la  prophylaxie  contre  la 
tuberculose  bovine  ;  mais  j'ai  appris  qu'il  s'estproduit  dans  ces 
derniers  temps  un  mouvement  favorable  pour  créer  des  sana- 
toria,  et  pour  publier'  et  distribuer  des  instructions  publiques. 

Selon  la  «  Higiene  popular  »  de  septembre  1897,  la  revue 
madrilène  avait  déjà  donné  la  traduction  de  la  Circulaire 
adressée  aux  médecins  et  indiquant  les  moyens  adoptés  par  le 
Se/vice  de  santé,  dans  le  but  cl  éviter  la  propagation  de  la  tuber- 
culose pulmonaire  dans  la  ville  de  New-York,  dont  nous  don- 
nons copie,  page  69. 

États-Unis  d'Amérique.  —  Aux  États-Unis  nous  n'avons  pas 
de  Direction  générale  de  l'hygiène  publique.  Chaque  État, 
même  chaque  ville,  peut  user  de  son  initiative  au  point  de  vue 
de  la  prévention  des  maladies  ou  des  lois  ou  des  règlements 
d'hygiène  en  général. 


68  LOIS  SANITAIRES  ET  LUTTE  CONTRE  LA   TUBERCULOSE 

Ainsi  il  y  a  des  Elals  où  la  prophylaxie  de  la  phtisie  pulmo- 
naire chez  l'homme  est  des  plus  rigoureuses, presque  parfaite, 
et  il  en  existe  d'autres  où  les  lois  sanitaires  l'ont  absolument 
défaut.  Quelques  Elals  ont  pris  des  mesures  contre  la  pro- 
pagation de  la  tuberculose  chez,  les  bovidés,  niais  en  laissant 
de  côté  toutes  les  prévisions  contre  la  dissémination  de  la 
phtisie  pulmonaire  par  l'homme.  L'année  dernière,  j'ai  l'ail  une 
enquête  pour  savoir  où  en  est  la  question  de  la  prophy- 
laxie de  la  tuberculose  dans  les  divers  Etats  de  l'Union  (i). 
En  voici  le  résultat  :  quatorze  Etats  possèdent  tics  lois 
contre  la  tuberculose  des  bovidés,  et  distribuent  des  ins- 
tructions au  point  de  vue  de  la  phtisie  pulmonaire  chez 
l'homme  ;  ce  sont  :  Californie,  Colorado,  Connecticut,  Towa, 
Maine,  Massachusetts,  Miehigan,  New-Jersey,  New-Hamp- 
shire,  New-York,  Pensylvanie,  Rhode-Island,  Virginie  et 
Wisconsin.  Deux  Etats,  Minnesota  et  South-Dacota,  ont  seule- 
ment des  lois  contre  la  tuberculose  du  bétail,  Un  État,  le 
Tennessee,  a  voté  une  loi  contre  la  tuberculose  des  bovidés, 
mais  manque  de  fonds  pour  la  faire  exécuter.  Deux  Elals,  dis- 
trict de  Colombie  et  Oklahama-Territory,  n'ont  pas  de  lois  contre 
la  vente  du  lait  tuberculeux.  Huit  autres,  Delaware,  Indiana, 
Kentucky,  Louisiane,  Nouveau-Mexique,  Ohio,  Texas  et  West- 
Virginie,  répandent  des  circulaires  relatives  à  la  prophylaxie 
de  la  tuberculose  chez  l'homme,  mais  ne  l'ont  rien  contre  la 
tuberculose  bovine.  Neuf  Etals  n'ont  ni  lois  ni  règlements 
contre  la  propagation  de  la  tuberculose  chez,  l'homme  ou  les 
animaux  ;  ces  neuf  Elals  sont  :  Alabama,  Arkansas,  Illinois, 
Kansas.  Maryland,  Mississipi,  North-Caroline,  North-Dacota 
et  South-Caroline.  Et  pas  moins  île  sept  Elats  n'ont  pas  même 
de  bureau  de  santé;  ce  sont  :  Georgia,  Idaho,  Montana, 
Nebraska,  Oregon,  l'tah  et  Wyoming. 

J'ai  adressé,  en  outre,  des  lettres  aux  bureaux  de  santé  de 
quarante  de  nos  grandes  villes  :  trente  seulement  ont  pris  des 
mesures  pour  enrayer  le  fléau  de  la  tuberculose.  Aucun  com- 
mentaire n'est  nécessaire. 


in  S. -A  Knopf.  The  présent  slalus  of  préventive  means  against  Llie  spread 
oi  tuberculpsis  in  the  varions  States  ofthe  Union  critically  reviewed.  Journal 
of the  American  Médical  Association,  181.17.  Ju  octobre. 


ÉTATS-UNIS  69 

La  création  d'un  ministère  de  la  santé  publique  à  Washington 
avec  un  pouvoir  analogue  à  celui  de  la  «  Direction  de  l'hygiène 
publique  »  ou  du  «  Comité  consultatif  »  de  France  peut  seule 
l'aire  disparaître  ces  conditions  déplorables  (1).  Mais  le 
manque  d'énergie  montré  parles  gouvernements  des  Etats  indi- 
viduels est  quelquefois  heureusement  suppléé  par  le  bureau  de 
santé  de  quelques-unes  de  nos  grandes  villes  et  par  l'initia- 
tive  privée.  Comme  exemple,  je  veux  citer  New-York  : 

Je  me  suis  informé  en  personne  depuis  mon  retour  en  Amé- 
rique de  la  façon  dont  le  bureau  de  santé  de  la  ville  de  New- 
York  lutte  contre  le  fléau. 

Yoici  la  circulaire  principale  publiée  sur  les  conseils  de 
notre  maître  à  New-York,  M.  le  professeur  Biggs,  inspecteur 
en  chef  du  Laboratoire  municipal  de  pathologie,  bactériologie 
et  désinfection,  en  collaboration  avec  MM.  les  professeurs 
T.-M.  Prudden  et  H. -P.  Loomis.  Cette  circulaire  est  imprimée 
en  quatre  langues,  anglaise,  allemande,  italienne,  hébraïque, 
pour  quelle  puisse  être  lue  par  les  nombreux  émigrants  des 
divers  pays  : 

Service  de  santé. 
Instruction  pour  les  phtisiques  et  ceux  qui  vivent  avec  eux. 

La  phtisie  est  une  maladie  contagieuse  et  qui  n'est  pas  seulement  la 
suite  d  un  rhume.  Un  rhume  peut  augmenter  le  danger  d  infection.  La 
phtisie  est  causée  par  un  bacille  qui  pénètre  dans  l'organisme  avec  l'air 
inspiré.  Les  substances  que  les  phtisiques  éliminent  par  la  toux  ou  les 
crachats  contiennent  une  grande  quantité  de  ces  bacilles. 

C'est  par  millions  que  ces  organismes  sont  souvent  expectorés  en  une 
seule  journée.  Si  ces  crachats  sont  projetés  sur  le  parquet,  les  murs,  n'im- 
porte où,  ils  se  dessèchent,  tombent  en  poussière  et  sont  entraînés  sous 
l'orme  de  poussières  par  l'air  :  ces  poussières  contiennent  des  bacilles  et 
pénètrent  dans  le  corps  avec  l'air  inspiré.  L'haleine  d'un  phtisique  ne 
contient  pas  de  bacilles  et  ne  peut  pas  propager  la  maladie.  Une  personne 
saine  ne  peut  être  contagionnée  par  un  phtisique  que  si  elle  recueille 
dune  manière  quelconque  les  produits  expectorés  par  la  toux. 


(1)  S. -A.  Knopf.  Modem  Pi-opliylaxis  of  Pulmouary  Tuberculosis  and  ils 
treatmeut  in  spécial  institutions  and  at  home.  Alveranga-Prize  essar  of  Col- 
lège of 'Physiciens  of  Philadelphie!,  1898. 


■je  LOIS  SANITAIRES   ET  LUTTE  CONTRE  LA   TUBERCULOSE 

La  phtisie  peut  quelquefois  guérir,  quand  elle  a  été  reconnue  de  bonne 
heure  et  qu'on  l'a   traitée  par  des  remèdes  appropriés. 

Il  n'est  pas  dangereux  pour  une  personne  saine  de  vivre  avec  un  pliti- 
sique,  pourvu  que  les  substances  expectorées  par  ce  dernier  soient  immé- 
diatement détruites.  Ces  produits  ne  doivent  pas  être  projetés  sur  le  sol, 
les  murs,  les  tapis,  les  poêles,  les  trottoirs  ni  ailleurs,  mais  seulement 
dans  des  récipients  spécialement  réservés  à  cet  usage.  Ces  derniers 
doivent  contenir  de  l'eau,  aiin  que  les  crachats  ne  puissent  pas  sécher,  et 
leur  contenu  doit  être  jeté  tous  les  jours  dans  les  lieux  d'aisance  ;  les  réci- 
pients seront  soigneusement  lavés  à  l'eau  bouillante.  Le  phtisique  doit  veil- 
ler avec  le  plus  grand  soin  à  ce  que  ses  mains,  son  visage  et  ses  vêtements 
ne  soient  pas  souillés  par  les  crachats.  Si  cependant  cela  arrivait,  ce  qui  a 
été  sali  devrait  être  immédiatemment  savonné   .avec   de  l'eau  très  chaude. 

Quand  les  phtisiques  sortent  de  chez  eux,  les  substances  expectorées 
peuvent  être  recueillies  dans  un  linge  qui  sera  immédiatement  brûlé  au 
retour.  Si  l'on  emploie  des  mouchoirs  (des  linges  sans  valeur,  qui  peuvent 
être  brûlés,  sont  bien  préférables),  il  faut  les  faire  bouillir  séparément 
avant  de  les  laver. 

11  est  préférable  que  les  phtisiques  dorment  seuls.  Leur  linge  de  lit  et  de 
corps  doit  être  séparé  du  linge  d'autres  personnes  ;  il  doit  être  bouilli, 
puis  lavé. 

Dès  qu'une  personne  est  soupçonnée  d  être  tuberculeuse,  il  tant  en- 
voyer immédiatement  son  nom  et  son  adresse  au  Service  de  santé  en  di- 
sant de  quoi  il  s'agit;  un  médecin  inspecteur  du  Service  de  santé  exami- 
nera la  personne  au  point  de  vue  de  la  phtisie  (en  supposant  que  cette 
personne  n'ait  pas  de  médecin  attitré),  et,  si  cela  est  nécessaire,  il  avisera 
de  façon  à  préserver  les  gens  de  son  entourage. 

Souvent  alors,  on  verra  un  phtisique  non  seulement  continuer  ses 
occupations  quotidiennes,  mais  encore  guérir  complètement. 

Les  chambres  qui  ont  été  habitées  par  des  phtisiques  doivent  être 
sérieusement  nettoyées,  frottées,  blanchies,  on  tapissées  avant  d'être 
utilisées  de  nouveau.  Les  lapis,  les  couvertures  de  laine,  la  literie,  etc., 
qui  proviennent  de  chambres  ayant  été  habitées  par  des  phtisiques 
doivent   rire  désinfectés    avec  soin. 

Le  Service  de  santé  doit  être  prévenu  alin  que  les  objets  soient  gra- 
tuitement désinfectés  puis  renvoyés  à  leur  propriétaire,  à  moins  que  ce 
dernier  ne  manifeste  le  désir  qu'ils  soient  détruits. 

Des  circulaires  de  ce  genre  sont  envoyées  aux  médecins  pra- 
ticiens, avec  prière  de.  veiller  autant  que  possible  à  ce  que  les 
prescriptions  ci-dessus  soienl  exécutées. 

Toute  personne  ayant  connaissance  d'un  cas  de  tuberculose 


ETATS-UXIS 


7' 


pulmonaire  est  obligée,  sous  peine  d'être  punie  par  la  loi, 
d'envoyer  au  Service  de  santé  le  nom  du  malade,  son  âge  et 
son  domicile,  dans  les  sept  jours  à  partir  de  celui  où  ils  ont  eu 
connaissance  de  la  maladie.  Ce  sont  surtout  les  médecins,  les 
directeurs  d'hôpitaux,  d'asiles,  de  prisons,  d'écoles,  de  fabri- 
ques, etc.,  qui  sont  responsables  vis-à-vis  de  cette  loi. 

Les  médecins  inspecteurs  ont  le  devoir  de  s'informer  plus 
exactement  au  sujet  des  cas  de  tuberculose  qui  sont  annoncés, 
et  de  recueillir  des  produits  d'expectoration  pour  les  sou- 
mettre à  l'examen  bactériologique  ou  de  les  faire  recueillir  par 
les  médecins  des  malades. 

A  cet  effet,  il  est  distribué  gratuitement  aux  médecins  de 
petits  récipients  en  verre  avec  des  bouchons  à  l'émeri,  et  ren- 
fermés dans  des  petites  boîtes  en  bois,  sur  lesquelles  est  impri- 
mée l'adresse  du  Service  de  santé.  Chaque  petite  boite  est 
accompagnée  de  deux  bulletins.  L'un  des  deux  (schéma  I)  con- 
tient une  instruction  pour  recueillir  les  crachats  et  reste  entre 
les  mains  du  médecin.  Le  second  (schéma  II)  doit  être  rempli 
et  renvoyé  avec  la  boîte.  Les  matières  expectorées  sont 
remises  au  Service  de  santé,  afin  que,  se  basant  sur  leur 
examen,  on  puisse  porter  un  jugement  définitif  et  décider  s'il 
est  utile  ou  non  d'avoir  recours  aux  mesures  sanitaires.  Si  on 
ne  trouve  pas  de  bacilles  tuberculeux  clans  les  crachats  sus- 
pects, le  médecin  ordinaire  du  malade  reçoit  le  schéma  III  ; 
si  au  contraire  le  diagnostic  de  tuberculose  est  confirmé,  on  lui 
envoie  le  schéma  IV.  Et  dans  ce  cas,  si  le  médecin  ordinaire 
désire  que  la  famille  du  malade  soit  renseignée  par  un 
médecin  inspecteur  sur  ce  qui  concerne  la  désinfection  de  l'ap- 
partement ou  la  prophylaxie  en  général,  il  en  avertira  l'Adminis- 
tration. Si,  au  contraire,  le  médecin  de  la  famille  préfère  insti- 
tuer les  mesures  prophylactiques  lui-même,  sans  intervention 
du  Service  de  santé,  il  a  le  droit  de  le  faire. 

Schéma  I.  —  Service  de  santé 

Manière  de  recueillir  les  crachats  destinés  à  l'examen  bactériologique 
dans  les  cas  de  phtisie. 

Les  crachats  ne  doivent  être  recueillis  que  clans  des  récipients  à  large 
ouverture  et  bien  fermés.  Ces  derniers  peuvent  être  obtenus  gratuitement 


-Jl 


LOIS  SAMTAIRES  ET  LUTTE  CONTRE  LA    TUBERCULOSE 


dans  tous  les  dépôts  qui  ont  été  installés  dans  le    but  de   distribuer  îles 
tubes  à  l'usage  du  diagnostic  de  la  diphtérie, 

Il  faut  avoir  soin  de  recueillir  des  crachats  provenant  du  poumon,  et 
non  du  pharynx.  Les  expectorations  que  Ton  doit  préférer  aux  autres  sont 
celles  du  matin.  Si  elles  sont  peu  nombreuses,  il  faut  recueillir  toutes 
celles  qui  ont  été  rejetées  pendant  les  vingt-quatre  heures. 

Schéma  II.  —  Service  de  santé 

Crachats  provenant  d' un  malade  suspect  de  tuberculose.  — Nom 
de  l'expéditeur  de  l'échantillon. 

Les  crachats  envoyés  représentent  tout  ce  qui  a  été  expectoré  pendant... 

heures  du au Nom   du   malade Age Sexe Adresse 

Profession Médecin  habituel  ;   son  domicile Diagnostic  clinique 

Durée  de  la  maladie Étiologie  (source  probable  de  l'infection) 

Y  a-l-il  eu  dans  la  famille  d'autres  malades  tuberculeux? Com- 
bien?   Quels  rapports  ces  malades  ont-ils  eus  avec  le  patient  ? Date 

de  sa  dernière  maladie '.'... 

S  c  n  É  MA  III.  —  S  i:  i!  v  i  c  i:    DE  s  a  x  t  é 

Numéro  du  laboratoire Date... 

A  M.  le  D'-...., 

L'examen  des  crachats  de qui  a  eu  lieu  le n'a  pas  révélé  l'exis- 
tence de  bacilles. 

Mais  il  ne  faut  cependant  pas  conclure  de  ce  résultat  négatif  que  le  cas 
en  question  ne  soit  pas  un  cas  de  tuberculose  ;  car,  dans  le  cours  de  celle 
affection,  les  bacilles  disparaissent  de  temps  à  autre  des  crachats.  L'exis- 
tence d'une  tuberculose  pulmonaire  peut  être  éliminée  avec  probabilité 
quand  des  examens  bactériologiques  répétés  de  crachats  ont  été  négatifs. 
Si.  dan-  le  cas  en  question,  on  a  encore  à  l'avenir  quelque  doute  sur  la 
tuberculose  pulmonaire,  il  faudra  renvoyer  de  nouveaux  échantillons. 

Nous  insistons  encore  sur  ce  fait  que  la  présence  de  bacilles  tubercu- 
leux dans  les  crachats  suffit  pour  affirmer  le  diagnostic  de  tuberculose 
pulmonaire,  alors  <pi  au  contraire  1  absence  de  bacilles  ou  un  examen 
négatif  de  crachats  n'exclut  nullement  l'existence  de  cette  affection. 

S  C  II  É  M  A   IX .   —   S  E  It  V  I  C  E    D  E    S  A  N  T  É 

Numéro  du  laboratoire Date 

A  M.  le  D' 

L'examen  des  crachats  de qui  a  eu  lieu a  décelé  la  présence  de 

bacilles  tuberculeux. 


ÉTATS-UNIS  -j3 

La  maladie  est  donc  de  nature  tuberculeuse.  Si  vous  désirez  que  la 
famille  du  malade  soit  instruite  par  un  médecin  inspecteur  en  ce  qui  con- 
cerne la  désinfection  de  l'appartement  ou  la  prophylaxie  en  général, 
veuillez  en  avertir  l'Administration. 

(Signature  de  l'Expert.)  (Signature  du  Directeur.) 

Les  médecins  inspecteurs  ont  le  devoir  de  notifier  an  Service 
de  santé  les  habitations  de  tous  les  tuberculeux  morts  ou  démé- 
nagés, afin  qu'elles  soient  désinfectées.  En  vertu  de  cet  avis, 
l'Administration  envoie  au  propriétaire  de  l'immeuble  l'ordre  de 
désinfecter  et  de  remettre  l'appartement  à  neuf,  et  il  ne  devra 
être  loué  à  aucune  personne  autre  que  celles  qui  y  demeuraient 
avant  que  la  prescription  ci-dessus  ait  été  exécutée. 

En  même  temps,  on  pose  sur  la  porte  de  l'appartement 
infecté  le  placard  suivant  : 

SERVICE    DE    SAXTE 

Laphtisie  est  une  maladie  contagieuse.  Un  phtisique  a  demeuré  dans  cet 
appartement.  Il  faut  donc  le  considérer  comme  infecté.  Il  ne  doit  pas  être 
habité  par  des  personnes  étrangères  tant  que  l'ordre  du  Service  de  santé  de 
le  désinfecter  et  de  le  remettre  à  neuf  n'aura  pas  été  exécuté.  Ce  bulletin  ne 
doit  pas  être  enlevé   avant  que  la  prescription  ci-dessus  ait  été  remplie. 

Autant  que  possible,  il  faut  soigner  les  phtisiques  dans  des 
hôpitaux  spéciaux. 

Il  est  urgent  de  faire  désinfecter  de  temps  à  autre  par  une 
équipe  de  désinfection  les  lieux  particulièrement  exposés  aux 
bacilles  tuberculeux. 

Il  est  utile  d'établir  des  crachoirs  spéciaux  dans  les  endroits 
où  il  y  a  agglomération  d'individus,  en  particulier  dans  les 
restaurants,  les  fabriques,  etc. 

C'est  de  cette  façon  qu'on  lutte  à  New-York  depuis  octo- 
bre 1889,  et  avec  succès.  Dans  cette  ville,  en  effet,  la  mortalité 
par  tuberculose  était,  pour  1.000  habitants  : 

En  1884   De 4,45 

—  1886   — 4,42 

-  1888   - 3,99 

—  1890   — 3,97 

—  1892   —   3,55 

•   —  1894   — 3,i6 

—  1896   — 3,o6 


-\  LOIS  SANITAIRES  ET  LUTTE  CONTRE  l..\   TUBERCULOSE 

Mais  le  bureau  de  santé  n'est  pas  satisfait  de  ce.  résultat.  Jus- 
qu'au 19  janvier  1897  'a  maladie  n'a  pas  été  classée  parmi  les 
affections  contagieuses  :  on  l'appelait  jusque-là  une  maladie 
transniissible,  et  la  notification  de  l'existence  de  la  maladie 
dans  la  famille  privée  était  facultative  pour  le  médecin  traitant. 
Mais,  à  la  date  du  19  janvier  1 897.  la  tuberculose  pulmonaire 
était  déclarée  par  la  loi  maladie  infectieuse,  transniissible  et 
dangereuse  pour  la  santé  publique;  et  la  déclaration  de  la 
maladie,  de  même  que  pour  les  autres  affections  contagieuses, 
est  ainsi  rendue  obligatoire  pour  le  médecin  traitant.  Partout, 
sur  les  glaces  des  tramways,  des  chemins  de  fer  élevés  et  des 
steamers  publics  de  la  ville  de  New- York,  se  détache  l'inscrip- 
tion :  «  Il  est  expressément  défendu  de  cracher  sur  le  parquet.  » 

Dans  le  chapitre  sur  la  prophylaxie  publique  de  la  tubercu- 
lose humaine,  nous  dirons  notre  sentiment  au  sujet  d'une  loi 
qui  rend  la  déclaration  de  la  tuberculose  obligatoire  de  la  part 
du  médecin. 

Depuis  quelque  temps  la  ville  de  New-York  s'occupe  de 
créer  des  hôpitaux  spéciaux  pour  les  phtisiques  pauvres.  Le 
bureau  de  santé  reçoit,  depuis  le  i'*r  janvier  1898,  3ooooo  francs 
par  an  pour  isoler  provisoirement  dans  un  sanatorium  privé 
1rs  tuberculeux  les  plus  nécessiteux. 

Cet  exemple  est  suivi  par  beaucoup  de  villes  des  Etals-Unis, 
entre  autres  Philadelphie,  Boston,  Chicago,  Saint-Louis,  San- 
Francisco,  Denver,  etc.,  qui  font  des  efforts  héroïques  pour 
combattre  la  propagation  de  la  tuberculose. 

En  ce  qui  concerne  les  sanatoria  pour  le  traitement  des  phti- 
siques déjà  en  fonctionnement  aux  Etats-Unis,  nous  en  parle- 
rons dans  le  chapitre  Une  visite  aux  sanatoria,  et  nous  y  join- 
drons une  liste,  des  sanatoria  en  construction  ou  à  l'état  de 
projet. 

Avant  d'en  finir  avec  les  Etais  luis,  on  me  pardonnera  si  je 
mentionne  encore  la  Société  pour  la  prévention  de  la  tuber- 
culose de  l'État  de  Pensylvanie,  dont  j'ai  l'honneur  d'être 
vice-président.  Celte  Société  a  un  double  but  :  1"  encourager 
l'érection  de  sanatoria  pour  le  traitement  des  phtisiques  des 
classes  moyenne  et  pauvre  ;  2°  instruire  le  public  sur  la  vraie 
nature  de  la  tuberculose  et  les  moyens  d'éviter  la  contagion. 
Elle  publie  des  «  tracts  »  et  les  envoie  partout  dans  les  Etals- 


FRANCE  7". 

Unis  pour  y  être  distribués  gratuitement.  Voici  les  titres  de 
quatre  petites  plaquettes  qui  ont  été  distribuées  l'année  dernière, 
au  nombre  de  5o  ooo  chacune  : 

i°  Comment  on  peut  éviter  de  devenir  phtisique. 

1°  Comment  des  personnes  tuberculeuses  peuvent  éviter  de  donner  leur 
maladie  à  leurs  semblables. 

3°  Comment  les  propriétaires  des  hôtels  peuvent  aider  par  leurs  efforts 
individuels  à  la  prophylaxie  de  la  tuberculose. 

4°  Comment  les  propriétaires  de  magasins  et  les  fabricants  peuvent  se 
rendre  utiles  à  la  prophylaxie  de  la  phtisie. 

Chacune  de  ces  plaquettes  donne  en  plus  des  instructions 
sur  la  meilleure  méthode  pour  désinfecter  les  crachats  ou 
autres  substances  tuberculeuses.  Ces  brochures  sont  souvent 
copiées  par  d'autres  Sociétés  ou  ligues  analogues  dans  les 
États-Unis. 

Le  gouvernement-central  des  Etats-Unis  à  Washington  semble 
particulièrement  bien  disposé  à  aider  toutes  les  initiatives  pri- 
vées tendant  à  améliorer  le  sort  de  nos  tuberculeux  pauvres. 
Ainsi,  tout  récemment  160  acres,  situés  dant  l'Etat  du  Nouveau- 
Mexique,  ont  été  cédés  par  l'Administration  à  la  Société  des 
invalides  américains  de  Boston  (Massachusetts)  pour  y  ériger 
un  sanatorium  destiné  au  traitement  des  phtisiques  pauvres. 

France.  —  La  France  n'est  pas  non  plus  restée  en  retard 
pour  les  mesures  à  prendre  contre  la  tuberculose.  A  Paris,  la 
Commission  hospitalière  de  la  tuberculose  avait  recommandé 
un  certain  nombre  de  mesures  prophylactiques  concernant  les 
indigents  soignés  à  domicile. 

Tout  d'abord  M.  le  D1'  A.-J.  Martin,  inspecteur  général  de 
l'assainissement,  s'enquit  auprès  des  médecins  des  bureaux 
de  bienfaisance  du  nombre  de  tuberculeux  indigents  qu'ils 
considéraient  comme  devant  être  l'objet  de  ces  mesures. 
Une  enquête  immédiate  permit  d'évaluer  approximativement 
à  a  ooo  le  nombre  de  ces  indigents.  Aussi,  en  raison  de 
ce  chiffre  si  considérable,  fut-il  décidé  qu'un  essai  serait 
préalablement  tenté  dans  cinq  quartiers  différents,  au  domicile 
de  tuberculeux  désignés  par   les    médecins    eux-mêmes.    Cet 


;6  LOIS  SANITAIRES  ET  LUTTE  CONTRE  LA  TVRERCULOSE 

essai  a  porté  jusqu'ici  sur  i>o  malades,  dont  4y  sont  morts, 
12  ont  été  transportés  à  l'hôpital,  4  sont  partis  à  la  campagne  ; 
Il  y  a  eu  10  refus,  5  améliorations  et  io  son!  encore  en  cours 
de  traitement. 

Chez  ces  malades,  le  service  municipal  de  désinfection  a  fonc- 
tionné 707  ibis.  La  moyenne  de  ces  opérations  a  été  de  7  ou  8 
pour  chacun  d'eux.  Ilcu  est  pour  lesquels  il  est  intervenu  plus 
de  5o  t'ois,  à  raison  d'une  opération  régulière  chaque  semaine. 

Voici  les  résultais  obtenus  en  suivant  pas  à  pas  les  instruc- 
tions de  la  Commission  de  la  tuberculose  : 

i°  Deux  crachoirs  ont  été  remis  au  domicile  de  chacun  des 
malades.  Le  modèle  adopté  a  été  généralement  trouvé  trop 
lourd  et  ne  garantissant  pas  assez  les  doigts  contre  leur  souil- 
lure par  les  crachats.  Beaucoup  de  malades  l'ont  remplacé  par 
la  cuvette  ou  le  crachoir  émaillé.  Des  crachoirs  d'un  nouveau 
modèle,  répondant  à  toutes  ces  exigences,  sont  actuellement 
mis  en  usage. 

20  Le  crachoir  devait  être  pourvu  d'une  certaine  quantité  de 
liquide.  Celte  prescription  a  été  remplie  ;  mais  on  a  partout 
rejeté  l'emploi  de  l'acide  phénique  comme  dégageant  une 
odeur  pénible  pour  les  malades  et  leur  entourage.  C'est  sim- 
plement de  l'eau  (pie  le  crachoir  contenait  d'ordinaire. 

.'5°  Le  crachoir  devait  être  nettoyé  chaque  jour  en  le  mettant 
dans  de  l'eau  froide  portée  ensuite  à  l'ébullition.  Les  médecins 
ont  été  unanimes  pour  faire  vider  le  crachoir  dans  les  cabinets 
d'aisances,  seul  endroit  du  logement  suffisamment  aménagé 
pour  l?éloignement  rapide,  immédiat  et  complet  des  liquides 
et  des  objets  impurs.  Il  a  paru,  d'autre  part,  (pie  dans  de  tels 
logements  il  est  impossible  d'obtenir  le  nettoyage  du  crachoir 
à  l'eau  bouillie  ;  la  plupart  d\\  temps,  tous  les  ustensiles 
nécessaires  l'ont  défaut  et  pendant  la  plus  grande  partie  de 
l'année  il  est  même  impossible  d'y  avoir  du  l'eu. 

4°  Les  linges  salis  devaient  être,  à  la  maison,  plies  et  main- 
tenus pendant  cinq  minutes  dans  l'eau  bouillante.  Les  mêmes 
motifs  que  ci-dessus  ne  permettent  pas,  dans  les  neuf  dixièmes 
des  cas,  de  prendre  une  telle  précaution. 

>  A  défaut  de  celle-ci,  il  été  recommandé  de  mettre  soigneu- 
sement à  part  les  linges  salis  pour  les  livrer  au  service  muni- 
cipal tic  désinfection.  Il  été    ainsi  fait    sans  trop  de    difficulté, 


FRANCE  77 

sauf  dans  un  des  quartiers  de  Paris  où  le  linge  lui-même  man- 
quait aux  indigents  tuberculeux. 

6°  Après  décès,  ce  qui  a  été  le  cas  le  plus  général,  ou  après 
guérison,  le  service  de  désinfection  a  pu  pratiquer  la  désinfec- 
tion suivant  les  règles  habituelles,  sans  trop  de  difficultés. 

Ce  service  consistait  à  se  rendre,  au  moins  une  fois  chaque, 
semaine,  au  domicile  des  tuberculeux  désignés.  On  y  faisait 
échange  de  linges  désinfectés  contre  les  linges  souillés  qui 
étaient  emportés  et  on  procédait  au  nettoyage  antiseptique  des 
water-closets  et  des  vases  et  ustensiles  ayant  servi  au  malade. 
Certaines  de  ces  désinfections  ayant  été  faites  au  crésyl,  on  s'est 
plaint  de  l'odeur  qui  persistait;  il  est  facile  d'y  remédier. 

Mais  le  plus  grand  obstacle  à  la  pratique  de  la  désinfection, 
c'a  été  la  désignation  qui  en  résultait  pour  le  malade.  11  ne  tar- 
dait pas  à  être  considéré  comme  «  un  pestiféré  »,  et  même  il  est 
arrivé  qu'on  l'a  expulsé  de  son  domicile. 

Aussi,  en  fin  de  compte,  les  opérations  de  désinfection 
n'ont-elles  pu  être  régulièrement  appliquées  que  dans  un  peu 
plus  de  la  moitié  des  cas.  Il  en  a  été  de  même  pour  la  désin- 
fection après  décès. 

En  ce  qui  concerne  la  désinfection  régulière  des  salles  de 
consultation,  des  maisons  de  secours,  des  locaux  des  mairies 
oii  fréquentent  les  tuberculeux  indigents,  elle  a  été  faite  sans 
difficultés. 

De  même,  chaque  fois  qu'un  tuberculeux  a  été  admis  dans 
un  établissement  hospitalier,  le  service  de  désinfection,  informé 
téléphoniquement  de  son  adresse  par  l'administration  de 
l'Assistance  publique,  s'y  est  aussitôt  rendu.  Il  n'a  pas  toujours 
été  accepté,  et  cela  par  l'unique  raison  que  la  notion  de  la  trans- 
mission de  la  tuberculose  est  encore  très  loin  d'être  entrée 
dans  l'éducation  populaire  parisienne. 

Tels  qu'ils  sont,  ces  résultats  apparaissent  assez  encoura- 
geants pour  qu'à  la  demande  des  médecins  des  bureaux  de 
bienfaisance  et  sur  l'avis  conforme  de  la  Commission  de  la  tuber- 
culose, ces  mesures  soient  prochainement  appliquées  chez  un 
grand  nombre  d'indigents  tuberculeux,  par  les  soins  du  service 
municipal  de  désinfection  de  la  Ville  de  Paris,  d'accord  avec 
l'administration  de  l'Assistance  publique. 

A  la  séance  du  3  mai  1898  de  l'Académie  de  médecine,  M.  le 


-g  LOIS  SANITAIRES  ET  LUTTE  CONTRE  LA   TURERCVLOSE 

professeur  Gi'ancher,  au  nom  d'une  Commission  composée  de 
MM.  Théophile  Roussel,  président,  Bergeron,  vice-président, 
Besnier,  Brôuardel,  Colin,  Magnan,  Monod,  Motet,  Napias, 
Nocard,  Proust,  Roux,  Vallin  et  Grancher,  a  présenté  un  très 
remarquable  rapport  sur  la  prophylaxie  de  la  tuberculose. 

Nous  aurons  certainement  occasion  de  revenir  sur  cet  impor- 
tant travail  dont  voici  les  conclusions  générales,  soumises  au 
vote  de  l'Académie  : 

i°  L'Académie  confirme  le  sens  de  ses  conseils  et  de  son  vote 
de  1890  <[ui  visent  trois  mesures  de  prophylaxie  : 

a.  Recueillir  les  crachats  dans  un  crachoir  de  poche  ou  d'ap- 
partement contenant  un  peu  de  solution  phéniquée  à  5  p.  100 
et  colorée,  ou  au  moins  un  peu  d'eau. 

b.  Eviter  les  poussières  en  remplaçant  le  balayage  par  le  lavage 
au  linge  humide. 

c.  Faire  bouillir  le  lait,  quelle  qu'en  soit  la  provenance,  avant 
de  le  boire. 

20  En  ce  qui  concerne  la  famille,  l'Académie  recommande  aux 
médecins  l'application  soutenue  de  ces  mesures  de  défense  dès 
que  la  tuberculose  est  ouverte  ;  elle  leur  recommande  aussi  île 
maintenir,  si  possible,  la  tuberculose  pulmonaire  à  l'état  fermé, 
par  un  diagnostic  précoce  et  un  traitement  approprié. 

3°  Pour  Vannée,  l'Académie  demande  la  réforme  temporaire 
qui  convient  aux  tuberculeux  du  premier  degré  avant  l'expecto- 
ration bacillaire,  et  la  réforme  définitive  dés  que  les  crachats 
contiennent  le  bacille  de  Koch.  Et  elle  l'ait  appel  à  l'entente 
cordiale  du  commandement  et  du  service  de  santé  pour  l'appli- 
cation, dans  toutes  les  casernes,  des  trois  mesures  énoncées 
plus  haut. 

4°  L'école,  l'atelier,  le  magasin,  etc.,  relevant  de  l'instituteur, 
du  patron,  du  chef  d'industrie,  etc.,  l'Académie  ne  peut  que 
leur  rappeler  l'importance  de  cette  question  d'hygiène  et  la 
simplicité  des  moyens  qui  suffisent  à  combattre  efficacement 
l'extension  de  la  tuberculose  qui  menace  toutes  les  familles. 

5°  L'Académie  approuve  les  conclusions  du  travail  de  la 
Commission  hospitalière  en  ce  qui  concerne  les  malades  et 
l'hygiène  de  nos  hôpitaux,  à  savoir  : 

a.  Isolement  des  tuberculeux  dans  des  pavillons  ou  salles 
séparées,  en  attendant  la  création  de  nouveaux  sanatoria. 


FRANCE  79 

b.  Antisepsie  des  salles  de  tuberculeux  et  des  salles  com- 
munes, notamment  par  la  réfection  des  planchers  et  la  suppres- 
sion du  balayage. 

c.  Amélioration  du  corps  des  infirmiers  par  une  paye  plus 
haute,  un  meilleur  recrutement  et  une  retraite. 

d.  Création  d'un  corps  d'infirmiers  sanitaires. 

6°  L'Académie  approuve  enfin  les  restrictions  de  la  loi  en 
projet  et  des  arrêtés  nouveaux  concernant  la  chair  musculaire 
des  animaux  tuberculeux.  La  saisie  totale  et  la  destruction  de 
cette  chair  doivent  être  réservées  à  des  cas  assez  rares  de  tuber- 
culose généralisée  et  d'hecticité.  Elle  recommande  aux  culti- 
vateurs l'emploi  diagnostique  de  la  tuberculine,  et  l'élimina- 
tion, par  la  boucherie,  de  leurs  animaux  légèrement  tubercu- 
leux et,  partant,  inolTensifs. 

70  Enfin,  l'Académie^  voulant  marquer  l'intérêt  exceptionnel 
qu'elle  attache  à  la  continuité  de  son  action  en  faveur  de  la 
prophylaxie  delà  tuberculose,  a  créé  une  nouvelle  commission 
permanente  dite  Commission  de  la  prophylaxie  de  la  tubercu- 
lose, qui  aura  pour  objet  d'encourager  et  de  coordonner  tous 
les  efforts  contre  l'envahissement  du  bacille  tuberculeux. 

Les  renseignements  que  j'ai  recueillis  sur  les  lois  et  règle- 
ments sanitaires  institués  dans  les  principles  stations  hiver- 
nales de  France  sont  assez  complets  et  intéressants  pour  être 
reproduits  ici. 

Voici  les  réponses  que  j'ai  reçues  des  stations  hivernales  les 
plus  connues  : 


MAIRIE    DE    XICE  (  AL  I>  E  S  -  M  A  II  I  T  I  M  E  s) 

Service  d'hygiène  et  de  salubrité. 

Kice,  le  27  février  1890. 
Monsieur, 

L'arrêté  municipal  du  17  juin  1892  avait  prescrit  la  déclaration  de 
diverses  maladies,  notamment  la  phtisie.  La  loi  du  3o  novembre  1892  a 
rendu  cet  arrêt  caduc,  et  les  cas  de  tuberculose  ne  sont  pas  déclarés. 
Mais  les  articles  relatifs  à  la  désinfection  sont  restés  en  vigueur  ;  seule- 
ment ces  désinfections  n'ont  lieu  qu'après  le  décès. 


80  LOIS  SAXITAIRES  et  lutte  contre  la  tuberculose 

Il  esl  clair  que  la  prophylaxie  se  trouve  ainsi  bien  réduite,  mais  un 
arrêté  municipal  ne  peut  pas  renchérir  sur  une  loi. 

Je  ne  sache  pas  que  les  hôtels  et  les  maisons  meublées,  du  moins  en 
général,  prennent  tics  mesures  quand  un  phtisique  s'en  va.  Ce  n'est  que 
par  exception  que  la  désinfection  esl  pratiquée.  En  revanche,  bien  > li- 
personnes,  avant  d'occuper  un  appartement,  le  font  désinfecter  par  le 
bureau  d'hygiène,  opération  qui  se  fait  gratuitement. 

Il  est  de  notoriété  publique  que  Nice,  et  surtout  Menton,  ont  vu  aug- 
menter dans  une  proportion  ('■norme  le  nombre  de  leurs  tuberculeux 
depuis  ipie  les  phtisiques  ont  fréquenté  ces  stations. 

1)'  Balestre. 


Voici  l'arrêté  municipal  dit  17  juin  iStja  : 

M  A  1  II  1  E    L)  E    >  1  1:  E 

Arrêté  municipal  prescrivant  des  mesures  prophylactiques  contre  les  mala- 
dies contagieuses,  transmissibles  et  épidémiques. 

I.e  Maire  Je  la  \  ille  de  Nice,  Chevalier  de  la  Légion  d'honneur; 

\  11  la  loi  du  j  avril  i88.'|,  article  y-,  §6; 

\u  l'article  171.  §  ù  du  Code  pénal  ; 

\  u  le  rapport  du  Directeur  du  Bureau  municipal  d'hygiène  : 

Considérant  que  les  maladies  contagieuses,  transmissibles  et  épidémi- 
ques font  annuellement  des  victimes  dont  le  nombre  peut  être  diminué 
par  1  observation  des  règles  <!  hygiène; 

Considérant  qu'il  esl  du  devoir  de  l'Administration  municipale  de 
prendre  les  mesures  nécessaires  pour  empêcher  le  développement  de  ces 
maladies  el  préserver  la  vie  el  la  santé  des  citoyens  : 

A  u  11 1'.  1  r.  : 

ARTICLE  PREMIER.  —  Les    parents   ou   logeurs    ayant    garde    île  malades 

atteints  d  affections  contagieuses,  infectieuses,  transmissibles  et  épidé- 
miques, telles  que  :  la  fièvre  typhoïde,  le  typhus,  le  scorbut,  la  variole,  la 
-  la  scarlatine,  la  coqueluche,  la  diphtérie,  croup  ou  angine  couen- 
nçuse,  la  phtisie,  la.  suette  miliuire,  le  choléra  asiatique  ou  nostras,  la  fièvre 
•  ■[  les  maladies  puerpérales,  sont  tenus  d'en  taire  la  déclaration  a  la  Mai- 
rie (bureau  d'hygiène)  ou  au  Commissariat  de  police  de  leur  quartier, 
dans  le  plu-  brel  délai. 

Art.  -i.  —  Les  habitants  de  la  même  maison  ou  les  voisins  sont  invités, 


FRA.XCE  Si 

à  défaut  de  la  déclaration  des  familles,  à  en  donner  avis  à  la  Mairie  ou  au 
Commissariat. 

Une  boîte  aux  lettres,  portant  l'inscription  du  Bureau  municipal 
d  hygiène,  sera  placée  à  l'Hôtel  de  Ville,  au  pied  du  grand  escalier,  à  l'ef- 
fet de  recevoir,  en  dehors  des  heures  de  bureau,  les  déclarations  écrites, 
prescrites  aux  articles  précédents.  Cette  déclaration  devra  porter  le  nom 
et  l'adresse  précis  du  cas  connu. 

Art.  3.  —  Dès  qu'un  cas  de  maladie  transmissible,  prévu  à  l'article  ier, 
est  porté  à  la  connaissance  du  Commissaire  de  police  du  quartier,  ce 
fonctionnaire  devra  en  faire  prévenir  immédiatement  le  Bureau  municipal 
d'hygiène  par  les  voies  les  plus  rapides. 

Art.  4-  —  Les  familles  dans  lesquelles  sera  soigné  un  malade  atteint 
d'une  desdites  maladies  devront  prendre  des  mesures  de  désinfection 
reconnues  efficaces  pour  les  personnes,  les  vêtements,  les  objets  de  lite- 
rie, les  meubles  et  les  locaux  d  habitation. 

Dans  le  cours  de  la  maladie,  tous  les  linges  de  corps  et  de  toilette  ou 
autres  ayant  servi  et  qui  viendraient  à  être  échangés  seront  immédiate- 
ment désinfectés  sur  place,  puis  mis  de  côté  et  envoyés  à  l'étuve  à  désin- 
fection sous  pression  avant  d'être  remis  au  lavage  et  au  blanchissage  (i). 

Il  est  expressément  recommandé  de  désinfecter  les  déjections  des 
malades  contagieux,  en  particulier  celles  des  typhoïdes  et  cholériques, 
avant  leur  déversement  dans  les  cabinets  d'aisance. 

A  la  fin  de  la  maladie,  c'est-à-dire  après  guérison  ou  décès,  il  sera 
procédé  à  une  désinfection  complète. 

Les  linges  de  corps,  de  toilette,  les  objets  de  literie  :  matelas,  oreil- 
lers, traversins,  les  rideaux,  tentures,  tapis,  en  un  mot  tout  objet  mobi- 
lier qui  aura  servi  au  malade  ou  au  décédé,  qui  se  trouve  dans  la  chambre 
par  lui  occupée  et  qui  est  susceptible  d'être  désinfecté  par  l'étuve  sous 
pression,  y  sera  envoyé.  L'appartement  lui-même  sera  désinfecté  sous  la 
surveillance  de  l'Autorité  municipale.  La  fosse  de  la  maison  sera  immé- 
diatement désinfectée  sous  la  surveillance  des  agents  de  l'Autorité. 

Art.  ">.  —  L'Administration  municipale  (bureau  d'hygiène)  fournira  tous 
les  renseignements  et  mettra  son  service  de  désinfection  à  la  disposition 
des  intéressés  mojTennant  une  rétribution  basée  sur  le  tarif  en  vigueur. 

La  désinfection  sera  pratiquée  gratuitement,  dans  les  familles  qui  ne 
pourront  en  faire  les  frais,  par  le  Bureau  municipal  d'hygiène,  soit  sur 
la  présentation  d  un  certificat  d'indigence  délivré  par  le  Commissaire  de 
police  du  quartier,  soit  sur  la  présentation  de  la  carte  d'admission  à  l'As- 
sistance publique  délivrée  par  l'autorité  municipale. 


(i)  Celte   étuve    existe   à  l'hôpital    civil    de    Nice,  et  est  à  la  disposition  du 
public . 

Knopf.  Sanatoria.  <> 


8-2  LOIS  SANITAIRES  ET  LUTTE  CONTRE  LA   TVBERCOLOSE 

Art.  G.  — ■  Les  désinfections  seront  toujours  pratiquées  sous  la  sur- 
veillance d'un  agent  du  Bureau  municipal  d'hygiène,  afin  d'en  assurer 
l'efficacité  et  la  parfaite  exécution. 

Aux.  -.  —  11  est  interdit  aux  personnes  qui  ont  chez  elles  un  malade 
atteint  de  maladie  contagieuse  ou  transmissible,  de  secouer  par  les 
fenêtres  ou  dans  l'escalier  ou  la  cour  de  la  maison  qu'elles  habitent,  des 
tapis,  vêtements,  etc. 

Les  poussières,  les  balayures  provenant  de  l'appartement  occupé  par 
un  malade  contagieux  ne  pourront  être  descendues  sur  la  voie  publique 
sous  aucun  prétexte,  mais  seront  brûlées  dans  un  foyer  dans  l'apparte- 
ment même. 

Art.  8.  —  Il  est  expressément  interdit  de  donner,  de  vendre  ou  de 
livrer  à  des  blanchisseuses,  et  il  est  prohibé  à  celles-ci  de  recevoir  un 
objet  quelconque  de  literie,  vêtement,  tenture  ou  autre  provenant  de 
personnes  avant  été  atteintes  de  maladie  contagieuse,  sans  que  ces  objets 
aient  été  préalablement  désinfectés  par  les  moyens  prescrits  par  les  délé- 
gués de  l'autorité. 

Il  est  également  interdit  de  porter  ces  objets  dans  les  lavoirs  publics 
ou  privés  avant  qu'ils  aient  subi  la  désinfection. 

Art.  9.  —  Les  voitures  de  toute  nature  amenant  des  malades  à  l'hôpital 
devront  entrer  dans  la  cour  intérieure  de  cet  établissement  où  seulement 
les  malades  seront  descendus. 

Lesdites  voilures  ne  pourront  repartir  qu'après  qu'il  leur  aura  été 
délivré,  par  l'interne  de  garde,  un  bulletin  indiquant  que  les  malades 
transportés  ne  sont  pas  atteints  de  maladie  contagieuse  ou  transmissible. 
Ce  bulletin  devra  être  remis  par  le  conducteur  de  la  voiture  au  concierge 
de  l'établissement,  qui  le  fera  immédiatement  parvenir  au  Bureau  d'hy- 
giène. 

Art.  io.  —  Tout  conducteur  de  voiture  qui  aura  transporté  des  per- 
sonnes atteintes  de  maladie  contagieuse  devra  faire  soumettre  sa  voiture  à 
une  désinfection  immédiate  et  complète  par  les  soins  ou  sous  la  surveil- 
lance d'un  agent  du  Bureau  municipal  d'hygiène. 

Art.  ii.  —  La  déclaration  des  décès  survenus  à  la  suite  d'une  maladie 
contagieuse  ou  transmissible  doit  être  faite  sans  délai  à  la  Mairie. 

Les  corps  seront  le  plus  promptement  possible  placés  dans  un  cercueil 
étanche,  goudronné  et   contenant  une  épaisseur  de   5  à  (i  centimètres  de 
poudre  de  charbon  de  bois,  arrosée  d'une  solution  désinfectante. 
Ils  seront  recouverts  d'un  linceul  imbibé  du  même  liquide. 
L'inhumation  aura  lieu  dans  le  plus  court  délai. 

Art.  12.  —  Des  instructions  concernant  les  soins  préventifs  à  prendre 
contre  les  maladies  contagieuses  seront  distribuées  au  public,  à  la  Mairie. 
au  Bureau  d'hygiène  et  au  Bureau  de  l'état  civil. 


FRANCE  8  3 

Aut.  i3.  —  Il  est  enjoint  aux  hôteliers  et  logeurs  en  garai,  et  cela  sous 
peine  de  poursuites,  de  tenir  dans  leur  établissement,  dans  un  endroit  des 
plus  apparents,  de  manière  à  être  facilement  consulté  par  leur  clientèle,  un 
exemplaire  du  présent  arrêté. 

Art.  i  '(.  —  Les  personnes  qui  n'auront  pas  fait  les  déclarations  ci- 
dessus  prescrites  ou  qui  auront  commis  quelques  infractions  aux  disposi- 
tions du  présent  arrêté,  seront  l'objet  de  procès-verbaux  de  contraven- 
tions, sans  préjudice  des  mesures  que  l'autorité  locale  croirait  devoir 
prendre  ou  prescrire  dans  l'intérêt  de  la  santé  publique  et  des  responsabi- 
lités civiles  qu'elles  peuvent  encourir  par  le  fait  de  leur  négligence. 

Art.  i  j.  —  Le  Commissaire  central  de  police,  le  Directeur  du  Bureau 
municipal  d  hygiène,  sont  chargés,  chacun  en  ce  qui  le  concerne,  de  l'exé- 
cution du  présent  arrêté,  qui  sera  publié  et  affiché  dès  qu'il  aura  reçu 
l'approbation  de  M.  le  Préfet. 

T'ait  à  Nice,  le   17  juin   1892. 

Le  Maire, 
Comte  de  MalAUSSEXA.  Vu  :  Nice,  le   i«  juillet  1892. 

Pour  le  Préfet  : 

Le  Secrétaire  général  délégué, 
Signé  :  Laugier. 

Lettre  du  D1'  Hameau,  médecin  consultant  à  Arcachon. 

Monsieur, 

Je  vous  adresse  une  circulaire  imprimée  qui  fut  distribuée  en  1891  aux 
hôteliers  et  propriétaires  de  maisons  meublées,  par  le  maire  d' Arcachon. 

Depuis,  d'autres  avis  ont  été  envoyés  sur  la  demande  des  médecins,  et 
tous  les  logeurs  savent  que -leurs  maisons  seraient  mises  moralement  en 
interdit  s'ils  ne  s'y  conformaient  pas.  Depuis  trois  ans,  une  étuve  de  dé- 
sinfection de  Geneste  et  Herscher  fonctionne  sous  la  surveillance  et  le 
tarif  de  la  mairie. 

Personne  ne  se  soustrait  maintenant  aux  obligations  de  la  désinfection 
méthodique. 

Pratiquement,  d'ailleurs,  la  chose  est  plus  facile  qu'on  ne  l'aurait  pu 
croire,  parce  que  les  frais  sont  supportés  par  les  locataires.  En  sorte  que 
les  hôteliers  et  les  agents  de  location  n'ont  aucun  motif  pour  éluder  une 
prescription  qui  ne  leur  coûte  rien,  au  contraire  ! 

A  défaut  de  la  loi  qui  rendra  les  mesures  de  désinfection  obligatoires, 
l'unanime  pression  du  Corps  médical  d'Arcachon  les  a  fait  entrer  immé- 
diatement dans  les  mœurs  de  la  population. 

Signé  :  Dr  Hameau. 


,S|  LOIS  SANITAIRES  ET  LUTTE  CONTRE  LA   TUBERCULOSE 

Voici  l'instruction  pour  la  désinfection  des  locaux  dans  les- 
quels ont  séjourné  ou  sont  décédées  des  personnes  atteintes 
de  maladies  contagieuses. 

Instruction  pour  lu   désinfection  des  locaux  dans  lesquels    ont  séjourne  ou 
sont  décédées  des  personnes  atteintes  de  maladies  contagieuses. 

i°  Enlever  toute  la  literie,  les  rideaux,  tentures  et  tapis  de  la  chambre, 
et  les  faire  passer  à  l'étuve  sous  pression  (  i). 

■i"  Essuyer  soigneusement  tous  les  meubles  ;  puis  en  frotter  le  bois 
avec  un  linge  bien  imbibé  d'une  solution  de  sublimé  à  i  p.  iooo.  Le  dénu- 
des armoires,  les  corniches,  le  dos  des  cadres,  et  toutes  les  saillies  des 
moulures  seront  l'objet  d'une  attention  spéciale. 

!"  Lessiver  à  l'eau  bouillante  le  parquet  et  toutes  les  boiseries  (portes, 
fenêtres,  plinthes,  etc.),  et  les  laver  ensuite  largement  avec  la  même  solu- 
tion de  sublimé. 

î"  Tous  les  meubles  étant  laissés  dans  l'appartement,  le  fermer  hermé- 
tiquement et  y  faire  brûler  du  soufre,  à  raison  de  5o  grammes  par  mètre 
cube.  —  Ouvrir  seulement  après  vingt-quatre  heures  et  laisser  toutes  les 
issues  extérieures  largement  ouvertes  pendant  quarante-huit  heures  au 
moins.  — ■  Ne  pas  oublier  d'ailleurs  que  l'air  et  la  lumière  sont  d'excellents 
adjuvants  de  désinfection. 

5°  Repeindre  après  cela  ou  revernir  toutes  les  boiseries  de  la  pièce 
désinfectée,  cirer  les  meubles  à  l'encaustique  ou,  s'ils  sont  vernis,  les 
oindre  extérieurement  et  intérieurement  avec  un  mélange  désinfectant  tel 
que  celui-ci  : 

Huile  de  lin 100  grammes  ; 

Bichlorure    hydrargyrique.   ...         o  gr.    10  centigr. 
Alcool Q.  S. 

6°  Brûler  toutes  les  choses  qu'il  n'est  pas  nécessaire  de  conserver  et 
notamment  les  papiers  enlevés  des  murs,  les  jouets  et  autres  menus  objets. 

Lettre  de  M.  le  D1'  Bouloumié,  médecin  consultant  à  Mande- 
liez,  prés  Cannes. 

Monsieur, 
Je  me  suis  informé  auprès  de  mes  confrères  de  Cannes  et  au  secrétariat 


ge 


néral  de  la  mairie. 


|i)  La  vapeur  sous  pression  de  cette  étuve  doit  avoir  iao  degrés  centigr.  de 
chaleur.  Elle  exi^e  une  installation  spéciale  et  l'Administration  s'occupe  de  la 
faire  établir  à  Arcachon. 


FRANCE  8~> 

Voici  le  résultat  de  mes  informations  ; 

i°  Il  n'y  a  pas  de  règlements  sanitaires  spéciaux; 

2°  On  n'a  pu  à  la  mairie  me  donner  aucun  imprimé  ou  autographie  con- 
cernant les  mesures  d'hygiène  à  prendre  dans  les  divers  cas; 

3°  A  la  mairie,  on  m'a  assuré  que  le  maire  était  plein  de  sollicitude 
pour  tout  ce  qui  intéresse  l'hygiène  et  veillait  au  bon  fonctionnement  de 
l'escouade  de  désinfection  municipale  ; 

4°  Il  y  a  une  escouade  de  désinfecteurs  munis  d'une  pompe  à  pulvérisa- 
tion de  Geneste  et  Herscher. 

Ces  désinfecteurs  se  rendent  aux  domiciles  indiqués,  pulvérisent  du 
bichlorure  sur  les  meubles,  la  literie,  les  parois  de  la  pièce,  et  dans  cer- 
tains cas  brûlent  certains  objets  d'habillement  ou  de  literie. 

Dans  les  hôtels  et  villas  on  ne  fait  pas  de  désinfection  systématique  : 
on  la  pratique  généralement  par  les  deux  moyens  ci-dessus  quand  il  y  a 
eu  un  décès,  un  cas  grave,  une  maladie  contagieuse  aiguë  ;  mais  ce  n'est 
pas  formellement  réglementé  et  appliqué. 

De  plus,  rien  ne  renseigne  le  public  sur  les  établissements  pratiquant 
la  désinfection.  C'est  donc  au  hasard  que  s'installe  le  locataire. 

En  automne,  avant  la  saison,  annuellement  dans  les  établissements  bien 
tenus,  les  tapis  sont  généralement  levés  et  battus,  mais  le  plus  souvent  ils 
le  sont  dans  la  cour  même  ou  le  jardin  des  hôtels. 

Il  y  a,  vous  le  voyez,  quelque  chose  d  ébauché,  mais  rien  de  suffisant  ; 
il  faut,  là  comme  ailleurs,  en  arriver  à  ce  que  l'intérêt  oblige  les  proprié- 
taires ou  gérants  d'hôtels  et  de  villas  meublées  à  désinfecter  régulièrement, 
et  pour  cela  qu'il  soit  délivré  un  certificat  de  salubrité  qui  sera  affiché. 
(Voir  ma  communication  à  ce  sujet  dans  les  Bulletins  de  la  Société  de 
Médecine  publique  et  d'Hygiène.) 

Signé  :  Dr  Bouloumié. 


Pau,  le  aG  avril  1 895. 


Ville  de  Pau 
Bureau  municipal  d'hygiène. 


Monsieur. 


Je  m'empresse  de  vous  faire  connaître  qu'il  est  de  règle  à  Pau  que  tout 
propriétaire  ou  habitant,  pour  avoir  le  droit  d'exhiber  un  écriteau  de 
patente  nette  de  location,  doit  se  soumettre  aux  pratiques  de  la  désinfec- 
tion par  les  appareils  Geneste  et  Herscher,  chaque  fois  que  cela  est 
reconnu  nécessaire. 


86  LOIS  SANITAIRES  ET  LUTTE  CONTRE  LA   TUBERCULOSE 

A  cel  effet,  il  est  détenteur  d'un  livret  sur  lequel  le  médecin  inscrit  la 
nécessité  de  cette  désinfection.  Un  inspecteur  de  police  est  spécialemenl 
chargé  de  la  surveillance  de  ce  service.  Les  désinfections  sont  faites  par 
les  soins  el  sous  la  surveillance  du  bureau  d'hygiène. 

Signé  :  Dr  BarthÉ. 

Contre  la  tuberculose  bovine  on  agit  plus  énergiquement 
en  France  que  contre  la  tuberculose  humaine.  Il  faut  rendre 
ici  hommage  au  distingué  professeur  Nocard  et  aux  efforts  per- 
sévérants avec  lesquels  il  a  mené  la  campagne  qu'il  a  entre- 
prise clans  le  but  d'extirper  la  tuberculose  des  grandes  agglo- 
mérations d'animaux  de  la  race  bovine  en  France. 

Sur  l'avis  de  l'Académie  de  médecine,  sanction  légale  a  été 
donnée  à  l'emploi  de  la  tuberculine  comme  moyen  île  dia- 
gnostic de  la  tuberculose  bovine.  Ou  accorde  aux  cultivateurs 
des  indemnités,  variant  de  la  moitié  aux  deux  tiers  de  la  valeur 
de  la  viande,  dans  les  cas  d'abattage  pour  cause  de  tuberculose, 
lorsque  l'animal  a  été  soumis  à  l'épreuve  de  la  tuberculine. 

Le  ministre  de  l'agriculture  a  également  donné  connaissance 
à  la  Commission  des  épizooties  d'un  projet  de  décret  régle- 
mentant les  dispositions  à  prendre-  pour  empêcher  la  propa- 
gation de  la  tuberculose  par  le  bétail  d'espèce  bovine  provenant 
de  l'étranger.  Le  principe  de  ce  décret  a  été  approuvé  par  la 
Commission  permanente  du  Conseil  supérieur  de  l'agricul- 
ture. 

En  conséquence,  le  ministre  de  l'agriculture  a  rendu,  en 
date  du  i4  mars  1896,  un  décret  en  vertu  duquel  les  animaux 
de  l'espèce  bovine  venant  de  l'étranger,  présentés  à  l'impor- 
tation en  France,  sont  soumis  à  l'épreuve  de  la  tuberculine 
el,  à  cel  effet,  sont  placés  en  observation  à  la  frontière,  aux 
frais  des  importateurs  ,  pendant  quarante-huit  heures  au 
moins.  Ceux  qui  présentent  à  celle  épreuve  les  réactions  carac- 
téristiques de  la  tuberculose  sont  reroulés  après  avoir  été 
marqués,  à  moins  que  l'importateur  ne  consente  à  ce  qu'ils 
soient  immédiatement  abattus.  Dans  ce  cas,  l'abattage  a  lieu 
sur  place,  sous  la  surveillance  du  vétérinaire  inspecteur  attaché 
au  bureau  de  douane  au  point  d'introduction. 

Sont  exempts  de  l'épreuve  de  la  tuberculine  les  animaux  de 
l'espèce  bovine  qui  sont  déclarés  pour  la   boucherie.  Ces  ani- 


FRANCE  87 

maux  ne  sont  admis  qu'à  destination  des  marchés  des  localités 
où  il  existe  un  abattoir  public.  Ils  sont  marqués,  et  le  laisser- 
passer  mentionne  la  localité  de  destination.  Ce  laisser-passer 
est  renvoyé  dans  les  quinze  jours  de  sa  date,  au  vétérinaire 
inspecteur  qui  l'a  délivré,  avec  un  certificat  d'abattage  émanant 
du  vétérinaire  préposé  à  la  surveillance  de  l'abattoir  où  les  ani- 
maux ont  été  sacrifiés.  Dans  le  cas  où  les  animaux  ne  seraient 
pas  tous  abattus  dans  la  localité  déclarée  au  moment  de  l'en- 
trée en  France,  la  réexpédition  ne  pourra  avoir  lieu  qu'avec 
un  laisser-passer  délivré  par  le  maire  de  ladite  localité,  et  à 
destination  d'autres  localités  également  pourvues  d'un  abattoir 
public.  La  justification  de  l'abattage  de  ces  animaux  devra  être 
fournie  dans  la  l'orme  et  le  délai  indiqués  au  paragraphe  pré- 
cédent. 

L'arrêté  ministériel  en  ce  qui  concerne  la  viande  tuberculeuse 
est  ainsi  conçu  : 

Article  premier.  —  L'article  XI  de  l'arrêté  ministériel  du  28  juil- 
let 1888  est  modifié  ainsi  qu  il  suit  : 

Les  viandes  provenant  d'animaux  tuberculeux  sont  saisies  et  exclues  en 
totalité  ou  en  partie  de  la  consommation  suivant  la  nature  et  l'étendue  des 
lésions  constatées,  ainsi  qu'il  est  ci-dessous  déterminé. 

Elles  sont  saisies  et  exclues  en  totalité  de  la  consommation  : 

i°  Quand  les  lésions  tuberculeuses,  quelle  que  soit  leur  importance, 
sont  accompagnées  de  maigreur  ; 

'i°  Quand  il  existe  des  tubercules  dans  les  muscles  ou  dans  les  ganglions 
intra-musculaires  ; 

3°  Quand  la  généralisation  de  la  tuberculose  se  traduit  par  des  éruptions 
miliaires  de  tous  les  parenchymes  et  notamment  de  la  rate  ; 

4°  Quand  il  existe  des  lésions  tuberculeuses  importantes  à  la  fois  sur 
les  organes  de  la  cavité  thoracique  et  sur  ceux  de  la  cavité  abdominale. 

Elles  ne  sont  saisies  et  exclues  qu'en  partie  de  la  consommation  : 

i°  Quand  la  tuberculose  est  localisée  soit  à  la  cavité  thoracique,  soit  à 
la  cavité  abdominale  ; 

20  Quand  les  lésions  tuberculeuses,  bien  qu'existant  à  la  fois  dans  la 
cavité  thoracique  et  la  cavité  abdominale,  sont  peu  étendues. 

La  saisie  et  l'exclusion  de  la  consommation  ne  portent  dans  ce  cas  que 
sur  les  portions  de  viande  (parois  abdomidales  ou  costales)  qui  sont  direc- 
tement en  contact  avec  les  parties  malades  de  la  plèvre  ou  du  péritoine. 

Dans  tous  les  cas  les  organes  tuberculeux  sont  saisis  et  détruits,  quelle 
que  soit  l'étendue  de  la  lésion. 


88  LOIS  SANITAIRES  ET  LUTTE  CONTRE  LA   TUBERCULOSE 

Toutefois  les  viandes  suffisamment  grasses  peuvent  être  remises  au 
propriétaire  après  stérilisation  prolongée  pendant  une  heure  au  moins 
soil  dans  l'eau  bouillante,  soit  dans  la  vapeur  sons  pression  ;  mais  la  sté- 
rilisation ne  pourra  avoir  lieu  qu'a  l'abattoir  sons  le  contrôle  du  vétéri- 
naire inspecteur. 

Art.  i.  —  Les  préfets  des  départements  sont  chargés,  chacun  en  ce  qui 
le  concerne,  de  l'exécution  du  présent  arrêté. 

Fait  à  Paris,  le  '28  septembre  1896. 

.Iules   MÉL1NE. 


Si  jusqu'à  présent,  on  n'a  l'ait  que  liés  peu  tic  chose  on  o-éné- 
ral  pour  les  tuberculeux  adultes,  notamment  au  point  de  vue 
de  leur  traitement  dans  des  établissements  fermés  ou  de  leur 
isolement  dans  des  hôpitaux  spéciaux,  il  faut  reconnaître 
qu'en  France  les  enfants  tuberculeux  ont  été  l'objet  d'une 
attention  spéciale. 

Comme  la  liste  jointe  à  ce  travail  sur  les  sanatoria  nous  l'en- 
seigne, il  y  a  plus  d'établissements  pour  traiter  les  enfants 
tuberculeux  en  France  que  dans  tous  les  autres  pays  réunis.  Et 
tout  récemment,  clans  une  de  ses  séances,  la  Chambre  des 
députés  a  décidé  que  le  gouvernement  peut  autoriser  rémis- 
sion d'une  loterie  par  séries  de  iooooo  lianes,  jusqu'à  concur- 
rence de  la  somme  d'un  million,  en  faveur  de  l'Œuvre  des 
enfants  tuberculeux  (hôpital  d'Ormesson).  Mais,  nous  le  répé- 
tons, il  y  a  encore  beaucoup  à  faire  pour  la  prophylaxie  de  la 
phtisie  pulmonaire  chez  l'homme  dansée  beau  pays  de  France, 
oit  le  nombre  des  sanatoria  pour  le  traitement  des  phtisiques 
de  toutes  les  classes  sociales,  mais  surtout  de  la  classe  pauvre, 
devra  être  considérablement  augmenté. 

Les  membres  les  plus  distingués  du  Corps  médical  fran- 
çais ont  bien  compris  la  situation,  et  il  existe  aujourd'hui  en 
France  plusieurs  Sociétés  qui  travaillent  sans  relâche  dans  le  but 
de  faire  adopter  des  mesures  de  prophylaxie  sérieuse  contre  la 
tuberculose  et  provoquent  par  tous  les  moyens  en  leur  pouvoir 
des  réformes  hospitalières  en  même  temps  qu'elles  l'ont  une 
propagande  active  pour  l'érection  de  sanatoria. 

Voici  les  noms  de  quelques-unes  de  ces  Sociétés  les  plus 
importantes  :  l'Œuvre  de  la  Tuberculose,  fondée  par  le  proies- 


IlOLLASDE,  1I0SGRIE  8<) 

seui'  Verneuil  (de  l'Institut),  avec  M.  le  professeur  Bouchard 
(de l'Institut)  connue  président;  MM.  les  professeurs  Chauveau 
(de  l'Institut)  et  Lannelongue  (de  l'Institut)  comme  vice-prési- 
dents, et  M.  le  D1'  L.-H.  Petit  comme  secrétaire  général.  — 
L'Œuvre  des  Enfants  tuberculeux,  avec  M.  le  D1'  E.-P.  Léon 
Petit  comme  secrétaire  général.  —  L'Œuvre  des  Hôpitaux 
marins.  —  L'Œuvre  nationale  des  sanatoria  de  montagne 
(Dr  Bournct).  —  Société  d'étude  des  sanatoria  français.  —  Il  y 
a  en  plus  de  nombreuses  ligues  françaises  contre  la  phtisie 
pulmonaire  :  la  première  de  ces  ligues  a  été  fondée  par  M.  le 
D1'  Armaingaud  (de  Bordeaux). 

Pour  couronner  les  efforts  qui  ont  lieu  partout  en  France 
dans  la  direction  de  la  prophylaxie  de  la  tuberculose,  tout 
récemment,  sur  la  proposition  de  M.  Brouardcl,  l'Académie  des 
sciences  a  décidé  qu'une  commission  spéciale  serait  chargée 
de  l'examen  des  questions  se  rapportant  aux  effets  et  à  la  pro- 
pagation de  la  tuberculose,  ainsi  qu'aux  logements  insalubres. 

Cette  commission  comprendra  les  six  membres  de  la  section 
de  médecine  et  de  chirurgie,  à  savoir  :  MM.  Potain,  Bouchard, 
Marey,  Guyon,  d'Arsonval,  Lannelongue,  les  deux  secrétaires 
perpétuels  de  l'Académie,  et  MM.  Brouardel,  de  Freycinet,  de 
Jonquières,  Chauveau,  Duclaux,  Arm.  Gautier. 

IIollaxde.  —  En  Hollande,  les  vacheries  industrielles  sont 
soumises  à  une  surveillance  sanitaire.  Il  y  a  plusieurs  sanato- 
ria et  hospices  marins  pour  le  traitement  des  enfants  tubercu- 
leux ;  et  dernièrement  une  société  hollandaise  a  fondé  à  Davos 
un  sanatorium  pour  le  traitement  des  phtisiques  qui  ne  peu- 
vent payer  qu'un  prix  modéré.  Il  n'existe  pas  encore  d'autre 
établissement  fermé  pour  le  traitement  de  la  phtisie  pulmonaire, 
mais  la  jeune  reine,  lors  de  son  avènement  au  trône  de  Hol- 
lande, a  décidé  qu'une  grande  partie  du  tribut  d'argent  offert 
à  cette  occasion  par  ses  sujets  sera  consacrée  à  la  construction 
de  sanatoria  pour  tuberculeux  pauvres. 

Hongrik.  —  De  la  Hongrie  comme  de  l'Autriche,  je  n'ai  pu 
obtenir  de  renseignements  précis  relativement  aux  lois  sani- 
taires ou  règlements  destinés  à  empêcher  la  propagation  de  la 
tuberculose    par    l'homme    ou    les    animaux.    Mais    l'opinion 


go  l'OIS  SANITAIRES  ET  LUTTE  CONTRE  LA   TUBERCULOSE 

publique  est  favorable  à  l'établissement  de  sanatoria.  Une 
somme  de  10000  florins  a  été  mise  récemment  à  la  disposition 
iln  professeur  Koranyi  (de  Budapest1,  et  dernièrement  un  autre 
legs  important  a  été  fait  par  un  philanthrope  hongrois  en 
faveur  des  phtisiques  pauvres  (ï). 

Italie. — Il  semble  que  l'Italie,  le  pays  qui,  dans  les  siècles 
passés,  a  pris  les  mesures  de  prophylaxie  les  plus  sévères  et 
édicté  les  lois  les  plus  draconiennes  contre  la  tuberculose,  se 
soit  relâché  jusqu'à  l'indifférence  à  l'égard  des  prescriptions 
adoptées  dans  les  temps  modernes  contre  celte  maladie. 
D'après  les  renseignements  que  mon  très  distingué  confrère 
M.  le  professeur  Massalongo  a  bien  voulu  m'envoyer,  il  n'y  a 
encore  en  Italie  ni  hôpitaux  spéciaux,  ni  sanatoria  pour  les 
phtisiques.  Mais,  à  la  date  du  10  mai  dernier,  le  ministre  de 
l'intérieur  a  adressé  à  tous  les  préfets  une  circulaire  dont 
voici,  sinon  le  texte,  au  moins  la  substance  : 

Dans  beaucoup  d'hôpitaux  du  royaume,  les  tuberculeux  sont 
mêlés  aux  autres  malades  dans  les  salles  communes;  il  est 
inutile  d'insister  sur  le  danger  qui  peut  en  résulter,  au  point 
de  vue.  de  la  contagion,  chez  des  sujets  dont  la  résistance 
vitale  est  déjà  affaiblie  par  d'autres  maladies.  Il  importe  de 
remédier  à  cet  état  de  choses  en  plaçant  dans  un  corps  spécial 
de  bâtiment  tous  ceux  chez  lesquels  l'existence  de  la  tubercu- 
lose est  démontrée.  Il  serait  assurément  désirable  que  cet  iso- 
lement fût  complet  et  rigoureux;  mais  beaucoup  d'hôpitaux 
sont  construits  de  telle  sorte  qu'ils  n'ont  qu'un  seid  corps  de 
bâtiment,  et  leurs  ressources  ne  leur  permettent  pas  d'édifier 
des  constructions  nouvelles  répondant  au  but  à  atteindre.  Dans 
ces  cas,  il  faudra  se  contenter  de  répartir  les  tuberculeux  dans 
des  salles  spéciales,  autant  que  possible  séparées  du  reste  de 
l'hôpital. 

A  la  réception  de  la  présente  circulaire,  une  commission  se 
réunira  afin  d'étudier  la  question  dans  les  hôpitaux  de  chaque 
province,  et  fera  connaître  au  ministère  les  mesures  prises 
dans  chaque  cas  particulier. 

Il  y  a   quelques    hôpitaux  spéciaux  pour  le  traitement  des 


(ï)  Heilstàtten  /Correspondent,  I.  Il,  1898,  avril. 


JAPON,   NORVEGE  ET  SUEDE  gi 

enfants  tuberculeux  et  rachitiques  disséminés  un   peu  partout 
dans  le  royaume  d'Italie. 

Japon.  —  Au  Japon,  le  gouvernement  impérial  a  créé  à 
Tokio,  pour  le  célèbre  professeur  Kitasato,  un  grand  hôpital 
destiné  au  traitement  et  à  l'étude  de  la  tuberculose  pulmonaire 
chez  l'homme. 

Norvège  et  Suéde.  —  En  Norvège  et  en  Suède,  grâce  aux 
efforts  persévérants  de  mon  ami  le  D1'  Klaus  Hansen,  médecin 
en  chef  de  l'hôpital  de  Bergen,  la  lutte  contre  la  tuberculose 
accomplit  de  réels  progrès.  En  ce  moment  même  le  Parlement 
norvégien  est  saisi  d'un  projet  de  loi  relatif  aux  mesures  à 
prendre  contre  la  tuberculose  humaine,  élaboré  sur  l'ordre 
du  département  de  justice  et  rédigé  par  MM.  les  D's  Holmboe 
et  Klaus  Hansen. 

La  tuberculose  bovine  est  soumise  à  une  surveillance  gou- 
vernementale; mais  les  fermiers  de  ces  pays  savent  bien  appré- 
cier la  valeur  commerciale  de  produits  absolument  sains.  Voici 
comment  procède  une  nouvelle  entreprise  cjui  fonctionne  depuis 
quelques  années  en  Suède  et  en  Norvège,  ainsi  qu'en  Dane- 
mark :  plusieurs  fermes  voisines  se  réunissent  pour  centraliser 
leur  lait  frais  dans  un  local  commun,  où  ce  lait  est  d'abord 
pasteurisé  à  une  température  d'environ  70°,  puis  refroidi  à  —  io°. 
Les  blocs  de  lait  congelés  sont  mis  dans  des  tonneaux  de  sapin 
étanches  que  l'on  remplit  à  moitié  de  cette  façon.  Ce  qui  reste 
d'espace  est  alors  rempli  de  lait  stérilisé,  puis  les  tonneaux  sont 
hermétiquement  fermés.  Les  secousses  du  voyage  ne  peuvent 
donner  lieu  à  la  production  de  beurre  parce  que,  d'une  part,  les 
tonneaux  sont  exactement  remplis  et  que,  d'autre  part,  les  gla- 
çons de  lait  ne  fondent  que  très  lentement  et  maintiennent 
longtemps  le  liquide  à  une  température  relativement  basse.  Le 
lait  se  conserve  ainsi  au  moins  trois  semaines,  et  de  Suède  et 
de  Danemark  on  expédie  en  Angleterre  des  cargaisons  entières 
de  tonneaux  de  lait  ainsi  préparé  (1). 

L'agitation  créée  par  les  médecins  norvégiens  en  faveur  de 


(1)  Bulletin  Médical.  1893,  27  octobre. 


92  LOIS  SANITAIRES  ET  LUTTE  CONTRE  LA    TUBERCULOSE 

sanatoria  pour  le  traitemenl   dé  phtisiques  de  toutes  classes 

n'a  pas  été  sans  résultat.  II  existe  déjà  quelques  établissements 
de  ce  genre,  et  le  gouvernement  et  les  municipalités  aident 
ces  entreprises  par  des  concessions  de  terrain  et  des  subven- 
tions. En  outre,  le  parlement  norvégien  a  décidé  que  deux  des 
anciens  hôpitaux  destinés  aux  lépreux  et  situés  aux  environs 
de  Bergen,  seraient  transformés  en  sanatoria  pour  le  traite- 
ment de  la  phtisie.  Un  autre  l'ait  caractéristique  montre  à  quel 
point  le  public  est  convaincu  de  la  nécessité  de  mesures 
énergiques. 

Le  roi  de  Suède  recevait  dernièrement, à  l'occasion  du  jubilé 
de  sa  vingt-cinquième  année  de  règne,  une  donation  de  près  de 
3oooooo  de  francs,  offerte  par  ses  sujets  en  témoignage  de 
reconnaissance  el  de  dévouement  envers  leur  souverain.  Avec 
une  générosité  qu'on  peut  doublement  qualifier  de  royale,  Sa 
.Majesté  a  décidé  que  cet  argent  serait  employé  à  la  création  de 
sanatoria  pour  les  phtisiques  pauvres. 

Portugal.  —  Le  Portugal  parait  particulièrement  affligé.  Ce 
pays, avec  une  population  d'environ  45ooooo  âmes, voit  chaque 
année  20000  de  ses  habitants  succomber  à  la  tuberculose.  Le 
manque  absolu  de  lois  contre  la  propagation  de  la  maladie 
provoqua  l'organisation  d'un  Congrès  île  la  tuberculose  en 
Portugal,  lequel  eut  lieu  à  Coïmbre.  Il  est  à  souhaiter  que 
les  travaux  de  ce  Congrès  amènent  bientôt  une  réduction  de 
celte  mortalité  effrayante. 

Russie.  —  Dans  le  grand  empire  de  Russie,  on  semble, 
d'après  des  nouvelles  que  nous  avons  reçues  de  notre  distinguée 
collègue  MmcPaolowskoja(de  Saint-Pétersbourg)  et  des  rensei- 
gnements puisés  dans  la  Revue  de  ht  tuberculose  et  dans 
quelques  journaux  étrangers,  vouloir  résoudre  le  problème  de 
la  tuberculose  par  la  création  multiple  de  sanatoria  el  hôpi- 
taux spéciaux  pour  les  pauvres.  Dans  aucun  pays  l'intérêt 
pour  celte  œuvre  philanthropique  ne  parait  plus  grand  qu'en 
Russie.  Les  plus  hauts  personnages  s'occupent  de  cette  ques- 
tion, et  l'empereur  Nicolas  II  donne  l'exemple.  Il  a  fait  présent 
à  la  Société  des  médecins  russes,  à  Saint-Pétersbourg,  de 
j(ij  000  roubles  pour  la  construction  et  l'entretien  d'un  sana- 


SUISSE,  TURQUIE  93 

torium  pour  les  tuberculeux,  en  mémoire  de  feu  l'impératrice 
Marie  Alexandrowna,  morte  de  phtisie.  Dans  ce  même  but, 
l'empereur  a  également  donné  à  la  Société  sa  propriété  de 
Taitzi,  renommée  pour  son  excellente  eau  de  source,  son  parc 
superbe  et  sa  situation  heureusement  abritée  des  vents. 

La  direction  des  sanatoria  impériaux  en  Russie  est  confiée 
aux  soins  du  médecin  particulier  de  Sa  Majesté,  M.  le  D1'  Hirsch. 

Nous  parlerons  plus  loin  des  nombreuses  autres  œuvres  phi- 
lanthropiques, inaugurées  en  Russie  en  faveur  des  phtisiques 
pauvres.  Nous  désirons  de  plus  mentionner  ici  que,  grâce  à 
l'initiative  de  M.  le  D1'  Schnaubert  (de  Moscou),  la  ligue  orga- 
nise et  développe  sa  propagande  par  des  conférences  et  par  la 
distribution  d'un  nombre  considérable  d'instructions  sur  la 
contagion  et  la  prophylaxie  de  la  tuberculose. 

Suisse.  — ■  La  Suisse  s'est  décidée  à  agir  énergiquement 
contre  la  propagation  de  la  tuberculose.  Une  commission  com- 
posée de  MM.  les  professeurs  Gosse,  Vincent  et  M.  le  D1'  Gil- 
bert, a  été  chargée  par  le  gouvernement  d'étudier  les  mesures 
à  prendre  contre  cette  maladie.  Les  instructions  publiées  par 
cette  commission  sont  analogues  à  celles  d'autres  pays,  et 
visent  les  précautions  à  prendre  pour  se  protéger  contre  la 
contagion  venant  de  l'homme  ou  des  animaux.  A  signaler  le 
dernier  paragraphe,  qu'on  ne  trouve  pas  partout  :  «  La  tuber- 
culose doit  être  traitée  dès  le  début  et,  dès  le  début,  il  faut 
savoir  se  résoudre  aux  sacrifices  auxquels  on  consent  alors 
qu'il  est  souvent  trop  tard.  » 

Un  arrêté  du  Conseil  fédéral,  en  date  du  7  juillet  1896,  con- 
cernant les  mesures  à  prendre  contre  la  tuberculose  de  l'es- 
pèce bovine,  et  qui  entrait  immédiatement  en  vigueur,  protège 
aulant  que  possible  ce  pays  contre  le  danger  venant  de  la 
tuberculose  des  bovidés. 

La  Suisse  n'a  pas  fait  moins  de  progrès  au  point  de  vue  du 
traitement  de  la  phtisie  pulmonaire  dans  les  établissements 
fermés.  Le  plus  ancien  de  ce  genre  est  celui  du  Dr  Turban,  à 
Davos;  mais  pour  les  phtisiques  pauvres  plusieurs  sanatoria, 
dans  les  divers  cantons,  sont  déjà  en  plein  fonctionnement  ou 
à  l'état  de  projet. 

Turquie.  —  Le  gouvernement  ottoman  rendait  obligatoire, 


ni 


LOIS  SANITAIRES    ET  LUTTE  CONTRE  LA   TUBERCULOSE 


en  i8q5,  et  sous  peine  d'amende  en  cas  d'infraction,  la  déclara- 
tion des  maladies  infectieuses  suivantes  :  choléra,  fièvre 
typhoïde,  typhus,  dysenterie,  variole,  varicelle,  rougeole, 
rubéole,  scarlatine,,  coqueluche,  diphtérie  et  tuberculose  pul- 
monaire. On  voit  donc  que  la  phtisie  pulmonaire  est  considé- 
rée, à  Constantinople  aussi,  comme  une  maladie  essentielle- 
ment contagieuse.  Mais  il  esl  à  craindre  que  la  loi,  au  point  de 
vue  de  la  phtisie  pulmonaire  tout  au  moins,  ne  soit  pas  liés 
rigoureusement  appliquée.  J'ai  visité,  il  y  a  quelques  années, 
la  ville  du  Bosphore  et  quelques-unes  de  ses  institutions  mé- 
dicales, et  le  doute  que  je  viens  d'émettre  ma  été  inspiré  par 
ce  que  j'ai  vu.  Je  le  répète,  il  est  à  craindre  que  cette  loi  sur 
les  maladies  infectieuses  ne  reste  pour  longtemps  en  Turquie 
à  l'état  de   lettre  morte. 

Il  m'a  été  impossible  de  rien  apprendre  de  précis  au  point 
de  vue  de  la  prophylaxie  de  la  tuberculose  bovine;  mais  il  v  a 
quelque  années,  le  sultan  a  décidé  qu'un  hôpital  spécial  poul- 
ies tuberculeux  serait  créé  à  Constantinople.  Un  établissement 
pour  les  enfants  tuberculeux  est  également  projeté. 


CHAPITRE    VII 
Prophylaxie  publique  de  la  tuberculose  dans  la  race  bovine. 


Dans  les  pages  précédentes  nous  avons  traité  d'abord  de  la 
prophylaxie  individuelle,  ensuite  nous  avons  passé  en  revue 
les  lois,  règlements  et  prescriptions  sanitaires  contre  la  tuber- 
culose humaine  et  bovine,  émanant  des  autorités  publiques 
ou  des  associations  privées.  Il  nous  reste  donc  à  parler  de  ce 
qui,  selon  nous,  reste  encore  à  l'aire  pour  combattre  avec  plus 
de  succès  la  propagation  de  la  tuberculose  par  la  prophylaxie 
publique. 

Distribution  géographique  de  la  tuberculose  des  bovidés. 
—  En  ce  qui  concerne  la  tuberculose  bovine,  il  n'y  aura  jamais 
rien  de  définitivement  accompli  tant  que  les  lois  ne  devien- 
dront pas  internationales,  c'est-à-dire  que  c'est  seulement  par 
suite  d'une  entente  comme  il  en  existe  pour  certaines  épidé- 
mies, telles  que  le  choléra,  la  peste,  etc.,  que  nous  pourrons 
espérer  supprimer  les  dangers  venant  de  la  tuberculose  des 
bovidés.  Pour  atteindre  ce  but,  je  propose  un  Congrès  inter- 
national de  la  tuberculose  analogue  à  la  Conférence  interna- 
tionale qui  eut  lieu  il  y  a  quelques  années  à  Dresde,  pour  les 
mesures  à  prendre  contre  le  choléra.  Afin  de  justifier  la  néces- 
sité d'une  telle  mesure,  je  ne  puis  que  citer  l'article  remar- 
quable que  M.  E.  Leclainche,  professeur  à  l'École  vétérinaire  de 
Toulouse,  a  publié  dans  la  Revue  de  la  tuberculose,  sur  la  «  Fré- 
quence et  la  distribution  géographique  de  la  tuberculose  des 
Bovidés  »  (i).  Ce  distingué  vétérinaire  nous  apprend  d'abord 


(i)  Revue  de  la  tuberculose,  t.  IV,  p.  3oi. 


96  PROPHYLAXIE  PUBLIQUE 

qu'en  France  La  proportion  des  bovidés  tuberculeux  est  vrai- 
semblablement comprise  entre  10  et  ao  p.  100,  en  Belgique 
(>o  |>.  uni,  en  Prusse  9  p.  roo,  en  Saxo  ai  p.  100.  En  Angleterre, 
un  rapporl  officiel,  basé  sur  une.  enquête  très  sommaire,  admel 
une  proportion  variant  de  3  à  17  p.  100.  Hunting,  qui  a  examiné 
4ooo  bêtes,  en  a  trouvé  ao  p.  100  de  tuberculeuses.  Des  statis- 
tiques officielles  récentes  indiquent  un  pourcentage  de  18, 7  dans 
le  Durbam,de  ao  dans  le  Midlothian,  de  22,8  dans  leYorkshire, 
de  a5  dans  les  vacheries  de  Londres  et  île  a6  dans  relies 
d'Edimbourg.  L'Ayrshire  compte  70  à  80  p.  100  de  malades. 
Par  contre,  la  tuberculose  est  rarement  signalée  dans  le  bétail 
de  Devon,  d'Aberdeen,  des  comtés  de  Stafford  et  de  Montgo- 
mery. 

En  Danemark,  îles  épreuves  par  la  tuberculine  ont  révélé 
i5o  p.  100  d'animaux  tuberculeux. En  Hollande  il  y  en  a, d'après 
Schmidt,  ao  p.  100;  en  Italie  (Lombardie  ,  3o  p.  100;  au  Mexi- 
que, 34  P-  It)0  ;  cn  Australie-,  de  10  à  ao  p.  100. 

Ces  chiffres  montrent  bien  la  fréquence  de  la  tuberculose 
dans  presque  tous  les  pays,  mais  ce  que  Leclainche  nous  dit 
au  point  de  vue  de  l'exportation  et  l'importation  des  bestiaux 
de  ces  diverses  contrées,  est  encore  plus  frappant  et  plus  ins- 
tructif. 

Voici  quelques  exemples  : 

La  Russie,  d'après  les  évaluations  optimistes  de  Semmer, 
renferme  à  coup  sur  plus  d'un  demi-million  de  bovidés  tuber- 
culeux. La  proportion  est  de  7,a6  p.  100  à  l'abattoir  de  Moscou. 
Alors  que  les  troupeaux  indigènes  sont  peu  gravement  atteints, 
on  trouve  10  à  90  p.  100  de  tuberculeux  dans  le  bétail  importé 
maintenu  en  stabulation  ;  en  1896,  Petrowsky  rencontre  18,2 
p.  100  de  malades  dans  les  métairies  du  gouvernement  mili- 
taire de  l'OuraL 

En  Afrique,  la  tuberculose  est  encore  peu  répandue  chez  les 
races  indigènes.  En  Algérie,  on  trouve  tout  au  plus  un  animal 
tuberculeux  sur  10000;  par  contre,  le  bétail  européen  importé 
est  souvent  affecté.  En  Egypte,  Piot  compte  5  p.  100  de 
malades  dans  le  domaine  de  l'Etat. 

Au  Japon,  la  tuberculose  s'observe  presque  uniquement  sur 
le  bétail  importé.  Les  bovidés  d'origine  américaine  donnent 
.")o  p.  100  de  tuberculeux  dans  les  abattoirs  ;  les  animaux  d'ori 


TUBERCULOSE  DES  BOVIDES  97 

gine  anglaise  payent  le  même   tribal;  au  contraire,  le  bétail 
indigène  est  encore  indemne  (Janson). 

J'ai   déjà  parlé,  dans  mon  chapitre  «  Les   lois   sanitaires   » 
(p.  67),    de    la    situation    déplorable    (pie    l'on    constate    aux 
États-Unis.    Ici,    où  chaque  Etat  a   le    droit  de  l'aire  des   lois 
comme  bon  lui  semble,  il  est  facile  de  comprendre  comment 
d'une  partPeters  évaluait  le  nombre  des  animaux  tuberculeux 
dans  l'État  de  Massachusetts  — -où  les  lois  contre  la  pommelière 
sont  très  strictes  —  seulement  à  2  ou  3  p.  100,  tandis  cpie  Osgood 
en  rencontrait  dans  les  régions  d'élevage  (situées  dans  d'au- 
tres États)  jusqu'à  80  et  90  p.   100.  Je  ne  peux  pas  admettre  la 
conclusion  de    M.    Leclainche,   d'après  laquelle  c'est  avec  le 
bétail  anglais  seulement  que  la  tuberculose  pénètre  en  Dane- 
mark, en  Suède,  en  France,   en   Russie,  en  Japon,  aux  Etats- 
Unis,  au  Chili  et  en  Australie.  Je  sais  que  la  faute  en  incombe 
non  seulement  à  l'Angleterre,  mais  à  tous  les  gouvernements 
des  pays  où  l'exportation  et  l'importation  du  bétail  se  font  sous 
les  conditions  actuellement  en  vigueur.  Pour  combattre  avec 
succès  la  tuberculose  qui  frappe  l'espèce  bovine  et  ipso  facto 
l'espèce  humaine,  il  faut  commencer  chacun  chez  soi,  c'est-à- 
dire  que  chaque  pays  devrait  détruire  les  animaux  tuberculeux, 
démolir   les  locaux  où   ces  animaux  ont  vécu,   construire  ou 
reconstruire   les    étables    selon  les   conceptions    hygiéniques 
modernes  et  instituer  une  surveillance  permanente  des  vache- 
ries,  abattoirs,   boucheries,    dépôts   et  marchands  de   lait,   et 
instruire  les  fermiers  et  laitiers  des  précautions  hygiéniques 
indispensables  à  leur  métier. 

Tout  en  faisant  table  rase  chez  soi,  et  afin  de  ne  pas  rendre 
la  précaution  inutile,  il  faudrait  instituer  en  même  temps  à  la 
frontière  de  chaque  pays  la  plus  stricte  surveillance  contre 
toute  possibilité  d'importation  de  bétail  tuberculeux. 

Entente  internationale.  — ■  Sans  une  entente  internationale, 
la  tuberculose  des  bovidés  progressera  et  s'étendra  toujours 
M.  le  D1'  F.-W.  Smith,  membre  du  Tuberculosis  Committee  0/ 
t/ie  State  Boavd  of  Health  of  New  York-,  une  des  autorités  amé- 
ricaines les  plus  considérables  en  matière  de  tuberculose, 
m'écrivait  l'année  dernière  :  The  first  great  slep  toward  llie 
prophylaxis  of  tuberculosis  inman  is  lo  stamf  out  the  diseast 

Kxopf.   Sanatoria. 


gg  LES  SANATORIA 

in  caille  (le  premier  grand  pas  vers  la  prophylaxie  de  la 
tuberculose  humaine  consiste  à  exterminer  la  tuberculose  dans 
l'espèce  bovine).  Mieux  vaudrait  encore  essayer  de  combattre 
la  tuberculose  à  la  fois  chez  l'homme  et  chez  les  bovidés. 
Revenons  doncà  présenta  la  prophylaxie  dans  la  race  humaine. 


CHAPITRE  VIII 
Prophylaxie  publique  de  la  tuberculose  humaine. 


Nous  avons  traité  longuement, dans  le  chapitre  «  Prophylaxie 
individuelle  »,de  tout  ce  qu'on  peut  demander  au  malade  lui- 
même  ou  à  sa  famille.  Quels  sont  les  devoirs  des  autorités 
publiques  au  point  de  vue  de  la  prophylaxie  de  la  tuberculose 
chez  l'homme  ?  Pour  prévenir  la  propagation  de  la  tuberculose 
dans  la  race  humaine  il  nous  tant  d'une  part  des  lois,  des 
règlements,  des  instructions  publiques,  émanant  des  autorités, 
et  des  établissements  spéciaux  pour  le  traitement  de  la  tuber- 
culose. Et  d'autre  part,  il  importe  que  l'esprit  médical  soit 
dirigé  vers  une  meilleure  compréhension  de  la  nécessité  du 
traitement  prophylactique.  Nous  parlerons  plus  loin  du  véri- 
table traitement  prophylactique  ;  ici,  nous  voulons  discuter 
seulement  les  mesures  prophylactiques  qui  devraient  être  ins- 
tituées par  les  autorités  publiques. 

Transmission  et  prédisposition.  —  La  tuberculose  per  se 
est  rarement  transmise  par  la  mère  au  fœtus.  Les  quelques 
cas  rapportés  par  divers  auteurs,  quoique  incontestables,  sont 
en  trop  petit  nombre  pour  que  nous  nous  y  arrêtions.  Mais  que 
l'hérédité  de  la  prédisposition  soit  un  facteur  des  plus  impor- 
tants dans  l'étiologie  delà  phtisie,  c'est  un  point  qui  n'est  plus 
guère  discutable.  Les  gens  «  tuberculisables  »,  comme  les 
appelait  l'ingénieux  Peter,  sontle  plus  souvent  des  enfants  issus 
d'un  père  ou  d'une  mère  tuberculeux.  Il  existe  un  tel  nombre 
d'enfants  et  de  jeunes  gens  «  tuberculisables  »,  mais  non  encore 
tuberculeux,  que  je  crois  qu'une  grande  partie,  peut-être  la 
plus  grande  partie,  de  la  prophylaxie  moderne  de  la  phtisie 
pulmonaire  devrait  avoir  pour  but  de  faire  de  ces  sujets,  qu'on 


,00  PROPHYLAXIE  PUBUQVE 

pourrait  appeler  aussi  des  «  candidats  à  la  phtisie  ».  des 
hommes  et  des  femmes  loris  cl  sains,  des  candidats  préparés 
n  n  a  pour  la  tuberculose,  mais  entraînés  à  la  lutte  pour  la  vie  tout 
comme  les  autres.  Nous  verrons  plus  loin  que  le  traitement 
prophylactique  devrait  commencer  avec  l'enfant  in  utero,  et  il 
en  est  de  même  pour  les  mesures  prophylactiques  à  prendre 
par  les  autorités  sanitaires. 

Femme  tuberculeuse  enceinte.  —  Toute  femme  enceinte  el 
tuberculeuse  devrait,  surtout  si  elle  appartient  à  la  classe 
pauvre,  devenir  un  objet  de  soins  publics.  Aussitôt  qu'une 
femme  dans  cel  état  se  présente  à  un  médecin,  elle  devrait 
être  envoyée  à  une  Maternité  spéciale  (Maternité-Sanatorium 
située  dans  les  conditions  atmosphériques  les  plus  favorables. 
où,  sous  les  soins  d'un  accoucheur  expérimenté  et  au  cou- 
rant de  la  phtisio-thérapie,  elle  attendrait  sa  délivrance.  Après 
l'accouchement  elle  devrait  rester  encore  quelques  mois  dans 
ce  sanatorium  d'accouchement  avant  de  rentrer  dans  son  foyer. 
Le  surmenage,  l'ennemi  le  plus  dangereux  de  toute  femme 
enceinte  ou  récemment  accouchée,  mais  surtout  de  la  mère 
tuberculeuse  sans  moyens,  peut  être  enrayé  par  ces  précau- 
tions, au  moins  dans  un  grand  nombre  de  cas.  Les  rensei- 
gnements que  la  mère  aura  reçus  au  point  de  vue  des  soins  à 
prendre  pour  elle-même  et  son  enfant  seront  d'une  valeur  ines- 
timable; et  l'enfant,  quoique  issu  d'une  tuberculeuse,  aura 
ainsi  grand'chance  de  devenir  un  homme  fort  el  sain. 

Ecoles  spéciales  pour  enfants  tuberculeux.  — -  La  France, 
la  Belgique,  la  Hollande,  l'Italie,  el  quelques  autres  pays  ont 
déjà  des  sanatoria  pour  enfants  tuberculeux  et  rachitiques. 
A  ces  sanatoria,  surtout  consacrés  au  traitement  de  la  tubercu- 
lose osseuse,  sont  rattachées  des  écoles  où  les  enfants  peuvent 
recevoir  l'instruction.  11  n'y  a  guère  d'établissements  où 
un  enfant  atteint  de  tuberculose  pulmonaire  ou  prédispose  à 
cette  maladie  puisse  avoir  les  soins  médicaux  et  intellectuels 
que  son  cas  exige. 

Davos  est  à  ma  connaissance  le  seul  endroit  possédant  un 
établissement  privé,  où  un  enfant  prédisposé  à  la  phtisie  puisse 
recevoir  non  seulement  le  traitement  climatérique  de  celte  sta- 


REPAS  AUX  ECOLES  DES  PACVRES  101 

lion,  mais  aussi  une  bonne  éducation.  Les  devoirs  des  autorités 
sont  tout  tracés. 

Ce  sont  des  établissements  pareils  qu'il  nous  faut,  situés  de 
préférence  près  d'une  grande  ville,  dans  un  milieu  sain,  et 
s'il  est  possible  à  une  altitude  de  quelques  centaines  de  mètres. 
Car  si  nous  ne  voulons  pas  qu'un  enfant  tuberculeux  fréquente 
les  écoles  ordinaires,  il  nous  appartient  de  créer  des  écoles 
spéciales.  De  plus  les  autorités  sanitaires  devraient  veiller  sur 
les  conditions  hygiéniques  de  toutes  les  écoles  où  se  trouvent 
assemblés  pendant  des  heures  des  centaines  d'enfants  avec  leur 
constitution  susceptible.  Ces  écoles  devraient  être  des  modèles 
de  tout  ce  qu'il  y  a  de  plus  hygiénique  et  sanitaire.  De  grandes 
cours  ou  «  roofgardens  (i)  »  pour  récréation,  jeux,  chants  et 
récitations  en  plein  air  sont  indispensables  au  bien-être  et  au 
développement  des  enfants. 

Dans  plusieurs  villes  des  Etats-Unis,  et  surtout  à  New- York, 
nous  jouissons  depuis  quelque  temps  d'une  innovation  très 
heureuse  au  point  de  vue  de  l'hygiène  scolaire.  Un  ou  plu- 
sieurs médecins  nommés  par  le  bureau  de  santé  de  la  ville  sont 
attachés  à  chaque  école  publique.  Le  matin  il  y  a  un  défilé  des 
enfants  devant  le  médecin.  Au  cas  où  un  écolier  ou  une  écolière 
présente  les  symptômes  d'une  maladie  contagieuse,  il  est  ren- 
voyé avec  une  note  à  ses  parents.  Il  est  évident  que  cette  pra- 
tique a  eu  pour  effet  une  diminution  appréciable  des  maladies 
contagieuses  de  l'enfance. 

Repas  aux  écoles  des  pauvres.  —  Dans  les  écoles  fréquen- 
tées par  les  pauvres,  le  médecin  reconnaîtra  aussi  bien  vite  les 
enfants  mal  nourris  et  qui,  par  ce  fait  même  et  en  raison  des 
conditions  peu  hygiéniques  où  ils  se  trouvent  chez  leurs 
parents,  sont  prédisposés  à  la  phtisie.  Donner  à  ces  enfants 
non  seulement  des  leçons  de  propreté,  d'hygiène  élémentaire, 
mais  aussi  vers  le  milieu  de  la  journée  un  simple  mais  bon 
repas  avec  un  ou  deux  verres  de  lait  comme  boisson,  sera  une 
des  meilleures  mesures  prophylactiques  que  puisse  prendre  un 
gouvernement  prévoyant. 


(i)  Jardins  sur  les  toits. 


i.i,  PROPHYLAXIE  PUBLIQUE 

RÈGLEMENT      DU     TRAVAIL      DES      ENFANTS     ET     DES     FEMMES.     — 

Une  question  <|ui  concerne  La  prophylaxie  publique  de  La 
tuberculose  humaine  au  plus  haul  degré,  c'esl  le  règlement  <\\t 
travail  des  enfants  et  des  femmes  dans  les  manufactures.  .Nous 
ne  pouvons  pas  entrer  ici  en  détail  dans  celle  question  sociale 
sanitaire  et  morale  toul  à  la  lois.  Nous  voulons  seulement 
insister  sur  ce  fail  qu'une  surveillance  hygiénique  de  tontes 
les  usines,  fabriques  ou  magasins  où  les  mineurs  et  les 
femmes  sônl  employés,  s'impose  comme  une  nécessité  absolue, 
et  qu'un  travail  prolongé  au  delà  de  huit  heures  devrai!  être 
absolument  interdit  aux  mineurs.  On  n'ignore  pas,  en  effet,  que 
le  plus  grand  nombre  de  jeunes  «eus  tuberculeux  se  recrute 
parmi  ees  classes  de  la  population  où  la  position  sociale  exige 
que  toute  la  famille  travaille,  et  il  n'y  a  pas  le  moindre  doute  que 
le  germe  de  la  phtisie  s'acquière  le  plus  souvent  à  l'âge  de  la 
puberté.  Ajoutons  à  cela  les  dangers  provenant  du  surmenage  cl 
de  la  misère,  et  nous  pourrons  comprendrela  mortalité  effrayante 
par  tuberculose  qui  s'observe  parmi  les  jeunes  ouvriers. 

D'après  Ilolti,  la  mortalité  par  phtisie  pour  les  sujets  à^és 
de  plus  de  quinze  ans,  dans  la  classe  aisée,  à  Helsingfors,  est 
de  27,7  p.  100  de  la  mortalité  générale,  tandis  qu'elle  esl  de 
44,6  p.  ioo  pour  les  hommes  de  la  classe  nécessiteuse  :  la 
différence  est  donc  presque  du  simple  au  double. 

Professions  particulièrement  dangereuses  aux  prédisposés. 
—  L'influence  exercée  par  les  professions  sur  le  développe- 
ment tle  la  tuberculose  devrait  être  aussi  un  guide  pour  les 
autorités  sanitaires.  Les  décès  par  phtisie  sont  particuliè- 
rement nombreux  parmi  les  ouvriers  qui  respirent  des  pous- 
sières minérales,  végétales  ou  animales,  les  marbriers,  les 
tailleurs  de  pierre,  les  taillandiers,  les  couteliers,  les  fabri- 
cants de  limes,  les  serruriers,  les  maçons,  les  ouvriers  en 
drap,    les  boulangers,    les  typographes   et    lithographes,    etc. 

A  propos  de  ces  professions  qui  prédisposent  à  la  phtisie, 
M.  Krieger,  de  Strasbourg,  ajoute  dans  son  très  intéressant 
rapport    au    Congrès    de    Berlin    (i)  :    «    Les    professions    qui 


'i)  «  Rapport  entre  les  conditions  extérieures  de  la  vie  et  la  dissémination 
de  la  tuberculose.  »  In  Presse  Médicale.  27  mai  1809. 


USINES  ET  ÉTABLISSEMENTS  PUBLICS  io3 

nécessitent  une  attitude  telle  que,  pendant  son  travail,  l'ou- 
vrier ne  respire  que  par  les  parties  postérieures  des  pou- 
mons :  il  en  résulte  une  diminution  de  la  circulation  de  l'air 
et  du  sang  dans  les  régions  supérieures  pulmonaires  dont  la 
résistance  se  trouve  par  suite  diminuée. 

«  Les  professions  où  l'individu  reste  tout  le  temps  assis  : 
le  défaut  de  mouvements  et  de  travail  musculaire  amène, 
dans  ces  conditions,  un  affaiblissement  du  cœur  et  de  tout 
le  système  musculaire,  d'où  résulte  une  diminution  de  la  résis- 
tance de  tout  l'organisme.   » 

Pour  tous,  une  meilleure  division  du  travail  ou  le  moyen 
de  respirer  plus  souvent  l'air  frais,  l'usage  de  respirateurs  (i) 
pendant  leur  exposition  aux  poussières,  et  une  meilleure 
appréciation  des  applications  de  l'hygiène,  telles  sont  les 
mesures  qui  favoriseront  le  mieux  les  progrès  de  la  prophy- 
laxie de  la  tuberculose  dans  cette  classe. 

Surveillance  des  usines  et  des  établissements  publics.  — 
Une  surveillance  de  toutes  les  usines,  fabriques,  grands  maga- 
sins, théâtres,  écoles  (2),  lycées,  prisons  (3),  asiles,  crèches  (4), 
etc.,  en  ce  qui  concerne  une  bonne  ventilation  et  l'utilisation  de 
nombreux  crachoirs,  pareils    ou   analogues   à  ceux  que  nous 


(1)  On  donne  ce  nom  aux  appareils  que  l'on  adapte  à  la  bouche  des  personnes 
exposées  aux  bronchites  graves,  afin  de  tamiser  l'air  qu'elles  respirent.  Entre 
deux  parois  de  iils  métalliques  on  interpose  une  couche  d'ouate  mélangée  de 
charbon  porphyrisé.  destinée  à  intercepter  les  poussières  atmosphériques  et  en 
même  temps  à  éviter  l'introduction  dans  les  voies  respiratoires  d'un  air  trop 
froid;  pour  les  tailleurs  de  pierres  et  les  aiguiseurs,  on  interpose  dans  l'appa- 
reil une  éponge  que  l'on  humecte  de  temps  à  autre  (Duval.  Dictionnaire  des 
Sciences  médicales). 

(2)  En  Italie,  en  1890,  la  mortalité  la  plus  forte  par  tuberculose  a  été  constatée 
parmi  les  écoliers,  étudiants  et  séminaristes  :  chez  eux,  pour  1000  décès  géné- 
raux, les  morts  ducs  à  la  tuberculose  se  chiffreraient  par  le  nombre  énorme 
de  4^9,  près  de  la  moitié. 

(3)  Baek.  Ueber  das  Aorkommen  von  Phtisis  in  den  Gefangnissen  Zeitschr. 
f.  klin.  Med.,  i883,  t.  VI,  p.  5n.  —  La  mortalité  dans  la  prison  cellulaire  de 
Moabit,  à  Berlin,  n'a  pas  été,  en  1879,  inférieure  à  71  p.  100. 

(4)  P.  Richard.  Communication  faite  au  4e  Congrès  pour  l'étude  de  la 
Tuberculose.  —  D'après  Gauchas,  la  fréquence  de  la  tuberculose  dans  les  crèches 
de  la  ville  de  Paris  est  de  11  p.  100.  ic  Congrès  pour  l'étude  de  la  Tubercu- 
lose. 


,,,i  PROPHYLAXIE  PUBLIQUE 

avons  décrits  dans  le  chapitre  sur  la  contagion  (p.  45),  consti- 
tuera un  autre  devoir  des  autorités  publiques.  A  la  Nouvelle- 
Orléans  [Etats-Unis) ,  on  a  commencé,  il  y  a  déjà  quelque  temps, 
dans  plusieurs  théâtres,  après  chaque  représentation,  à  désinfec- 
ter la  salle  parles  vapeurs  de  formaldéhyde.  Il  esl  à  souhaiter 
qu'une  mesure  semblable,  rendue  obligatoire,  soit  bientôl 
inaugurée  dans  tout  le  inonde  civilisé,  pour  les  théâtres, 
salles  de  concerts,  etc. 

Le  danger  du  transport  des  PHTISIQUES  par  chemin  de  feu. 
—  Le  danger  du  transport  des  phtisiques  par  chemin  de  fer  a 
été  signalé  depuis  longtemps.  En  France  :  Villemin  (i), 
Petit  (2);  <Mi  Autriche  :  Prausnitz  (3);  en  Amérique:  Whit- 
tacker  (4),  Gonn  (5)  et  nous-mème  (6)  avons  plaidé  à  plusieurs 
reprises  devant  les  autorités  sanitaires  et  les  compagnies  >\<' 
chemins  de  fer  en  faveur  de  la  désinfection  des  wagons.  Les 
vvagons-salons-lits  sur  les  lignes  particulièrement  fréquentées 
par  des  voyageurs  tuberculeux  demandent  une  surveillance 
spéciale.  M.  le  professeur  Whittacker  (de  Cincinnati)  décrit  de 
la  façon  suivante  un  voyage  dans  un  de  ces  «  sleeping  cars  »  : 
«On  ne  peut  guère  concevoir  une  réunion  plus  complète  de  con- 
ditions capables  de  disséminer  la  tuberculose  que  celles  que 
présentent  les  wagons-salons.  Us  sont  toujours  mal  ventilés, 
chauffés  et  clos  avec  soin.  Le  wagon-lit  renferme  de  seize  à 
trente  personnes  dans  un  espace  si  restreint  que,  dans  une 
habitation  particulière,  il  ne  viendrait  à  personne  l'idée  d'en 
l'aire  une  chambre  à  coucher  pour  deux.  Gomme  il  y  a  toujours 
quelqu'un    qui    craint    les   courants    d'air,    les  fenêtres,    tenues 


(1)  Villemin.  Bulletin  </<•  l'Acad.  de  Méd.,  1889,  1    XXII,  p.   17a. 
(a)  I.  -II.  Petit.  Revue  de  la  tuberculose,  1.  I,  p.  337. 

(3)  Pkaus.mtz.  Sur  la  propagation  <le  la  tuberculose  par  les  voyages  on 
chemin  de  fer.  Deutsche  med.  Wochenschr .,  1894.  12  juin. 

(4)  Whittacker.  Tuberculosis  in  sleeping  cars.  Boston  Med .  and  Surg. 
Journal,  1889.  7  novembre. 

(5)  Cokn.  Car  sanitation;  Report  of  Committee.  Journal  of  the  American 
Med.  Association,  1896,  septembre. 

(6)  Knopf.  'Ilic  présent  status  of  préventive  means  against  the  spread  of 
Tuberculosis,  etc.  Journal  of  the  American  Med.  Association.  1897.  3o  oc- 
tobre. 


DANGER  DV  TRANSPORT  PAR  CHEMIN  DE  EER  io5 

bien  fermées ,  ne  permettent  pas  la  ventilation  ;  comme  on 
ne  peut  non  plus  cracher  sur  le  plancher  ou  dans  les  très 
petits  crachoirs,  qui  ne  contiennent  jamais  d'eau,  la  tempe- 
rature  assez  élevée  permet  la  rapide  dissémination  des  produits 
infectieux. 

«  A  la  tombée  de  la  nuit,  on  ouvre  les  compartiments  con- 
tenant la  literie,  et  il  s'en  dégage  une  odeur  insupportable  de 
moisi.  On  traite  le  voyageur  avec  un  luxe  ostensible  de  draps 
de  lit  et  de  taies  d'oreillers,  mais  les  couvertures,  les  matelas, 
les  tapis,  et,  le  pire  de  tout,  les  courtines,  restent  en  place 
jusqu'à  ce  qu'ils  soient  hors  d'usage. 

«  Songez,  de  plus,  que  chaque  wagon  transporte  ou  a  récem- 
ment transporté  un  voyageur  phtisique,  ne  fût-ce  que  pour 
changer  de  climat,  eUque,  par  ignorance,  négligence  ou  mal- 
propreté, celui-ci  n'a  pas  manqué  de  déposer  de  la  matière 
tuberculeuse  sur  la  literie,  les  rideaux,  etc.  Cette  matière 
n'est-elle  pas  desséchée,  disséminée  à  travers  le  wagon  et 
absorbée  peu  à  peu  par  les  poumons  des  voyageurs?  » 

Malheureusement,  rien  n'est  encore  changé  depuis  l'intéres- 
sante publication  de  M.  Whittacker.  J'ai  visité  l'année  dernière 
un  de  nos  sanatoria  américains,  et  pendant  deux  jours  j'ai  eu 
pour  co-voyageurs  deux  phtisiques.  Les  crachoirs  étaient  des 
vaisseaux  plats  à  large  pourtour  et  dépourvus  d'eau.  J'ai  pu 
me  convaincre  que  les  voyageurs  qui  employaient  ces  crachoirs 
se  souciaient  fort  peu  de  voir  si  leurs  crachats  arrivaient  dans 
l'étroit  orifice,  s'ils  restaient  sur  le  pourtour  des  vases  ou  s'ils 
tombaient  sur  le  tapis.  Chaque  wagon  de  voyageurs  en  Amé- 
rique contient  un  réservoir  d'eau  glacée,  mais  ce  réservoir 
est  rarement  muni  de  plus  d'un  verre  ;  c'était  le  cas  le  jour  où 
je  voyageais  pour  me  rendre  dans  la  Caroline  du  Nord.  Les 
deux  tuberculeux,  dix  à  quinze  autres  voyageurs,  le  conduc- 
teur et  le  garçon  du  wagon  se  servaient  tous  du  même  verre. 
Enfin  le  train  s'arrêta  pour  nous  laisser  descendre,  et  con- 
tinua son  chemin  vers  le  Sud.  Le  hasard  voulut  que,  deux 
jours  plus  tard,  je  reprisse  le  même  train  pour  revenir,  et 
l'on  me  donna  une  place  dans  le  même  «  sleeping  car  ». 
D'après  les  questions  cpie  je  posai  aux  employés  du  «  car  », 
je  pus  me  convaincre  qu'on  n'avait  rien  fait  à  l'arrivée  du 
train  à  la  station  terminale  pour  désinfecter  les  wagons  dans 


IO(5  PROPHYLAXIE  PVBLIQVE 

lesquels  avaient  séjourné  nuit  et  jour  les  tuberculeux  dont 
j'ai  parlé. 

Le  D*  Whittacker  compare  le  voyageur  de  ces  trains-express 
au  chien  que,  dans  un  but  expérimental,  on  fait  respirer  dans 
une  boite  chargée  de  particules  tuberculeuses,  et  qui  y  con- 
tracte la  maladie.  Et  mon  distingué  confrère  a  bien  raison. 

Quels  sont  doue  les  moyens  de  supprimer  ou  d'atténuer 
!<■  danger  sans  sacrifier  les  sleeping  cars.' 

On  a  proposé  —  et  celle  proposition  nous  semble  une  solu- 
tion pratique  ■ — de  l'aire  disparaître  la  peluche,  le  velours  et  la 
soie  du  mobilier;  de  recouvrir  les  sièges  île  cuir  lisse,  facile  à 
laver;  de  remplacer  les  lapis  à  demeure  par  des  lapis  mobiles 
qu'on  peut  secouer  en  plein  air,  à  la  fin  de  chaque  voyage,  ou 
mieux  encore,  do  leur  préférer  le  simple  parquet.  Les  abomi- 
nables rideaux  doivent  céder  la  place  au  bois  et  au  cuir;  les 
couvertures  du  lit  des  malades  seront  soumises  à  une  haute 
température  dans  une  étuve  à  vapeur;  les  matelas  seronl 
recouverts  d'une  enveloppe  de  soie  imperméabilisée  ou  de 
toile  de  caoutchouc  pouvant  être  nettoyée.  Surtout,  on  mettra 
les  malades  dans  des  compartiments  séparés,  isolés  du  reste 
du  wagon,  avec  le  même  soin  qu'on  le  l'ait  pour  les  fumeurs, 
moins  nuisibles  et  moins  dangereux.  Les  crachoirs  seronl  à 
moitié  remplis  d'eau  dans  chaque  wagon  ;  les  voyageurs  phli- 
siques  seront   pourvus  d'un  crachoir  qu'on  pourra  vider  hors 


du  wagon. 


Mais  il  me  semble  qu'il  vaudrait  encore  mieux  construire 
des  wagons-ambulance  (pie  l'on  mettrait  en  circulation  sur 
toutes  les  lignes  spécialement  fréquentées  par  des  phtisiques. 
Et,  dans  l'intérêt  de  tous,  je  crois  qu'il  serait  temps  d'arriver  à 
une  entente  internationale  afin  que  chaque  train  île  voyageurs 
soit  obligé  de  rester  à  la  station  terminale  jusqu'à  ce  que  tous 
les  wagons  aient  élé  soumis  à  une  désinfection  par  les  vapeurs 
de  formaldéhyde. 


Logements  insalubres.  —  Les  logements  insalubres  dans  les 
grandes  villes  ainsi  que  dans  beaucoup  de  petites  localités,  et 
même  à  la  campagne,  sont  sans  doute  une  des  causes  principales 
qui  nous  empêchent  d'obtenir  une  extermination  plus  rapide  de 
hlisie  pulmonaire.  Il  esl  reconnu,  d'après  la  distribution  de 


a  pi 


DÉCLARATION  OBLIGATOIRE  DE  LA   TUBERCULOSE  107 

la  phtisie  pulmonaire  dans  les  grandes  villes,  qu'il  y  a  des  dis- 
tricts et  des  maisons  à  Paris  (i),  à  New-York  (2)  et  à  Philadel- 
phie (3),  où  la  phtisie  pulmonaire  semble  être  endémique. 
Et  l'explication  de  l'existence  de  ces  foyers  dangereux  se 
trouve  :  i°  dans  la  non-imperméabilité  du  sol  sur  lequel  les  bâti- 
ments sont  construits;  20  dans  le  fait  même  que  des  tuberculeux 
ont  demeuré  et  sont  morts  dans  cette  maison  sans  qu'une  désin- 
fection ou  quoi  que  ce  soit  ait  été  tenté  pour  détruire  les  foyers 
de  tuberculose  ;  et  3°  dans  les  conditions  hygiéniques  dans 
lesquelles  vivent  les  nombreuses  familles  habitant  ces  maisons. 
Je  ne  puis  mieux  faire  que  de  reproduire  ici  le  tableau  triste 
et  douloureux,  mais  hélas!  trop  vrai,  que  nous  donne  l'émi- 
nent  professeur  Brouardel,  dans  le  discours  éloquent  qu'il  a 
prononcé  le  10  janvier  dernier,  en  séance  solennelle  de  l'Aca- 
démie des  sciences,  sur  le  logement  insalubre  :  «  Un  ouvrier 
vit  assez  à  l'aise  dans  une  ou  deux  chambres  avec  sa  femme  et 
ses  enfants.  Il  est  pris  de  tuberculose.  Sa  femme  le  soigne 
avec  un  dévouement  qui,  je  le  dis  avec  fierté,  est  une  règle 
dans  tous  les  milieux  de  notre  société.  Elle  lutte  pour  sub- 
venir aux  besoins  de  la  famille,  les  ressources  s'épuisent,  la 
maladie  du  mari  s'aggrave,  la  misère  s'abat  avec  ses  priva- 
tions sur  la  mère  et  les  enfants.  Cette  dernière  tombe  malade, 
contagionnée  par  son  mari,  tous  deux  prennent  le  chemin  de 
l'hôpital,  les  enfants  sont  recueillis  par  l'Assistance  publique, 
mais  celle-ci  les  reçoit  inoculés  eux-mêmes  par  le  germe  de  la 
maladie,  voués  à  la  mort  ou  aux  infirmités.  »  La  destruction 
de   pareilles  habitations  s'impose   donc  au  gouvernement  (4). 

La  question  de  la  déclaration  obligatoire  de  la  tubercu- 
lose comme  maladie  contagieuse.  —  De  plus,  je  suis  d'avis 
qu'il  faut  une  loi  établissant  le  devoir  du  médecin  soit  pen- 
dant   le   traitement  du  malade,  soit   après  la  mort  de  ce  der- 


(1)  Bertillox.  Statistique  sanitaire  de  Paris,  i865  à  1892. 

(2)  Biggs.  Report  of  Board  of  Health,  1897. 

(3)  L.-F.  Flick.  Prévention  of  Tuberculosis.  Philadelphie,  1890. 

(4)  Voir  aussi  à  ce  sujet  :  Dubousquet-Labordekie.  Quelques  recherches  et 
réflexions  sur  la  contagion  familiale  et  ruaisonnicre  de  la  tuberculose.  4e  Con- 
grès pour  l'étude  de  la  tuberculose. 


,08  PROPHYLAXIE  PUBLIQUE 

nier.  Nombre  de  médecins  hygiénistes  réclamenl  depuis  long- 
temps la  déclaration  de  la  tuberculose  humaine  comme  mala- 
die contagieuse,  au  même  titre  que  le  choléra,  la  variole,  la 
diphtérie,  etc.  Il  y  a  quelques  années,  alors  que  j'avais  moins 
d'expérience  en  phtisio-thérapie,  j'étais  aussi  partisan  de  celle 
idée,  et  dans  plusieurs  de  nies  publications  sur  la  prophylaxie 
de  la  phtisie  je  réclamais  l'application  d'une  telle  loi.  J'avoue 
franchement  qu'aujourd'hui  je  trouve  celte  loi  non  seulement 
difficile  à  exécuter,  mais  encore  presque  inhumaine  et  peu  utile. 
Voici  ace  sujet  nies  idées  actuelles,  qui  sont  le  résultat  d'une 
expérience  fondée  sur  mes  relations  avec  les  autorités  sanitaires 
de  beaucoup  de  pays  :  je  propose  que  chaque  médecin,  dans 
l'intérêt  des  statistiques,  soil  obligé  de  déclarer  un  cas  de  tuber- 
culose quand  le  malade  se  soumet  à  sou  traitement.  Tous  les 
médecins  seront  instruits  par  les  autorités  sanitaires,  par  des 
circulaires,  brochures  ou  conférences,  de  toutes  les  précau- 
tions à  prendre  pour  empêcher  la  propagation  de  la  tubercu- 
lose. Aux  indigents  les  crachoirs  de  poche  devraient  être  dis- 
tribués   sans  frais  sur  l'ordonnance  du  médecin. 

La  désinfection  de  l'appartement  des  tuberculeux.  —  La 
désinfection  de  l'appartement  du  malade  ne  devrait  pas  se 
faire  seulement  après  la  mort,  mais  aussi  assez  souvent  pen- 
dant la  maladie.  C'est  au  médecin  traitant  de  décider  combien 
de  fois  la  désinfection  devra  être  pratiquée.  En  cas  de  décès, 
le  médecin  sera  obligé  d'en  faire  part  aux  autorités  avec 
avis  de  procéder  à  une  dernière  désinfection.  Si  la  famille  est 
trop  pauvre  pour  payer  les  frais  de  la  désinfection,  celle-ci 
devra  être  opérée  gratuitement.  Si  l'on  considère  que  peut- 
être  un  cinquième  de  la  population  d'une  grande  ville  est 
composé  de  tuberculeux,  que  la  durée  moyenne  de  la  phtisie 
pulmonaire  est  à  peu  près  de  trois  ans,  il  faut  reconnaître 
l'inutilité  de  classer  la  phtisie  pulmonaire  chronique  parmi  les 
maladies  contagieuses  aiguës,  telles  que  le  choléra,  la  variole, 
la  diphtérie,  etc.  La  durée  de  ces  dernières  maladies  est  de 
quelques  semaines;  on  peut  donc  isoler  le  malade  de  ses  amis 
et  même  de  sa  famille  pendant  ce  court  laps  de  temps.  Mais 
un  sujet  n'est  souvent  reconnu  tuberculeux  que  lorsque  l'affec- 
tion est  en  pleine  activité.  Est-il  possible  de  le  surveiller  ou 


LA  BÉFEXSE  DE  CRACHER  PAR  TERRE  109 

de  l'isoler  pendant  tonte  la  durée  de  sa  maladie  comme  nous 
le  faisons  pour  un  cholérique  ou  un  diphtérique?  Et  si  non, 
à  quoi  bon  déclarer  sa  maladie  au  même  titre  que  les  autres 
maladies   contagieuses  aiguës? 

Inspection  par  les  autorités  publiques  de  tous  établisse- 
ments ou  sont  traités  des  tuberculeux.  —  Je  serais  partisan 
d'une  loi  qui  permettrait  aux  autorités  sanitaires  d'inspecter 
toute  institution  privée  ou  publique  où  l'on  traite  des  phti- 
siques et  d'insister  sur  une  prophylaxie  absolue.  Je  suis  aussi 
d'avis  de  supprimer  tout  asile  qui  serait  sans  médecin,  et  je 
suis  surtout  en  faveur  d'une  loi  qui  rendrait  obligatoire  l'iso- 
lement d'un  tuberculeux  aliéné,  ou  des  individus  réfractaires 
aux  règles  hygiénique  que  leur  cas  réclame. 

Sur  la  défense  de  cracher  par  terre.  —  On  a  déjà  beaucoup 
écrit  sur  la  défense  de  cracher  par  terre.  Il  conviendrait  de  faire 
apposer  des  affiches  où  on  lirait  :  »  Il  est  expressément 
défendu  de  cracher  sur  les  parquets  des  bâtiments  publics, 
dans  les  tramways,  omnibus,  etc.  »  Il  serait  bon  même  de  punir 
de  temps  en  temps  comme  nous  le  faisons  en  Amérique)  un 
individu  pour  avoir  enfreint  cette  défense.  A  San-Francisco 
nous  avons  même  infligé  à  un  milliardaire  vingt-quatre  heures 
de  prison;  il  est  vrai  qu'il  y  avait  récidive  :  la  première  fois, 
Mr.  B.  s'en  était  tiré  avec  une  amende.  Mais  Mr.  B.  n'est  pas 
phtisique,  et  il  a  craché  à  terre  probablement  dans  un  mo- 
ment de  distraction,  pu  bien  il  est  encore  possible  qu'il  chi- 
quât. Cette  habitude  est  malheureusement  encore  répandue  un 
peu  partout  en  Amérique. 

Mais  quelle  que  soit  la  loi  «  à  faire  »,  je  doute  fort  que  nous 
arrivions  jamais  à  supprimer  l'habitude  de  cracher  à  terre  dans 
les  véhicules  ou  les  locaux  publics,  tels  que  tramways,  omni- 
bus, chemins  de  fer,  ou  dans  la  rue.  Il  faudrait  pour  cela  chan- 
ger nos  mœurs.  Et  puis,  pourquoi  exiger  seulement  des 
phtisiques  qu'ils  prennent  des'  précautions  au  sujet  de  leurs 
crachats  ?  Les  expectorations  de  la  grippe  ou  de  la  coquelu- 
che sont  également  assez  contagieuses  pour  qu'on  évite  de 
les  projeter  à  terre. 

S'est-on  jamais  demandé  combien    il   est    difficile    pour  les 


jio  l'ROPUYLAXIE  PUBLIQUE 

pauvres  phtisiques  de  suivre  à  la  lettre  la  recommandation  de 
cracher  toujours  et  uniquement  dans  un  crachoir,  el  jamais 
ailleurs  ? 

Expérience  personnelle  avec  un  crachoir  de  poche.  —  Il 
m'esl  arrivé,  étant  enrhumé,  el  voyageant  dans  un  tramway  ou 

dans  un  coupé  de  chemin  de  fer,  de  l'aire  usage  d'un  crachoir 
île  poche  :  je  regrette  'de  ne  pouvoir  dépeindre  l'air  ahuri 
avec  lequel  certains  de  mes  voisins  me  regardaient.  Je  prie 
ceux  qui  sans  pitié  maugréent  contre  les  phtisiques  qui  ne  se 
conforment  pas  religieusement  aux  ordonnances  de  police 
sanitaire,  de  suivre  mon  exemple.  Les  regards  effarés  de  leurs 
compagnons  de  voyage  fixés  sur  eux,  les  remarques  souvent 
peu  généreuses  arrivant  à  leurs  oreilles,  leur  apprendront 
bientôt  à  avoir  plus  d'indulgence. 

J'ai  dit  dans  les  pages  précédentes  combien  je  suis  en  faveur 
de  l'emploi  du  crachoir  de  poche,  de  même  que  je  considère 
comme  dangereux  de  cracher  dans  un  mouchoir;  mais  pour 
que  les  tuberculeux  à  tous  les  degrés  suivent  ces  recom- 
mandations, il  faut  en  toute  justice  défendre  également  aux 
grippés  d'expectorer  ailleurs  que  dans  un  crachoir.  En  un  mot, 
l'emploi  du  crachoir  de  poche,  dans  les  cas  de  grippe,  coque- 
luche ou  bronchite  devrait  devenir  universel. 

Alors  seulement  on  pourra  exiger  que  le  phtisique  lasse 
toujours  emploi  de  son  crachoir  de  poche.  Dans  les  établisse- 
ments publics,  les  chemins  de  fer,  les  usines,  etc.,  devraient 
se  trouver  des  crachoirs  lixes,  semblables  ou  analogues  à  celui 
que  nous  avons  décrit  sous  le  nom  de  crachoir  de  Predohl 
(p.  45).  Car  si  l'on  interdit  de  cracher  sur  le  parquet,  il  est 
nécessaire  en  même  temps  de  distribuer  les  crachoirs  à  profu- 
sion, de  façon  que  les  tousseurs  n'aient  aucune  excuse  pour 
répandre  par  terre  les  produits  de  leur  expectoration.  On 
pourra  alors  faire  des  lois  interdisant  tic  cracher  sur  les  par- 
quels,  dans  les  locaux  publics,  sous  peine  d'amende.  Contre  le 
danger  qui  nous  vient  des  tousâeurs  qui  expectorent  dans  les 
rues,  dans  leurs  cours  ou  jardins,  rien  ne  peut  nous  protéger 
que  leur  bonne  volonté,  la  connaissance  du  danger  de  la  réin- 
fection et  l'éducation  générale  du  tousseur.  Enfin,  il  faut 
compter  que  le  soleil,  la  lumière  et  les  agents  atmosphériques, 


BALAYAGE  DES  RUES  m 

qui    contribuent    heureusement    dans     une    large   mesure    à 
détruire  la  virulence  du  crachat  tuberculeux,  feront  le  reste. 

Surveillance  ues  boulangeries.  —  Nous  avons  déjà  fait 
allusion,  dans  le  chapitre  de  la  tuberculose  de  la  race  bovine, 
à  la  nécessité  d'une  stricte  surveillance  de  la  part  de  la  police 
sanitaire  sur  les  abattoirs,  les  laiteries  et  les  boucheries.  Mais 
il  y  a  une  profession  qui  nous  semble  aussi  exiger  une  sur- 
veillance particulière  :  c'est  celle  de  boulanger.  Dans  tous  les 
pays  les  boulangeries  se  trouvent  souvent  dans  un  état  de 
malpropreté  effrayante,  et  si  par  malheur  le  boulanger  ou  un 
de  ses  employés  est  phtisique  et,  comme  d'habitude,  hélas  ! 
peu  soigneux  à  l'égard  de  ses  expectorations,  le  danger  de  la 
transmission  de  la  tuberculose  devient  évident.  Mais  ce  qui  est 
surtout  une  habitude  fâcheuse  et  même  dangereuse,  c'est  la 
manière  dont  on  traite  généralement  le  pain  depuis  sa  sortie 
du  four  jusqu'à  son  arrivée  à  la  bouche  du  consommateur. 
Personne  au  monde  ne  consentirait  à  consommer  aucun  autre 
article  d'alimentation  ayant  passé  par  autant  de  mains  et 
séjourné  dans  autant  d'endroits  — d'une  propreté  souvent  dou- 
teuse —  sans  l'avoir  soumis  à  un  nettoyage  quelconque.  Il  n'y  a 
que  le  pain  que  nous  mangions  sans  le  nettoyer  après  qu'il  a 
passé  par  de  nombreuses  mains,  dans  la  boulangerie  où  on  le 
fabrique,  dans  la  voiture  ouïes  paniers  où  on  le  transporte,  et 
dans  la  boutique  où  on  le  vend. 

Enveloppement  du  pain.  — •  Voici  un  procédé  qu'il  me  paraît 
bon  d'introduire  partout,  et  qu'on  devrait  même  rendre  obli- 
gatoire. Il  est  déjà  en  usage  dans  plusieurs  grandes  boulan- 
geries d'Allemagne.  Dès  que  le  pain  sort  du  four,  quand  il  est 
encore  trop  chaud  pour  le  manier,  on  le  place  avec  l'aide  d'une 
pelle  sur  une  feuille  de  papier  propre,  assez  large  pour  qu'on 
puisse  l'envelopper  entièrement  en  tordant  les  quatre  bouts  du 
papier.  Ainsi  on  peut  protéger  le  pain  jusqu'à  son  arrivée  au 
consommateur,  et  le  danger  d'une  contamination  quelconque 
est  réduit  au  minimum. 

Balayage  des  rues.  —  Dans  un  très  intéressant  discours, 
prononcé  il  y  a  quelques  années  par  M.  le  professeur  von 
Schroetter    devant  le  Club   scientifique  de   Vienne,    l'orateur 


lia  PROPHYLAXIE  PUBLIQUE 

disait  :  a  Le  balayage  des  nies  et  des  trottoirs  avec  soulè- 
vement de  poussière  est  un  crime  contre  m>s  semblables.  »  Je 
ue  puis  que  me  rallier  à  l'opinion  de  ce  grand  phtisio-théra- 
peute,  e1  déclarer  avec  lui  que  la  police  sanitaire  ne  déviait 
permettre  nulle  part  le  nettoyage  d'une  rue  sans  qu'elle  eùl 
été  préalablement  arrosée.  Ne  savons-nous  pas,  d'après  les 
belles  recherches  de  Miquel  i  .  que  le  nombre  des  bactéries 
de  toute  sorte,  pathogènes  el  saprophytes,  dans  les  rues  très 
fréquentées,  est  absolument  surprenant  ?  Dans  la  vue  de 
Rivoli,  à  Paris,  Le  dixième  d'un  centimètre  cube  d'air  ne  con- 
tenait pas  moins  de  55oooo  germes  !  Ajoutons  à  cela  l'in- 
fluence néfaste  produite  par  l'inhalation  de  la  poussière  inerte, 
connue  agent  physique  irritant  la  surface  pulmonaire,  et  l'on 
comprendra  la  nécessité  de  mesures  radicales  à  cet  égard. 

Le  danger  d'un  seul  calice  pour  tous  les  communiants.  — 
Il  existe  encore  u\w  autre  cause  probable  de  propagation  de 
la  tuberculose,  mais  dans  ce  cas  les  autorités  eclésiastiques  plu- 
tôt que  les  autorités  sanitaires  devraient  intervenir.  Je  veux 
parler  de  la  coutume,  dans  les  églises  protestantes,  de  faire 
boire  tout  le  monde  au  même  calice.  En  Amérique,  quelques 
pasteurs  ont  déjà  inauguré  une  autre  pratique,  et  chaque  com- 
muniant boit  dans  son  propre  verre. 

Quant  a  la  façon  dont  les  gouvernemeDts  ou  les  munici- 
palités devraient  prendre  soin  de  leur  indigents,  prisonniers  et 
aliénés  tuberculeux,  ce  point  sera  traite  en  détail  dans  les 
chapitres  sur  les  sanatoria,  hôpitaux  spéciaux,  dispensaires  et 
colonies  pour  les  phtisiques  pauvres. 

La.  tuberculose  dans  l'armée.  —  Ed  ce  qui  concerne  la 
tuberculose  dans  l'armée,  je  n'ai  aucune  expérience  person- 
nelle à  cet  égard.  Le  meilleur  moyen  d'empêcher  la  propa- 
gation de  la  tuberculose  parmi  les  soldats,  semble  être  d'exa- 
miner tous  les  conscrits  îles  leur  arrivée  au  régiinent3  non 
seulement  par  l'auscultation  et  la  percussion  les  plus  scrupu- 
leuses, mais  aussi  au  point  de  vue  de  la  présence  des  bacilles 


(i)  Miquel .  Annuaire  de  l  Observatoire  de  Montsouris.    Paris,  armée  1 8S  ; , 
p.  538. 


LA   CREMATIOX  Il3 

de  Koch.  Pour  ceux  qui  s'intéressent  à  cette  question,  je  ne 
puis  mieux  faire  que  de  les  renvoyer  aux  articles  remarquables 
de  M.  le  médecin-major  Granjux  dans  la  Revue  de  la  tubercu- 
lose, t.  IV,  p.  87  :  «  De  la  tuberculose  dans  l'armée.  »  Ils  y 
trouveront  les  renseignements  les  plus  précieux  sur  cette  ques- 
tion si  importante  pour  tous  les  pays  qui  entretiennent  une 
armée. 

La  crémation.  —  Comme  mesure  publique  de  prophylaxie 
de  la  tuberculose,  je  désire  dire  quelques  mots  sur  la  créma- 
tion. Il  a  été  déjà  question  plus  haut  (p.  47)  de  la  propagation 
de  la  tuberculose  par  les  vers  de  terre.  Rappelons  ce  que  dit 
Sir  Spencer  Wells  à  ce  propos  :  «  De  quelque  nature  que  soient 
les  bacilles,  tuberculeux,  typhiques  ou  cholériques,  il  est 
incontestable  que  les  vers  si  nombreux  et  si  actifs  peuvent 
conserver  les  bacilles  dans  leurs  corps  pendant  de  longs  mois 
sans  leur  faire  perdre  rien  de  leur  virulence  ni  de  leur  faculté 
de  reproduction.  Ce  sont  là  les  motifs  sur  lesquels  je  m'appuie 
pour  affirmer  que  les  corps,  après  la  mort,  devraient  être  inci- 
nérés et  non  enterrés.  » 

On  a  élevé  de  nombreuses  objections  contre  la  crémation. 
La  plus  importante,  la  seule  valable  peut-être,  au  point  de  vue 
médical,  c'est  que  la  crémation  pourrait  servir  à  faire  dispa- 
raître les  preuves  d'un  empoisonnement. 

A  cela,  M.  L.-H.  Petit  répond  avec  raison  :  «  Pour  la  tuber- 
culose, cet  argument  est  sans  valeur;  sauf  dans  des  cas  spé- 
ciaux, ceux  de  méningite  par  exemple,  où  la  maladie  peut 
marcher  très  vite,  la  mort  chez  les  tuberculeux,  qu'il  s'agisse  de 
phtisie,  de  maux  de  Pott,  de  tumeurs  blanches,  etc.,  n'arrive 
qu'après  une  maladie  de  longue  durée,  pendant  laquelle  on  a 
eu  le  temps  d'établir  le  diagnostic,  et  lorsqu'un  de  ces  malades 
meurt,  on  peut  affirmer  sans  le  moindre  doute  qu'il  est  mort  de 
maladie  et  non  d'empoisonnement.  Et  encore,  s'il  est  des  cas 
qui  paraissent  douteux,  rien  n'empêche  de  faire  l'autopsie,  et 
de  détruire  par  le  feu,  après  l'action  médico-légale,  les  restes 
du  défunt.  » 

En  outre,  la  crémation  a  l'avantage  de  supprimer  toutes  les 
arrière-pensées  qu'inspirent  les  cimetières  relativement  à 
l'intégrité  des  milieux,  d'éluder  l'énorme  souci  qu'impose  aux 

Kkopf.  Sanatoria.  8 


jlj  PROPHYLAXIE    l'LBUQVE 

municipalités  l'obligation  de  déplacer  incessamment  leurs 
cimetières  et  de  trouver  à  la  périphérie  des  villes  de  vastes  ter- 
rains désormais  sans  charmes  et  sans  rapport,  pour  y  installer 
des  nécropoles  que  l'accroissement  de  population  dans  la  cité 
vivante  refoulera  à  bref  délai  (i). 

La  meilleure  méthode  pour  encourager  la  crémation  est  sans 
doute  de  l'opérer  à  des  prix  raisonnables,  et  gratuitement  poul- 
ies familles  indigentes. 

Il  fonctionne  actuellement,  en  Europe  et  en  Amérique, 
60  crematoria.  L'Italie  à  elle  seule  n'en  a  pas  moins  de  24, 
puis  viennent  les  Etats-Unis  avec  23,  l'Allemagne  avec  4i 
l'Angleterre  avec  ii,  la  France  avec  2,  la  Suède  avec  2,  le 
Danemark  avec  1,  la  Suisse  avec  1. 

L'intempérance,  l'abus  de  l'alcool,  etc.  —  L'intempérance, 
surtout  l'abus  de  l'alcool,  la  pauvreté  et  la  misère,  sont  incon- 
testablement les  facteurs  étiologiques  les  plus  importants  de 
la  phtisie  pulmonaire.  Faire  des  lois  pour  empêcher  la  con- 
sommation excessive  de  l'alcool,  prévenir  autant  que  possible 
la  dégradation,  la  pauvreté  et  la  misère,  sera  le  devoir  des 
hommes  d'Etat  et  des  philanthropes  de  tous  les  pays. 


(1)  Arnolld.  Nouveaux  éléments  d'hygiène,  Paris,  i8g3 


CHAPITRE   IX 
Traitement  préventif  de  la  phtisie  pulmonaire. 


Dans  les  chapitres  sur  la  prophylaxie  individuelle  et  la  pro- 
phylaxie publique,  nous  avons  essayé  de  signaler  toutes  les 
éventualités  permettant  au  bacille  de  la  tuberculose  de  péné- 
trer dans  le  corps  humain.  .Nous  avons  suggéré  les  moyens 
qui  nous  paraissent  les  meilleurs  pour  éviter  la  transmission 
et  la  propagation  de  la  tuberculose;  mais  nous  avons  reconnu 
que,  malgré  la  stricte  application  des  lois  sanitaires,  il  y  aura, 
sans  doute  pendant  longtemps  encore,  des  chances  multiples 
de  contracter  la  phtisie  pulmonaire.  Nous  trouverons  toujours 
des  malades  peu  scrupuleux  sur  la  façon  dont  ils  se  débar- 
rassent de  leurs  expectorations,  et  le  danger  de  consommer 
des  produits  d'alimentation  tuberculeux  n'est  vraisemblable- 
ment pas  près  de  disparaître,  étant  donné  le  relâchement  avec 
lequel  les  lois  contre  la  tuberculose  bovine  sont  exécutées 
dans  beaucoup  de  pays. 

Qualités  bactéricide  et  piiagocytique  de  l'organisme.  — 
L'espoir  que  les  bactério-thérapeutes  arriveront  à  trouver 
un  remède  immunisant  contre  la  tuberculose  n'est  malheureu- 
sement pas  encore  réalisé.  Nous  saluerons  avec  joie  le  jour 
où  l'on  aura  donné  à  l'humanité  une  vaccine  contre  la  tubercu- 
lose ;  mais  en  attendant,  si  nous  nous  appliquons  à  instituer 
un  traitement  prophylactique,  nous  mettrons  sans  doute  un 
grand  nombre  d'êtres  humains  à  l'abri  du  fléau.  Pour  cela,  il 
convient  déplacer  l'organisme  en  état  de  défense.  Nous  savons 
que  la  muqueuse  nasale  normale  est  bactéricide  (i),  et  que  le 


(i)  R.  Y\  urtz  et  Lermoyez.   Du  rôle  bactéricide  du  mucus   nasal.    Comptes 
vendus  de  la  Soc.  de  Biol.,   i8g3,  p.  736. 


,,i;  TRAITEMENT   PREVENTIF 

sang' do  l'homme  sain  est  doué  du  pouvoir  phagocytique,  car, 
si  l'organisme  humain  ne  possédait  pas  ces  moyens  de 
défense,  qui  peut  dire  si  [ont  le  inonde  ne  sérail  pas  tuber- 
culeux ? 

Le  traitement  prophylactique,  selon  la  conception  de  la 
phtisio-thérapie  moderne,  a  pour  but  de  mettre  l'homme  qui 
est  en  danger  de  devenir  tuberculeux  en  état  de  résister  à 
l'invasion  des  bacilles  de  Koch. 

Physique  kt  caractère  d'un  individu  prédisposé.  —  Afin  <lr 
saisir   les    indications    de    la  thérapeutique   préventive   et   «le 

bien  comprendre  la  nécessité  des  mesures  que  nous  allons 
décrire,  il  sera  peut-être  bon  d'examiner  brièvement  le  phy- 
sique et  le  caractère  d'un  sujet  prédisposé  à  la  phtisie. 

S'il  s'agit  d'un  enfant,  il  est  (.l'une  taille  trop  petite,  ou  bien 
au  contraire  trop  élevée  pour  son  âge,  avec  la  poitrine  étroite. 
Il  sera  irritable,  nerveux,  anémique,  mauvais  mangeur,  ayant 
une  digestion  irrégulière,  parfois  constipé,  parfois  soutirant 
de  diarrhée,  enclin  à  toutes  les  maladies  de  l'enfance,  et 
néanmoins,  au  point  de  vue  intellectuel,  rarement  en  arrière  de 
ses  camarades  plus  robustes.  Il  est  ennemi  des  jeux  au  dehors, 
et  comme,  à  cause  de  sa  constitution  délicate, on  lui  permet  tous 
ses  caprices,  son  caractère  est  souvent  celui   d'un   enfant  gâté. 

L'adulte  candidat  à  la  phtisie  pulmonaire  ne  diffère  que 
peu  de  son  jeune  frère.  Le  physique  est  le  même  ;  les  parti- 
cularités de  l'état  mental  sont  plus  prononcées;  le  sujet  est 
parfois  sanguin.  D'un  autre  côté  l'anxiété,  les  désappointe- 
ments, et  surtout  les  chagrins  d'amour  et  d'autres  soucis  ana- 
logues suffisent  souvent  pour  amener  le  développement  rapide 
delà  maladie.  Le  jeune  homme  mange  peu;  chez  lui  la  pres- 
sion artérielle  est  basse;  la  faiblesse  musculaire  et  l'état  de 
dépression  nerveuse  entravent  la  respiration.  L'influence  bien- 
faisante d'une  respiration  normale  ne  s'exerce  plus;  le  cœur 
est  obligé  de  travailler  davantage  :  d'où  un  état  continuel  d'ex- 
citation cardiaque.  Les  troubles  circulatoires  des  poumons 
empêchent  la  nutrition  de  ces  organes,  et  ainsi  le  terrain 
se  trouve  tout  préparé  pour  l'invasion  des  bacilles  tuber- 
culeux. 

La  diminution  du   pouvoir  de   résistance  rend  anémique  et 


FEMMES  TUBERCULEUSES  ENCEINTES  117 

particulièrement  disposé  aux  inflammations  aiguës  des  mu- 
queuses ou  des  séreuses,  tandis  que  les  déterminations 
catarrhales  des  organes  respiratoires  supérieurs  deviennent 
de  plus  en  plus  fréquentes  et  ont  de  la  tendance  à  gagner 
les  petites  bronches,  et  finalement  le  tissu  pulmonaire. 

Cause  des  rhumes.  —  Pourquoi,  peut-on  se  demander,  ces 
sujets  s'enrhument-ils  si  facilement  et  si  fréquemment?  Peut- 
être  cela  tient-il  à  ce  que  leur  système  vasomoteur  participe 
à  l'affaiblissement  général,  et  à  ce  que  le  moindre  changement 
de  température,  la  moindre  exposition  à  l'air  d'une  partie  du 
corps  ordinairement  couvert,  suffît  pour  entraver  la  circulation 
périphérique  et  produire  des  congestions  réflexes  de  la  mu- 
queuse bronchique. 

11  semble  alors  évident  que  l'insuffisance  d'air  fourni  aux 
organes  respiratoires,  et  l'augmentation  de  susceptibilité  aux 
moindres  changements  de  température,  sont  les  principaux 
agents  qui  favorisent  la  pénétration  et  le  développement  du 
bacille  de  la  phtisie.  En  conséquence,  pour  prévenir  ou  amé- 
liorer les  conditions  créées  par  l'insuffisance  d'air  nous  devons 
recourir  à  l'aérothérapie,  et  pour  stimuler  le  système  vaso- 
moteur  il  faut,  parmi  les  divers  agents  thérapeutiques,  donner 
la  préférence  à  l'hydrothérapie,  laquelle,  en  raison  de  ses 
effets  salutaires  secondaires,  peut  être  considérée  comme  le 
plus  efficace. 

Conseils  aux  femmes  tuberculeuses  enceintes.  —  Que.  la 
prédisposition  à  la  phtisie  soit  héréditaire  ou  acquise,  le  trai- 
tement prophylactique  sera  le  même.  La  différence  entre  les 
deux  n'est  que  dans  les  périodes  de  l'institution  du  traitement. 
Dans  le  cas  de  prédisposition  acquise  on  devra  commencer  le 
traitement  dès  qu'on  s'apercevra  de  l'état  des  choses.  Pour 
l'enfant  de  souche  tuberculeuse,  le  traitement  prophylactique 
devrait  commencer  in  utero.  Dans  le  chapitre  sur  la  prophy- 
laxie publique  nous  avons  parlé  en  détail  des  mesures  à 
prendre  de  la  part  des  autorités  publiques  pour  les  femmes 
enceintes  tuberculeuses  et  sans  moyens.  Nous  allons  donner 
ici  quelques  conseils  pour  la  mère  et  pour  la  famille  de  l'en- 
fant qui  a  le  malheur  d'être  de  procréation   tuberculeuse.  La 


nK  TRAITEMENT  PREVENTIF 

future  mère  devrait  abandonner  le  corset,  el  ne  porter  que  des 
vêtements  qui  lui  permissent  une  respiration  thoracique  et 
abdominale  entièrement  libre . 

Nous  reviendrons  sur  ce  sujet  en  parlant  des  vêlements  des 
phtisiques  en  général;  nous  voulons  seulement  attirer  l'a t- 
tention  sur  ce  l'ait  que  la  mère,  dans  son  intérêt  autant  que 
dans  l'intérêt  de  son  enfant,  devrait  toujours  s'habiller  de  façon 
que  sa  respiration  et  sa  circulation  ne  fussent  gênées  nulle 
part.  Plus  les  inspirations  seront  profondes  et  plus  l'air  que  la 
mère  inspire  sera  abondant,  plus  le  sang  qui  nourrit  le  fœtus 
sera  oxygéné.  La  mère  devrait  faire  de  véritables  exercices 
respiratoires  sous  la  direction  de  son  médecin.  Elle  devrait 
surtout  vivre  à  l'air  libre,  et  mener  une  vie  aussi  hygiénique 
cl  tranquille  que  possible. 

AÉROTHÉRAPIE  COMME   MOYEN  PROPHYLACTIQUE.   —   Le  IlOUVCaU- 

né  a  autant  besoin  d'air  pur  que  la  mère,  et  la  chambre  où  il 
dort  devra  toujours  être  bien  aérée.  Quand  l'enfant  sort  pour 
prendre  l'air,  le  voile  épais  et  presque  imperméable  dont  on 
lui  recouvre  le  visage  doit  être  abandonné.  Ces  voiles,  souvent 
serrés  autour  de  la  tète,  compriment  le  nez,  et  rendent  difficile 
sinon  impossible  la  respiration  nasale  de  l'enfant,  que  la  mère 
s'étonne  de  voir  respirer  par  la  bouche.  Une  autre  cause  assez 
fréquente  de  la  respiration  par  la  bouche  chez  les  enfants  et 
quelquefois  chez  les  adultes,  est  duc  à  la  présence  de  végé- 
tations adénoïdes  clans  le  rétropharynx,  à  l'hypertrophie  des 
amygdales  ou  aux  deux  affections  à  la  fois.  Ces  productions, 
de  même  que  toute  autre  cause  d'obstruction  nasale,  connue 
la  déviation  du  sepluin,  les  excroissances,  l'hypertrophie  des 
cornets,  les  polypes,  etc.,  doivent  être  enlevées  ou  réséquées, 
si  l'on  veut  protéger  l'individu  contre  le  catarrhe  nasal  chro- 
nique, pharyngien  et  laryngien,  avant-coureurs  de  tant  d'affec- 
tions pulmonaires.  Avec  de  telles  obstructions  dans  le  nez  ou 
le  nasopharynx  la  respiration  physiologique  est  impossible,  cl 
c'est  seulement  après  la  suppression  de  tous  les  obstacles  à 
l'entrée  el  à  la  sortie  libres  et  faciles  de  l'air  dans  les  voies 
aériennes,  que  l'on  peut  espérer  obtenir  un  bénéfice  réel  d'un 
système  d'aérothérapie  quelconque. 

Je  considère  le  bain  d'air  et  le  bain  tic  soleil  pour  les  enfants 


EXERCICES  RESPIRATOIRES  119 

en  bas  âge  comme  très  salutaires.  Laissez  les  bébés  se  traîner 
nus  tous  les  jours  pendant  quelque  temps,  quanti  il  fait 
froid  dans  des  chambres  bien  chauffées,  et  en  été  dans  une 
chambre  baignée  par  les  rayons  du  soleil  :  ils  deviendront  moins 
susceptibles  au  froid  que  s'ils  étaient  toujours  soigneusement 
emmaillotés.  Dans  les  endroits  où  il  est  impossible  d'éviter  les 
inhalations  de  poussière  de  charbon  ou  autres  substances 
irritables,  une  toilette  nasale  journalière  avec  une  solution 
antiseptique  faible,  ou  peut-être  mieux  encore  avec  de  l'eau 
tiède  préalablement  bouillie,  sera  faite  aux  petits  enfants 
jusqu'à  ce  qu'ils  soient  assez  âgés  pour  se  servir  du  mou- 
choir. 

Exercices  respiratoires,  chant  et  déclamation  a  l'air  lirre. 
—  Aussitôt  que  l'âge  et  l'intelligence  de  l'enfant  le  permettront, 
les  exercices  respiratoires  lui  seront  enseignés.  Il  apprendra  à 
les  aimer,  comme  la  plupart  aiment  les  exercices  gymnas- 
tiques.  Nos  écoles  seront  comme  des  modèles  de  ventilation. 
Apprendre  aux  enfants  à  respirer,  à  rester  assis  ou  debout  et  à 
marcher  de  façon  à  développer  leur  corps  et  à  ne  gêner  nulle 
part  leur  croissance  naturelle,  constituera  une  partie  du 
programme  des  cours  journaliers.  Chaque  école  devra  avoir 
une  grande  cour  ou  un  jardin  sur  le  toit(i),  où  les  élèves  rece- 
vront alternativement  leur  instruction.  Dans  les  communes 
rurales  l'instruction  à  l'intérieur  pendant  l'été  sera  une  excep- 
tion et  non  une  règle.  Le  chant  et  la  déclamation  seront  surtout 
enseignés  à  l'extérieur. 

Avant  de  laisser  de  côté  ce  point  d'hygiène  scolaire,  je  ne 
puis  m'empècher  de  répéter  les  paroles  de  mon  ami  le  Dl  W- 
Hitchcock  (2),  que  j'ai  eu  la  bonne  fortune  d'entendre  l'année 
dernière  quand  j'assistais  à  la  Convention  sanitaire  de  l'Etat  de 
Californie.  En  parlant  de  la  gymnastique  comme  mesure 
hygiénique,  il  a  fait  allusion  au  manque  fréquent  de  développe- 
ment du  thorax,  particulièrement  frappant  chez  les  prédispo- 
sés aux  maladies  pulmonaires  :  «  Il  n'y  a  pas  de  doute,  a-t-il  dit, 


(1)  Roofgarden. 

(2)  W.-W.  Hitchcock.  The  gymnasium  from  thc  staiulpoint  of  tlie  sanitarien. 
Transactions  ofthe  IVth  California  Sanitary  Convention . 


TU.  111 EMEXT  PREVENTIF 


<^£> 


que  si  le  développement  du  thorax  recevait  autant  de  soins  que 
ceux  que  l'on  donne  habituellement  au  cerveau,  la  tuberculose 
disparaîtrait  presque  entièrement.  »  Ces  paroles  m'ont  beau- 
coup impressionné,  car  elles  sont  très  justes. 

Quoique  je  me  réserve  de  consacrer  un  chapitre  spécial  à 
l'aérothérapie,  je  veux  donner  dès  maintenant  une  description 
des  exercices  respiratoires  que  je  recommande  aux  prédisposés, 
aux  anémiques,  à  tous  les  entants  et  adultes  qui  respirent  mal 
et  aussi  aux  phtisiques,  mais  pour  ces  derniers  avec  les  gra- 
dations ou  les  modifications  que  leur  cas  comporte.  Ce  sont 
aussi  ces  exercices  que  je  voudrais  voir  incorporer  dans  le 
programme  de  toutes  nos  écoles  publiques. 

Debout,  dans  la  situation  verticale,  la  bouche  fermée,  l'enfant 

ou  l'adulte  place  les  bras 
dans  la  position  de  la  nata- 
tion, et  fait  une  inspiration 
de  luis  en  haut  en  ramenanl 
les  bras  lentement  en  arrière, 
les  paumes  des  mains  en  de- 
hors, jusqu'à  ce  qu'ils  se  ren- 
contrent derrière  le  dos  ;  il 
garde  l'air  pendant  quelque 
temps,  alors  que  la  poitrine 
est  projetée  en  avant,  et  ra- 
mène un  peu  plus  rapide- 
ment les  bras  pendant  l'ex- 
piration (voir  fig.  4)-  La 
durée  de  l'inspiration  devienl 
ainsi  un  peu  plus  longue  que 
la  durée  de  l'expiration.  Pour 
faciliter  le  mouvement  des 
bras  en  arrière  il  est  bon  de 
se  soulever  pendant  l'inspi- 
ration sur  la  pointe  des  pieds, 
et  de  descendre  pendant  les 
mouvements  d'expiration. 
Meissen  conseille  d'accompagner  l'expiration  de  la  pronon- 
ciation rapide  du  mot  «  eins  »,  pour  expulser  autant  que  pos- 
sible l'air  résidual.  Le  mot  «  anse  »  en  français  demande  le 


Fis 


Exercice  respiratoire. 


EXERCICES  RESPIRATOIRES  I2I 

même  effort,  mais  je  crois  qu'il  est  encore  plus  efficace    de 
faire  l'expiration  entièrement  par  le  nez. 

De  plus,  je  fais  suivre  immédiatement  chaque  acte  respira- 
toire par  un  second  effort  expiratoire.  Celui-ci  a  pour  but 
d'expulser  autant  que  possible  l'air  supplémentaire,  et  peut 
être  efficacement  aidé  par  la  supination  des  bras,  en  les  pres- 
sant contre  le  thorax.  Si  l'on  considère,  d'une  part,  que  l'air 
d'une  respiration,  c'est-à-dire  le  volume  qui  est  inspiré  et 
expiré  dans  une  respiration  ordinaire,  est  seulement  de 
5oo  centimètres  cubes,  tandis  que  le  volume  qui  peut  être 
inspiré  après  une  respiration  ordinaire  est  de  i  5oo  centimètres 
cubes,  et,  d'autre  part,  que  l'air  de  réserve,  le  volume  qui  peut 
être  facilement  expulsé  après  une  respiration  ordinaire  atteint 
de  i  240  à  1  800  centimètres  cubes,  on  peut  facilement  se  rendre 
compte  de  la  valeur  des  exercices  respiratoires,  et  aussi  de 
l'utilité  du  second  effort  expiratoire. 

Le  fait  que  dans  la  majorité  des  cas  le  développement  des 
lésions  tuberculeuses  commence  au  sommet  des  poumons  a 
été  expliqué  par  l'hypothèse  d'une  insuffisance  de  l'inspiration 
dans  cette  partie  des  poumons.  Bien  que  cette  théorie  ait  beau- 
coup de  défenseurs,  je  suis  d'accord  avec  Hanau  (1),  qui  la 
considère  comme  erronée.  Au  contraire,  les  sommets  des 
poumons  inspirent  très  bien,  presque  trop  bien- pourrait-on 
dire,  car  la  poussière  et  toutes  sortes  de  microorganismes  y 
pénètrent  plus  facilement  que  dans  les  autres  parties  du  pou- 
mon, ainsi  qu'on  peut  s'en  convaincre  dans  les  autopsies 
exécutées  avec  soin. 

Ce  qui  est  en  défaut,  c'est  la  fonction  expiratoire  des  som- 
mets. Une  expiration  complète,  suivie  d'un  effort  expiratoire 
forcé  comme  il  est  décrit  plus  haut,  est  selon  moi  le  seul 
moyen  d'améliorer  cette  condition  défectueuse  et  de  prévenir 
ainsi  la  stagnation  et  la  congestion  qui,  on  le  sait,  favorisent 
admirablement  le  développement  des  bacilles. 

En  règle  générale,  les  exercices  respiratoires  devraient  tou- 
jours avoir  lieu  à  l'air  libre  ou  au  moins  devant  une  fenêtre 
ouverte.  Il  n'est  pas  toujours  facile  de  faire  au  dehors  le  mou- 


(1)  A.    Haxau.   Beitrage  zur  Pathologie   der   Lungenkrankheiten .   Zeitschr. 
fur  /clin.  Med.,  1887,  t.  XII. 


in  TRAITEMENT  PREVENTIF 

vement  des  liras  sans  attirer  sur  soi  l'attention.  Je  recommande 
de  remplacer  alors  les  mouvements  des  bras  par  une  simple 
rotation  en  arrière  de  l'articulation  scapulo-humérale  pendant 
l'inspiration,  et  une  rotation  en  avant  durant  l'expiration.  La 
rotation  en  arrière  accomplie,  on  retient  l'air  de  la  même  façon 
cpie  ci-dessus.  Cet  acte  respiratoire  sera  également  suivi  de 
l'expulsion  forcée  que  nous  venons  de  décrire.  Tout  cela  peut 
se  faire  sans  se  gêner,  en  se  promenant,  et  sans  que  personne 
s'en  aperçoive. 


■~f.:\; 


Procédé  pour  empêcher  les  enfants  de  se  tenir  courbés. 
Beaucoup  d'enfants  ou  de  jeunes  gens  d'une  {(institution 
l'aibleonl  l'habitude  île  se  tenir  toujours 
plus  ou  moins  courbés.  Cette  position 
est  des  plus  fâcheuses,  car  elle  tend  à 
aplatir  davantage  la  poitrine,  de  sorte 
que  le  diamètre  antéro-postérieur  di- 
minue de  plus  en  plus,  à  mesure  que 
le  diamètre  longitudinal  augmente. 
Pour  corriger  celle  position,  je  con- 
seille l'exercice  respiratoire  suivant  : 
le  malade  se  tient  aussi  droit  que  pos- 
sible ;  il  place  les  mains  sur  les  han- 
ches, le  pouce  en  avant  et  les  autres 
doigts  en  arrière  ;  alors,  avec  la  bouche 
fermée,  il  fait  une  aspiration  profonde 
pendant  laquelle  il  se  penche  en  arrière, 
reste  quelques  moments  dans  celle  si- 
tuation en  gardant  l'air  dans  ses  pou- 
mons, puis  revient  pendant  l'expiration 
faite  un  peu  plus  rapidement  à  la  posi- 
tion originale  (voirfig.  5). 

La  position  courbée  est  souvent  aussi 
le  résultat  de  la  manière  dont  reniant 
ou  l'adolescent  a  l'habitude  de  dormir. 
Un  lil  trop  doux  avec  un  et  parfois 
même  deux  oreillers  non  seulement  procure  un  sommeil 
moins  bon  et  moins  reposant,  mais  encore  a  tendance  à 
produire    l'attitude    courbée.   Dormir    sur    un    matelas    plutôt 


Fig-.  5.  —  Exercice  respiratoire 
destiné  à  corriger   l'attitude 

courbée . 


HYDROTHERAPIE  I23 

dur  avec  un  oreiller  très  mince,  ou  même  sans  oreiller,  se  tenir 
sur  le  côté  gauche  ou  droit  avec  les  bras  à  côté  ou  en  avant  de  la 
poitrine,  de  façon  que  l'on  repose  presque  sur  la  poitrine,  est  la 
meilleure  position  à  prendre.  Les  couvertures  ne  doivent  pas 
être  trop  lourdes  ;  les  lits  de  plumes  et  les  édredons  nous 
semblent  peu  hygiéniques,  et  devraient  être  abandonnés  par 
tous  ceux  qui  veulent  devenir  vigoureux.  Il  est  bien  entendu 
que  tout  le  inonde,  mais  surtout  les  personnes  prédisposées  à 
la  phtisie,  devraient  toujours  dormir  fenêtres  ouvertes. 

Les  prédisposés,  aussi  bien  que  les  malades,  devraient 
prendre  soin  de  n'exécuter  les  exercices  respiratoires  qu'à  l'air 
libre,  ou  en  des  endroits  où  l'air  est  pur,  et  de  ne  jamais  les 
faire  à  l'état  de  fatigue  ni  jusqu'au  point  de  se  fatiguer.  De 
plus,  les  femmes  et  les  jeunes  filles  se  rappelleront  qu'il  est 
inutile  de  procéder  aux  exercices  respiratoires  avec  un  corset 
ou  avec  des  jupes  serrées  de  telle  façon  qu'une  respiration 
profonde  où  tous  les  muscles  abdominaux  et  costaux  entrent  en 
jeu  devient  impossible. 

Enfin,  on  ne  saurait  trop  répéter  aux  sujets  prédisposés  à  la 
phtisie  que,  vivre  autant  que  possible  à  l'air  libre,  respirer 
jour  et  nuit  un  air  pair  et  frais,  est  pour  eux  l'évangile  qui  les 
sauvera  d'une  mort  prématurée. 

Hydrothérapie  comme  moyen  d'endurcissement.  —  L'hydro- 
thérapie, qui  donne  une  tonicité  plus  grande  au  système 
vasomoteur,  sera  aussi  appliquée  dès  le  jeune  âge  comme 
mesure  préventive  de  la  phtisie  pulmonaire.  Un  enfant  de 
quelques  mois  peut  supporter  sans  inconvénient,  aussitôt  après 
son  bain  chaud,  une  lotion  froide  faite  rapidement  avec  l'éponge 
et  suivie  d'une  friction  relativement  viamireuse  à  l'aide  d'une 
serviette-éponge.  Quand  l'enfant  avancera  en  âge,  on  lui 
apprendra  non  seulement  à  s'éponger  après  son  bain,  mais  à 
se  laver  le  visage,  le  cou  et  la  poitrine  tous  les  matins  à  l'eau 
froide.  L'utilité  des  bains  et  bassins  de  natation  gratuits  ou 
à  un  prix  modéré,  construits  de  façon  à  rester  ouverts  toute 
l'année  (c'est-à-dire  avec  des  courants  d'eau  chaude  en  hiver), 
n'est  pas  niable,  car  rien  n'est  aussi  salutaire  et  hygiénique 
pour  les  personnes  de  tout  âge  que  les  bains  réguliers  combinés 
avec  les  exercices  de  natation. 


,,j  traitement  préventif 

Edi  cation  de  la  peau  et  du  système  nerveux  a  l'eau  froide. 
— ■  Pour  les  individus  anémiques,  <|iii  sont  en  général  des 
candidats  à  La  phtisie  pulmonaire,  des  manœuvres  graduées 
d'hydrothérapie  semblent  agir  presque  comme  un  traitemenl 
spécifique.  Qu'il  n'y  ait  aucun  danger  à  faire  des  applications 
d'eau  froide  soi!  en  allusions,  soil  en  douches,  c'est  ce  que 
l'expérience  a  nettement  démontré  depuis  des  années.  Et  pour- 
quoi y  en  aurait-il  ?  Tout  ce  qui  importe,  c'est  d'assurer  une 
réaction  complète,  et  une  éducation  de  la  peau  et  du  système 
nerveux  avant  l'application  de  la  douche.  En  ceci  je  ne  lais 
aucune  exception  entre  un  individu  simplement  prédisposé  à  la 
phtisie,  ou  un  sujet  anémique,  ou  un  malade  avec  tous  les 
symptômes  de  la  phtisie  développée.  Je  commence  par  un 
massage  sec  pendant  quelques  jours  et  parfois  des  semaines; 
si  la  peau  est  par  trop  sèche,  j'emploie  quelque  substance 
grasse,  de  préférence  l'huile  de  l'oie  de  morue.  Ensuite, 
durant  à  peu  près  Je  même  laps  de  temps,  je  pratique  des 
frictions  avec  de  l'alcool,  puis  avec  moitié  alcool  et  moitié  eau, 
cl  finalement  la  friction  à  l'eau  froide  seule  ;  alors  vient  le  bain 
froid  à  l'éponge,  l'affusion,  et  eu  dernier  lieu  la  douche.  La  fric- 
tion à  l'aide  des  mains  directement  en  contact  avec  la  peau  ou 
à  l'aide  d'une  grande  serviette  sera  continuée  après  la  douche 
jusqu'à  ce  que  le  malade  soit  bien  sec  <■[  réchauffé.  Une  petite 
promenade  ou  un  repos  au  lit  suivra,  selon  le  pouvoir  réactif 
du  sujet.  La  douche  froide  ne  durera  jamais  plus  tic  vingt  à 
vingt-cinq  secondes,  et,  comme  règle  absolue,  on  commencera 
par  cinq  secondes  au  plus,  en  augmentant  graduellement.  A 
quelle  température  doit  être  l'eau  pour  favoriser  l'endurcisse- 
ment? On  doit  commencera  -f- 200,  puis  descendre  progres- 
sivement, sans  jamais  dépasser  -f-  10"  ou  +  ()"• 

Installation  de  l'hydrothérapie  dans  la  chambre  du  malade. 
—  Ma  manière  favorite  consiste  à  appliquer  la  douche  premiè- 
rement en  forme  de  pluie  sur  tout  le  corps,  puis  à  diriger  un 
petit  jet  avec  un  peu  plus  de  force  sur  les  sommets  des 
poumons.  Au  cas  où  celle  pratique,  dans  la  clientèle  privée, 
présente  des  inconvénients,  j'ai  recours  à  la  méthode  suivante, 
1res  simple  :  une  chaise  de  bois  est  placée  dans  un  grand  lub 
circulaire;  le    malade  s'assied   à  califourchon   sur  la   chaise, 


MALADIES  PIITISTOGENETIQUES  i25 

s'appuyant  avec  les  mains  sur  le  dossier  et  penchant  légère- 
ment la  tète  en  avant.  Alors,  deux,  quatre  cruches  et  même 
plus  d'eau  froide  ou  tempérée  sont  rapidement  versées  sur 
les  épaules.  Dans  les  cas  où  la  réaction  est  faible,  le  malade 
est  vivement  ramené  dans  son  lit  chaud,  même  s'il  n'est  pas 
complètement  sec. 

Le  meilleur  moment  pour  appliquer  l'hydrothérapie  est  le 
matin,  environ  une  demi-heure  après  un  léger  repas.  Les 
malades  habitués  à  nos  copieux  déjeuners  américains  les  pren- 
dront après  leur  toilette  et  leur  promenade  matinale,  mais  ils 
auront  soin  d'ingérer  un  verre  de  lait  avec  un  morceau  de  pain 
grillé  et  beurré  avant  de  quitter  la  maison. 

Dans  quelques  cas  je  trouve  sage,  afin  de  surmonter  l'ap- 
préhension de  l'eau  froide,  de  commencer  seulement  par  des 
aff usions  ou  épongements  partiels. 

De  la  gymnastique,  du  sport  et  du  surmenage.  —  En  dehors 
de  l'aérothérapie  et  de  l'hydrothérapie  il  y  a  des  gymnastiques 
ordinaires  et  des  sports  modérés,  auxquels  les  gens  prédis- 
posés à  la  phtisie  peuvent  s'adonner  pour  développer  leur 
constitution.  Seulement  il  est  toujours  nécessaire  de  demander 
conseil  au  médecin,  car  malheureusement  il  n'est  pas  du  tout 
rare  d'observer  des  résultats  néfastes  en  conséquence  d'exer- 
cices exagérés  de  sport. 

J'ai  eu  l'occasion  de  noter  assez  souvent,  parmi  nos  athlètes 
américains,  un  développement  rapide  de  la  phtisie.  Il  faut  cher- 
cher l'explication  de  cette  déchéance  dans  le  fait  que  plus 
un  organisme  se  trouve  en  état  de  fatigue,  plus  il  est  sujet  à 
l'invasion  des  microorganismes  pathogènes.  Le  sport  exagéré 
est  donc  particulièrement  dangereux  pour  les  gens  prédisposés 
à  la  phtisie. 

Le  surmenage  physique  et  intellectuel  devrait  être  épargné 
aux  enfants  et  aux  jeunes  gens  débiles.  Ce  conseil  est  d'une 
importance  particulière  pour  les  prédisposés  parvenus  à  l'âge 
île  puberté.  Les  effets  du  surmenage  physique  se  remarquent 
dans  l'armée  française,  où,  dès  la  première  année,  on  élimine, 
d'après  le  D1'  Beaulavon,  six  hommes  sur  mille  pour  tuberculose. 

Maladies  phtisiogénétiques.   —  Pendant  les  épidémies   de 


,26  TRAITEMENT  PREVENTIF 

grippe  les  gens  tuberculisables  devraient  être  particulièrement 
prudents.  Pour  eux  la  grippe  est  une  maladie  vraiment  dange- 
reuse, surtout  si  le  traitement  est  négligé,  car  elle  laisse  sou- 
vent l'organisme  dans  un  état  de  faiblesse  tel  qu'il  no  peut 
guère  résister  au  développement  d'une  tuberculose  contractée 
dans  ces  conditions.  Ce  que  nous  venons  de  dire  de  la  grippe 
s'applique  également,  niais  à  un  degré  moindre,  à  la  pneu- 
monie, à  la  bronchite,  à  la  fièvre  typhoïde,  à  la  syphilis,  à  la 
variole,  à  l'alcoolisme  et  aux  diverses  maladies  de  l'enfance. 

Mai  vais  mangeurs.  —  Souvent  l'on  rencontre  des  enfants 
qui  semblent  nés  mauvais  mangeurs,  ou  qui  présentent  une 
aversion  héréditaire  pour  la  viande,  surtout  pour  les  substances 
grasses.  Je  connais  des  cas  où  les  sujets,  arrivés  à  l'âge  adulte, 
n'avaient  pas  encore  mangé  de  beurre.  Il  n'est  pas  du  tout 
nécessaire  que  ces  enfants  soient  d'origine  tuberculeuse,  m;iis 
ils  deviendront  néanmoins  des  prédisposés  à  la  phtisie,  si  on 
ne  les  corrige  pas  de  bonne  heure  tic  leur  mauvaise  habitude. 
Il  importe  beaucoup  d'insister  sur  la  régularité  des  repas  et 
des  selles.  Empêcher  ces  enfants  de  gâter  leur  appétit  par 
l'ingestion  exagérée  de  bonbons  et  autres  substances  sucrées, 
est  une  prescription  qui  relève  du  traitement  prophylactique. 
Enfin,  il  faut  autant  que  possible  par  raisonnement  et  encou- 
ragement persuader  les  mauvais  mangeurs  de  prendre  plus  de 
nourriture.  Parfois  même  il  sera  nécessaire  de  se  montrer  très 
sévère  à  cet  égard. 

Enseignement  de  l'hygiène  et  de  la  physiologie  élémentaire. 
Choix  d'une  profession.  —  Les  enfants  devraient  recevoir  des 
notions  suffisantes  d'hygiène  et  de  physiologie  pour  pouvoir 
mener  une  vie  saine  et  naturelle.  Lé  choix  d'une  profession  est 
d'une  importance  exceptionnelle  pour  les  gens  prédisposés  à 
la  phtisie.  On  retardera  de  quelques  années  l'âge  d'envoyer 
l'enfant  à  l'école,  surtout  si  on  ne  peut  le  faire  admettre 
dans  une  école  spéciale,  analogue  à  celles  dont  nous  avons 
parlé  à  propos  de  la  prophylaxie  publique.  Dans  ce  même  cha- 
pitre nous  avons  énuméré  les  professions  les  plus  nuisibles, 
et  qui  tendent  à  développer  la  phtisie  pulmonaire. 


CHOIX  D'USE  PROFESSION 


127 


Pour  en  finir  avec  le  traitement  prophylactique,  je  ne  peux 
l'aire  mieux  que  de  reproduire  le  conseil  classique  que  Peter  (1) 
donnait  aux  parents  de  tout  enfant  prédisposé  à  la  phtisie  ou  en 
danger  de  devenir  phtisique  : 

«  Faire  de  l'enfant  un  petit  paysan,  changer  la  vie  urbaine 
pour  la  vie  agreste,  la  vie  dans  les  chambres  pour  la  vie  dans 
les  champs,  la  privation  de  soleil  par  l'exposition  au  soleil,  la 
crainte  du  froid  par  sa  recherche,  les  bains  chauds  par  les 
bains  de  rivière,  le  repos  par  l'activité,  les  exercices  intellec- 
tuels par  les  musculaires,  en  un  mot,  vivre  de  la  vie  naturelle  : 
là  est  en  réalité  la  vraie  prophylaxie.  » 


(1)  Peter.  L'hygiène  des  lubereuleux.  Bulletin  de  thérap.,  1887,  et  Clinique 
Médicale.  Paris,  1882. 


CHAPITRE    X 

Des  saiiatoria  et   du  traitement  hygiéuo-diététique 
en  général. 


Définition.  —  Avant  de  décrire  nos  visites  aux  sanatoria,  il 
faut  que  nous  disions  d'abord  ce  que  c'est  qu'un  sanatorium 
pour  phtisiques,  ou  un  établissement  fermé.  C'est  une  institu- 
I ion  où  les  malades  atteints  de  tuberculose  pulmonaire  à  divers 
degrés  sont  reçus  pour  se  soumettre  surtout  au  traitement 
hygiéno-diététique,  sous  la  surveillance  constante  d'un  méde- 
cin. Ht  qu'est-ce  que  ce  traitement  connu  sous  le  nom  d'hy- 
giéno-diététique  ?  C'est  le  traitement  qui  consiste  à  mettre  en 
œuvre  tous  les  moyens  possibles  fournis  par  l'hygiène,  la  dié- 
tétique,  et  aussi  la  matière  médicale  afin  de  guérir  le  malade,  de 
l'instruire,  de  le  mettre  à  l'abri  des  rechutes,  et  de  lui  donner 
des  instructions  hygiéniques  qui  l'empêcheront  de  devenir 
une  source  d'infection  pour  les  autres. 

Etablissement  des  sanatoria.  — Un  élahlit  les  sanatoria  pour 
phtisiques  de  préférence  dans  les  régions  d'une  certaine  alti- 
tude ;  mais  ces  dernières  peuvent  varier  de  1 5o  mètres  à  près  île 
2000  mètres  (Arosa).  Les  climats  où  Ion  construit  les  sana- 
toria sont  extrêmement  variés,  car  on  a  reconnu  qu'il  n'y  a  pas 
de  climats  spécifiques,  mais  seulement  des  régions  où  le  trai- 
tement hygiéno-diététique  peut  être  suivi  plus  avantageusement 
(pic  dans  d'autres;  cela  veut  dire  (pic  le  meilleur  emplacement, 
c'est  l'endroit  où  le  malade  peut  séjourner  le  plus  longtemps 
entièrement  à  l'air  libre.  Néanmoins  il  faut  faire  exception  poul- 
ies climats  trop  chauds  ou  trop  froids.  Mais  au  point  de  vue 
du  choix  d'un  sanatorium  pour  un  malade,  le  médecin  consulté 
doit  veiller  à  ce  (pie  la  différence  entre  le  climat  de  la  demeure 


TRAITEMENT  UYGIEXO-DIETETIQUE  EX  GENERAL  129 

actuelle  et  le  climat  du  sanatorium  où  le  patient  doit  être 
envoyé  ne  soit  pas  trop  grande.  J'ai  souvent  remarqué  qu'une 
cure  entreprise  dans  le  climat  où  le  malade  était  né  ou  avait 
demeuré  pendant  de  longues  années,  était  plus  assurée  que 
pour  les  sujets  qu'on  avait  envoyés  dans  un  climat  doux  et 
souvent  totalement  différent  de  leur  «  home  climate  ». 

Les  objections  qu'on  a  faites  au  point  de  vue  du  danger  de 
l'accumulation  des  phtisiques  dans  un  sanatorium  pour  les 
malades  eux-mêmes,  pour  les  infirmiers,  le  personnel  de  l'éta- 
blissement et  pour  le  voisinage,  sont  aujourd'hui  sans  aucune 
valeur.  Au  cours  de  mes  voyages  d'études,  je  me  suis  particu- 
lièrement renseigné  à  ce  point  de  vue. 

Me  rappelant  les  recherches  de  Debove  sur  la  fréquence  de 
la  mortalité  des  infirmiers  dans  nos  hôpitaux,  celles  de  Bergeret, 
Lombard,  Cornet,  sur  la  mortalité  des  sœurs  de  charité,  de 
Laveran  et  Kirchner  (i)  sur  celle  des  infirmiers  militaires,  j'ai 
demandé  lors  de  ma  visite  dans  les  sanatoria  si  on  avait 
observé  des  cas  de  phtisie  parmi  les  infirmiers  et  infir- 
mières. 

On  m'en  a  rapporté  un  seul  cas  à  Reiboldsgrùn,  où  une  jeune 
fille  de  santé  parfaite  en  apparence  est  entrée  en  service  et  a 
succombé  en  moins  d'un  an.  Des  recherches  ultérieures  ont 
démontré  qu'un  autre  membre  de  la  famille  était  déjà  mort  de 
phtisie. 

A  Falkenstein,  pendant  une  période  de  dix  ans,  220  personnes 
ont  séjourné  au  sanatorium  pour  tenir  compagnie  aux  malades. 
Beaucoup  d'entre  eux  avaient  passé  six  mois  et  plus  dans  l'éta- 
blissement avec  leurs  amis  malades.  Dans  aucun  cas  on  n'a 
observé  d'infection  tuberculeuse. 

M.  le  Dr  Trudeau,  de  l'Adirondack  Cottage  Sanatorium,  m'in- 
formait que  depuis  plus  de  dix  ans  aucun  des  nombreux  em- 
ployés de  l'établissement  n'avait  été  atteint  de  phtisie  pulmo- 
naire; et  tout  cela  grâce  aux  précautions  que  les  malades  et 
les  employés  prennent  au  sujet  de  leurs  expectorations. 

Mon  ami  le  Dr  Hanse  (2),  autrefois  assistant  du  Dr  Trudeau, 


(1)  Stkaus.  La  tuberculose  et  son  bacille,  p.  433. 

(2)  I.  H.  Ha^se.  A  study  of  the  infeetiousness  of  the  dust  in   the  Adirondack 
Cottage  Sanatorium.  New  York  Med.  Record,  1895,  28  déc. 

Knopf.  Sanatoria.  9 


i3o  LES  SANATORIA 

a  fait  dos  inoculations  avec  la  poussière  de  divers  pavillons, 
et  une  seule  fois  le  cobaye  fut  rendu  tuberculeux.  La  pous- 
sière provenait  d'un  pavillon   habité  par  un  phtisique,   qu'on 

avait  réprimandé  à  plusieurs  reprises  à  cause  de  la  négligence 
avec  laquelle  il  surveillait  ses  expectorations. 

Williams  i),  autrefois  médecin  du  Brompton  Hospitalà  Lon- 
dres (hôpital  spécialement  destiné  aux  tuberculeux),  n'a  pas  vu 
au  cours  de  longues  années  plus  de  3  ou  4  ca*  de  contagion 
parmi  le  personnel  de  l'hôpital. 

C'est  cette  rareté  extrême  de  la  contagion  qui  a  amené  Wil- 
liams à  la  nier. 

J'ai  fait  une  visite  prolongée  à  l'hôpital  de  Brompton  il  y  a 
trois  ans  ;  j'ai  pu,  grâce  à  l'extrême  obligeance  du  D'  Perkins, 
visiter  complètement  la  maison,  et  je  peux  expliquer  la  rareté 
de  la  tuberculose  contractée  parles  infirmiers.  Elle  est  due  a 
une  propreté  scrupuleuse,  et,  sauf  quelques  détails,  les  mesu- 
res hygiéniques  à  Brompton  diffèrent  peu  de  celles  des  meil- 
leurs sanatoria  du  continent. 

Nous  voyons  donc  que  dans  un  sanatorium  bien  tenu  et  bien 
surveillé  il  v  a  peu  de  danger  pour  les  infirmiers,  les  méde- 
cins et  autres  membres  du  personnel  de  cet  établissement. 
En  est-il  ainsi  pour  le  voisinage  '.'  Nous  avons  essayé  de 
répondre  à  cette  question  dans  un  article  qui  a  paru  dans  la 
Revue  de  la  tuberculose  (n°  4-  décembre  189D),  sous  le  titre 
«  Les  Sanatoria  de  phtisiques  sont-ils  un  danger  pour  le  voisi- 
nage? »  Nous  voulons  seulement  reproduire  ici  quelques 
statistiques  montrant  combien  peu  sont  justifiées  les  craintes 
des  rares  alarmistes  qui  existent  encore. 


de  Goerbersdorf  et  de  Falkenstein.  — A  Goerbersdorf,  oii  l'on 
trouve  trois  grands  sanatoria  ayant  hébergé  plus  de  2Dooo  tuber- 
culeux en  quarante  ans.  la  mortalité  des  habitants  du  village  n'a 
jamais  dépassé  la  moyenne  ordinaire;  elle  aurait  plutôt  di- 
minue, grâce  peut-être  à  l'exemple  donné  par  les  trois  sana- 
toria.   Voici    la    statistique  intéressante    de    la   mortalité    par 


(M  Williams.  The  contagion  of  «  Phtisis  Pulmonalis  ».  British  Mal.  Journal. 
îHHz,  sept. 


TRAITEMENT  lirGIÉNO-DlÉTÉTIQUE  EX  GÉNÉRAL  i3g 

phtisie  pulmonaire  pour  les  habitants  de  Goerbersdorf  depuis 
cent  ans  : 

1790-1799 14  cas 

1800-1809 5  — 

i8io-i8ig 9  — 

1820-1829 9  — 

i83o-i839 8  — 

1840-1849 6  — 

i85o-i85g 7  — 

1860-1869 4  — 

1870-1879 5  — 

1880-1889 5  — 

Ces  chiffres  ont  une  valeur  encore  plus  grande  si  on  ré- 
fléchit que  depuis  vingt-cinq  ans  la  population  de  Goerbers- 
dorf a  doublé  (1). 

Récemment  un  de  mes  anciens  collègues  à  Falkenstein,  le 
D1'  Nahm,  maintenant  directeur  d'un  sanatorium  pour  les  pau- 
vres à  Ruppertshain  dans  le  Taunus,  a  fait  des  recherches  très 
minutieuses  sur  la  mortalité  par  phtisie  chez  les  habitants  du 
village  de  Falkenstein,  avant  et  après  la  création  de  cette  impor- 
tante institution  (2). 

Yoiei  la  statistique  que  M.  Nahm  a  pu  établir  grâce  aux  docu- 
ments officiels  mis  à  sa  disposition.  Dans  le  village  de  Falken- 
stein la  mortalité  par  tuberculose  était  : 

Avant  1  établissement 
du  sanatorium. 

i856-i858  ....  I7,-  p.   100 

i85g-i86i  ...  7.7  — 

1862-1864  ....  22,6  . — 

1865-1867  ....  14,0  — 

1868-1870  ....  16,7  — 

1871-18-3  ....  21,0  — 

1874-1876  ....  33,3  — 

Cela  nous  donne  pour  la  période  de  i856  à  1876,  antérieure 
à  l'ouverture  du  sanatorium,  une  mortalité  moyenne  de  18,9 
p.  100  par  tuberculose,  et  de  1877  à  1894,  c'est-à-dire  après 
l'établissement  du  sanatorium,  une  moyenne  de  11,9  p.   100. 


Ajjrès 

l'élabl 

issement 

du 

sanato! 

:"ium. 

1877-1879   . 

17,0  p.    100 

1880-1882    . 

i4.6       - 

i883-i885   . 

6,0       — 

1886-1888   . 

5,0      — 

1S89-1891    . 

i3,g     — 

i8g2-i8g4   . 

13,1        — 

(1)  Rùmplek.  Deutsclie  medizinische  Zeitung,  1891,  n°  26. 

(2)  Nahm.  Mùnchener  medizinische  Wochenschi-ift,  1895,  n°  40. 


l3a  LES  SANATORIA 

.Nous  avons  donc  ici  des  preuves  irréfutables  de  l'innocuité 
du  voisinage  d'un  sanatorium  pour  phtisiques  lorsque  la  pro- 
phylaxie y  est  rigoureusement  appliquée. 

Opinion  lu   professeur  von  Leyden.  —  En  ce  qui  concerne 

les  résultats  détaillés  obtenus  par  le  traitement  de  la  phtisie 
pulmonaire  dans  les  sanatoria,  nous  renvoyons  nos  lecteurs  à 
notre  chapitre  «  Preuves  cliniques  de  la  curabilité  de  la  tuber- 
culose pulmonaire  »  (p.  3o  et  iii  .  Ici  nous  voulons  seule- 
ment rappeler  que,  d'après  notre  expérience,  le  traitement  com- 
paré des  phtisiques  dans  les  stations  hivernales,  les  hôpitaux, 
la  famille  et  les  sanatoria,  montre  que  des  effets  curatifs  plus 
rapides,  en  même  temps  que  d'une  durée  plus  longue  et  mieux 
assurée,  ont  été  réalisés  chez  les  malades  soumis  au  dernier 
mode  de  traitement.  Beaucoup  de  médecins  autorisés  sont 
arrivés  à  celte  même  conclusion.  Dans  un  article  très  remar- 
quable, M.  le  professeur  von  Leyden  (i  s'exprimait,  à  ce  point 
de  vue,  de  la  façon  suivante  :  «  La  possibilité  du  traitement 
d'un  phtisique  en  dehors  des  sanatoria  avec  des  résultats  aussi 
satisfaisants  que  ceux  que  l'on  obtient  dans  ces  établissements 
ne  peut  pas  être  niée.  Mais  pour  obtenir  ces  bons  résultats 
en  dehors  du  sanatorium,  uu  repos  beaucoup  plus  prolongé 
devient  nécessaire  ;  le  cas  demande  beaucoup  plus  de  temps 
de  la  part  du  médecin,  el  les  résultats  ne  sont  nullement  aussi 
certains  que  ceux  que  Ton  constate  dans  les  sanatoria.  » 


I 1    E.  von  Leyden.  Ueber  den  gegenwiirligen  Stand  dur  BehandlungTubcrku- 

lOser.  Bel'liu,   I^y;,  p.  'il--iù. 


CHAPITRE   XI 
Visites  aux  Sanatoria. 


Rien  n'est  plus  instructif  pour  le  médecin  qui  s'intéresse  à 
la  phtisie-thérapie  moderne,  qu'une  visite  aux  sanatoria,  aux 
hôpitaux  spéciaux  et  aux  stations  climatériques  consacrés  au 
traitement  de  la  phtisie  pulmonaire.  Comme  je  l'ai  déjà  dit 
dans  la  préface  de  la  première  édition  de  ce  livre,  je  me  suis 
préparé  par  de  longs  voyages  d'études  à  travers  l'Europe  et 
l'Amérique  à  la  tâche  difficile  de  faire  un  exposé  de  la  prophy- 
laxie et  du  traitement  moderne  de  cette  maladie.  Comme 
il  n'est  pas  toujours  possible  à  tout  le  monde  de  faire  de 
tels  voyages,  j'essayerai  de  décrire,  dans  les  pages  qui 
vont  suivre,  quelques-uns  des  sanatoria  les  plus  importants 
parmi  une  vingtaine  d'établissements  que  j'ai  visités  il  y  a 
quatre  ans  et  plusieurs  autres  que  j'ai  parcourus  depuis  lors. 
Je  parlerai  aussi  de  quelques  établissements  de  fondation  plus 
récente,  pour  la  description  desquels  MM.  leurs  Directeurs 
ont  bien  voulu  me  donner  tous  les  renseignements  nécessaires. 
Afin  d'être  complet,  je.  ferai  également  entrer  dans  ce  chapitre 
la  description  de  divers  sanatoria  étudiés  par  d'autres  con- 
frères. 

ALLEMAGNE 

Sanatorium  de  Falkenstein.  —  Falkenstein  est  la  Mecque 
des  phtisio-thérapeutes  ;  tous  les  médecins,  tous  les  étudiants 
qui  veulent  s'instruire  sur  le  traitement  hygiénique  et  diété- 
tique de  la  tuberculose  visitent  le  sanatorium  de  Falkenstein 
et  son  vénérable  ex-directeur,  le  Dr  Dettweiler,  aujourd'hui 
médecin  consultant  à  l'établissement. 


i  3  î  USITES  AUX  SANATORfA 

Beaucoup  de  médecins  onl  visité  la  célèbre  institution,  et  on 
en  peul  lire  des  relations  plus  ou  moins  détaillées  dans  lous 
les  ouvrages  classiques  qui  traitent  de  la  tuberculose  pulmo- 
naire. 

Une  des  meilleures  se  trouve  dans  le  livre  de  Moeller,  qui 
parut  en  î S94 -  J'ajouterai  à  celle  description  les  quelques 
changements  <|iii  se  sont  effectués  pendanl  et  depuis  mon 
séjour  comme  médecin  assistant  à  Falkenstein. 

«  C'est  dans  le  Taunus,  dans  le  bois  de  l'ancien  château  de 
Falkenstein,  que  se  trouve  le  sanatorium  de  ce  nom.  Il  esl 
dirigé  par  le  conseiller  prive  ]>'  Dettweiler,  aidé  par  les  doc- 
teurs Hess  et  Blumenfeld. 

«  Il  est  situé  à  4°o  mètres  au-dessus  du  niveau  de  la  mer, 
bien  abrité  par  les  montagnes  contre  les  vents  du  X..  de  l'E. 
cl  de  l'O.  Il  est  largement  ouvert  au  S.-E.  On  a  de  ce  côté  une. 
vue  ravissante  sur  la  plaine  du  Mein,  qui  est  parsemée  de  vil- 
lages et  de  petites  villes,  et  au  fond  de  laquelle  on  aperçoit 
les  tours  et  les  églises,  ainsi  que  la  monumentale  gare  de 
la  ville  de  Francfort.  Le  sanatorium  esl  construit  au  fond  d'une 
espèce  de  demi-cirque  de  montagnes  boisées,  dont  le  voisi- 
nage contribue  pour  beaucoup  à  réaliser  les  bonnes  conditions 
hygiéniques  de  cette  station. 

«  L'établissement  se  compose  d'une  maison  principale,  de 
deux  ailes  latérales  et  de  deux  annexes,  qui  sont  reliées  au 
corps  du  bâtiment  par  une  galerie  couverte.  Derrière  la 
galerie  E.  se  trouve  une  magnifique  salle  à  manger,  qui  a 
12  mètres  de  largeur  sur  24  mètres  de  longueur  et  10  mètres 
de  hauteur,  et  qui  peut  facilement  recevoir  200  convives;  elle 
est  chauffée  par  la  vapeur  à  basse  pression  et  sa  ventilation  est 
organisée  de  telle  sorte  que  l'air  frais  qui  y  entre  esl  chauffé 
en  traversant  les  murailles. 

«  Le  rez-de-chaussée  de  la  maison  principale  comprend  des 
salles  communes,  uwv  salle  de  musique,  un  salon  de  lecture, 
un  jardin  d'hiver,  une  salle  de  billard,  une  bibliothèque  (plus 
de  2000  ouvrages  allemands,  anglais  et  français),  le  cabinet  du 
directeur  et  le  bureau  de  poste  et  de  télégraphe.  Les  étages 
renferment  les  chambres  à  coucher  des  pensionnaires.  La  ter- 
rasse, qui  se  trouve  entre  la  façade  principale  et  les  deux  ailes, 
a  une  situation  très  bien  abritée.   Devant  chacune  des  ailes  du 


FALKEXSTE1X 


.37 


bâtiment  règne  une  véranda  couverte,  munie  d'installations 
permettant  de  se  mettre  à  l'abri  des  rayons  solaires  trop 
intenses,  de  la  pluie  ou  de  la  neige.  En  outre,  dans  le  jardin, 
se  trouvent  plusieurs  pavillons  isolés,  dont  quelques-uns  peu- 
vent être  tournés  de  façon  à  les  protéger  contre  l'action  du 
vent. 

«  Dans  cette  véranda  et  ces  pavillons  sont  installées 
i4o  chaises  longues,  sur  lesquelles  les  malades  séjournent 
pour  y  faire  la  cure  d'air. 

«  L'annexe  E.,  qui  touche  directementà  la  forêt,  ne  contient 


Fiff.  7.  —  Véranda  de  Falkenstein. 


que  les  chambres  des  malades.  Elle  est  chauffée  à  l'eau  ;  les 
corridors  et  les  cages  de  l'escalier  le  sont  par  l'air.  Chaque 
chambre  de  malade  a  en  outre  un  poêle  avec  ventilateur. 

«  L'annexe  0.  renferme  au  rez-de-chaussée  les  services 
hydrothérapiques  :  bains  chauds,  douches  en  pluie  et  en  jets  ; 
l'eau  vient  d'une  source  qui  jaillit  dans  la  montagne  de  l'Altkônig 
avec  une  différence  de  niveau  de  80  mètres. 

Tout  l'établissement  est  éclairé  à  l'électricité,  qui  est  pro- 
duite sur  le  terrain  même  du  sanatorium.  Il  y  a  en  plus  des 
appareils  ventilateurs  électriques  dans  les  salles  à  manger, 
dans  les  jardins  d'hiver,  dans  la  cuisine,  etc.  C'est  par  l'élec- 


i  ;s 


VISITES   AUX  SAXATORIA 


tricité  qu'est  chauffé  l'appareil  destiné  à  désinfecter  1rs  Four- 
chettes, les  cuillères,  etc.,  après  chaque  repas.  A  côté  de  ces 
installations  balnéaires  se  trouve  un  salon  d'attente,  1rs  cabi- 
ceïs   de  consultation  munis  de  tous  les  appareils  modernes, 


Fig. 


Pavillon  tournait  pour  la  cure  d'air  au  Sanatorium  de  Fallcenstein . 


électriques  el  autre-;  pour  le  traitement  des  maladies  de  la 
gorge,  etc.  Un  laboratoire  pour  les  travaux  cliniques,  histologi- 
ques  et  bactériologiques  est  contigu  à  la  salle  de  consultation. 

Les  deux  étages  supérieurs  de  cette  annexe  servent  d'habi- 
tations aux  médecins.  Tout  le  long  de  ce  bâtiment  on  a  cons- 
truit une  jolie  serre,   renfermant   de  belles  plantes  orientales. 

Derrière  ces  constructions,  destinées  à  la  cure  proprement 
dite,  se  trouvent  les  dépendances  qui  sont  consacrées  aux  ser- 
vices de  ménage,  notamment  la  vacherie,  l'écurie,  les  remises, 


RUPI'ERTSIIAIS  i3g 

une  petite  usine  à  gaz,    une   installation   de  désinfection  à  la 
vapeur  surchauffée,  enfin  la  buanderie  et  le  séchoir. 

Bien  entendu  les  vaches  sont,  avant  l'achat,  et  après,  à  des 
intervalles  de  trois  ou  quatre  mois,  régulièrement  examinées  à 
l'aide  de  la  tuberculine  pour  s'assurer  qu'elles  sont  toujours 
en  parfaite  santé. 

La  désinfection  des  appartements  se  fait  par  la  vapeur  de 
formaldéhyde. 

En  i883,  l'établissement  a  été  doté  d'un  système  de  drainage 
fort  complet,  avec  appareil  de  clarification  chimique  des  eaux 
ménagères.  Ajoutons  qu'une  source  très  pure  a  été  captée  spé- 
cialement pour  le  sanatorium.  Un  grand  parc  entoure  toutes 
les  constructions  ;  on  y  a  tracé,  ainsi  que  dans  les  bois  avoisi- 
nants,  de  nombreux  chemins  d'accès  très  facile. 

Le  sanatorium  de  Falkenstein  est  actuellement  dirigé  par  M.  le 
D'  Karl  Hess,  avec  M.  le  D1'  Besold  comme  deuxième  et  M.  le 
D1'  Pickert  comme  troisième  médecin;  M.  le  D1'  Dettweiler, 
conseiller  privé,  est,  avons-nous  dit,  médecin  consultant  à 
L'établissement. 

Le  sanatorium  de  Falkenstein  appartient  à  une  compagnie 
d'actionnaires.  Tout  bénéfice  au-dessus  de  5  p.  100  est  versé 
dans  le  trésor  pour  les  phtisiques  pauvres. 

Sanatorium  de  Ruppertshain.  —  Cet  établissement,  le 
premier  sanatorium  pour  phtisiques  indigents,  a  eu  des  com- 
mencements très  durs.  Mais,  grâce  à  l'énergie  du  Dr  Dettweiler 
et  de  ses  collaborateurs,  grâce  à  la  générosité  de  quelques 
malades  riches  du  sanatorium  de  Falkenstein  et  d'autres  philan- 
thropes se  trouvant  plus  ou  moins  en  relation  avec  l'institution 
mère  à  Falkenstein,  il  y  a  à  l'heure  actuelle  à  Ruppertshain  un 
sanatorium  o-randiose  et  florissant.  Il  est  sous  l'habile  direc- 
tion  de  mon  ancien  collègue  M.  le  D1'  Nahm,  aidé  par  M.  le 
D1'  Spiegel  comme  assistant,  et  par  la  sœur  Gabrielle,  dontj'ai 
pu  apprécier  le  dévouement  à  la  cause  des  phtisiques  malheu- 
reux pendant  le  temps  que  j'ai  remplacé  le  Dr  Nahm,  il  y  a  trois 
ans. 

On  compte  déjà  yo  lits  à  Ruppertshain,  et  d'après  une  lettre 
que  M.  le  professeur  Dettweiler  a  bien  voulu  m'écrire,  il  y  a 
quelques  mois,  un  malade  de  Falkenstein  a  fait,  en  mourant, 


I  ,o 


VISITKS  AUX  SA.\ATOItIA 


un  Legs  de  '.'.33ooo  marks  en  faveur  de  l'établissement  de  Rup- 
pertshain.  Le  résultat  de  ce  legs  généreux  sera  pour  Rup- 
pertshain  un  agrandissement  et  une  installation  de  lumière 
électrique. 

Le  Dr  Nahm  a  décrit  le  sanatorium  de  Ruppertshain  dans  le 
Zeitschrift  fur  Kvankenpflege,  en  février  1896,  et  mon  excel- 
lent confrère  le  D1'  Beaulavon  a  traduit  cette  description  dans 
la  Revue  de  la  tuberculose,  t.  IV,  n°  4-  Cet  établissement 
peut  servir  comme  type  de  sanatorium  pour  phtisiques  indi- 
gents, et  je  me  fais  \\n  plaisir  de  reproduire  ici  cette  intéres- 
sante relation  : 

En  mai  18945  o.h  commençait  les  travaux  du  nouvel  établis- 
sement dans  un  terrain  de  G  hectares  situé  près  de  Ruppertshain 
et  adossé  à  la  route  qui  conduit  de  ce  village  à  Kœnigstein  ;  la 
plus  proche  station  de  chemin  de  fer  est  à  une  heure  de  là. 
L'emplacement  est  protégé  au  nord  et  à  l'ouest  par  des  col- 
lines boisées;  il  est  en  pente  rapide,  tourne  vers  le  sud,  sur  le 
versant  méridional  de  la  chaîne  du  Taunus  et  par  conséquent 
jouit  de  la  protection  générale  garantie  par  ces  hauteurs  contre 
les  vents  du  nord. 

L'ensemble  des  constructions  a  sa  façade  orientée  vers  le 
sud-sud-ouest  ;  on  lui  a  donné  la  forme  d'un  arc  de  cercle  de 
60  mètres  de  rayon  ;  le  terrain  ne  permettait  pas  de  construire 
de  grandes  ailes  formant  avec. le  bâtiment  principal  des  angles 
obtus  et  délimitant  une  terrasse  garantie  contre  tout  vent, 
comme  cela  s'est  fait  à  Hohenhonnef.  Les  constructions  se 
répartissent  en  un  bâtiment  principal,  deux  galeries  de  cure  y 
attenant  et  continuant  la  direction  générale  des  bâtiments, 
deux  pavillons  formant  des  ailes,  une  remise  et  une  glacière. 

Lé  bâtiment  principal  se  compose  d'un  sous-sol,  d'un  rez- 
de-chaussée  et  de  trois  étages  dont  un  de  combles. 

Le  sous-sol,  grâce  à  la  déclivité  du  terrain,  se  trouve  être 
un  rez-de-chaussée  du  côté  de  la  façade  ;  il  est  de  plain-pied  à 
ses  extrémités  avec  les  galeries  de  cure  séparées  ainsi  l'une 
de  l'autre  par  toute  la  longueur  du  bâtiment.  On  accède  à  cha- 
cune de  ces  galeries  par  une  grande  pièce  servant  de  salle  de 
réunion,  de  musique  ou  de  réception  pour  les  malades.  De  ces 
pièces  on  passe  dans  un  couloir  courant  sur  la  façade  nord 
des  bâtiments;  sur  la  façade  méridionale  sont  les  douches,  les 


RLI'PERTSIIAI.X  l/,3 

caves,  le  poste  de  chauffage  à  la  vapeur  à  Lasse  pression,  les 
moteurs  à  air  chaud  qui  refoulent  dans  les  réservoirs  situés 
en  haut  du  bâtiment  l'eau  nécessaire  à  rétablissement. 

Au  rez-de-chaussée  se  trouvent  :  au  milieu,  deux  chambres 
pour  les  sœurs  avec  à  côté  deux  chambres  pour  la  consultation, 
puis  à  chaque  extrémité  un  grand  dortoir  à  5  lits  et  sur  le  reste 
de  la  façade  des  chambres  à  i,  a  et  3  lits.  Sur  la  façade  nord 
se  trouve  le  couloir  donnant  accès  aux  bains,  lavabos  et  water- 
closets. 

Le  premier  et  le  deuxième  étage  sont  semblables.  Au  milieu, 
une  grande  pièce  sert  de  réfectoire  (premier  étage,  femmes; 
deuxième  étage,  hommes),  puis  de  chaque  côté  les  chambres 
de  malades,  toujours  sur  la  façade  méridionale,  avec  5  lits, 
3  lits  et  i  lit.  Au  nord  :  le  couloir,  les  bains,  les  water-closets. 
Aux  combles,  un  des  pavillons  d'aile  sert  au  médecin-direc- 
teur, l'autre  au  personnel. 

A  chaque  extrémité  est  accolé  un  pavillon  d'un  étage  ;  à 
l'ouest  la  cuisine,  à  l'est  la  buanderie  avec  les  écuries,  le 
logement  du  cocher,  une  étuve  à  désinfection. 

La  remise,  la  glacière,  une  étable  à  porcs  sont  au  nord  du 
bâtiment,  et  séparées  de  lui. 

Les  galeries  de  cure  sont  des  hangars  garantis  en  haut  par 
un  toit  et  sur  trois  côtés  par  des  murs;  elles  sont  librement 
ouvertes  vers  le  sud.  Leur  sol  est  en  ciment  et  elles  contien- 
nent les  chaises  longues  sur  lesquelles  les  malades  passent  la 
plus  grande  partie  de  la  journée.  Le  reste  du  temps  est  pris 
par  des  promenades  qui  peuvent  se  faire  et  se  graduer  faci- 
lement dans  les  collines  boisées  qui  avoisinent  l'établisse- 
ment ;  des  travaux  faciles  occupent  aussi  le  patient  pendant  la 
ournée. 

Les  chambres  de  malades  sont  spacieuses,  bien  éclairées, 
bien  aérées.  Les  plafonds  ont  3"',3o  de  hauteur,  les  murs 
sont  peints  à  l'huile  jusqu'à  i'u,6o.  Au-dessus,  ils  sont  blan- 
chis à  la  chaux.  Le  plancher,  en  sapin,  a  reçu  trois  couches 
d'huile  bouillante  dont  la  troisième  est  brun-rouee.  Les  fenè- 
très  sont  munies  à  leur  partie  supérieure  d'un  châssis  qui  peut 
s'ouvrir  à  volonté  et  permet  aux  malades  de  respirer  toujours 
l'air  frais  du  dehors.  Chacun  d'eux  dispose  d'ailleurs  dans  ces 
chambres  de  4°  mètres  cubes  d'air.  Il  n'existe  aucun  svstème 


1 1 1 


VISITES  AUX  S.iy.lTOIil.i 


de   ventilation;  le  renouvellement  de  l'air  s'effectue    par  les 
fenêtres  ouvertes  nuit  et  jour. 

Le  chauffage  se  fait  à  la  vapeur  d'eau  à  basse  pression  ;  les 
radiateurs,  placés  au-dessus  ilu  sol,  pour  qu'on  puisse  laver 
sens  eux,  peuvent  donner  jusqu'à  38  et  4°"  de  chaleur,  ce  qui 
est  nécessaire  pour  maintenir  dans  les  chambres  une  tempéra- 
ture raisonnable  pendant  les  froids  de  l'hiver. 

L'eau  provient  de  sources  captées  pour  l'établissement.  Les 
water-closets  aboutissent  à  des  tinettes  en  fer  garnies  de 
tourbe,  enlevées  tous  les  jouis  et  dont  le  contenu  est  mélangé 
à  de  la  terre  et  mis  en  cavalier.  Les  eaux  vannes  sont  collec- 
tées clans  un  réservoir,  lilirées  au  sable,  puis  servent  à  irri- 
guer les  prairies.  Cette  dernière  partie,  concernant  les  égouts, 
n'est  donc  pas  absolument  parfaite. 

L'établissement  peut  recevoir  j5  malades,  38  hommes  el 
'>-  femmes.  Le  traitement  qu'ils  y  suivent  ne  diffère  point 
essentiellement  de  celui  qui  a  été  institué  pour  les  riches.  Les 
repas  y  sont  aussi  nombreux,  presque  aussi  abondants;  la 
variété  de  nourriture  seule  est  un  peu  moins  grande  . 

Les  repas  sont  établis  de  la  façon  suivante  :  le  matin,  à 
7  heures  et  demie,  café  au  lait  avec  pain  et  beurre,  un  verre  de 
lait  ;  à  io  heures,  un  verre  de  lait,  pain  et  beurre  ;  a  midi, 
soupe,  viande  et  légumes,  demi-bouteille  de  bière  ou  un  à 
deux  verres  de  vin  ;  à  4  heures,  café,  pain  et  beurre  ;  à 
7  heures,  soupe,  viandes  froides,  salade  ou  fromage  avec 
beurre  ou  quelques  autres  mets  analogues,  demi-bouteille  de 
bière  ou   thé. 

Bien  entendu,  à  côté  de  ce  régime  existent  des  diètes  spé- 
ciales instituées  par  le  médecin  ;  en  outre,  les  malades  qui  ont 
des  sueurs  nocturnes  abondantes  prennent,  avant  de  se  coucher, 
un  verre  de  lait  avec  quelques  cuillerées  a  café  de  cognac 

Les  malades,  pendant  la  journée,  s'occupent  à  des  travaux 
de  jardinage,  confectionnent  de  petits  objets  de  vannerie,  font 
de  la  sculpture  sur  bois.  etc.  Ils  vaquent  aussi,  quand  ils  sont 
assez,  valides,  a  des  soins  de  ménage,  permettant  ainsi  de  n'em- 
ployer qu'un  personnel  très  restreint. 

Parmi  les  sanatoria  d'Allemagne,  ceux  de  Goerbersdof  pré- 
sentent un  intérêt  particulier.  Ils  comprennent  le  sanatorium 


SANATORIUM  DE  BREUMER  14* 

de  Brehmer,   le  sanatorium  de  Rœmpler,  le  sanatorium  de  la 
comtesse  Pùckler  et  le  sanatorium  de  Weicker. 

Sanatorium  de  Brehmer.  —  Le  premier  sanatorium  pour 
phtisiques  fut  fondé  par  Brehmer  en  1869,  mais  le  gouver- 
nement ne  lui  donna  qu'avec  peine  la  permission  de  le  bâtir.  Il 
commença  en  petit,  fit  des  agrandissements  dès  1862,  en  même 
temps  qu'il  prenait  les  dispositions  nécessaires  pour  pouvoir 
offrir  aux  malades  un  séjour  d'hiver  agréable. 

Je  vais  donner  la  description  du  sanatorium  tel  que  je  l'ai 
trouvé  lors  de  ma  visite,  il  y  a  quatre  ans  ;  c'est  celle  qui  a 
déjà  paru  dans  ma  première  édition  et  qui  est  empruntée  à 
Pouzet.  J'y  ajouterai  quelques  observations,  et  mentionnerai 
aussi  certains  changements  apportés  ces  dernières  années  à 
l'établissement. 

Au  bout  du  village  de  Goerbersdorf,  dans  l'endroit  le  mieux 
approprié,  au  milieu  de  grands  arbres,  se  dresse,  tout  en  bri- 
ques rouges,  avec  des  toits  pointus  ardoisés,  le  sanatorium 
fondé  il  y  a  plus  de  trente  ans  par  le  Dr  Brehmer.  C'est  un 
véritable  monument  architectural,  dans  le  style  des  vieux 
bâtiments  gothiques  allemands. 

Trois  principaux  corps  de  bâtiments  construits  à  des  épo- 
ques différentes,  mais  sur  le  même  alignement,  se  succèdent. 
Ils  sont  réunis  entre  eux  par  des  galeries  et  des  terrasses 
transformées  en  jardin  d'hiver  et  en  promenades  couvertes. 

A  l'ouest  s'élève  le  plus  ancien  de  ces  bâtiments,  le  vieux 
Curhaus  :  c'est  une  grosse  masse  carrée  flanquée  d'une  tour 
également  carrée  surmontée  de  poivrières.  A  l'autre  extrémité, 
le  nouveau  Curhaus,  avec  deux  grosses  tours  rondes  à  son 
entrée,  présente  une  façade  décorée  d'arcades  ogivales  soute- 
nues par  des  colonnettes,  formant  une  série  de  balcons  en 
retrait.  Au  centre,  un  donjon,  une  tour  élancée  indiquent 
l'appartement  occupé  par  le  Dr  Brehmer  et  habité  aujourd'hui 
par  M.  le  professeur  Robert,  le  directeur  de  l'établissement. 

Devant  la  façade  exposée  au  midi,  une  plate-forme  appelée 
Corso  et  un  grand  bassin  alimenté  par  un  énorme  jet  d'eau. 
Plus  loin,  le  parc  se  développe  d'abord  en  pente  douce,  devient 
plus  escarpé,  et  finit  dans  une  véritable  forêt  de  sapins. 

Au  milieu  des  jardins,  à  proximité,  se  trouvent  trois  établis 

Knopf.  Sanatoria.  10 


i  i  6  1 ISITES  A  l  A  s.  I  .y.  1 l  a  m.  l 

sements  annexes   contenant   une   douzaine  de  chambres    :    la 
.Maison  Blanche,  la  Maison  Neuve,  la  Villa  lîosa. 

Dans  le  pai'c,  très  bien  dessiné,  entretenu  avec  soin,  coupé 
dans  tous  les  sens  d'allées  aux  pentes  les  plus  variées,  sont 
ménagés  des  bosquets,  des  salles  d'ombrages,  des  berceaux 
de  verdure,  des  parties  découvertes.  A  tous  les  pas,  des  bancs 
rustiques,  des  chaises,  des  fauteuils  de  toutes  formes,  des 
hamacs  suspendus  aux  branches.  Çà  et  là  des  abris,  une 
grotte,  des  guérites,  des  chalets  suisses,  norvégiens  ;  un 
réservoir  peuplé  de  poissons,  un  enclos  dans  lequel  s'ébattent 
des  cerfs  ;  à  tni-CÔte  une  large  terrasse. 

Si  nous  continuons  l'ascension  à  travers  bois,  nous  arrivons 
par  des  sentiers  pittoresques  au  sommet  de  la  colline,  a 
i4o  mètres  au-dessus  du  Corso,  et  de  là.  abrité  derrière  les 
vitraux  d'un  pavillon  russe  appelé  Katharium,  nous  pouvons 
reposer  notre  vue  sur  de  larges  espaces  cultivés,  fermés  à 
l'horizon  par  les  montagnes  de  Bohème  et  de  Silésie. 

Ainsi,  tout  a  été  disposé  et  prévu  pour  que  le  malade  puisse 
se  promener  sans  ennui,  s'isoler  s'il  a  l'humeur  solitaire. 
monter  ou  descendre,  s'étendre  ou  s'asseoir  suivant  ses  forces 
et  «  la  prescription  du  médecin  ». 

On  entre  dans  le  nouveau  Gurhaus  par  un  escalier  monu- 
mental, décoré  de  peintures  archaïques;  sur  les  murs  sont 
inscrits  des  aphorismes  de  circonstance:  m  Où  h'  malade  se 
trouve  bien,  qu'il  y  reste  jusqu'à  sa  guérison.  »  «  La  meilleure 
occupation  pour  un  malade  est  de  travailler  a  devenir  bien 
portant.  »  Sous  le  médaillon  île  Brehmer  :  «  Seul  sait  guérir 
les  hommes  le  médecin  qui  a  étudié  la  nature  et  habitué  son 
esprit  aux  éludes  mathématiques.  »  —  Brehmer  avait  été 
mathématicien. 

Le  Curhaus  comprend  trois  étages  qui  sont  reliés  par  un 
ascenseur.  Les  salles  communes  se  trouvent,  les  unes  dans  ce 
bâtiment,  les  autres  dans  les  annexes;  les  pensionnaires  pas- 
sent de  l'une  à  l'autre  sans  s'exposer  à  l'air.  Deux  grandes 
salles  à  manger,  des  salons  d'attente,  des  cabinets  de  lecture, 
sont  disposés  de  la  façon  la  plus  commode  ;  de  là,  on  a  accès 
à  une  véranda  qui  est  orientée  vers  le  midi  et  aboutit  à  un 
pavillon  qui  donne  dans  un  jardin  d'hiver,  où  se  fout  les  pro- 
menades lorsque  le  temps  est  trop  mauvais  pour  permettre  le 


SANATORIUM  DE  BREIIMER  i5i 

séjour  à  l'air;  enfin  nous  arrivons  à  la  nouvelle  pièce  qui  sert 
de  salle  de  lecture  en  hiver,  de  salle  à  manger  en  été. 

Les  chambres  des  malades,  l'ameublement,  les  décorations, 
sont  de  style  gothique;  les  meubles,  en  bois,sontpeints  à  l'huile, 
ornés  de  dessins  et  de  crénelures.  Les  fenêtres  des  chambres 
à  coucher  sont  assez  grandes.  Pas  de  vasistas,  pas  d'impostes. 
L'aération  est  pratiquée  par  une  ouverture  située  en  haut  de 
la  pièce  et  communiquant  avec  une  cheminée  d'appel. 

Le  chauffage  se  fait  au  moyen  d'un  calorifère  à  air  chaud. 
La  désinfection  de  tous  les  appartements  s'exécute  réguliè- 
rement, selon  la  recommandation  du  professeur  Robert,  par  les 
vapeurs  de  formaldéhyde. 

En  dehors  de  cet  établissement  élégant  pour  les  malades 
riches,  il  y  a  depuis  1890  une  annexe  pour  le  traitement  des 
phtisiques  ayant  des  moyens  modérés.  Les  deux  sanatoria  sont 
sous  la  direction  du  distingué  professeur  M.  le  Dr  Rudolf 
Robert,  assisté  de  M.  le  D1'  Johannes  Tirmann  et  de  trois 
médecins  adjoints. 

Une  grande  ferme,  située  à  peu  de  distance,  est  annexée  au 
sanatorium.  On  y  compte  cinquante  belles  vaches,  bien  en 
point,  et  vingt  chèvres  blanches.  De  plus,  un  employé  est 
spécialement  attaché  à  la  fabrication  du  kéfir,  consommé  par 
certains  phtisiques. 

J'ai  donné,  pour  honorer  la  mémoire  de  Brehmer,  cette  lon- 
gue description  du  premier  sanatorium,  mais  j'avoue  que,  pour 
moi,  le  sanatorium  de  Brehmer  est  loin  d'être  le  sanatorium 
idéal.  On  y  a  dépensé  des  millions,  mais  inutilement.  Les  masses 
carrées,  les  tours  surmontées  de  poivrières,  les  façades  lourdes, 
ressemblent  à  un  ancien  château,  presque  à  une  forteresse. 

Mais  c'est  peut-être  le  seul  reproche  que  l'on  puisse  faire  à 
ce  grand  phtisio-thérapeute.  L'immense  service  qu'il  a  rendu  à 
l'humanité  est  reconnu  par  ses  élèves,  ses  confrères  et  des 
milliers  de  malades.  Brehmer,  qui  mourut  le  22  décembre  1889, 
a  eu  la  satisfaction  de  voir  prospérer  son  établissement  ;  mais 
il  n'a  pas  vécu  assez  longtemps  pour  jouir  du  principal  triomphe 
de  sa  doctrine  ;  'car  précisément,  au  cours  de  ces  dernières 
années,  ses  contradicteurs  se  sont  tus  l'un  après  l'autre,  et 
des  sanatoria  ayant  pour  but  de  traiter  la  phtisie  selon  son 
système,  combiné  avec  celui  de  Dettweiler,  son  élève  le  plus 


132  VISITES  AUX  SAXATORIA 

distingué,  sont  présentemenl   établis  dans  différentes  parties 
du  inonde. 

A  la  dernière  séance  de  la  Société  des  médecins  balnéologues 
allemands,  qui  eut  lieu  à  Vienne  le  i5  mars  iKi)N.  l'érection 
d'un  monument  en  l'honneur  du  fondateur  de  la  phtisio-thé- 
rapie  moderne  a  été  décidée.  Ce  monument  sera  ultérieure- 
ment remis  au  village  de  Goerbersdorf. 

Sanatorium  de  Ftompler.  —  La  vallée  dans  laquelle  est 
situé  le  village  de  Goerbersdorf  a  une  altitude  de  56i  mètres. 
Sur  un  des  points  les  plus  pittoresques  s'élève  le  sanatorium 
du  D1'  Rômpler.  II  est  entouré  de  toutes  parts  d'un  beau  parc 
et  d'un  jardin,  qui  touchent  immédiatement  à  la  forêt  avoisi- 
nante.  De  nombreux  chemins  bien  entretenus,  à  pentes 
douces  et  pourvus  de  lianes  de  repos  ont  été  traces  ;  on  y  a 
ménagé  de  magnifiques  points  de  vue  s'éteudaiil  jusqu'au 
centre  des  Monts-Géants. 

Des  pavillons  sont  disséminés  dans  le  parc:  un  des  buts  de 
promenade  les  plus  fréquentés  par  les  pensionnaires  est  le 
petit  chalet  suisse,  qui  est  chauffé  en  hiver:  des  colonnades 
couvertes  et  un  grand  promenoir  également  couvert  servent 
d'abris  en  cas  de  mauvais  temps  et  permettent  d'étendre  beau- 
coup la  durée  du  séjour  à  l'air. 

Une  galerie  couverte,  destinée  a  la  cure  d'air,  a  été  bâtie  en 
1887  immédiatement  le  long  de  l'établissement  ;  elle  est  orientée 
vers  le  S.-E.  et  protège  les  malades  contre  les  vents  froids. 
On  v  a  installé  de  nombreuses   chaises  longues. 

Le  Curhaus  est  bâti  en  style  de  chalet  suisse:  son  altitude 
est  d'environ  55o  mètres.  Deux  villas  y  sont  annexées.  Ces  dif- 
férentes constructions  comprennent  plus  de  100  logements. 
Tous  les  perfectionnements  de  confort  et  d'hygiène  y  ont  été 
réalisés.  Un  grand  jardin  d'hiver  communique  avec  le  Cur- 
haus; il  est  chauffé  et  très  bien  ventilé,  de  sorte  que  les 
pensionnaires  peuvent  v  séjourner  lorsque  leur  étal  ou  les 
conditions  météorologiques  interdisent  la  cure  à  l'air  libre. 
Tout  rétablissement  est  chauffé  par  un  système  à  l'eau 
chaude. 

Le  jardin  d'hiver  conduit  à  une  vaste  et  élégante  salle  a 
manger,  qui  peut  recevoir  200  convives.  A  côté  se  trouvent  un 


SA.XATORICM  DE  ROMPLER 


1 55 


salon  de  lecture,  une  salle  d'attente,  ainsi  que  les  cabinets  de 
consultation  du  médecin-directeur  et  de  ses  assistants.  Au  pre- 
mier étage  de  ce  bâtiment,  il  y  a  des  salons  de  conversation, 
de  musique,  de  billard,  qui  donnent  sur  une  terrasse,  d'où 
l'on  jouit  d'une  vue  admirable  sur  les  montagnes  environ- 
nantes. 

Des  cabinets  de  bains  ont  été  installés  dans  le   Gurhaus  et 
dans    une  des   villas;   une  salle  bydrothérapique,    permettant 


Fi  g.    ij.  —  Galerie  pour  la  cure  à  l'air  libre  du  sanatorium  du  Dr  Rompler. 

l'application  de  douches  variées,  est  également  à  la  disposition 
des  pensionnaires.  Une  distribution  d'eau  a  été  organisée;  la 
source  qui  l'alimente  jaillit  directement  de  rochers  situés  à 
70  mètres  au-dessus  du  sanatorium;  elle  est  en  même  temps 
utilisée  pour  les  bains,  les  douches;  elle  est  assez  abondante 
pour  servir  à  l'arrosage  des  pelouses,  des  chemins,  et  pour 
former  un  très  beau  jet  d'eau,  devant  la  façade  du  Gurhaus. 

Telle  est  la  description  de  mon  distingué  confrère,  M.  le 
D1'  Moeller,  qui  a  visité  l'établissement  du  D'  Rompler  quelque 
temps  avant  moi. 

Je  ne  puis  guère  donner  une  meilleure  idée  de  ce  bel 
établissement.  Je  veux  seulement  ajouter  que  le  traitement 
suivi   dans   le    sanatorium  dirigé  par    M.  le  D1'  Rompler,   est 


i56  VISITES  AUX  SAyATOIUA 

celui  qu'ont  inauguré  Brehmer  et  Dettweiler.  En  dehors  du 
médecin-directeur  il  v  a  des  médecins-assistants,  et  pour  le 
traitement  des  maladies  de  la  gorge,  un  spécialiste  est  attaché 
à  l'institution.  "SI""'  Rompler  esl  la  collaboratrice  assidue  et 
dévouée  de  son  mari.  Le  sanatorium  Rompler  existe  depuis 
i875. 

Sanatorium  de  Pùckler  et  sanatorium  de  Weicker.  — 
Le  sanatorium  Pùckler  pour  les  malades  payants,  el  le  sana- 
torium Weicker  pour  les  phtisiques  pauvres,  à  Goerbersdorf, 
sont  tous  les  deux  sous  la  direction  tic  mon  ami  le 
Dr  Weicker. 

Le  premier,  fondé,  il  v  a  plusieurs  années,  grâce  à  la  géné- 
rosité de  la  comtesse  Marie  Piickler,  se  trouve  à  une  petite 
distance  du  village,  un  peu  plus  Las  (pie  les  précédents,  mais 
encore  à  une  altitude  de  56o  mètres.  Cet  établissement  est  le 
plus  petit  des  trois,  mais,  comme  me  le  disait  le  Dr  Weicker  : 
«  II  est  petit,  je  veux  qu'il  reste   petit.  » 

Il  peut  recevoir  seulement  une  trentaine  de  malades.  L'idée 
du  D1' Weicker  est  de  rendre  aux  tuberculeux  la  vie  de  famille 
qu'ils  ont  quittée.  Dernièrement,  on  a  ajouté,  pour  faciliter  la 
cure  à  l'air  libre,  une  galerie  où  les  malades  restent  de  trois 
à  dix  heures  par  jour. 

Le  deuxième  sanatorium  pour  les  phtisiques  pauvres,  le 
«  Krankenheim  »  pour  les  malades  au  premier  degré  de  la 
tuberculose  pulmonaire,  a  été  fondé  le  22  juin  1889,  en  con- 
séquence des  lois  sur  l'assurance  ouvrière  obligatoire  dans 
l'empire  allemand. 

Nous  parlerons  plus  loin,  dans  notre  chapitre  sur  les  sana- 
toria  pour  les  pauvres,  de  cette  assurance  obligatoire.  Bor- 
nons-nous simplement  à  constater  que  l'entreprise  a  réussi 
d'une  façon  surprenante. 

En  1894        12  malades  ont  séjourné  836  jours  dans  le  sanatorium 

189}       86  4.860 

1896  256       —  17.134         — 

1897  5i2  32.494         — 

Il  y  a  une  division  pour  les  femmes  et  une  autre  pour  les 
hommes;    elles  comprennent    160  lits  qui  sont    répartis    dans 


I 


BOUE.XIIOSyEF  1 6 1 

plusieurs  villas.  Les  médecins  internes  sont  M.  le  Dr  Knobloch 
pour  le  département  des  hommes,  et  M.  le  Dr  Schœn  pour 
celui  des  femmes. 

Très  intéressant  est  l'arrangement  par  lequel  le  D'  Weicker 
maintient  la  discipline  dans  les  villas  des  tuberculeux  pau- 
vres. Chaque  villa  a  le  droit  d'élire  un  membre  comme  «  supé- 
rieur »,  et  celui-ci  est  responsable  envers  les  médecins  de  l'or- 
dre de  la  maison.  11  a  en  plus  le  devoir  de  prendre  la 
température  de  chaque  malade  deux  fois  par  jour,  et  de  veiller 
à  ce  que  les  ordonnances  des  médecins  soient  suivies  par  tous 
les  malades. 

Le  village  de  Goerbersdorf  (Silésie  ï  est  à  6  kilomètres  de 
Friedland,  station  de  la  ligne  de  chemin  de  fer  de  Breslau- 
Fribourg.  Il  est  également  à  une  petite  distance  de  Detters- 
baeh,  station  du  chemin  de  fer  des  Monts-Géants  [Riesen- 
gebirge). 

Le  traitement  diffère  peu  dans  les  trois  sanatoria  de 
Goerbersdorf.  Les  médecins  dirigeants  actuels  ont  adopté 
les  modifications  apportées  par  Dettweiler  au  traitement  ins- 
titué par  Brehmer.  Ils  s'en  écartent  peut-être  un  peu,  mais 
les  grands  principes  de  la  phtisio-thérapie  restent  les  mêmes. 
Tous  les  trois  s'intéressent  beaucoup  à  la  tuberculose,  envi- 
sagée comme  question  sociale.  J'ai  visité  Goerbersdorf  au  mois 
d'août;  j'ai  pu  apprécier  la  beauté  naturelle  du  site  et  le  climat 
superbe  qui  firent  choisir  cet  endroit  par  Brehmer  comme 
particulièrement  favorable  à  son  but. 

Tous  les  sanatoria  dont  j'ai  parlé  sont  très  curieux  à  visi- 
ter; j'y  ai  reçu  de  leurs  directeurs  un  accueil  on  ne  peut 
plus  cordial. 

Sanatorium  de  Hohenhonnef.  —  Honnef  est  une  petite 
ville  au  bord  du  Rhin,  protégée  contre  les  vents  froids  du 
nord  et  de  l'est  par  les  Sept-Montagnes.  Au  N.-E.  de  la  ville 
s'élève  le  sanatorium  de  Hohenhonnef.  dans  une  belle  posi- 
tion, avec  vue  sur  la  vallée  du  Rhin. 

L'établissement  de  Hohenhonnef,  ouvert  en  octobre  1892,  a 
été  visité  avant  moi  par  M.  de  Boischevalier,  ingénieur  des 
Arts  et  Manufactures,  qui  en  a  fait  un  rapport  détaillé  clans 
le  Génie  civil.  Cet  établissement  est  dirigé  parle  Dr  Meissen,. 

Knopf.   Sanatoria.  ii 


162  VISITES  AUX  SANATORIA 

ancien  médecin-adjoint  à  Falkenstein,  et  un  des  élèves  les 
plus  distingués  de  Dettweiler. 

Le  sanatorium  est  silué  à  a36  mètres  au-dessus  Au  niveau 
de  la  mer,  et  à  1 58  mètres  au-dessus  de  Honnef-sur-le-Rhin. 
L'établissement  est  au  milieu  du  pare  et  de  la  forêl  que 
sillonnent  des  chemins  dont  les  pentes,  appropriées  aux 
besoins  de  la  cure,  aboutissent  aux  points  de  vue  les  plus 
pittoresques  et  les  plus  variés. 

La  façade  principale  du  sanatorium,  exposée  au  S.-O.,  est 
composée  d'un  bâtiment  central  et  de  deux  ailes  formant  un 
angle  obtus  avec  la  façade;  il  y  a  un  sous-sol  de  plain-pied 
avec  le  terrain,  un  rez-de-chaussée  et  trois  étages. 

Le  bâtiment  principal  est  disposé  de  telle  sorte  que  toutes 
les  chambres  sont  sur  le  devant  et  donnent  sur  i\\\  corridor 
longeant  la  façade  de  derrière;  les  ailes,  au  contraire,  se  com- 
posent de  deux  séries  de  chambres,  séparées  par  un  corridor 
central.  L'orientation  est  telle  (pie  les  rayons  du  soleil  peu- 
vent pénétrer,  au  moins  pendant  quelques  heures,  dans  toutes 
les  chambres,  le  plus  grand  nombre  de  celles-ci  étant  exposées 
au  S.-O. 

Les  bâtiments  des  machines  pour  l'éclairage,  le  blanchis- 
sage, la  désinfection,  l'alimentation  en  eau,  sont  situes  dans  la 
vallée  et  reliés  par  un  chemin  de  1er  funiculaire,  de  sorte  que 
le  sanatorium  est  absolument  à  l'abri  de  la  poussière,  de  la 
fumée  et  du  bruit. 

Les  chambres  des  malades  sont  spacieuses  (les  plus  petites 
ne  cubent  pas  moins  de  60  mètres),  à  portes  et  fenêtres  dou- 
bles; le  plancher  est  doublé  de  voliges  plâtrées  et  couvert  de 
linoléum.  Chaque  chambre  a  sa  cheminée  d'aérage  spéciale  et 
un  poêle  tubulaire  à  circulation  d'eau  chaude  réglable  à  vo- 
lonté. Des  vasistas  mobiles  facilitent  l'afflux  d'air  extérieur. 
Ces  conditions  sont  d'une  importance  majeure.  L'établissement 
est  éclairée  la  lumière  électrique,  et  un  ascenseur  relie  les 
différents  étages  entre  eux.  On  y  trouve  toute  une  série  de 
salons  élégants. 

Le  long  de  la  façade  principale,  et  se  prolongeant  autour  de 
l'aile  E,  règne  au  niveau  du  rez-de-chaussée  une  véranda 
destinée  aux  cures  sur  les  chaises-longues.  Cette  véranda  est 
installée  de   façon  à    protéger  les  malades   contre   le   soleil,  la 


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REIBOLDSGRUN  167 

pluie  et  le  vent.  Le  traitement  repose  sur  les  principes  de 
Brehmer-Dettweiler.  L'air  esl  pur,  doux  et  calme,  sans  pous- 
sières, rafraîchi  par  le  voisinage  des  bois  ;  le  sol  est  sec, 
poreux,  absorbe  l'humidité  et  permet  l'écoulement  des  eaux. 
Hohenhonnef,  qui  possède  un  bureau  de  poste  et  de  télé- 
graphe, a  des  communications  faciles  avec  Cologne,  Bonn, 
Aix-la-Chapelle,  Francfort-sur-le-Mein  et  Wiesbaden.  La  sta- 
tion de  Honnef  (rive  droite  du  Rhin)  est  desservie  par  deux 
express. 

Sanatorium  de  Heiboldsgrùn.  —  Reiboldsgrun  est  situé 
dans  la  partie  méridionale  de  la  Saxe,  sur  les  premières  pentes 
de  1-Erzgebirge.  Le  sanatorium  esl  construit  dans  un  endroit 
abrité,  à  l'est,  au  nord,  et  à  l'ouest,  par  des  montagnes  et  des 
forêts  de  sapins.  En  i8j3,  l'établissement  de  bains  ferrugineux 
connu  sous  le  nom  de  Reiboldsgrun  devint  la  propriété  du 
D'  Driver,  qui  le  convertit  en  un  sanatorium  uniquement  des- 
tiné au  traitement  des  tuberculeux.  Il  est  maintenant  dirigé 
par  le  D1'  Wolff,  qui  m'a  reçu  avec  beaucoup  de  bienveillance 
lors  de  ma  visite  et  qui  m'a  fourni  des  renseignements  pré- 
cieux. La  caractéristique  principale  de  cet  établissement  est 
d'être  éloigné  de  toute  agglomération  humaine.  Reiboldsgrun 
n'est  pas  un  village  :  il  faut  aller  à  une  heure  et  demie  de  là 
pour  trouver  un  centre  d'habitations.  C'est  là  une  particularité 
importante  qui  permet,  outre  l'avantage  de  la  pureté  absolue 
de  l'air,  d'éviter  toute  imprudence  de  la  part  du  malade  et  toute 
influence  étrangère  fâcheuse. 

Le  sanatorium  se  compose  de  huit  grandes  villas  destinées 
aux  pensionnaires,  avec  des  bâtiments  séparés  pour  les  ser- 
vices intérieurs. 

Le  Curhaus,  bâti  en  1889-90,  renferme  une  salle  à  manger, 
un  salon,  différentes  pièces  où  les  malades  peuvent  se  dis- 
traire par  la  lecture  ou  les  jeux. 

Devant  le  Curhaus  est  une  terrasse  orientée  au  midi  pour 
le  repos  sur  les  chaises  longues. 

Le  Curhaus  communique  avec  un  autre  bâtiment  où  sont 
installés  la  direction,  la  poste,  le  service  de  l'hôtel.  Dans  les 
deux  étages  se  trouvent  12  chambres  de  malades. 

La  villa  Winterheim  (i885-86)  communique  avec  le  Curhaus. 


168  VISITES  AUX  SANATOBIA 

Le  rez-de-chaussée  contienl  des  appareils  hydrothérapiques. 
Aux  étages  sont  les  chambres  des  malades  dont  le  sol  est 
recouverl  de  linoléum  pour  faciliter  les  nettoyages;  le  chauf- 
fage se  l'ait  par  la  vapeur  à  basse  pression;  la  ventilation  est 
parfaite. 

A  l'extrémité  de  celle  villa  se  trouve  mie  véranda  couverte, 
servant  de  promenade,  à  laquelle  sont  annexées  quatre  galeries 
avec  chaises  longues. 

A  coté  se  trouvent  d'autres  villas,  construites  sur  le  même 
modèle  :  i°  la  «  Hugo's  Ruhe  »,  20  la  «  Villa  Karlsruhe  »,  3"  la 
«  Thurmhaiis  ». 

Comme  Reiboldsgrùn  est  éloigné  de  toute  agglomération, 
un  bâtiment  spécial,  la  «  Waldgut  Zôbish  »,  a  été  construit 
pour  recevoir  les  parents  des  malades  et  les  anciens  pension- 
naires guéris,  revenant  visiter  le  sanatorium. 

L'établissement  possède  une  source  d'eau  potable  1res  pure, 
une  installation  pour  la  désinfection  à  la  vapeur,  un  système 
de  chauffage  permettant  d'assurer  dans  les  chambres  une  tem- 
pérature liede  constante. 

Le  climat  de  la  région  où  est  situé  h'  sanatorium  est  celui 
de  moyenne  altitude;  air  pur,  riche  en  ozone,  privé  de  pous- 
sières.  Les  vents  sont  faibles,  de  même  que  les  variations  de 
température,  grâce  à  l'entourage  des  forêts.  Le  sol  poreux  se 
sèche  rapidement  après  les  pluies.  Dans  la  forêt  se  trouvent 
des  sentiers  en  pente  douce,  pour  les  promenades  des  malades 
qui  peuvent  se  reposer  sur  des  bancs  ou  dans  des  pavillons 
exposés  au  soleil,  avec  chaises  longues. 

Le  traitement  est  dirigé  par  le  D'  Wolff,  secondé  par  deux 
médecins  adjoints ,  suivant  les  principes  de  Brehmer-Dett- 
vveiler. 

Le  docteur  garde  les  malades  en  observation  pendant  quinze 
jours  avant  de  les  admettre  définitivement;  il  prend  la  tempé- 
rature de  ses  pensionnaires  très  fréquemment,  et  dès  (pie  la 
température  buccale  dépasse  .S;", 4  le  sujet  est  considéré  comme 
fébricitant  et  astreint  au  repos.  11  emploie  la  méthode  d'Oertel 
pour  renforcer  le  fonctionnement  <h\  cœur.  Le  diagnostic  et 
le  pronostic  sont  aidés  par  l'examen  du  sang  et  la  numération 
des  globules.  Le  D'  Wolll'  se  préoccupe  beaucoup  tic  procurer 
a    ses    malades    des    distractions  calmes,  telles   que    concerts, 


bu 

S 


BAD-LAUBBACH  175 

jeux  de  toutes  sortes,  réunions.  Dès  qu'un  malade  est  fébri- 
citant,  il  doit  garder  le  repos  absolu  :  même  la  lecture  de 
certains  ouvrages  lui  est  interdite.  Dans  la  bibliothèque  du 
sanatorium,  on  voit  des  livres  marqués  d'un  astérisque,  que 
les  malades  iebricitants  ne  peuvent  pas  lire. 

L'établissement  peut  recevoir  environ  une  centaine  de 
malades. 

Sanatorium  d'Albertsherg.  —  Non  loin  de  Reiboldsgrùn, 
à  Albertsberg,  s'élève  le  premier  sanatorium  pour  les  phtisi- 
ques pauvres  du  royaume  de  Saxe. 

C'est  grâce  aux  efforts  de  Driver  et  Wolf-Immerman,  ainsi 
qu'à  la  générosité  du  roi  de  Saxe  et  de  cpielques  autres 
philanthropes,  que  cet  établissement,  quoique  inauguré  seu- 
lement au  mois  d'octobre  1897,  est  déjà  florissant,  et  traite 
actuellement  5o  malades. 

Cet  établissement  est  sous  la  direction  du  Dv  Gebser,  ancien 
assistant  à  Pœiboldse'rùn. 


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Sanatorium  de  Bad-Laubbach.  —  En  octobre  1897  fut 
ouvert  par  M.  le  D1'  Wilh.  Achtermann,  ancien  médecin-direc- 
teur de  l'établissement  Brehmer  de  Goerbersdorf,  un  nouveau 
sanatorium  destiné  au  traitement  de  la  phtisie  pulmonaire. 

Bad-Laubbach  est  situé  près  de  Coblence,  dans  une  vallée 
du  Rhin,  entourée  de  montagnes  boisées.  A  la  beauté  natu- 
relle du  site  s'ajoute  l'agrément  d'une  petite  rivière  descen- 
dant d'une  haute  montagne  appelée  le  Laubbaeh. 

Le  parc  du  sanatorium  touche  au  magnifique  parc  de  la  ville 
de  Coblence,  d'où  l'on  découvre  des  vues  admirables.  Une  très 
belle  allée  de  châtaigniers  conduit  les  visiteurs  aux  divers 
bâtiments  du  sanatorium.  Le  bâtiment  principal  peut  recevoir 
environ  oo  malades,  et  quatre  villas  séparées  contiennent  cha- 
cune une  dizaine  de  chambres.  Dans  l'une  de  ces  quatre  habi- 
tations, appelée  le  «  Badehaus  »,  se  trouve  aussi  la  salle  de 
consultation,  le  jardin  d'hiver,  et  quelques  salons  pour  les 
pensionnaires.  De  nombreux  pavillons  et  bancs,  où  les  mala- 
des peuvent  se  reposer,  sont  disséminés  dans  le  parc.  Il  y  a 
en  plus  une  galerie  pour  la  cure  à  air  libre. 

Le  climat  de  Laubbaeh  est  doux,  modérément  humide.   La 


'71' 


1 757  TES  .  !  /  '.V  SA  \A  TORIA 


température,  dans  la  vallée,  esl  en  moyenne  de  deux  à  trois 
degrés  moins  chaude,  et  en  hiver  <1<'  deux  à  trois  degrés 
moins  froide  que  dans  les  environs. 

Le  traitement  prescrit  par  le  Dr  Achtermann  est  celui  qu'em- 
ploient Imis  les  phtisio-thérapeutes  modernes.  .Notre  confrère, 
(|tii  inaugurait  en  iSt)4  à  Goerbersdorf  une  section  pour  le 
traitement  des  phtisiques  de  la  classe  moyenne,  a  ajout»'' 
également  à  son  nouveau  sanatorium  une  annexe  pour  rece- 
voir cette  classe  de  pensionnaires.  Le  sanatorium  de  Bad- 
Laubbacli  est  ouvert  toute  l'année. 


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msÊÊlÊÊÈm 


Fie:.  21.  —  Sanatorium  de  Bad-Laubbach. 


Sanatorium  de  Saint-Blasien.  —  Cet  établissement,  que 
j'ai  visité  en  juillet  i »St)4 ,  est  situé  au  pied  i\n  Feldberg 
(Forêt-Noire),  dans  la  vallée  de  l'Alb,  à  773  mètres  d'altitude, 
au  milieu  de  montagnes  couvertes  de  forêt  de  pins  ;  il  est 
exposé  au  midi  dans  un  site  pittoresque,  dominant  la  petite 
ville  de  Saint-Blasien.  La  vallée  de  l'Alb  est  assez  large  pour 
être    follement    ensoleillée  ;    elle   est  protégée    des   vents  du 


Knopf.  Sanator 


SAINT-BLASIEN  179 

nord.  Le  climat  est  de  moyenne  altitude  sans  être  froid, 
tonique  sans  être  excitant,  convenant  à  des  malades  impres- 
sionnables comme  les  phtisiques.  Atmosphère  pure,  chargée 
de  principes  résineux,  riche  en  ozone,  grâce  au  voisinage  des 
forêts;  sol  granitique;  eaux  vives.  Les  variations  de  tempé- 
rature ne  se  font  pas  vivement  sentir  à  Saint-Blasicn  :  en  été, 
la  température  ne  dépasse  pas  i5°;  l'hiver  est  doux,  grâce  à 
l'exposition  au  midi. 

Le  sanatorium  a  été  construit  en  1881  ;  il  fut  d'abord  admi- 
nistré par  M.  le  Dr  Hauffe  ;  l'établissement  est  à  présent 
sous   l'habile  direction  de  M.  le  Dr  Sanders. 

Il  se  compose  de  trois  corps  de  bâtiments  principaux  reliés 
par  une  véranda  vitrée  avec  des  chaises  longues  pour  la  cure 
de  repos.  Les  différents  étages  sont  également  précédés  de 
terrasses  couvertes  où  les  malades  peuvent  reposer  sur  les 
chaises  longues.  Il  peut  recevoir  60  malades.  Un  vaste  hall 
sert  de  promenoir  par  les  temps  de  pluie.  Les  malades  sont 
répartis  dans  les  trois  villas  selon  la  gravité  de  leur  état. 
L'établissement  est  entouré  de  jardins,  au  milieu  d'un  parc,  et 
accède  directement  dans  la  forêt  percée  de  beaux  sentiers  en 
pente  douce,  avec  des  bancs  de  repos  et  des  chaises  longues. 
L'installation  intérieure  est  très  confortable.  Ventilation  par- 
faite; chauffage  au  bois  ;  désinfection  soigneuse  à  la  vapeur. 

Il  y  a  en  plus  de  bonne  eau,  des  salles  de  bains  et  de 
douches,  et  toute  la  maison  est  éclairée  à  l'électricité. 

Le  traitement  est  celui  de  Brehmer-Dettweiller,  sauf  quel- 
ques légères  modifications.  Sous  la  direction  de  M.  le 
D1'  Hauffe,  les  malades  même  à  un  degré  avancé  y  étaient  reçus  ; 
mais  la  nouvelle  direction  les  refuse.  M.  le  Dr  Sanders  veut 
que  l'établissement  soit  un  véritable  «  Heilanstalt  »  (maison 
où  l'on  va  pour  être  guéri),  et  il  n'admet  que  les  tuberculeux 
au  premier  degré,  ainsi  que  l'es  prédisposés  à  la  phtisie. 

Le  seul  désavantage  que  le  sanatorium  de  Saint-Blasien 
me  semble  présenter,  c'est  qu'il  est  peut-être  trop  rapproché 
du  «  Kursaal  »  de  la  station,  établissement  sans  doute  très 
utile  aux  névropathes,  mais  ne  convenant  guère  aux  tubercu- 
leux. 

Néanmoins,  les  résultats  obtenus  dans  le  sanatorium  de  Saint- 
Blasien  semblent  être  aussi  bons  qu'ailleurs. 


180  VISITES  AUX  SANATORIA 

Sanatorium  de  Nordrach.  —  Le  I)1  Walther,  directeur  de  ce 
sanatorium,  l'appelle  aussi  ci  la  colonie  de  Nordrach  ».  L'éta- 
blissemenl  est  situé  dans  la  Forèt-Noire,  à  une  altitude  de 
.j5<>  mètres,  dans  une  vallée  ouverte  au  sud-ouest.  Autour  il 
y  a  des  montagnes  boisées  de  pins.  C'esl  dans  la  plus  belle 
région  de  la  Forêt-Noire  que  se  trouvent  les  maisons  appar- 
tenant à  celle  colonie. 

Les  chambres  sont  meublées  d'une  façon  très  hygiénique  ; 
leur  parquet  est  recouvert  de  linoléum.  Le  chauffage  se  l'ail 
par  la  vapeur,  cl  toutes  les  pièces  sont  éclairées  à  la  lumière 
électrique.  Chaque  chambre  a  une  installation  séparée  pour 
les  douches  à  l'eau  froide  <>u  tempérée.  Une  vacherie  attenant 
au  sanatorium  fournil  de  bon  lait. 

Une  institutrice  est  attachée  à  l'établissement  pour  instruire 
les  enfants  venus  avec  leurs  parents  malades. 

Le  sanatorium  esi  silué  dans  un  endroit  1res  isolé  et  tran- 
quille; il  esi  protégé  contre  les  vents  froids.  Le  traitement  rsi 
celui  de  Brehmer-Dettweiler.  La  station  de  chemin  de  fer  la 
plus  rapprochée  de  la  colonie  es1  Gengenbach,  sur  la  ligne  de  la 
Forêt-Noire. 

Sanatorium  Lehrecke  à  Bad-Hehburg.  —  Cet  établisse- 
ment esl  destiné  au  traitement  des  maladies  île  la  arorffe  el  des 
poumons.  Rehburg  esl  situé  dans  la  région  montagneuse  de 
l'Allemagne  appelée  le  Harz,  a  une  altitude  de  i5o  mètres. 
Des  montagnes  couvertes  de  sapins  l'abritent  île  tous  les  vents 
froids. 

Le  climat  de  Rehburg  a  la  réputation  d  être  particulièrement 
avantageux  pour  les  malades  venant  en  élé  des  stations  hiver- 
nales du  Sud.  ou  en  automne  avant  de  partir  pour  les  pays 
chauds.  Toutefois  on  l'ail  aussi  à  Rehburg  îles  cures  d'hiver, 
el  on  obtient  de  bons  résultats  chez  les  phtisiques  peu 
avancés. 

Le  sanatorium  Lehrecke,  fondé  en  188G  par  le  D'  Kaatzer, 
se  trouve  depuis  i8i)(>  sous  la  direction  du  D'  Lehrecke. 
Il  est  installé  selon  les  principes  d  hygiène  moderne,  avec 
vérandas,  galeries  île  repos,  jardins,  etc.  L'établissement  a  en 
plus  un  laboratoire  bactériologique,  des  chambres  noires,  des 
appareils  de  Rœntgen  pour  faire  des  études  cliniques.  11  y  a 


SANATORIUM  LEIIRECKE  1S1 

aussi  une  installation  d'hydrothérapie,  particulièrement  cons- 


l'isr.  2).  —  Sanatorium  de  ftordrach. 


rig.  2.1.  —  Vue  générale  du  sanatorium  Lehrccke  à  Bad-Rehburg. 

truite  pour  les  besoins  des  malades  atteints  de  phtisie  pulmo- 
naire. 


iSj  visites  aux  sanatoriâ 

Bad-Rehbure  est  une  station  du  chemin  de  fer  de  la  Lionne 
Steinhuder-Meer,  et  se  trouve  à  une  distance  de  5  kilomètres 
de  la  ville  de  Rehburg. 

Sanatorium  Schomberg.  —  A  Schômberg,  dans  la  portion 
wurtemberereoise  de  la  Forêt-Noire,  le  Dr  Baudach  a  fondé,  il 
y  a  sept  ans,  un  sanatorium  qui  a  été  agrandi  l'année  der- 
nière. Il  esl  dirige  à  présent  par  le  ].)''  Koch. 

Cet  établissement,  ouvert  été  connue  hiver,  a  toutes  ses 
chambrés  orientées  au  midi.  Il  possède  des  vérandas  et  des 
galeries  pour  la  cure  d'air,  qui  y  est  appliquée  avec  le  même 
soin  et  d'après  la  même  méthode  que  dans  les  grands  établis- 
sements fermés. 

Une  section  est  réservée  aux  phtisiques  peu  aisés.  Moyen- 
nant un  prix  de  journée  modique,  ils  y  reçoivent  tous  les 
soins  que  réclame  leur  état  ,  et  peuvent  y  suivre  ,  dans 
d'excellentes  conditions,  le  traitement  hygiénique  de  la  tuber- 
culose. 

Schomberg  est  à  65o  mètres  d'altitude.  Le  pays,  montagneux, 
est  entouré  de  toutes  paris  par  de  grandes  forêts  de  pins  et 
de  haute  futaie.  Le  climat  est  celui  de  toute  la  Forêt-Noire  (1). 


A  X  GLETERHE 

Il  n'y  a  encore  à  l'heure  actuelle  en  Angleterre  que  très  peu 
de  sanatoriâ  pour  phtisiques  dans  le  vrai  sens  du  mot.  Mais  il 
existe  dans  tout  le  Royaume-Uni,  pour  le  traitement  des  tuber- 
culeux indigents,  quelques  hôpitaux  spéciaux  d'une  très  grande 
importance  par  les  bons  résultats  qu'on  y  a  obtenus. 

Lors  de  ma  visite  en  Angleterre  j'ai  vu  plusieurs  de  ces  ins- 
titutions, et  je  vais  décrire  quelques-unes  de  celles  qui  m'ont 
semblé  les  plus  importantes. 

Hôpital  de  Ventnor.  —  Cet  établissement,  que  l'on  désigne 
sous  le  nom  de  The  Royal  National  Hospital  for  Consumption, 


(i)  E.-P.  Lêo.n  Petit.  Le  phtisique  et  son  traitement  hygiénique. 


J3 


HOPITAL   DE    VEXTXOR  1 85 

a  été  bâti  petit  à  petit  par  la  charité  privée  dans  l'île  de  Wight. 
Cette  Madère  de  l'Angleterre  jouit  d'un  climat  agréable,  grâce 
à  sa  situation  abritée  contre  les  vents  froids  du  nord,  grâce  au 
Gulf-Stream,  qui  vient  se  briser  perpendiculairement  sur  la 
côte  sud,  se  dirige  ensuite  vers  Test  et  l'ouest,  et  entoure  l'île 
d'un  courant  d'eau  tiède. 

Le  climat  est  si  doux  que  les  oliviers,  les  myrtes  et  les  pal- 
miers poussent  en  pleine  terre.  La  température  maxima  de 
l'année  est  de  +  a6°,5  et  la  température  minima — 4*\6-  L'at- 
mosphère est  plutôt  sèche  qu'humide,  car  la  quantité  d'eau 
tombée  n'est  que  de  28°,2. 

C'est  un  poitrinaire,  le  D1'  Hill-Hassal,  qui  en  1868  commença 
modestement  par  élever  à  Ventnor  un  petit  pavillon  isolé  ; 
aujourd'hui,  il  y  a  10  pavillons  et  l'hôpital  peut  recevoir 
i3a  malades.  Entre  chaque  groupe  de  deux  bâtiments  se 
trouve  une  cuisine.  Chaque  pavillon  a  sa  chambre  spéciale, 
un  salon  par  six  malades  ;  c'est  l'isolement  par  séquestration. 
Un  ventilateur  à  hélice,  mû  par  la  vapeur,  fournit  4-ooo  pieds 
cubes  d'air  par  heure  ;  cet  air  pur  est  pris  au  dehors,  circule 
dans  des  tubes  qui  entourent  le  poêle,  et  n'arrive  dans  les 
chambres  qu'à  une  température  de  -+-  160.  L'air  vicié  s'échappe 
par  la  partie  élevée  et  est  entraîné  dans  une  cheminée  d'appel, 
qui  le  projette  à  plusieurs  mètres  au-dessus  des  habita- 
tions. 

Il  n'y  a  pas  de  vérandas  pour  la  cure  de  repos  ;  les  prome- 
nades sont  graduées.  Les  repas  sont  pris  en  commun;  une 
grande  salle  sert  de  lieu  de  réunion,  avec  une  bibliothèque, 
des  pianos,  des  billards.  Dans  le  parc,  des  jeux  de  croquet,  et 
dans  le  bas,  vers  la  mer,   un  jardin   d'hiver. 

L'hôpital  ouvre  ses  portes  à  tous  les  nécessiteux,  âgés  de 
plus  de  douze  ans,  atteints  d'affections  tuberculeuses. 

On  exige  de  chaque  malade  une  petite  pension,  autant  pour 
ménager  son  amour-propre  que  pour  parer  à  l'inconvénient 
inhérent  à  la  plupart  des  hôpitaux  destinés  à  la  classe  indigente, 
à  l'exclusion  de  la  classe  moyenne.  Le  prix  de  cette  pension 
est  fixé  à  10  shillings  par  semaine,  soit  1  fr.  80  par  jour,  tout 
compris.  Il  ne  représente  pas  la  dépense  totale  du  malade.  La 
différence  est  généralement  acquittée  par  des  associations  de 
bienfaisance   ou   des  sociétés  de  secours   mutuels.  En  outre, 


l'ISlTES    MX    SAXATORIA 

un  certain  nombre  de  pauvres  sonl  reçus  gratuitement,  le  prix 
de  leur  pension  ('-tant  prélevé  sur  un  crédit  spécial. 

Cel  hôpital,  à  la  portée  de  toutes  les  bourses,  esl  ouvert 
à  tous  les  sujets  britanniques.  Depuis  sa  fondation,  i2,5oo 
malades  y  onl  été   traités,  sans  compter  les  externes. 

Les  médecins  traitants  pratiquent  l'éclectisme  en  matière  de 
traitement.  La  principale  médication  est  l'air  si  pur  de  la  «nie. 
et  l'on  emploie  indifféremment  les  hypophosphites,  les  injec- 
tions de  créosote,  <!'■  gaïaeol,  les  inhalations  <le  vapeur 
chaude  :  on  donne  beaucoup  d'huile  de  foie  de  morue. 

Les  règles  de  l'hygiène  sont  rigoureusement  observées  et 
l'on  esl  toujours  à  le  recherche  du  progrès.  Les  crachoirs, 
les  mouchoirs,  les  linges  sonl  désinfectés  dans  une  buanderie 
à  vapeur  spéciale. 

Le  rapport  médical  de  1890  constate  les  beaux  résultats 
obtenus. 

J'ai  visité  l'hôpital  de  Ventnor  dans  ses  diverses  parties  :  les 
chambres  sont  reliées  par  une  porte  qui  facilite  les  communica- 
tions entre  malade-. 

Lors  de  ma  visite.  M.  le  Dr  Philip  m'a  reçu  avec  beaucoup 
de  bienveillance. 

Hôpital  Brompton.  —  J'ai  visité  il  y  a  trois  ans.  à  Londres, 
celte  grande  institution  dans  laquelle  Williams  institua  de  si 
bonnes  règles  d'hygiène  qu'on  n'a  presque  jamais  observé  de 

s  de  contagion  parmi  ses  infirmiers.  Ce  fait  L'amenait  à  nier 
la  nature  contagieuse  de  la  maladie. 

Voici  la  belle  description  de  Brompton  Hospital,  que  j'em- 
prunte à  l'excellent  livre  de  M.  le  Dr  Léon  Petit  : 

Ce  qui  Frappe,  dés  l'abord,  c'est  le  côté  pittoresque,  I  5- 
pecl  souriant  de  cet  asile  bâti  au  milieu  d'un  beau  parc.  Avec 
sa  façade  crénelée,  ses  fenêtres  à  meneaux,  se-  campaniles,  il 
a  tout  l'air  d'une  riche  maison  de  plaisance. 

Il  se  compose  de  deux  corps  de  bâtiment,  séparés  par  la 
rue    Fulham  road   et  réunis  par  un  souterrain. 

L'ancien  hôpital,  édifié  en  i84i.  affecte  la  forme  de  la 
lettre  II  dont  chaque  branche  verticale  mesure  190  pieds  an- 
glais environ  58  mètres  .  La  branche  transversale  fait  face  à 
la  rue.  sa  façade  est  de  200  pieds    < >  1  mètre- 


UOPITAL  BROMl'TOy  189 

Celte  construction  est  entourée  de  pelouses  et  de  jardins 
d'une  superficie  de  3  acres  (i  hectare  214). 

Dès  qu'on  a  franchi  la  grille,  on  se  trouve  en  présence  de 
trois  allées  conduisant  :  l'une  aux  offices  et  aux  communs,  une 
autre  au  parloir  des  visiteurs  ;  celle  du  milieu  mène  dans  un 
vaste  hall  qui  sert  d'entrée  principale.  Le  sous-sol  dessert,  en 
les  réunissant,  toutes  les  parties  du  bâtiment.  Il  renferme 
les  salles  de  bains,  de  bains  de  vapeur  et  d'hydrothérapie,  les 
appareils  d'aérothérapie  et  les  machines  destinées  à  la  venti- 
lation et  au  chauffage. 

Le  rez-de-chaussée,  surélevé,  contient  la  salle  des  médecins, 
les  laboratoires,  le  musée  analomique,  les  bureaux  de  la  direc- 
tion et  les  logements  du  personnel. 

Un  ascenseur  et  un  monte-charges  relient  les  deux  galeries 
réservées  aux  malades. 

Le  premier  étage  est  affecté  aux  femmes.  Sur  toute  la  façade 
règne  un  large  promenoir,  exposé  au  midi  et  sur  lequel  s'ou- 
vrent les  salles.  Ces  salles  sont  des  chambres  qui  ne  renfer- 
ment jamais  que  8  lits  :  quelques-unes  n'en  contiennent  que  2. 
La  lumière  et  le  soleil  y  pénètrent  par  de  larges  baies,  dans 
l'embrasure  desquelles  sont  disposées  les  bouches  de  chaleur 
et  de  ventilation.  Ce  premier  étage  peut  recevoir  io3  malades. 

Le  second  étage  présente  exactement  les  mêmes  disposi- 
tions. Il  est  réservé  aux  hommes  et  contient  107  lils. 

Le  Nouvel  Hôpital,  situé  sur  le  côté  sud  de  Fulham  roail.  est 
aménagé  pour  i3j  malades.  Il  renferme,  en  outre,  le  service 
de  la  consultation  qui  occupe  tout  le  rez-de-chaussée. 

Les  trois  étages  consacrés  aux  malades  sont  entourés  cha- 
cun d'une  large  galerie  intérieure,  au  centre  de  laquelle  est 
aménagé  un  véritable  salon  très  spacieux,  avec  sa  bibliothèque, 
ses  journaux,  son  piano  et  ses  jeux.  Les  malades  s  y  réunis- 
sent dans  la  journée.  Les  chambres,  au  nombre  de  dix  ^4"\20 
de  hauteur,  renferment  de  1  à  8  lits;  elles  s'ouvrent  toutes  sur 
la  galerie.  Chaque  service  de  4°  lits,  soit  1  malade  par 
1 1 5  pieds  superficiels,  possède  ses  lavabos,  ses  salles  de  bains, 
d'inhalation,  de  sudation  et  ses  water-elosets. 

Les  cuisines  sont  placées  dans  les  combles  sur  la  façade 
nord,  dans  une  sorte  d'annexé  qui  les  sépare  complètement 
du  corps  de  logis  principal. 


190  yiSITES  AUX  SANATORIA 

Trois  ascenseurs  et  îles  monte-charges  facilitent  le  service 
des  étages.  Aux  quatre  angles  existenl  de  larges  escaliers  à 
la  française,  sans  tapis. 

A  proximité  de  Brompton  (Smith  street)  se  trouve  le  Home, 
fondé  par  des  personnes  bienfaisantes.  11  est  destiné  à  abriter 
les  malades,  en  attendant  leur  tour  d'admission  et  à  offrir  un 
refuge  temporaire  aux  convalescents  après  leur  sortie.  Ils  y 
reçoivent  le  logement,  les  soins  et  les  médicaments,  niais  ils 
ont  à  pourvoir  a  leur  nourriture. 

Une  visite  à  Brompton  laisse  une  impression  toute  diffé- 
rente de  celle  que  produit  généralement  un  hôpital.  D'abord, 
aucune  odeur,  grâce  a  la  perfection  du  système  ventilateur, 
même  dans  le  hall  des  consultations,  ou  passent  et  séjournent 
chaque  jour  plus  de  3oo  personnes.  Ensuite,  aucun  de  ces 
détails  attristants  qui,  d'ordinaire,  assombrissent  le  séjour 
dans  une  salle  hospitalière.  Aux  lits,  pas  de  numéro,  pas  de 
ces  pancartes  ou  sont  étalées  aux  yeux  de  tous  le  nom  et 
l'histoire  de  la  maladie  ainsi  que  les  conditions  sociales  île 
l'hospitalisé;  pas  de  ces  affreuses  capotes  d'uniforme,  mais  des 
robes  de  chambre  et  des  peignoirs  aux  formes  variées  et  aux 
couleurs  \  ives. 

Des  Heurs  à  profusion  dans  les  salles  et  les  galeries  appor- 
tent leur  note  gaie  et  consolante.  Deux  fois  par  semaine,  elles 
sont  renouvelées  par  des  dames  réunies  en  association  cha- 
ritable, sous  la  gracieuse  appellation  de  Mission  aux  fleurs 
(Flowers  Mission). 

Pour  les  quatre  repas  quotidiens,  les  malades  d'une  même 
galerie  sont  reunis  autour  d'une  grande  table,  soigneusement 
servie,  parée  de  linge,  d'argenterie  et  de  fleurs,  et  rappelant 
aux  visiteurs  tout  le  confort  de  la  maison   aisée. 

Sanatorium  de  Craigleith.  —  A  quelques  lieues  d'Edim- 
bourg, sous  le  ciel  changeant  île  l'Ecosse,  s'élève,  dans  un 
parc,  l'ébauche  d'un  sanatorium  pour  la  classe  pauvre  du  pays. 

Un  philanthrope  écossais  a  donne  sa  villa;  le  D' Philip,  méde- 
cin honoraire,  consacre  ses  labeurs  aux  soins  des  indigents  : 
les  dépenses  sont  couvertes  par  des  contributions  volontaires. 

On  ne  peut  soigner  (pie  i  j  malades,  mais  on  apporte  à  leur 
traitement  la  plus  grande  sollicitude,  et  les  résultats  obtenus 


CR  AIGLE  ITI1 


19' 


jusqu'ici  ont  été  la  récompense  de  tous  ces  dévouements.  Le 
D1'  Philip  doit  du  reste  une  partie  du  succès  de  sa  statistique 
à  la  façon  dont  se  fait  le  recrutement  des  malades. 

On  les  choisit  parmi  les  cas  urgents  :  une  laryngite  néces- 
sitant la  trachéotomie,  une  pleurésie  purulente  obligeant  à 
pratiquer  l'empvème,  etc.,  sont  autant  d'indications  à  l'admis- 
sion immédiate  des  malades. 


Fis-  2: 


Sanatorium  de  Craigleith   (Ecosse) 


Pour  les  tuberculeux,  on  les  prend  dans  de  telles  condi- 
tions qu'un  bon  régime,  une  hygiène  sévère,  amèneront  cer- 
tainement la  guérison  du  mal.  Le  choix  de  ces  derniers  malades 
est  l'ail  dans  la  ville  d'Edimbourg,  par  l'intermédiaire  de  The 
Victoria  Dispensary  for  Consumplion  and  Diseuses  oftlie  Chest. 

Cet  établissement  remplit  le  rôle  des  consultations  externes 
des  hôpitaux  de  Paris,  avec  cette  différence  que  ce  dispensaire 
est  tout  à  fait  indépendant. 

Les  personnes  atteintes  d'affections  pulmonaires  viennent  y 
prendre  des  consultations.  Des  aides-médecins  attachés  au  dis- 
pensaire vont  visiter  chez  eux  les  malades  qui  ne  peuvent  sortir. 

C'est  dans  ces  conditions  que  sont  choisis  les  tuberculeux 
que  l'on  envoie  à  l'hôpital  de  Craigieith. 


Kji  VISITES  AUX  SANATORIA 

Quoique  le  climat  d'Ecosse  soit  loin  d'être  particulièrement 
doux,  les  résultais  obtenus  par  le  traitement  hygiéno-diété- 
tique  el  consignés  clans  le  dernier  rapport  du  I)1  Philip  sont 
des  plus  encourageants,  au  point  que  notre  confrère  espère 
voir  l'établissement  prendre  bientôt  de  plus  larges  proportions. 

The  Victoria  Dispensai')/  for  Consumptionand  Diseases  ofthe 
Chest  est  situé  au  centre  d'Edimbourg,  26,  Launston  Place. 

C'est,  comme  je  le  disais  plus  haut,  l'établissement  <>u  se 
l'ait  le  recrutement  des  malades  pour  le  sanatorium  de  Craig- 
leith. 

Cette  institution  est  intéressante,  et  mérite  (pu-  j'en  donne 
une  description. 

Le  dispensaire  est  ouvert  pour  les  consultations,  les  lundi, 
mercredi,  vendredi,  à  partir  de  trois  heures,  seulement  pour 
les  maladies  de  l'appareil  respiratoire;  bien  entendu,  le  plus 
fort  contingent  est  fourni  par  les  phtisiques.  Chaque  malade 
reçoit  un  bulletin,  indiquant  combien  de  fois  il  doit  revenir 
par  semai  ne  ou  par  mois  :  à  la  deuxième  visite,  il  doit  apporter 
un  échantillon  de  son  expectoration  dans  un  flacon. 

Si  le  malade  est  trouvé  tuberculeux,  il  reçoit  une  feuille  con- 
tenant des  instructions  indiquant  la  façon  dont  il  doit  traiter 
ses  expectorations,  soit  avec  de  l'eau  chaude  ou  de  l'acide 
phénique,  pour  empêcher  la  contagion.  On  lui  recommande 
de  ne  jamais  cracher  dans  la  rue,  mais  toujours  dans  son 
crachoir  de  poche,  de  ne  jamais  se  servir  de  son  mouchoir 
pour  recevoir  les  expectorations,  de  ne  jamais  les  avaler.  On 
lui  conseille  d'avoir  des  ustensiles  de  table  ne  servant  qu'à 
lui  seul,  de  n'embrasser  personne.  La  mère  phtisique  ne  doit 
pas  nourrir  son  enfant.  Le  malade  doit  vivre  à  l'air  pur,  dor- 
mir les  fenêtres  ouvertes,  se  distraire  prudemment,  suivre  un 
régime  approprié,  ne  jamais  prendre  d'alcool  sans  ordonnance 
du    médecin. 

A.  L  T  BICHE-  H  0  N  G  RI  E 

Sanatorium  Alland.  —  En  i883,  M.  le  professeur  von 
Schrœtter  eut,  le  premier,  l'idée  de  fonder  en  Autriche  un  éta- 
blissement à  l'instar  de  celui  que  les  Anglais  avaient  créé  dans 
l'île  île  Wight.  Cet  établissement  devait  avoir  un  double  but; 


Kxopf.   Sanatoria. 


ALLAND  195 

d'une  part,  mettre  un  terme  à  l'encombrement  des  hôpitaux 
par  les  tuberculeux;  d'autre  pari,  fournir  aux  pauvres  et  aux 
déshérités  les  moyens  de  vivre  sous  un  climat  salubre  et  de 
jouir  d'un  ordinaire  supérieur  à  celui  cpii  leur  esl  offert  dans 
les  hôpitaux   généraux. 

En  1884,  grâce  à  ses  nombreuses  démarches,  M.  von 
Schrœtter  réussit  enfin  à  constituer  un  comité  composé  de 
membres  appartenant  au  Collège  médical  de  Vienne,  et  chargé 
de  l'examen  et  de  l'exécution  de  ce  projet  si  cligne  d'intérêt  à 
tous  égards.  Malheureusement,  l'assemblée  se  borna  à  élaborer 
des  statuts;  aucune  mesure  décisive  ne  fut  adoptée. 

En  1892,  nouvel  appel  de  M.  von  Schrœtter  au  Collège  médi- 
cal, dans  le  but  d'arriver  à  une  solution  immédiate  de  cette 
question.  Cette  fois,  tout  le  monde  en  reconnut  l'urgence.  Dans 
le  courant  de  cette  même  année,  M.  von  Schrœtter  se  décida 
à  solliciter  la  charité  publique,  et,  grâce  au  concours  pécu- 
niaire d'un  petit  nombre  de  généreux  donateurs,  il  parvint  à 
jeter  les  bases  d'une  «  Société  »  ayant  comme  objet  la  création 
et  l'entretien  d'un  sanatorium  pour  les  tuberculeux. 

Cet  appel  à  la  charité  publique  ne  fut  pas  fait  en  vain: 
bientôt  les  dons  affluèrent  de  toutes  parts,  de  sorte  que,  dès 
l'année  1894,  on  put  songer  à  l'acquisition  du  terrain  avec 
l'intention  de  commencer  les  travaux  de  construction  dès  le 
printemps  suivant. 

Le  choix  de  l'emplacement  fut  des  plus  laborieux  ;  après  bien 
des  recherches,  la  préférence  fut  accordée  à  un  délicieux  vallon, 
situé  à  16  kilomètres  de  la  ville  de  Baden,  près  de  Vienne,  et 
non  loin  de  la  petite  localité  d'Alland,  dans  le  Wienerwald. 
Cette  charmante  région  est  abritée  du  côté  du  nord,  de  l'est 
et  de  l'ouest,  par  une  chaîne  de  hautes  montagnes;  du  côté 
du  sud,  elle  s'ouvre  dans  une  plaine  de  i5o  arpents  environ. 
Le  point  le  plus  bas  de  ce  domaine  se  trouve  à  4oo  mètres, 
le  point  le  plus  élevé  à  680  mètres  au-dessus  du  niveau  de 
la  mer.  L'établissement  est  actuellement  capable  de  loger 
108  pensionnaires.  Les  plans  en  ont  été  tracés  par  M.  le  profes- 
seur L.  Teyer  (de  Gratz j  ;  ils  ont  été  conçus  de  telle  sorte 
que  dortoirs,  réfectoires,  cuisines,  salons,  se  trouvent  com- 
plètement isolés  les  uns   des  autres. 

Le  bâtiment  principal  se   compose  de   trois  étages.  Le  pre- 


■  96  VISITES  AUX  SANATORIA 

mier  comprend  une  pièce  de  11  mètres  de  large,  dont  les 
fenêtres  s'ouvrent  vers  le  sud:  de  chaque  côté  du  salon  se 
trouvenl  deux  dortoirs  destinés  à  loger  chacun  s  malades,  el 
subdivisés  en  deux  dortoirs  secondaires,  renfermant  chacun 
i   liis. 

A  ces  deux  dortoirs  s<>nl  annexés,  de  chaque  côté,  des  cham- 
bres d'infirmiers,  des  salles  de  bains  et  un  grand  hall  dans 
lequel  les  malades  peuvent  se  réunir  en  cas  de  mauvais  leni|>s. 

Il  existe,  en  outre,  à  chaque  étage,  une  salle  d'inhalation 
<>l  une  pièce  pour  l'hydrothérapie.  Les  appartements  réservés 
aux  médecins,  ainsi  que  les  salles  d'opération,  etc.,  se  trou- 
vent au  premier  et  au  troisième  étage. 

Toutes  ces  pièces  sonl  chauffées  au  moyen  d'un  calorifère 
ei  éclairées  à  la  lumière  électrique. 

Le  réfectoire  el  les  cuisines  sonl  contigus  au  bâtimenl 
principal.  Le  premier  se  compose  d'une  vaste  salle,  haute  de 
plafond,  dans  laquelle  plus  de  cent  pensionnaires  peuvent 
aisément  se  réunir  pour  prendre  leur  repas.  Ce  réfectoire 
communique  avec  le  bâtiment  principal  par  1  intermédiaire 
d'une  galerie  couverte. 

Dans  un  pavillon  isolé  et  éloigné  du  reste  de  l'établissement 
ont  été  installés  la  chambre  de  repos,  ainsi  que  la  salle  d'au- 
topsie  et  les  laboratoires. 

Quant  au  médecin  en  chef,  il  est  logé  dans  i[n<~  sorte  de 
villa  «pii  lui  est  exclusivement  destinée  et  qui  se  trouve  située 
pies  de  l'entrée  de  la  propriété. 

Mais  quel  est  le  but  poursuivi  par  les  fondateurs?  Quels 
bienfaits  peut-on  espérer  d'une  institution  de  ce  genre?  Puis- 
qu'il s'agit  d'une  maison  de  santé  et  nullement  d'une  retraite 
pour  les  incurables,  il  est  évident  que  seuls  les  malades  sus- 
ceptibles d'être  améliorés  doivent  avoir  le  droit  d'y  être 
admis.  Ces  malades  seront  désignés  parmi  ceux  des  hôpitaux 
généraux  qui  paraîtront  satisfaire  aux  conditions  requises;  les 
sujets  agréés  devront  ensuite  être  soumis  à  une  sorte  de  stage 
probatoire  pendant  trois  semaines;  en  cas  d'amélioration,  leur 
séjour  sera  prolongé  île  trois  mois  au  maximum;  dans  le  cas 
contraire,  ils  devront  être  renvoyés  dans  les  hôpitaux  ordi- 
naires et  considérés  désormais  comme  incurables. 

Une  ibis  admis  dans  l'établissement,  les  pensionnaires  sont 


ALLAND  197 

soumis  à  des  règles  thérapeutiques  spéciales,  n'ayant  rien  de 
commun  avec  les  traitements  que  Ton  institue  dans  les  hôpi- 
taux généraux  ;  de  plus,  il  est  essentiel  que  chaque  malade 
suive  docilement  les  prescriptions  qui  lui  seront  laites  :  la 
rapidité  de  la  guérison  sera  en  raison  directe  de  la  bonne 
volonté  manifestée  par  le   patient. 

La  vaste  étendue  de  ce  domains  permettra  aux  pension- 
naires de  se  livrer  à  une  foule  de  petits  travaux  dont  l'exé- 
cution sera  jugée  compatible  avec  le  séjour  en  plein  air  : 
jardinage,  défrichement  du  parc,  etc. 

Quant  à  la  durée  qu'il  conviendra  d'accorder  à  ces  exer- 
cices corporels  et  au  séjour  en  plein  air,  c'est  à  l'expérience 
de  se  prononcer;  nous  en  dirons  autant  de  la  température,  à 
laquelle  les  malades  devront  s'habituer.  D'ailleurs,  il  sera  pro- 
bablement nécessaire  d'instituer  un  traitement  spécial  pour 
chaque  phase  de  la  maladie  ;  c'est  à  ce  prix  qu'on  aura  des- 
chances, sinon  d'atteindre  pleinement  le  but,  au  moins  de  s'en 
rapprocher  le  plus  possible. 

L'étendue  de  la  propriété  est  telle  qu'il  n'est  guère  facile, 
pour  le  moment,  de  déterminer  d'une  façon  précise  le  nombre 
de  pensionnaires  qui  peuvent  être  hospitalisés.  Tout  ce  que 
l'on  peut  dire,  c'est  que  si  les  espérances  des  fondateurs 
viennent  à  se  réaliser,  il  serait  aisé,  vu  l'immensité  de  ce 
domaine,  d'admettre  cinq  ou  six  fois  plus  de  malades  qu'il  n'en 
possède  actuellement. 

Telle  est  la  description  publiée  dans  la  Presse  Médicale  du 
7  mars  1896,  par  M.  le  D1'  Ileller,  assistant  du  professeur  von 
Schrœtter.  J'ai  reçu  depuis  quelques  renseignements  complé- 
mentaires intéressants,  grâce  à  l'obligeance  de  M.  le  profes- 
seur von  Schrœtter  et  de  M.  le  directeur  von  Weissmeyer.  J'ai 
appris  de  ces  messieurs  cpi'il  existe  à  présent  dans  leur  éta- 
blissement des  facilités  pour  3oo  malades.  Le  bâtiment  prin- 
cipal seul  peut  admettre  100  pensionnaires.  Les  chambres- 
sont  de  grandeur  différente  et  contiennent  de  2  à  8  lits 
chacune. 

M.  le  D1'  von  Weissmeyer,  qui  est  médecin  en  chef,  est  aidé 
par  deux  médecins  internes.  Il  y  a  de  plus  une  infirmière 
supérieure  et  quatre  infirmières  assistantes. 

Le  sanatorium  d'Alland,  le  premier  de  ce  genre  en  Autriche,. 


198  VISITES  AUX  SANATORIA 

est  destiné  à  servir  comme  institution  mère  et  comme  modèle 
pour  les  sanàtoria  à  cirer  à   l'avenir  dans  l'empire. 

On  a  établi  depuis  lors  dans  plusieurs  grandes  villes,  (elles 
que  Baden,  Briick,  etc.,  des  établissements  similaires  dirigés 
par  dés  membres  de  l><  Association  pour  la  création  d'établis- 
sements destinés  au  traitement  climatérique  des  maladies  de 
poitrine  »  Verein  zur  Errichtung  und  Erhallung  klimatischer 
Heilstœtten  filr  Brustkranke  . 

Celle  Société,  fondée  par  M.  le  professeur  von  Schrœtter 
il  v  a  cinq  ans.  esi  placée  sous  la  protection  de  Sa  Majesté 
l'Empereur  d'Autriche  ,  et  compte  aujourd'hui  près  de 
1000  membres.  Beaucoup  d'entre  eux  appartiennent  a  L'aris- 
tocratie et   à  la  noblesse    de   l'empire. 

Sanatorium  de  Neu-Schmecks.  —  Le  sanatorium  de  Neu- 
Schmecks  est  situé  dans  Tune  des  parties  les  plus  pittoresques 
des  Carpatlies,  en  Hongrie.  Il  se  trouve  à  1004  mètres  d'alti- 
tude, au  milieu  de  forêts  magnifiques  qui  s'étendent  sur  plu- 
sieurs lieues  de  longueur.  La  localité  est  indemne  de  poussière 
et  de  vent;  l'air  y  est  pur,  riche  en  ozone  et  vivifié  par  les 
émanations  des  nombreux  conifères  qui  composent  la  plus 
grande  partie  des  bois  environnants.  Une  montagne  voisine, 
de  iiooo  mètres  de  hauteur,  abrite  Neu-Schmecks  contre  les 
vents  du  nord,  tandis  que  l'horizon  s'ouvre  largement  au  midi, 
de  telle  sorte  que  le  soleil  arrive  librement  jusqu'au  sana- 
torium. 

Le  climat  est  des  plus  favorables  :  température  égale,  jamais 
très  élevée.  L'été  est  plutôt  frais,  l'atmosphère  y  est  modéré- 
ment humide;  l'hiver  esl  liés  sec  et  le  froid  rarement  intense. 
Les  brouillards  y  sont  peu  abondants  et  se  dissipent  généra- 
lement vite.  Lu  des  grands  avantages  de  Neu-Schmecks  tient 
à  l'absence  île  tout  glacier  sur  les  montagnes  environnantes, 
de  sorte  qu'il  ne  s'y  produit  jamais  de  ces  courants  d'air  froid 
que  donne  le  voisinage  de  grandes  surfaces  de  glaces.  On  y  a 
donc  tous  les  avantages  du  climat  alpestre  sans  en  avoir  les 
inconvénients. 

Le  sanatorium  est  très  bien  construit.  Les  chambres  reçoi- 
vent une  lumière  abondante;  elles  sont  munies  de  doubles 
fenêtres  et   meublées  selon  les  règles  de  l'hygiène  ;  chacune 


V 


liiïtv 


II 


i  j ,..-a»fa.,KM.«Mfc 


VKJLEFJORDS  201 

d'elles  a  son  foyer  de  chaleur.  Les  corridors  et  la  cage  d'esca- 
lier sont  chauffés  en  hiver  par  un  système  à  eau  chaude.  Un 
appareil  de  ventilation  très  perfectionné  assure  le  renouvel- 
lement de  l'air  dans  toutes  les  parties  de  l'établissement,  ainsi 
cpue  dans  chaque  chambre  à  coucher.  Une  grande  salle  à  man- 
ger, une  installation  hydrothérapique  et  un  jardin  d'hiver  sont 
annexés  au  sanatorium.  Les  moyens  thérapeutiques  mis  en 
œuvre  à  Neu-Schmecks  sont  très  nombreux  :  ce  sont  principa- 
lement les  influences  climatériques,  la  gymnastique  pulmo- 
naire, les  pratiques  hydrothérapiques,  le  massage,  les  inhala- 
tions médicamenteuses,  la  pneumothérapie,  l'usage  du  lait, 
du  kéfir. 

Le  D1'  Szontagh,  médecin-directeur,  a  une  grande  confiance 
dans  l'hydrothérapie,  notamment  dans  les  enveloppements 
froids,  généraux  ou  partiels,  les  lotions  froides,  les  frictions 
sèches  et  humides,  l'usage  des  compresses  froides  et  de  la 
vessie  de  glace  en  cas  de  fièvre  ;  il  emploie  exceptionnelle- 
ment les  douches. 

La  cure  d'air  est  instituée  dans  toute  sa  rigueur  ;  les  malades 
fébricitants  doivent  observer  un  repos  complet,  à  l'air  libre, 
soit  sur  une  terrasse,  soit  dans  la  chambre  avec  les  fenêtres 
ouvertes.  L'alimentation  est  riche  et  abondante  ;  on  administre 
le  plus  de  lait,  de  kéfir  ou  de  koumys  possible.  Le  vin  et  le 
cognac  ne  sont  donnés  qu'à  dose  modérée,  d'après  les  indica- 
tions de  chaque  cas  individuel. 

Les  malades  ne  se  rendent  guère  que  dans  la  saison  d'été  à 
Neu-Schmecks.  Le  sanatorium  est  fermé  pendant  l'hiver. 

Neu-Schmecks  est  à  9  kilomètres  de  la  station  de  Poprad- 
Felka,  où  l'on  arrive  en  9  heures  de  Budapest  ou  de  A'ienne, 
en  10  heures  de  Breslau  (1). 


DAKE M A R K 

Vejlefjords  sanatorium.  —  C'est  le  premier  sanatorium 
pour  le  traitement  de  la  phtisie  pulmonaire  en  Danemark.  11  faut 
dire,  toutefois,  qu'un  sanatorium  maritime  pour  le  traitement 


(1)  Description  du  Dr  A.  Moeller. 


VISITES  AUX  SANATORIA 

de  la  scrofulose  el  de  la  tuberculose  locale  des  curants  existe 
déjà  depuis  plusieurs  années  à  Refsnas,  smis  la  direction  du 
|i'  Schepelern. 

Le  sanatorium  de  Vejlefjords  esl  à  l'heure  actuelle  encore 
en  construction;  mais  grâce  à  l'extrême  obligeance  de  M.  le 
I.)1  Saugmann,  je  puis  donner  à  mes  lecteurs  quelques  détails 
intéressants  sur  cet  établissement. 

Le  sanatorium  est  bâti  par  une  société  d'actionnaires  avec 
une  subvention  de  l'Etat  s'élevant  à  i38.ooo  francs.  Les  divi- 
dendes  ne  doivent  jamais  dépasser  4  p-  100.  Le  surplus  est 
versé  à  un  fonds  qui  a  pour  luit  d'assurer  à  un  certain  nombre 
de  malades  pauvres  les  avantages  du  traitement  dans  ce  sana- 
torium. 

Le  sanatorium  est  situé  sur  le  enté  nord  de  Vejlefjords,  à 
l'est  du  Jutland,  protégé  contre  les  vents  froids  par  les  mon- 
tagnes boisées  et  découvert  \ers  le  sud.  Il  est  à  une  altitude 
de  '.")  mètres;  la  distance  du  bord  de  la  mer  est  d'environ 
3oo  mètres.  Le  bâtiment  est  construit  selon  les  conceptions 
modernes  de  l'hygiène  <■!  de  la  phtisio-thérapie.  Toutes  les 
chambres  exposées  au  midi  sont  habitées  par  les  malades; 
les  employés  seuls  occupent  les  chambres  du  cuit''  nord.  On 
compte  environ  70  chambres,  dont  16  à  deux  lits.  Il  y  a  une 
bonne  ventilation,  une  installation  pour  la  lumière  électrique 
et  les  appareils  d'hydrothérapie;  le  chauffage  se  l'ail  par 
l'eau  chaude,  l 'ne  partie  de  la  maison  est  réservée  aux  phti- 
siques avancés.  Leurs  chambres  sont  en  communication 
directe  avec  la  véranda. 

Le  «  Liegehalle  »,  c'est-à-dire  la  galerie  pour  la  cure  à 
l'air  libre,  a  une  largeur  de  4  mètres  et  est  ouverte  vers  le 
sud  et  le  sud-est.  11  v  a  de  plus  une  galerie-promenade  nu 
les  pensionnaires  peuvent  circuler  quand  le  temps  ne  per- 
met pas  les  exercices  au  dehors.  Une  grande  salle  a  manger 
et  [\\u>  salle  de  musique  et  de  conversation  se  trouvent  au  pre- 
mier étage.  In  ascenseur  communique  avec  les  autres  étages. 

Dans  un  bâtiment  voisin  se  trouvent  les  appartements  de 
l'administration,  les  machines  électriques  et  les  appareils  à 
désinfection,  une  salle  d'autopsie,  etc. 

La  photographie  ci-jointe  de  la  façade  principale  donnera 
une  idée  de  ce  beau  sanatorium. 


ADIROSBACK  COTTAGE  2o5 


E  T  A  TS-INIS    D  A  M  E  li  I  Q  U  E 


Adirondack  Cottage  sanitarium.  —  L'  «  Àdirondack  Cot- 
tage Sanitarium  »  est  situé  sur  la  penle  boisée  d'une  monta- 
gne, près  du  village  de  Saranac  Lake  (Etat  de  New-York),  à 
une  altitude  de  près  de  53o  mètres.  Le  site  domine  une  des 
vues  les  plus  pittoresques  et  les  plus  étendues  des  «  Adiron- 
dack Mountains  ».  L'œil  embrasse  un  espace  illimité  de  mon- 
tagnes couvertes  de  forèls  de  sapins. 

Au  pied  de  la  montagne  est  la  vallée  de  Saranac,  au  fond  de 
lacjuelle  serpente,  vers  le  nord,  une  petite  rivière  aperçue 
dans  le  lointain  comme  un  ruban  argenté.  En  face  s'élève,  en 
terrasses,  la  chaîne  de  montagnes,  se  terminant  par  le  «  White 
Face  »  avec  sa  cime  nue  et  rocheuse.  Les  reflets  du  soleil 
couchant  font  de  ces  sommets  des  masses  de  couleurs  variées 
et,  en  hiver,  les  forêts  sont  d'une  beauté  merveilleuse. 

Ce  sanatorium  fut  commencé  très  modestement  il  y  a  qua- 
torze ans,  dans  un  élan  de  philanthropie,  et  tous  les  efforts 
ont  été  laits  pour  obvier  aux  inconvénients  de  l'accumulation 
si  bien  connus  et  si  souvent  observés  dans  les  hôpitaux  de 
phtisiques.  Dans  ce  but,  le  système  des  pavillons  a  été  stric- 
tement conservé,  en  dépit  de  la  dépense  plus  grande  qui  en 
résulte. 

Formé  d'abord  d'un  bâtiment  principal  et  d'un  pavillon, 
où  6  malades  pouvaient  être. soignés,  l'établissement  agrandi 
et  peut  contenir  ioo  malades  :  il  forme  ainsi  un  village  en 
miniature  composé  de  18  pavillons  tous  distants  les  uns  des 
autres  d'une  trentaine  de  mètres.  Tout  pavillon  est  construit 
de  façon  à  pouvoir  donner  une  chambre  particulière  à  chaque 
malade,  avec  un  cube  d'air  suffisant  et  une  ventilation  parfaite. 
Les  pavillons  contiennent  de  cinq  à  dix  chambres  ;  toutes 
donnent  sur  un  salon  de  réunion,  chauffé  par  une  cheminée. 
Les  portes  des  chambres  ne  touchent  ni  le  parquet  ni  le  pla- 
fond, et  ainsi  le  malade  profile  du  cube  d'air  entier  du  pavillon, 
tandis  que,  dans  le  salon,  plusieurs  vasistas  ouvrant  à  l'air 
extérieur  procurent  une  ventilation  amplement  suffisante.  De 
larges  vérandas  sont  annexées  à  tous  les  pavillons,  et  proté- 
gées des  vents  à  un  bout  seulement  par  un  grand  écran.  Les 


206  VISITES  AUX  SASATORIA 

malades  passent    la  plus  grande  partie  du    temps  dehors,  été 
comme  hiver. 

Point  de  tapis  ni  de  draperies,  et  tout  peut  rire  nettoyé  et 
désinfecté  aussi  souvent  <pfil  est  nécessaire. 

Le  bâtiment  principal  contient  une  grande  salle  à  manger, 
où  les  malades  se  réunissent  à  l'heure  des  repas,  le  seul 
moment  où  ils  soient  tous  ensemble.  Ce  bâtiment  contient 
aussi  un  salon,  une  bibliothèque,  l'office  el  la  cuisine.  La  nour- 
riture est  simple,  mais  lionne  el  abondante,  le  lait  formant  une 
large  part  de  l'alimentation. 

Au  dispensaire,  le  peu  de  médicaments  nécessaires  sont 
vendus  au  prix  coûtant. 

Il  y  a  un  grand  pavillon  de  récréation  toujours  ouvert  des 
deux  cotes,  où  les  malades  peuvent  se  distraire  par-  des  jeux 
divers,  billard,  etc.,  quelque  temps  qu'il  lasse  et  en  toute 
saison . 

J'ai  visité  Saranac-Lake  pendant  l'hiver  de  1896,  qui  lut  un 
des  plus  rigoureux.  La  veille  de  mon  arrivée,  le  thermomètre 
avait  marqué  25°  au-dessous  de  zéro.  Le  lendemain,  la  tem- 
pérature montait  jusqu'à *i 3°,  et  je  visitais  avec  mon  distin- 
gué confrère,  M.  le  D'  Trudeau,  les  pavillons  des  malades. 
Beaucoup  étaient  dehors,  enveloppés  dans  leurs  fourrures. 
M.  Trudeau  m'assurait  que  ses  phtisiques  se  trouvaient  mieux 
en  hiver  qu'en  été.  Ce  qui  me  frappait  particulièrement, 
c'était  une  véritable  gaieté  parmi  les  malades. 

La  plupart  des  phtisiques  ne  sont  pas  assez  souffrants 
pour  garder  le  lit  ;  dans  le  cas  contraire,  le  malade  est  trans- 
porté à  l'infirmerie,  où  il  reçoit  les  soins  d'une  infirmière 
expérimentée,  et  tout  ce  qui  lui  est  nécessaire.  Ce  système 
assure  au  patient  les  meilleurs  soins  et  évite  les  effets  dépri- 
mants ipie  sa  présence  au  pavillon  pourrait  produire  sur  ses 
compagnons. 

Un  bienfaiteur  a  donné  il  y  a  quelques  années  une  forte 
somme  pour  l'érection  d'un  laboratoire.  Je  lai  visité,  et  je 
puis  assurer  que  c'est  un  des  meilleurs  laboratoires  bactério- 
logiques que  j'aie  jamais  vus.  Le  sanatorium  est  dirige  par 
M.  le  Dr  Trudeau,  aidé  de  M.  le  D'  W--H.  Jamieson,  et  de 
M.  le  D1  E.-L.  Baldwin. 

L'admission  à  l'établissement  est   prononcée  après  examen 


I 


S 


Knopf.  Sanatbria. 


ADlIiOSDACK  COTTAGE 


de  MM.  les  Drs  Edw.-J.  Janeway,  II.  P.  Loomis  et  W.-B.  James 
à  New-York,  ou  du  D1'  Trudeau  à  Saranac-Lake. 

Sont  seuls  admis  les  phtisiques  du  premier  degré,  ou  bien 
les  malades  cpii  sont  convalescents  d'autres  maladies  pulmo- 
naires, ou    ceux   qui,  d'après  l'opinion   des   médecins   exami- 


G-  ROUND 


Pi_a  r-~j 

3CALC:  y&    ItsICH    =  O  M  El   F"  O  OT, 


Fig.  33.  —  Plan  d'un  pavillon  do  l'Adirondack  cottage  sanitarium. 


nants,  susceptibles  d'être  beaucoup  améliorés  par  le  trai- 
tement, ne  peuvent  payer  plus  que  la  modeste  somme 
demandée    pour   leur   pension.    Les   soins   du    médecin    sont 


gratuits. 


On  évalue  la  dépense,  pour  chaque  sujet,  à  35  francs  par 
semaine,  et  les  malades  paient  a5  francs  seulement.  Nous 
avons  donné  des  vues,  prises  en  hiver  et  en  été,  de  quelques- 


VISITES  AUX  SJ.XATOMA 


uns  îles  pavillons   de   ce  village  intéressant,  et    aussi   le  plan 
d'un  de   ees  pavillons. 


Je  joins  ici  quelques  photographies  avec  un  plan  montrant 


LOOMIS  .SA.XATORIC.U 


2l5 


la  situation  des  divers  pavillons  qui  sont  désignés  d'après 
le  nom  de  leurs  fondateurs.  Au  milieu  se  trouve  le  bâtiment 
principal  et  le  grand  pavillon  de  récréation.  Pour  donner 
une  idée  de  la  construction  d'un  de  ces  petits  cottages,  je 
reproduis  ici  le  plan  de  l'un  d'eux.  Le  cottage  appelé  «  Inflr- 
mary  »  peut  contenir  une  quinzaine  de  malades,  et  sert  pour 
recevoir  les  sujets  qui  ont  besoin  du  repos  au  lit  et  de  soins 
particuliers. 

Loomis  sanatorium  de  Liberty.  —  Cet  établissement  fut 
fondé  par  un   grand  philanthrope   en  mémoire  du  professeur 


Fig.  36.  —  Un  pavillon  de    Loomis  sanatorium. 


Albert  L.  Loomis,  de  l'Université  de  New-York.  Il  est  situé 
à  3  kilomètres  et  demi  à  l'ouest  de  la  ville  de  Liberty  (Etat 
de  New- York),  à  une  altitude  d'environ  700  mètres. 

Il  fut  ouvert  le  icr  juin  1896.  Les  divers  bâtiments  qui  le 
composent  sont  au  nombre  de  n  ;  ils  se  trouvent  sur  la  pente 
sud  d'une  des  grandes  montagnes  de  cette  région,  qui  est  cou- 
verte d'une  épaisse  forêt.  L'ensemble  est  très  pittoresque. 
Toutes  les  maisons  et  pavillons  sont  chauffés  par  la  vapeur 
sous  pression,  et  le  tout  est  éclairé  à  l'électricité. 

La   série   des  bâtiments  se   compose  d'un  grand  local  pour 


2 1 6  1 75/ II:  s  AUX  SA .\. i IDIU A 

l'administration,  où  se  trouvent  la  salle  à  manger,  les  salles  de 
réception  el  de  consultation,  le   laboratoire  et  le  «  solarium  ». 

l'n  pavillon  à  deux  étages,  appelé  «  Casino  »,  est  consacré 
aux  amusements  des  pensionnaires.  11  y  a  là  un  piano,  un 
orgue,  un  billard  et  d'autres  jeux.  Dans  un  grand  bâtiment  à 
trois  étages  se  trouvent  plusieurs  chambres  pour  les  tubercu- 
leux alités,  ainsi  qu'une  école  spéciale  pour  les  infirmières  qui 
désirent  se  perfectionner  dans  cette  branche  de  leur  profession. 

Deux  grands  pavillons  à  t\ca\  étages  et  cinq  pavillons  à  un 
étage  servent  exclusivement  au  logemenl  des  malades.  Il  y  a 
de  plus  un  «  cottage  »  pour  le  médecin  en  chef.  Le  plus  grand 
pavillon  contient  22  chambres,  et  le  plus  petit  en  a  4- 

Une  eau  de  bonne  qualité  est  captée  à  joo  mètres  du  sana- 
torium. Le  climat  de  la  région  où  est  situé  le  sanatorium  est 
réputé  depuis  de  longues  années  comme  un  des  mieux  adaptés 
au  traitement  de  la  phtisie  pulmonaire.  Quoiqu'il  y  ait  fré- 
quemment îles  vents  assez  loris  à  Liberty,  M.  le  D'  Stubbert, 
médecin-directeur,  m'assurait  que  selon  lui,  les  vents  oui 
plutôt  une  action  favorable  que  défavorable  sur  les  malades. 
Cette  opinion  concorde  avec  les  expériences  de  M.  Dettweiler, 
qui  dit  que  l'air  agité  [bewegte  Luft]  est  essentiel  pour  pratiquer 
avec  bénéfice  l'aérothérapie  des  phtisiques.  Le  traitement  à 
Liberty  est  essentiellement  liygiéno-diététique,  mais  dernière- 
ment, .M.  Stubbert  a  essayé  le  sérum  de  Sclrweinitz  et  autres 
produits  de  culture.  Les  résultats  définitifs  n'ont  pas  encore 
été  publiés. 

Les  malades  qui  n'ont  pas  dépassé  le  premier  degré  y  sont 
seuls  admis.  Ils  sont  examinés  à  New-York  par  les  docteurs 
Loomis,  Smith  ou  Quimby.  Les  dépenses  à  Liberty  sont  plus 
élevées  qu'au  sanatorium  d'Adirondack.  La  direction  veut  don- 
ner à  ses  pensionnaires  tout  le  luxe  et  le  confort  possibles.  Il 
y  a  néanmoins  un  fonds  destiné  à  venir  en  aide  aux  malades 
ne  possédant  que  des  moyens  modiques. 

Le  sanatorium  est  sous  la  direction  de  M.  le  D'  J. -Edward 
Stubbert,  assisté  par  M.  le  D'  W.-M.  Bryan  comme  interne. 
Le  même  Conseil  qui  est  a  la  tète  de  la  Société  du  Loomis 
sanatorium  dirige  un  petit  hôpital  spécial  à  New- York, 
23o  W-  38th  streel,  pour  les  phtisiques  pauvres  plus  avancés. 
M.  le  D'  Schultz  est  le  médecin  interne  de  cet  hôpital. 


SHARON  SAS  A  TOHIVM 


217 


Sharon  sanatorium.  —  Cet  établissement,  situé  à  quel- 
ques kilomètres  de  Boston  (État  de  Massachusetts)  a  pour  le 
corps  médical  américain  un  intérêt  tout  particulier.  Fondé 
en  1 89 1 ,  c'est  le  premier  sanatorium  établi  près  d'une  grande 
ville,  et  dans  une  région  où  l'on  n'a  pas  la  moindre  préten- 
tion de  posséder  un  climat  plus  spécialement  avantageux  pour 
le  traitement  de  la  phtisie  pulmonaire.  Néanmoins,  ce  «  home 


Fig.   >;.  —  Sharon  sanatorium,  près    de  Boston. 


Ireatment  »,  ce  traitement  de  la  phtisie  près  de  nous,  suivant 
l'expression  du  D1'  Vincent  Y.  Bowditch,  le  médecin  ingénieux 
qui  l'a  inauguré  en  Amérique,  a  donné  des  résultats  sur- 
prenants. 

Le  sanatorium  est  situé  près  de  la  station  de  Sharon,  dans 
un  endroit  pittoresque,  d'une  altitude  d'environ  120  mètres. 
Quoiqu'il  fût  destiné  au  début  à  ne  recevoir  que  des  malades 
au  premier  degré,  on  a  commencé  à  y  recevoir  aussi  des 
tuberculeux  plus  avancés. 

Les  malades  ne  paient  que  cinq  dollars  par  semaine.  Les 
citoyens  de  Boston  contribuent  au  surplus  des  dépenses.  Il  n'y 


VISITES  AUX  SAXATOBIA 


a  actuellement  place  que  pour  10  lits.  Mais  le  D'Bowdilch,  qui 
esl  toujours  à  la  t<Me  de  l'établissement,  espère  bien  l'agran- 
dir. M.  Bowditeh  suit  religieusement  la  méthode  de  Dettweiler. 


n 


«  The  Home  »  de  Denver.  —  Parmi  les  institutions 
philanthropiques  et  semi-philanthropiques  consacrées  à  la 
cause  de  la  phtisio-thérapie,  il  faut  que  je  cite  un  établisse- 
ment que  j'ai  visité,  quoiqu'il  ne  puisse  guère  être  classé 
parmi  les  sanatoria  selon  les  conceptions  de  la  thérapeutique 
moderne. 

Le  climat  du  Colorado  jouit  de  la  réputation  justifiée  d'être 
un  des  plus  favorables  des  Etats-Unis  pour  le  traitement  de 
la  phtisie  pulmonaire. 

D'après  un  tableau  météorologique  inséré  dans  les  comptes 
rendus  de  la  Médical  Society  du  Colorado,  publiés  de  1872 
à  1877,  voici  quels  sont  les  chiffres  moyens  pour  la  ville  de 
Denver  : 

Température  moyenne  t)0,^;  dans  les  mois  les  plus  froids, 
décembre  et  janvier,  le  thermomètre  descend  au-dessous  de  o°; 
dans  le  mois  le  plus  chaud,  juillet,  il  s'élève  à  22°, 5  ;  les  varia- 
tions diurnes  moyennes  sont  de  i5°, 5;  le  maximum  de  tempé- 
rature atteint  exceptionnellement  3o° .  L'humidité  relative 
n'est  guère  que  de  47i2;  la  quantité  de  pluie  et  de  neige  seu- 
lement de  4°"  centimètres;  le  nombre  de  jours  de  pluie  est 
de  68,  parmi  lesquels  4o  avec  de  la  neige.  Beaux  jours  i4", 
assez  beaux  1 54,  couverts  65.  Le  mouvement  moyen  du  vent 
pendant  l'année  est  de  83  000  kilomètres. 

Le  D1'  Weber(i),  en  parlant  du  climat  du  Colorado,  dit  très 
justement  qu'il  s'agitici  d'un  climat  modéré,  avec  de  nombreux 
changements  de  la  température  moyenne,  très  peu  d'humidité, 
beaucoup  de  beaux  jours,  et  un  vent  assez  violent. 

Pour  donner  un  asile  aux  tuberculeux  de  la  classe  moyenne 
venant  au  Colorado,  l'église  protestante  épiscopale  a  créé  cet 
établissement,  où  la  pension  n'est  que  de  sept  dollars  par 
semaine. 

Le  «  Home  »  est  situé  à  une  petite  distance  de  Denver  (un 
quart   d'heure    par   chemin    de  fer   électrique).   C'est  un   très 


(1)  II.  Weber.  Climato thérapie.  Paris,  1886. 


-d 


THE  HOME  DE  DE  M' EH  221 

beau  bâtiment  dans  le  stylecolonial.il  est  construit  sur  un  terrain 
poreux  avec  exposition  au  sud,  et  une  très  belle  vue  sur  les 
montagnes  rocheuses  (Pikes  Peak.  Greys  Peak  et  Longs  Peak). 

L'institution  est  composée  de  trois  maisons  distinctes:  l'une 
pour  hommes,  l'autre  pour  femmes  et  la  troisième  pour 
familles.  Il  y  a  des  galeries  ouvertes  et  fermées,  une  salle  de 
musique,  une  salle  de  billard  et  autres  jeux. 

Chaque  pensionnaire  a  sa  chambre  à  lui,  et  les  murs  sont 
assez  épais  pour  que  le  bruit  de  la  toux,  provenant  d'une  cham- 
bre voisine,  ne  puisse  être  entendu.  Tous  les  autres  arrange- 
ments sont  assez  satisfaisants  au  point  de  vue  sanitaire  et  on 
pourrait  s'imaginer  à  première  vue  que  l'on  se  trouve  dans  un 
véritable  sanatorium. 

Malheureusement  il  n'en  est  pas  ainsi. 

Lors  de  ma  visite  à  cet  établissement,  j'ai  pu  apprécier  plus 
que  jamais  la  valeur  d'une  surveillance  médicale,  et  la  différence 
entre  une  institution  où  le  phtisique  peut  faire  comme  bon  lui 
semble  et  un  établissement  fermé  selon  les  idées  de  Brehmer, 
Dettweiler  et  leurs  élèves. 

Dans  le  «  Home  »  le  malade,  s'il  ne  croit  pas  avoir  besoin 
d'un  médecin,  ne  suit  aucun  traitement;  il  se  contente  des 
bénéfices  que  le  climat  peut  lui  procurer.  Mais  en  me  prome- 
nant un  peu  partout  dans  cette  vaste  maison,  j'ai  pu  observer 
que  relativement  peu  de  sujets  savaient  profiter  du  bon  air  du 
dehors.  Chaque  malade  ayant  le  droit  de  choisir  son  médecin, 
il  n'y  en  a  pas  qui  soit  attaché  à  la  maison. 

A  la  tète  du  «  Home  »  se  trouve  The  Révérend  Frederick 
W.  Oakes,  un  homme  de  tout  cœur,  mais  étranger  à  la  méde- 
cine. Il  est  impossible  de  croire  que  dans  un  tel  établissement, 
où  se  trouve  un  si  grand  nombre  de  phtisiques,  les  règles 
hygiéniques  nécessaires  puissent  être  rigoureusement  exécu- 
tées. Et  de  fait  la  thérapeutique,  la  stricte  surveillance  de  la 
part  d'un  médecin  expérimenté,  si  nécessaires  pour  les  tuber- 
culeux à  tous  les  degrés,  manquent  totalement  dans  cette  ins- 
titution. 

Quand  on  fait  un  voyage  d'études,  il  faut  tout  signaler,  même 
ce  qui  ne  parait  pas  pariait,  afin  d'empêcher  la  répétition  de 
semblables  erreurs.  C'est  pour  cette  raison  que  j'ai  décrit  le 
«  Home  »  de  Denver. 


222  VISITES  AUX  SAXATORIA 

Winyah  sanatorium  d'Asheville.  —  Le  Winyah  sana- 
torium est  établi  depuis  plusieurs  années  ;  fondé  par  le 
D1'  Gleitzmann,  cet  établissement  lui  le  premier  sanatorium 
selon  le  principe  de  Brehmer-Dettweiler  pour  les  malades 
payants  aux  Etats-Unis.  Il  se  trouve  depuis  la  retraite  du 
D1'  Gleitzmann  sous  l'habile  direction  du  1)''  Karl  von  Ruck. 
un  phtisio-thérapeute  distingué  des  Etats-Unis. 

Les  résultats  obtenus  à  Winyah  sont  aussi  bons  que  ceux 
des  meilleurs  sanatoria  d'Europe.  Lors  de  ma  visite,  M.  le 
D1'  von  Ruck  m'a  aussi  montré  son  très  intéressant  laboratoire 
où  il  fabrique  divers  produits,  tels  que  la  tuberculine,  l'an ti- 
phtisine,  le  tuberculinum  purificatum,  etc. 

Asheville  est  situé  dans  la  partie  ouest  de  la  Caroline  du 
Nord,  à  une  altitude  d'environ  800  mètres,  dans  une  région 
montagneuse.  Le  climat  d'Asheville  est  doux.  Pendant  les 
cinq  dernières  années  on  a  noté  une  moyenne  de  a5  beaux 
jours  par  mois.  Il  y  a  peu  de  brouillards,  et  les  malades  peuvent 
rester  dehors  presque  tout  le  temps. 

Depuis  ma  visite  au  Winyah  sanatorium,  M.  le  D'  von  Ruck 
m'a  écrit  qu'il  est  en  possession  de  plans  pour  l'érection  d'un 
sanatorium  plus  grand,  plus  élégant  et  encore  mieux  situé 
que  le  sanatorium  actuel. 

Asheville  sanatorium.  —  Depuis  le  i01'  mars  1898,  MM.  les 
D"  S.  Westrav  Battle  et  John-W.  Ross  ont  établi  à  Asheville 
un  deuxième  sanatorium  pour  le  traitement  des  maladies 
de  la  gorge  et  de  la  poitrine.  Il  est  situé  à  environ  2  kilo- 
mètres au  sud  d'Asheville,  sur  une  élévation  appelée  «  Oak- 
land  Heights  »,  d'où  l'on  a  une  vue  superbe  sur  les  vallées, 
les  forêts  et  les  montagnes  lointaines. 

Ce  sanatorium,  que  nous  reproduisons  en  photogravure, 
possède  toutes  les  installations  nécessaires  pour  un  établisse- 
ment fermé,  y  compris  le  confort  de  toutes  les  constructions 
américaines  modernes  :  lumière  électrique,  ascenseurs,  etc., 
et  autour  de  la  maison  vérandas  pour  la  cure  d'air.  Dans  le 
sous-sol  se  trouvent  les  appareils  hydrothérapiques  et  un 
bassin  de  natation.  Le  sanatorium  est  entouré  d'un  pare 
de  chênes  el  de  sapins.   Il  peut  recevoir  environ  80  malades. 

Contrairement  à   l'opinion  de  quelques   phtisio-thérapeutes 


SANATORIUM  11YGEIA 


22.3 


américains  qui  ne  voient  le  salut  que~dans~  le  système  des 
petits  pavillons  [Cottage  System),  je  suis  heureux  de  cons- 
tater que  M.  le  D1' Batlle  estime,  comme  nous,  que,  dans  un 
établissement  recevant  des  tuberculeux  à  toutes  les  périodes, 
la  surveillance  médicale  se  fait  mieux  si  les  malades  sont  pla- 
cés ensemble  dans  un  ou  plusieurs  grands  bâtiments. 


Fis 


39- 


Aslicvil'.e   sanatorium. 


Sanatorium  Hygeia  de  Citronelle.  —  L'année  dernière  fut 
fondé  à  Citronelle,  dans  l'État  d'Alabama ,  un  sanatorium 
sous  la  direction  de  M.  le  D1'  A.-C.  Klebs,  fils  du  célèbre 
professeur  Edwin  Klebs.  Cet  établissement  est  composé  d'une 
série  de  pavillons  situés  près  de  la  ville  de  Citronelle,  à  une 
élévation  d'à  peu  près  100  mètres.  Citronelle  est  assez  près  du 
Gulf  Stream  pour  en  ressentir  l'influence.  Le  séjour  en  hiver 
y  est  particulièrement  agréable.  Le  sanatorium  lui-même  est 
entouré  d'une  forêt  de  pins  qui  le  protège  contre  les  vents 
froids.  L'air  de  cette  région  est  pur  et  sec. 

M.  le  D'  Klebs  et  son  interne  M.  le  DrJ.-J.  Curry  emploient 
le  traitement  hygiéno-diététique,  en  vogue  dans  tous  les  bons 
sanatoria  d'Europe  et  des  Etats-Unis. 

L'IIygeia  est  composé  d'une  série  de  bâtiments.  D'abord  il  y 
a  la  maison  principale,  puis  deux  grands  pavillons  et  cinq  petits. 
Le  bâtiment  principal  contient  les  appartements  de  l'adminis- 
tration, les  salons,  la  bibliothèque  et  la  salle  à  manger.  Dans 
l'annexe  se  trouvent  la  cuisine,  l'installation  pour  l'hydrothé- 


!  i  F/SITES  AUX  SA.YATORIA 

rapie  et  le  salon  de  coiffure,  les  vérandas  pour  la  cure  à 
l'air  libre.  L'établissement  possède  une  laiterie  de  premier 
ordre. 

Ci-joint  se  trouvent  une  photogravure  <lu  bâtiment  principal 
et  une  autre  montrant  quelques  pavillons  agréablement  situés 
au  milieu  des  arbres  de  cette  belle  région  forestière. 

Les  résultats  obtenus  pendanl  la  première  année  de  l'exis- 
tence île  cet  établissement  semblent  très  satisl'aisants.  Il  est 
fermé  pendanl  1  été. 

Citronelle  est  située  a  une  vingtaine  de  kilomètres  de  Mobile, 
dans  l'Etat  d'Alabama  :  elle  est  pourvue  d'une  station  sur  le 
chemin  de  1er  de  Mobile  à  I'(  >hio. 

Sanatorium  Pasteur.  — C'est  le  nom  donné  par  M.  le  Dr  Paul 
Gibier,  ancien  interne  des  hôpitaux  de  Paris,  actuellement 
directeur  de  l'Institut  Pasteur  de  New-York,  a  l'établissement 
qu'il  a  fondé  près  de  Suffern,  petit  village  non  loin  de  New-York 
'une  heure  de  chemin  de  1er  . 

Ce  sanatorium  est  bâti  près  du  sommet  <i  une  colline,  sur 
une  propriété  d'environ  100  hectares  mise  trouvent  les  labo- 
ratoires de  l'Institut  et  une  ternie  modèle.  Le  D1'  Gibier  a  pensé 
honorer  la  mémoire  de  sou  illustre  maître  en  attribuant  le  nom 
de  ci  Pasteur  »  a  l'établissement  scientifique  et  médical  qu'il  a 
fait  construire  il  y  a  plusieurs  années  au  pied  des  Ramapo 
Mountains,  dans  le  comte  de  Rochland,  Etat'  de  New-York. 

Le  bâtiment  principal  du  sanatorium  est  érigé  sur  un  plateau 
d'une  altitude  de  îoo  mètres  environ.  11  est  exposé  au  Sud  et 
au  Sud-Ouest  et  entouré  d'un  bois  de  sapins,  érables,  chênes 
et  châtaigniers.  La  façade  principale  est  libre,  une  baie  dans 
le  bois  laissant  une  belle  vue  sur  la  chaîne  de  montagnes  des 
lianiapos. 

Le  sanatorium  est  bâti  selon  la  conception  de  la  physio- 
thérapie moderne.  11  est  flanqué  de  larges  vérandas  et  balcons 
pour  la  cure  d'air.  La  véranda  principale  se  trouve  a  j  mètres 
au-dessus  i\\i  sol  et  peut  être  entièrement  lermé.e  par.  îles  fenê- 
tres. Les  laboratoires  de  bactériologie  et  de  radiographie,  les 
appareils  d'hydrothérapie  se  trouvent  au  rez-de-chaussée.  L'é- 
tage principal  comprend  lecabinetde  consultation,  les. salons, 
salles  de  conférences,  de  lecture,  de  musique,   de  billard,  de 


Fig.  40.  —  Bâtiment  principal  de  Hygcia,  à  Citronellj 


Fïg.  41-  —  Pavillons  dans  la  forêt,  à  Citronelle. 
Knopf.  Sanatoria. 


SANATORIUM  PASTEUR  227 

jeux  et  la  salle   à  manger.  La  cuisine,  la  blanchisserie  et  les 


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locaux  pour  les  serviteurs  et    les  machines  se  trouvent  dans 
une  annexe.  Le  chauffage  se  fait  à  l'eau  chaude.  Tout  Téta- 


2i8  VISITES  AUX  SANATORIA 

blissement  est  éclairé  à  L'électricité.  Une  excellente  Laiterie, 
où  les  vailles  sont  régulièrement  examinées  par  un  vétéri- 
naire, et  les  jardins  potagers,  four- 
nissent Le  sanatorium  de  bon  lait, 
de  légumes  frais  et  de  tous  les  autres 
produits  de  la  ferme  modèle. 

Les  liois  qui  entourent  le  sanato- 
rium et  le  Spitzberg  Mountain  situé 
a   son   côté,    offrent  des  excursions 
agréables  en  voiture  ou  à   pied   aux 
pensionnaires  de  rétablissement.  A 
4oo  mètres  de  distance  du  sanatorium 
se   trouve    le   cottage    du    médecin- 
;      directeur,  qu'un  téléphone  relie    au 
;      sanatorium.  Il  v  a  en  plus  un  méde- 
;      cm   interne   résidant  au  sanatorium 
•      même. 

Le  climat  de  «  Pasteur  »  est  à  peu 
;  près  celui  de  New-York,  niais  l'at- 
\  mosphère  y  est  particulièrement 
:_  pure.  En  été  il  y  fait  un  peu  moins 
|      chaud  qu'à  New-York. 

Le  traitement  est  celui  de  Breh- 
mer-Dettweiler. 
I  Un  caractère  très  louable  <\u   sa- 

i  natorium  Pasteur  est  qu'il  est  destiné 
par  son  fondateur  à  recevoir  gra- 
tuitement et  discrètement  des  mé- 
decins phtisiques  pauvres,  sans  dis- 
tinction de  nationalité  ni  de  reli- 
g'ion...  médicale  ou  autre.  Les  cham- 
bres disponibles  sont  louées  a  des 
malades  payant  de  12  à  aj  dollars 
par  semaine.  Le  sanatorium  Pasteur, 
tel  qu'il  existe  aujourd'hui  ,  peut 
héberger  environ  3o  malades.  L'érec- 
tion d'un  autre  pavillon  est  à  l'élude. 
La  planche  ci-contre  donne  une  idée  générale  de  l'apparence 
extérieure  de  cet  établissement  (fig.  43). 


HOPITAL  DE  L'ÉTAT  DE  MASSACHUSETTS 


>.1Ç) 


L'hôpital  de  l'État  de  Massachusetts  pour  malades  phti- 
siques et  tuberculeux.  —  La  construction  de  cet  hôpital  fut 


autorisée  par  la  législature  de  l'État  de  Massachusetts  en  1895. 


Il  a  été  inauguré  le   icr  octobre  1898. 


■  io  VISITES  AUX  SANATORIA 

Cette  institution  est  située  à  Rutland,  dans  le  comté  de 
Worcester,  Etat  de  Massachusetts,  à  une  altitude  de  4°o  mètres. 
Les  constructions  consistent  en  une  série  de  pavillons  à  deux 
étages  disposés  en  un  demi-cercle,  au  milieu  duquel  se  trouve 
le  bâtiment  de  l'administration.  Les  pavillons  sont  de  deux 
genres  :  les  uns  ont  sept  petites  chambres  el  une  salle  pour 
22  malades,  et  les  autres  le  même  nombre  de  chambres  el 
une  salle  pour  io  malades  seulement.  A  chaque  pavillon  est 
rattaché  un  solarium  fait  entièrement  de  verre,  et  tous  les 
bâtiments  sont  encerclés  par  une  large  véranda.  Les  pavillons 
d'un  côté  du  bâtiment  de  l'administration  sont  destines  à 
recevoir  les  hommes,  et  ceux  de  l'autre  côté  les  femmes. 

11  y  a  place  pour  200  malades.  Le  prix,  uniforme,  est  iixé  à 
2  fr.  5o  par  jour,  soins  médicaux  et  médicaments  compris. 
Les  pourboires  aux  infirmiers  sont  absolument  interdits.  C'est 
donc  un  établissement  vraiment  philanthropique. 

Mais  il  y  a  une  condition  d'admission  particulière  à  cet  éta- 
blissement. Aucun  malade  n'est  reçu  s'il  n'a  —  d'après  l'avis 
du  médecin  qui  l'examine  quand  il  se  présente  —  des  chances 
raisonnables  de  guérison.  De  plus,  si,  après  un  certain  temps 
de  séjour  à  l'hôpital,  le  sujet  ne  va  pas  mieux,  il  est  prié  de 
chercher  un  climat  plus  favorable,  et  ses  parents  ou  ses  amis 
reçoivent  une  notification  à  cet  effet. 

Les  médecins  visitants  sont  MM.  les  D"  Vincent  Y.  Bo'sv- 
ditch  et  Herbert-C.  Clapp  (de  Boston).  Le  médecin-directeur 
de  l'hôpital  est  M.  le  Dr  Walter-J.  Marclay. 

Je  tiens  à  ajouter  à  la  courte  description  de  cette  intéres- 
sante institution  que  je  regrette  vivement  de  lui  voir  donner 
le  nom  d1  hôpital  pour  phtisiques,  car  elle  est  dans  le  vrai  sens 
du  mot  un  sanatorium  pour  tuberculeux.  Je  joins  ici  le  plan 
en  élévation  et  en  perspective  qui  donne  une  bonne  idée  de 
l'étendite  et  de  la  distribution  des  pavillons  sur  le  vaste 
terrain  occupé  par  l'hôpital  de  Rutland. 


c  a  x  a  d  v 

Le  Muskoka   cottage  sanatorium.  —  Ce    sanatorium   est 
situé   à  Gravenluirst,    dans    la    province    d'Ontario,    Canada. 


.1/ VSKOKA   COTTAGE 


■233 


C'est  le  premier  sanatorium  de  ce  genre  fondé  au  Dominion, 
et  c'est  aussi  le  premier  établissement  créé  par  The  National 
Sanatorium  Association  du  Canada. 

Cette  association,  composée  d'un  certain  nombre  de  philan- 
thropes, a  été  reconnue  d'utilité  publique  [incorporaled)  par  un 
vote  du  parlement  du  Dominion,  et  elle  a  pour  but  d'organiser 
des  établissements  publics  pour  l'isolement,  le  traitement  et 
la  cure  des  personnes  atteintes  de  maladies  pulmonaires  [to 
establish  public  institutions  for  the  isolation,  treatinent  and 
cure  of  persons  affected  with  pulmonary  diseases). 


Fig.  4<j.  —  Un  pavillon  de  lluskoka  cotlage  sanatorium. 


Le  gouvernement  provincial  d'Ontario  accorde  une  sub- 
vention de  2  dollars  par  semaine  pour  chaque  malade.  Le  prix 
par  semaine  n'est  que  de  6  dollars,  tout  compris  :  ce  qui  fait 
de  ce  sanatorium  un  établissement  surtout  destiné  aux  per- 
sonnes n'ayant  que  des  moyens  modérés. 

Le  sanatorium  se  compose.de  plusieurs  petits  pavillons  (de 
4  à  6  personnes)  et  d'une  maison  principale  assez  large  pour 
admettre  20  malades.  Là  se  trouvent  également  le  bureau, 
la  salle  de  réception  et  de  musique,  la  salle  à  manger,  la 
cuisine  et  trois  solaria,  l'un  exposé  à  l'est,  l'autre  au  sud-est, 
et  le  troisième  au  sud-ouest.  La  maison  principale  ainsi  que 
les  pavillons  ont  de  larges  vérandas  qui  peuvent  être  entou- 
rées de  vitres  pendant  l'hiver. 

Le  tout  est  situé  sur  le  bord  du  lac  Muskoka,  à  220  kilomètres 


a3i  VISITES  ATX  SANATORIA 

au  nord  de  Toronto,  à  \u\c  altitude  de  32.5  mètres.-  L'air  y 
est  stimulant,  sec  et  sans  poussière.  Tous  les  bâtiments  sont 
exposes  au  sud.  Au  nord  et  à  l'ouest  l'établissement  est 
protégé  par  des  rochers,  et  dans  le  voisinage  immédiat  du 
sanatorium  se  trouvent  de  nombreux  arbres,  des  hêtres,  des 
érables  et  des  pins.  Du  sud  on  a  une  très  belle  vue  sur  le  lac. 

Tous  les  bâtiments  sont  éclaires  a  L'électricité.  La  maison 
principale  est  chauffée  par  la  vapeur,  les  petits  pavillons  par 
l'eau  chaude.  Chaque  malade  a  sa  chambre  particulière.  L'éta- 
blissement peut  recevoir  5o  pensionnaires;  on  espère  pou- 
voir bientôt  l'agrandir  pour  en  loger  au   moins  une   centaine. 

Autour  du  sanatorium  se  trouvent  des  promenades  graduées. 
Le  traitement  est  celui  de  Brehmer-Dettweiler.  Quoique  dans 
un  climat  froid,  les  malades  peuvent  faire  des  journées  médi- 
cales de  6  à  8  heures  pendant  tout  l'hiver.  Les  résultats  sont 
aussi  satisfaisants  en  hiver  qu'en  été.  Le  président  de  la  Na- 
tional Sanatorium  Association  est  sir  Donald  Smith,  K. CM. G., 
M.  le  Dr  X.-A.  Powell  de  Toronto  est  secrétaire,  et  M.  le 
I)r  J.-II.  Elliott  est  directeur  de  l'établissement,  où  sont  seuls 
reçus  les  malades  atteints  de  tuberculose  pulmonaire  au  pre- 
mier  degré. 

Sanatorium  des  Laiwentides.  —  Cet  établissement  modeste. 
qui  ne  peut  héberger  cpie  aa  malades,  est  situé  dans  un  vallon 
des  montagnes  portant  le  nom  de  «  Laurentides  »,  à  une  élé- 
vation de  près  de  aoo  mètres.  Il  est  exposé  un  peu  au  nord  et 
à  l'est,  mais  suffisamment  protégé.  L'air  sec  de  cette  région 
est  particulièrement  adapté  à  la  cure  en  plein  air,  où,  même 
pendant  les  froids  assez  rigoureux  de  l'hiver  canadien,  les 
malades  ne  souffrent  pas  plus  du  froid  ou  plutôt  moins  qu'à 
Paris  ou  à  Londres,  en  pareille  saison.  Le  froid  du  Canada  est 
d'ailleurs  reconnu  connue  un  réel  stimulant.  Ce  sanatorium 
est  à  i  kilomètre  du  village  de  Sainte-Agathe-des-Monts  et  à 
égale   distance  de  la  gare  du  chemin  de  1er. 

Sainte-Agathe  est  éloigné  de  la  ville  de  Montréal  de  îoo  ki- 
lomètres. Le  Chemin  de  fer  Pacifique  Canadien  construisit 
cette  voie  ferrée  il  y  a  quelques  années  à  travers  des  forêts, 
et  maintenant  cette  route  est  parsemée  de  hameaux  et  de 
villages.  A  certains  endroits  du  parcours  on  voit  des  sites  riva- 


SANATORIUM  DES  LAURENTIDES 


lisant  presque  avec  ceux  des  Alpes.   Du  sommet  de  la   mon- 
tagne protégeant  le  sanatorium  au  sud-ouest  on  peut  compter 


sept  lacs,  et  dans  cette  chaîne  de  montagnes  il  en  est  encore 
un  grand  nombre  qui  ne  sont  pas  ou  sont  mal  connus. 


2  !6  VISITES  AUX  SANATORIA 

Le  sanatorium  est  sous  la  direction  du  ])''  A.-.I.  Richer  (de 
Montréal).  L'admission  des  malades  esl  faite  sur  la  recomman- 
dation du  D1  11. -A.  Lafleur,  professeur  agrégé  de  médecine  à 
l'Université  Me  Gill  de  Montréal,  qui  est  le  médecin  consul- 
tant de  l'établissement.  La  surveillance  thérapeutique  est  exer- 
cée par  le  Dr  R.  Wilson,  professeur  de  matière  médicale  et 
thérapeutique  à  l'Université  Bishop  de  Montréal. 

Le  sanatorium  reçoit  son  approvisionnement  d'eau  d'une 
source  située  à  ioo  mètres  de  là  et  pouvant  fournir  200  litres 
à  la  minute.  L'éclairage  à  l'électricité  est,  pour  un  modeste 
établissement,  un  luxe  que  ce  sanatorium  possède.  Pendant 
l'hiver  une  véranda  vitrée,  avec  un  grand  foyer,  ajoute  au  con- 
fort des  malades.  Les  promenades  en  voitures  dans  ces  ré- 
gions montagneuses  sont  très  agréables.  Les  patients  sont 
surveillés  par  des  infirmières,  à  l'exception  de  ceux  dont  la 
température  ne  dépasse  pas  370  C.  Des  kiosques  pour  le  repos 
des  malades  sont  dispersés  sur  une  grande  étendue  de  terrain. 

Comme  ce  sanatorium  est  de  construction  récente  (1898  , 
la  vie  y  est  des  plus  simples,  mais  avec  le  temps  des  modifi- 
cations au  point  de  vue  du  luxe  y  seront  apportées. 


F  R  A  M  C  E 

Sanatorium  du  Canigou  (Pyrénées-Orientales).  —  J'ai 
visité  le  sanatorium  du  Canigou  quand  il  était  encore  sous  la 
direction  de  M.  le  D1'  Sabourin,  ancien  interne  des  hôpitaux  de 
Paris.  Cet  établissement  est  à  présent  dirigé  par  M.  le  D'  Gi- 
resse. 

Bien  que  cet  établissement,  fondé  en  1890,  puisse  être  con- 
sidéré comme  le  premier  et  le  plus  important  de  ce  genre  en 
France,  il  me  semble  qu'il  n'est  pas  suffisamment  connu.  Je 
suis  heureux  d'en  donner  ici  une  description  un  peu  détail- 
lée. Elle  a  déjà  été  faite  d'une  façon  assez  précise  dans 
les  livres  de  Moeller  (i),de  la  Harpe  (2),  et  dans   le    Traité  de 


(1)  Moeller.  Les  Sanaloria  pour  le  traitement  de  la  Phtisie. 

(2)  De  la  Harpe.  Les  Stations  d'hiver. 


I 


Knopf.  Sanatoria. 


ï6 


SANATORIUM   DU  CAMGOU  243 

Médecine  (i).  Qu'il  me  soit  permis  de  revenir  sur  les  points 
les  plus  intéressants  de  ces  ouvrages,  en  y  ajoutant  ce  que 
j'ai  vu  lors  de  ma  visite,  et  aussi  les  quelques  renseignements 
que  M.  le  D1'  Giresse  a  bien  voulu  me  faire  parvenir  depuis 
qu'il  a  pris  la  direction  de  l'établissement. 

Vernet-les-Bains,  dans  les  Pyrénées-Orientales,  est  connu 
depuis  longtemps  pour  ses  eaux  sulfureuses.  La  plus  ancienne 
mention  historique  qu'on  en  trouve  date  de  1181. 

La  ville,  située  à  l'intersection  des  vallées  du  Gadi  et  du 
Tech,  est  exposée  au  sud.  Elle  est  protégée  des  vents  du 
nord  et  de  l'ouest  par  la  montagne. 

L'établissement  comprend  un  hôtel  à  trois  étages,  ayant 
soixante-dix  chambres,  grandes,  bien  aérées,  ouvrant  sur  le 
vaste  parc  de  l'établissement  ;  attenant  à  cet  hôtel,  se  trouve 
une  première  galerie  de  cure  ;  puis,  à  quelques  centaines  de 
mètres  à  peine  sont  déposées  à  flanc  de  montagne,  et  reliées 
par  une  belle  route,  d'autres  galeries  de  cure  ;  à  la  galerie 
principale  est  annexée  une  salle  à  manger  avec  toutes  ses  dé- 
pendances. 

Le  sanatorium  est  à  700  mètres  d'altitude  ;  son  exposition 
principale  est  au  sud-ouest  ;  il  est  un  peu  au-dessus  du  village 
de  Yernet,  dont  il  est  distant  d'environ  800  à  1  000  mètres. 

La  pression  barométrique  moyenne  est  de  710  millimètres; 
elle  est  pour  ainsi  dire  constante,  les  oscillations  un  peu 
intenses  étant  fort  rares.  L'air  est  très  sec;  mesuré  à  l'hveTO- 
mètre  à  cheveu  et  au  psychromètre,  l'état  hygrométrique  est 
de  5g  en  moyenne.  L'atmosphère  est  calme.  Le  sol,  très  per- 
méable, ne  conserve  jamais  d'humidité. 

Gomme  température,  les  moyennes  saisonnières  sont  de  6° 
pour  l'hiver,  i4°  pour  le  printemps,  190  l'été,  8°  l'automne  ; 
l'écart  moyen  par  24  heures  est  -de  io°,  les  températures  ex- 
trêmes —  6°  en  hiver  -+-  290  en  été. 

La  moyenne  des  jours  de  pluie  est  de  70  par  an,  qui  donnent 
600  millimètres  de  hauteur  d'eau  mesurée  au  pluviomètre  ;  il 
y  a  environ  5  ou  6  jours  de  neige  par  an.  L'ardeur  des  rayons 
solaires  est  intense  au  Yernet,  grâce  à  la  pureté  du  ciel,   à  la 


(1)    Marfan.    Art.   «  Phtisie     pulmonaire  »,     in    Traité     de    Médecine    de    Charcot 
et  Debove. 


î  i  ',  VISITES  AUX  SANATORIA 

limpidité  île  l'atmosphère.  Environ  iao  jours  par  an  le  ciel  est 
sans  nuages;  pendant  ioo  autres  jours  le  temps  est  couvert 
ou  pluvieux.  Le  reste  de  l'année  le  ciel  a  quelques  nuages, 
niais  les  journées  sont  néanmoins  belles. 

La  méthode  thérapeutique  consiste  dans  le  repos  complet 
pour  les  fébricitants,  le  repos  coupé  de  quelques  promenades 
pour  les  sujets    plus  valides. 

A  l'inverse  de  ce  qui  se  passe  en  Allemagne,  où  les  repas 
sont  très  multipliés,  au  Ganigou  on  ne  fait  que  trois  repas  par 
jour  :  un  petit  déjeuner  du  matin  et  deux  grands  repas  de  table 
d'hôte.  Mais  les  goûters  sont  très  en  vogue  et  souvent  compo- 
ses de  viande  crue,  lait  frais,  etc. 

La  cure  d'air  a  lieu  de  9  heures  du  matin  à  10  heures  du  soir; 
la  nuit  les  fenêtres  sont  entr 'ouvertes.  La  durée  moyenne  du 
séjour  des  malades  est  de  cinq  mois.  Quant  aux  résultats,  ils 
représentent  environ  20  p.  100  de  guérisons  apparentes,  ','>'>  a 
4o  p.   100  d'améliorations,   10  p.   100  d'aggravations. 

Une  des  particularités  du  traitement  inauguré  par  M.  Sabou- 
rin,  c'est  les  boules  d'eau  chaude  que  les  malades  ont  aux 
pieds  pendant  le  repos  sur  les  chaises  longues,  et  le  port  de 
chaussons  fourrés,  de  galoches  en  bois,  auxquels  notre  con- 
frère attribue  l'absence  de  rhumes  et  de  refroidissements  chez 
ses  malades,  même  pendant  les  grands  froids  de  l'hiver.  Le  fait 
que  la  terrasse  pour  la  cure  d'air  est  assez  éloignée  de  l'hôtel 
a  moins  d'inconvénients  que  l'on  ne  pourrait  croire  au  pre- 
mier abord.  Il  est  rare  que  le  sanatorium  ait  des  malades  ali- 
tés ou  trop  faibles  pour  monter  à  la  terrasse.  Pendant  mon  sé- 
jour à  Vernet,  un  seul  s'est  fait  ramener  à  l'hôtel  par  l'omnibus. 

Il  faut  connaître  l'état  d'âme  d'un  tuberculeux  qui  fait  sa 
cure.  Rien  ne  lui  est  plus  agréable  qu'une  petite  distraction. 
que  ces  courtes  promenades  ayant  un  but.  L'ascension  lente  le 
matin  —  pour  commencer  son  «  jour  médical  »  —  cette  des- 
cente le  soir  après  avoir  accompli  ses  devoirs  pour  sa  guérison, 
donnent  plutôt  un  charme  à  la  vie,  toujours  assez  monotone, 
dans  un  sanatorium. 

Sanatoi'ium  du  Château  de  Durtol  (Puy-de-Dôme).  —  Le 
sanatorium  de  Durtol  pour  le  traitement  des  maladies  de  poi- 
trine a  été  fondé  récemment   par   notre   distingué  confrère  et 


SANATORIUM  DU  CHATEAU  DE  DURTOL  247 

ami  M.  le  D1'  Ch.  Sabourin,  ancien  médecin-directeur  du  sana- 
torium du  Canigou. 

Durtol  est  un  petit  village  de  quelques  centaines  d'habitants 
situé  à  trois  kilomètres  de  Clermont-Ferrand,  desservi  par  une 
station  du  chemin  de  fer  de  Clermont  à  Limoges,  dans  la  plus 
verdoyante  des  petits  vallées  que  dessinent  les  premiers  con- 
treforts de  la  chaîne  des  Dômes. 

Situé  à  D20  mètres  au-dessus  du  niveau  de  la  mer,  son  éléva- 
tion au-dessus  de  la  vallée  de  Clermont  est  telle  qu'on  y  a 
une  vue  splendide  sur  la  plaine. 

Le  sanatorium  est  établi  dans  le  château  de  Durtol,  au  milieu 
d'un  parc  de  5  hectares,  orienté  au  midi  et  à  l'est,  et  abrité  au 
nord-ouest  par  une  vaste  colline  de  grands  bois  très  ombreux 
faisant  partie  de  la  propriété.  Au  pied  et  à  l'abri  de  cette  colline, 
partant  du  château,  une  vaste  allée-promenade  plantée  de  vieux 
arbres  forme  une  immense  terrasse  d'où  l'on  jtyait  d'un  pano- 
rama admirable  sur  Clermont  et  ses  environs  jusqu'aux  monta- 
gnes du  Forez. 

Tout  le  fond  de  la  vallée  est  limité  par  des  collines  couvertes 
de  pins  et  cette  région  est  sillonnée  de  routes  magnifiques  qui 
rendent  faciles  les  promenades  et  les  excursions  aux  environs. 

Au  château  ont  été  annexées  une  laiterie,  ainsi  que  des  cons- 
tructions diverses  répondant  au  logement  des  malades,  aux 
installations  de  la  cure  d'air  et  de  repos,  aux  distractions  variées 
et  aux  promenades.  Une  chapelle  catholique  fait  partie  de  l'éta- 
blissement. 

La  vallée  de  Durtol  est  réputée  pour  les  qualités  médicales 
de  son  climat,  et  tous  les  étés,  les  médecins  y  envoient  les 
personnes  affaiblies  ou  délicates  de  la  poitrine  pour  respirer 
son  air  pur  et  vivifiant.  C'est  que  par  suite  de  sa  situation  favo- 
rable, cette  vallée  possède  un  climat  essentiellement  sédatif 
par  rapport  à  la  rudesse  générale  du  climat  d'Auvergne. 
C'est  qu'aussi  les  brouillards  de  la  plaine  atteignent  très  rare- 
ment Durtol,  comme  on  peut  le  constater  journellement  de  la 
terrasse  du  parc. 

Cette  région  d'Auvergne  présente  tous  les  avantages  désira- 
bles pour  l'installation  d'un  sanatorium.  Durtol  est  au  centre 
de  la  France,  à  9  heures  de  Paris,  au  milieu  de  toutes  les 
grandes  stations  thermales  d'Auvergne   et    tout  particulière- 


248  VISITES  AUX  SANATORIA 

ment  à  dix  inimités  de  chemin  de  fer  de  Royat,  à  proximité 
d'une  grande  ville  comme  Clermont  qui  offre  toutes  les  res- 
sources désirables. 

L'établissement  est  ouvert  toute  l'année.  M.  Sabourin  in- 
siste beaucoup  sur  la  nécessité  de  la  cure  de  repos,  mais  il 
exige  que   cette  cure  se  fasse  à  l'ombre. 

Les  malades,  dans  leurs  galeries,  passent  la  journée  dans 
une  région  ensoleillée,  mais  jamais  ils  ne  sont  exposés  direc- 
tement aux  rayons  du  soleil,  la  profondeur  des  galeries  et 
l'installation  des  rideaux  les  mettant  toujours  à  l'abri.  Pour 
M.  Sabourin,  c'est  une  des  conditions  essentielles  de  la  cure  : 
il  considère  que  l'exposition  au  soleil  pour  le  patient  au  repos 
est  à  elle  seule  capable  d'entretenir  la  fièvre  et  même  de  la 
provoquer  chez  ceux  qui  ne  l'ont  pas,  sans  compter  les  autres 
accidents  imputables  aux  rayons  solaires  et  relevant  d'un  état 
congestif  général. 

Même  à  la  promenade,  les  malades  se  garantissent  la  tète  et 
les  épaules  avec  une  ombrelle. 

Le  sanatorium  de  Duiiol  est  \\w-  maison  essentiellement 
médicale  où  toute  direction  appartient  au  médecin.  Tout  y  est 
installé  et  dirigé  pour  que  la  cure  des  maladies  de  poitrine  s'y 
lasse  d'après  les  principes  de  l'hygiène  rationnelle  universel- 
lement préconisée  aujourd'hui  pour  ces  sortes  d'affections,  et 
pour  que  les  malades  soient  soumis  à  une  surveillance  constante 
de  la  part  du  médecin. 

Sanatorium  de  Trespoye  (Pau).  —  Ce  sanatorium  est 
situé  à  environ  trois  kilomètres  à  l'est  de  la  ville  de  Pau,  près 
du  petit  hameau  de  Trespoye.  Il  fut  fondé  par  M.  le  D'  (hou- 
zet,  en  1896,  sur  le  conseil  de  quelques  médecins  de  Paris. 

Ne  pouvant  visiter  ce  sanatorium,  je  me  suis  adressé  à 
M.  le  D1  Crouzet  pour  avoir  des  renseignements.  Voici  la  lettre 
très  intéressante  que  j'ai  reçue  en  réponse  à  la  mienne.  Elle 
me  semble  assez  importante,  surtout  pour  les  médecins  fran- 
çais, pour  que  je  la  reproduise  in  e.rlcnso. 

Le  sanatorium  de  Pau  se  compose  d'un  corps  de  bâtiment 
principal,  d'une  annexe  et  d'une  cure  d'air. 

Le  bâtiment  principal  comprend  au  rez-de-chaussée  les  piè- 
ces  communes    aux   malades,  salle    à    manger,  bibliothèque, 


SANATORIUM  DE  TRESl'OYE 


249 


salons,  etc.  Au  premier  étage  sont  dix  chambres  à  coucher 
orientées  au  sud,  et  dont  la  plus  petite  mesure  70  mètres  cubes. 

L'annexe,  située  à  environ  100  mètres  du  bâtiment  prin- 
cipal, comprend  quatre  chambres  pour  malades,  orientées  au 
sud  aussi. 

Enfin  la  cure  d'air  se  trouve  immédiatement  à  côté  du  bâti- 
ment principal. 

Le  parc  qui  entoure  l'établissement  a  une  contenance  totale 
de  5  hectares.  Il  présente  une  pente  assez  considérable.  Des 
chemins  de  pente  diverse  y  ont  été  tracés  afin  de  graduer  les 


Fîg.  f>a.  —  Vue  générale  du  Sanatorium  de  Trcspove  (Pau). 

promenades  des   malades.  Enfin  le  parc    est  entouré  de  tous 
côtés  par  des  champs,  prairies,  etc. 

Désinfection.  —  1°  Les  crachats  sont  actuellement  soumis  à 
l'ébullition,  mais  le  sanatorium  possédera  l'an  prochain  l'ap- 
pareil à  désinfection  de  Thomas  ; 

20  Le  service  de  désinfection  est  assuré  par  l'étuve  muni- 
cipale, qui  vient  chercher  chaque  semaine  le  linge  des  malades 
pour  le  désinfecter; 

3°  La  désinfection  des  chambres  se  fait  par  les  pulvérisa- 
tions de  sublimé. 

Conditions  climatériques.  —  C'est  le  climat  de  Pau,  sur 
lequel  on  a  beaucoup  discuté,  et  qui  en  réalité  est  le  suivant. 


25o  VISITES  AUX  SANÂTORIA 

C'est  avant  tout  un  climat  de  plaisir  qui,  grâce  à  sa  situation 
dans  l'extrême  sud  delà  France,  n'est  jamais  très  froid  pendant 
l'hiver.  Quelquefois  le  thermomètre  descend  la  nuit  à  —  4"  ou 
—  5°  C,  mais  cela  est  tout  à  fait  exceptionnel  et  la  température 
de  la  journée  n'est  jamais  froide. 

Il  y  pleut  assez  souvent  et  le  degré  hygrométrique  y  est 
assez,  élevé,  moins  cependant  qu'à  Falkenstein.  Grâce  à  cette 
pluie  et  à  l'absence  de  vent,  il  n'y  a  jamais  de  poussière. 

La  seule  grande  caractéristique  du  climat  de  Pau  est  la  sui- 
vante :  en  dehors  des  tempêtes  et  bourrasques  qui  peuvent 
survenir  trois  ou  quatre  fois  dans  le  courant  de  l'hiver,  il  n'y 
a  jamais  de  vent  à  Pau.  Cela  est  très  exact  et  une  explication 
météorologique  sérieuse  n'en  a  encore  jamais  été  donnée. 
C'est  le  grand  avantage  de  Pau  sur  les  autres  villes  du  Midi. 

Pau  convient  donc  à  tous  les  tuberculeux  en  général  qui 
veulent  se  soigner  hygiéniquement,  n'aimant  ni  le  froid,  ni  le 
vent,  ni  le  trop  grand  soleil. 

Les  médecins  de  France  envoient  surtout  à  Pau  les  hémo- 
ptysiques  et  les  fébricitants,  Je  suis  arrivé  avec  ces  deux  caté- 
gories de  malades  à  de  très  bons  résultats.  Mais,  qu'est-ce 
qui  a  le  plus  agi  ?  Le  sanatorium  ou  le  climat? 

L'altitude  du  sanatorium  est  de  ai5  mètres.  Pression  baro- 
métrique moyenne,  74°- 

Méthode  thérapeutique  employée.  —  C'est  la  méthode  hygié- 
nique diététique  des  auteurs  allemands.  La  métbode  que  je 
pratique  est  celle  de  Falkenstein. 

La  seule  modification  apportée  est  la  suivante  :  je  laisse  les 
malades  marcher  plus  qu'on  ne  le  fait  à  Falkenstein.  Je  ne 
fais  garder  le  repos  absolu  qu'en  cas  de  fièvre. 

Alimentation  aussi  riche  (pie  possilde  :  Repas  à  la  française 
(trois  par  jour).  Viande  crue  à  discrétion. 

Deux  règles  seulement  :  Etre  toujours  dehors  ;  ne  jamais 
cracher  à  terre. 

Nombre  de  lits  :  i4-  Nombre  de  malades  ayant  séjourné  :  18. 
Ce  petit  nombre  de  malades  ne  me  permet  pas  de  faire  une 
statistique  bien  probante. 

i°  Un  malade  reste  six  mois  —  l'année  dernière  —  tous- 
sant peu  en  arrivant,  mais  avec  bacilles  dans  les  crachats.  A 


HOPITAL  DE   VILLIERS-SUR-MARNE 


25l 


la  fin  de  l'hiver  il  ne  tousse  ni  ne  crache.  A  repris  à  la  fin  de 
l'été  son  métier  et  continue  à  aller  bien. 

a0  Un  malade  porteur  de  lésions  ramollies  localisées  aux 
deux  sommets  ;  pas  de  fièvre.  Après  un  séjour  de  six  mois  a 
quitté  le  sanatorium  sans  tousser  ni  cracher.  Plus  de  craque- 
ments ;  respiration  un  peu  rude  dans  les  sommets.  Pas  de  ba- 
cilles depuis  trois  mois. 

Voilà  deux  exemples  de  guérison  apparente. 

Je   crois    qu'il   faut   une    moyenne    de  deux  ou  trois  hivers 


Fig".  :>j.  —  Galerie  pour  cure  d'air  ù  Trespoye. 

pour  avoir  une  guérison  apparente,  et  un  traitement  d'épreuve 
de  un  an  pour  être  sur  de  la  guérison  réelle. 

Parmi  les  autres  malades  que  je  suis  actuellement,  j'ai  des 
améliorations  énormes  ;  guérisons  apparentes  qui  ont  besoin 
de  l'épreuve  du  temps. 

Pour  terminer,  je  suis  le  seul  médecin  —  à  la  l'ois  méde- 
cin-directeur et  propriétaire,  — ■  ce  qui  me  paraît  être  une  con- 
dition essentielle  de  réussite. 

Hôpital  de  Villiers-sur-Marne.  —  Parmi  les  nombreux 
hôpitaux  pour  les  enfants  tuberculeux  de  France,  un  de  ceux 


23-2  VISITES  AUX  SANATORIA 

qui  nous  intéressent  particulièrement  est  celui  de  Villiers-sur- 
Marne,  où  l'on  traite  les  enfants  atteints  de  tuberculose  pul- 
monaire. 

Cet  hôpital  appartient  à  la  Société  connue  sous  le  nom  de 
VŒuvre  des  enfants  tuberculeux.  Voici  la  description  cpi'en 
donne  M.  le  Dr  E.-P.  Léon-Petit,  secrétaire  général  de  ladite 
Société  : 

«  A  l'extrémité  du  village  de  Villiers- sur -Marne,  sur  une 
seide  ligne,  face  au  soleil,  le  nouvel  hôpital,  commencé  en 
1890,  s'étale  en  plein  midi  au  milieu  d'un  vaste  terrain  bordé 
de  larges  avenues  qui  l'isolent  de  tout  voisinage.  Derrière,  a 
perte  de  vue,  des  champs  de  grande  culture,  et,  à  l'horizon, 
les  crêtes  boisées  dominant  la  vallée  de  la  Marne. 

Bonne  altitude,  orientation  parfaite,  air  excellent,  calme 
absolu  dans  ce  port  où  viennent  se  réfugier  les  petits  naufragés 
de  la  grande  ville. 

L'hôpital  se  compose  de  deux  pavillons  placés  sur  une 
même  ligne  et  reliés  entre  eux  par  un  long  portique  à  arcades 
surmonté  d'une  galerie.  La  façade,  d'une  architecture  agréable 
relevée  de  couleurs  gaies,  s'étend  en  plein  Midi  sur  une  lon- 
gueur de  200  mètres. 

Le  rez-de-chaussée  du  portique  est  occupé  par  le  service 
médical,  le  premier  étage  par  une  vaste  galerie  garnie  de  lits 
d'un  seid  côté  et  d'où  la  vue  découvre  la  pleine  campagne.  En 
avant  de  ce  bâtiment,  sur  toute  la  longueur,  règne  un  large 
balcon  couvert  pour  la  cure  d'air  au  repos,  sur  lequel  les 
logements  des  malades  s'ouvrent  de  plain-pied. 

A  droite  de  cette  galerie  se  trouve  un  pavillon  à  deux 
étages  construit  d'après  les  règles  de  l'hygiène  hospitalière 
la  plus  stricte.  Chacun  de  ces  étages,  desservi  par  de  larges 
couloirs,  est  divisé  en  petites  salles  éclairées  par  de  grandes 
fenêtres  aux  vitres  perforées.  Le  renouvellement  incessant  de 
l'air  et  l'équilibre  de  la  température  y  sont  assurés  d'une  façon 
parfaite. 

La  cuisine,  les  réfectoires,  la  bibliothèque,  la  salle  des  jeux, 
la  pharmacie  et  la  chapelle   occupent  le  rez-de-chaussée. 

Le  premier  étage  est  réservé  aux  dortoirs,  lavabos,  salle 
de  bains  et  chambres  d'isolement  pour  les  malades  dont  l'état 
réclame  la  solitude  et  le  repos. 


HOPITAL  DE   VILLIERS-SCR-MAR.XE 


•i53 


Ce  pavillon  est  entièrement  éclairé  à  la  lumière  électrique, 
et  alimenté  en  eau  de  source  soigneusement  filtrée  et  stéri- 
lisée que  des  appareils  élévateurs  distribuent  dans  toutes  les 
pièces. 

Il  convient  surtout  aux  petits  phtisiques  gravement  atteints. 
Leur  dispersion  dans  les  salles  où  les  lits  sont  peu  nombreux 
permet  de  leur  donner  des  soins  plus  intimes,  avec  tout  le 
confort  de  la  famille,  qui  leur  semble  d'autant  plus  doux  qu'ils 
ne  l'ont  guère  connu. 

A  gauche  de  la  galerie  centrale,  parallèlement  à  ce  pavillon, 


■%yiï^iïii!MiïM$M-. 


Fig.  54.  —  Hôpital  de  Villiers-sui'-Marne.  Pavillon  des  Enfants  de  France. 
(Vue  intérieure  prise  de  la  galerie  supérieure.) 

et  sur  la  même  ligne  de  façade,  à  l'autre  extrémité  du  jardin, 
un  pavillon  d'aspect  extérieur  semblable  lui  fait  pendant. 

Ce  pavillon  est  construit  sur  un  vaste  sous-sol  où  sont 
installés  les  appareils  de  chauffage  à  vapeur  à  basse  pression 
et  de  ventilation. 

L'intérieur  ne  comprend  qu'une  seule  pièce,  sorte  de  grand 
hall  sans  cloison,  dont  le  plafond  en  ogive  s'élève  à  12  mètres 
au-dessus  du  sol.  Dans  toute  la  hauteur,  de  larges  baies 
vitrées  y  versent  à  profusion  la  lumière. 


u*.  i  VISITES  AUX  SAXATOBIA 

Deux  galeries  superposées,  d'une  largeur  de  6  mètres, 
bordées  d'une  balustrade,  l'uni  le  tour  de  la  pièce.  Celle  < I u 
bas,  élevée  de  quelques  marches,  s'ouvre  sur  les  jardins  ; 
l'autre,  placée  au  niveau  du  premier  étage,  donne  sur  la  gale- 
rie et  sur  le  grand  escalier  intérieur  qui  relie  les  deux  gale- 
ries. 

Quatre-vingts  enfants  peuvent  coucher  dans  ce  hall  qui, 
ne  cubant  pas  moins  de  10.000  mètres,  donne  à  chacun  d'eux 
la  moyenne  imposante  de  120  mètres  cubes  d'air.  Deux  sœurs, 
une  à  chaque  galerie,  qui  de  leur  place  découvrent  toute  la 
salle,  suffisent  à  la  surveillance. 

Le  vaste  espace  laissé  libre  au  centre  est  occupé  par  une  salle 
de  réunion. 

Dans  une  construction  en  annexe  sont  installés  le  service 
d'hydrothérapie  froide  et  chaude  et  les  appareils  de  balnéo- 
thérapie. 

Dans  l'embrasure  des  fenêtres  soûl  disposées  cote  a  côte 
les  bouches  de  chaleur  et  de  ventilation,  appelées  à  jouer  un 
rôle  capital  dans  le  traitement. 

Par  des  conduits  garnis  d'une  toile  métallique  et  d'un  bou- 
chon poreux  sur  lequel  il  se  filtre,  l'air  extérieur  pénètre 
dans  la  salle,  soit  directement  à  la  température  du  dehors,  soit 
après  avoir  traversé  les  bouches  du  calorifère  sur  lesquelles 
il  s'échauffe.  Un  jeu  de  registres  règle  le  débit  de  l'air  chaud 
et  celui  de  l'air  froid,  et  par  conséquent  la  température  du 
pavillon. 

L'air  vicie  est  entraîné  dans  une  tourelle  placée  sur  le 
toit  et  dans  laquelle  un  jet  de  vapeur  assure  et  active1  son 
aspiration.  Il  s'échappe  de  la  salle  par  les  nombreuses  bouches 
pratiquées  au  sommet  du  plafond  ogival  ;  il  est  immédiate- 
ment remplacé  par  une  quantité  égale  d'air  pur,  prise  au  dehors. 

Ce  double  mouvement  d'appel  d'air  pur  et  de  rejet  d'air 
vicié  oll're  la  plus  grande  analogie  avec  la  respiration  pulmo- 
naire. Les  poumons  de  l'hôpital  fonctionnent  avec  une  activité 
telle  que  toutes  les  heures  ils  renouvellent  complètement 
l'atmosphère  de  la  salle,  dans  laquelle  ils  ne  déversent  pas 
moins  de  200.000  mètres  cubes  d'air  neuf  par  jour. 

En  outre,  des  fenêtres  d'un  modèle  nouveau  permettent 
une  large  aération  directe.  » 


SANATORIUM  TONSAASEN  257 

Hôpital  Maritime  de  Berck-sur-Mer.  —  Une  des  insti- 
tutions les  plus  importantes  que  j'aie  visitées  et  étudiées  en 
France  est  l'Hôpital  Maritime  de  Berck-sur-Mer.  Cet  établis- 
sement dépend  de  l'Assistance  publique  de  Paris.  Il  existe 
depuis  1861.  L'administration  de  l'Assistance  publique  inau- 
gurait alors  un  petit  hôpital  de  100  lits,  à  côté  duquel,  huit 
ans  plus  tard,  elle  construisit  un  grand  établissement  de 
600  lits. 

Deux  maisons  plus  petites  connues  sous  le  nom  de  maisons 
Cornu,  l'une  pour  les  tilles,  l'autre  pour  les  garçons,  con- 
tiennent ensemble  3oo  places. 

À  l'Hôpital  Maritime  se  trouve  rattaché  l'hôpital  des  Entants 
Assistés.  Tous  les  deux  sont  sous  la  direction  de  M.  le  D'  V. 
Ménard,  chirurgien  et  médecin  en  chef.  J'ai  fait  un  séjour  de 
plusieurs  semaines  à  Berck-sur-Mer,  et  j'ai  visité  presque 
journellement  l'Hôpital  Maritime,  d'une  part  pour  assister  aux 
opérations  intéressantes  de  M.  le  D1'  Ménard,  et  d'autre  part 
pour  suivre  les  changements  dans  l'état  général  des  petits 
pauvres,  scrofuleux  ou  tuberculeux,  venus  de  Paris. 

Je  n'hésite  pas  à  déclarer  que  les  observations  que  j'ai  faites 
à  Berck-sur-Mer  m'ont  rendu  enthousiaste  du  climat  mari- 
lime  pour  les  enfants  atteints  de  tuberculose  locale  osseuse 
ou  ganglionnaire  (scrofuleux). 

En  dehors  de  ces  institutions  il  existe  encore,  sur  la  plage 
de  Berck,  l'hôpital  Rothschild,  qui  peut  recevoir  5o  enfants-, 
et  un  quatrième  hôpital  privé  sous  la  direction  de  Sœurs  de 
charité.  Ces  dernières  institutions  ont  pour  chirurgien  en 
chef  M.  le  D'' Calot. 

NORVÈGE 

Sanatorium  Tonsaasen.  —  Le  premier  sanatorium  établi 
en  Norvège  pour  le  traitement  de  la  phtisie  pulmonaire  est 
celui  de  Tonsaasen.  Quoique  Tonsaasen  fût  déjà  connu  en  1882 
en  tant  que  station  d'été,  on  y  fit  en  1880  le  premier  essai  comme 
séjour  d'hiver.  Aujourd'hui  le  sanatorium  jouit  dune  juste 
réputation  comme  sanatorium  pour  phtisiques  ouvert  toute 
l'année,  oit  les  résultats  obtenus  sont  aussi  bons  que  dans  les 
autres  sanatoria  d'Europe. 

Kxopf.  Sanatoria.  i- 


258  VISITES  AUX  SA.XATORIA 

La  première  description  de  ce  sanatorium  appartient  à 
Moeller  J'y  ajouterai  quelques  nouveaux  renseignements,  et 
noterai  certains   changements    qui    onl    eu  lieu  depuis. 

«  Les  superbes  montagnes  de  la  Norvège,  qui  sont  couvertes 
de  ces  magnifiques  forêts  dont  l'Europe  entière  tire  ses  bois 
de  construction  ,  doivent  offrir  des  conditions  on  ne  peut 
plus  favorables  pour  le  traitement  des  tuberculeux  par  la  cure 
d'air.  Il  va  quelques  années  on  a  fondé  dans  le  district  de 
Valders,  situé  entre  Christiania  et  Bergen,  un  établissement 
hydrothérapique.  Les  conditions  climatériques  de  la  localité 
sont,  comme  nous  allons  le  dire,  tellement  particulières,  que 
l'on  songea  bientôt  à  en  tirerparti  pour  le  traitement  'des  phti- 
siques. 

L'établissement  se  trouve  à  600  mètres  d'altitude.  Il  se 
compose  de  six  bâtiments  séparés  qui  sont  construits  en  bois, 
dans  le  style  simple  el  coquet  du  pays.  Placé  à  mi-côte, 
adossé  à  wnc  épaisse  et  sombre  forêt  de  sapins,  il  présente  un 
aspect  1res  pittoresque.  Sur  la  façade  principale,  ainsi  que 
sur  les  faces  latérales  des  constructions,  régnent  des  halls 
ouverts,  qui  sont  fermés  à  chaque  coin  par  la  saillie  de  la 
chambre  correspondante.  Le  bâtiment  principal  a  un  esca- 
lier extérieur  qui  fait  communiquer  les  vérandas  des  divers 
étages. 

Les  salles  communes  (salles  à  manger,  salons  de  musique, 
de  conversation,  etc.)  forment  le  rez-de-chaussée  île  la  plus 
grande  des  constructions;  les  chambres  sont  réparties  entre 
les  quatre  autres  maisons,  ce  qui  permet  d'admettre  quatre 
tarifs  selon  la  situation  et  la  grandeur  des  pièces.  Le  mobi- 
lier est  confortable,  mais  extrêmement  simple.  Le  sanatorium 
possède  90  chambres.  11  y  a  en  outre  une  installation  hydro- 
thérapique très  complète,  avec  bains  simples,  froids  el  chauds, 
bains  ferrugineux,  bains  de  vapeur,  bains  d'aiguilles  de 
pins.  etc. 

Tonsaasen  jouit  d'un  climat  extrêmement  particulier  et 
intéressant.  D'une  façon  générale  celle  localité  rentre  dans  la 
catégorie  des  climats  alpestres  d'altitude  ;  les  hautes  mon- 
tagnes qui  l'entourent,  le  voisinage  des  puissantes  forêts  pro- 
duisent une  uniformité  thermométrique  assez  grande. 

L'été  n'y   est  pas  trop  chaud  ;    il   arrive   même   quelquefois 


SANATORIUM  TONSAASEN  261 

que  le  thermomètre  descend  au-dessous  de  o°.  Il  est  caracté- 
risé par  ces  belles  nuits  de  Norvège,  qui,  grâce  à  leur  brièveté 
et  à  leur  clarté,  interrompent  à  peine  la  vie  de  la  nature. 
Pendant  l'hiver,  en  raison  du  calme  de  l'atmosphère,  le  froid, 
qui  est  cependant  assez  vif,  y  est  très  facilement  supporté. 
An  printemps  la  fonte  des  neiges,  en  automne  les  premières 
chutes  de  neige,  sont  assez  désagréables. 

Voici  comment  M.  le  D1' Andvord,  le  fondateur  du  sanatorium, 
caractérise  le  climat  de  Tonsaasen.  Dans  son  ensemble,  il  res- 
semble à  celui  de  Wildbad.  Les  mois  d'avril,  de  mai  et  de  juin 
rappellent  la  saison  d'hiver  de  Méran  ;  le  reste  de  l'été,  ainsi 
que  l'automne,  se  rapprochent  de  l'hiver  de  Pau;  enfin  l'hiver 
ne  s'écarte  pas  beaucoup  de  celui  de  Davos.  La  neige  ne  fond 
pas  du  tout  l'hiver;  le  vent  se  fait  très  peu  sentir  ;  même  pen- 
dant les  hivers  les  plus  froids,  la  température  descend  rare- 
ment au-dessous  de  20°  à  20°  C. 

La  situation  topographique  du  sanatorium  est  des  plus 
pittoresques.  Du  plateau  où  il  a  été  construit,  descendent  des 
versants  assez  escarpés  qui  aboutissent  d'un  côté  à  la  vallée 
de  Bagna,  de  l'autre  à  la  vallée  d'Etna  ;  une  belle  route  gravit 
la  montagne,  en  décrivant  de  nombreux  lacets,  et  établit  la 
communication  entre  ces  deux  vallées.  D'abondants  ruisseaux, 
parcourant  de  gracieuses  sinuosités  ou  tombant  brusquement 
en  cascades  plus  ou  moins  élevées,  animent  le  paysage  ;  par- 
ci  par-là  les  cours  d'eaux  s'élargissent  pour  former  de  petits 
lacs  réfléchissant  le  bleu  du  ciel.  Aux  penchants  des  mon- 
tagnes s'élèvent  ces  magnifiques  pins  et  sapins  qui  forment 
la  caractéristique  des  paysages  de  la  Norvège.  On  rencontre, 
à  différentes  altitudes,  de  petits  plateaux,  couverts  de  verdure, 
d'où  l'on  jouit  de  points  de  vue  magnifiques. 

Ici  c'est  la  vue  sur  le  val  de  Bagna,  avec  ses  nombreux 
lacs  et  son  admirable  fond  de  tableau,  constitué  par  la  majes- 
tueuse montagne  des  Géants,  dont  les  cimes  sont  couvertes 
de  neiges  éternelles;  ailleurs,  c'est  le  petit  village  de  Bagna, 
avec  la  grandiose  chute  d'eau  connue  sous  le  nom  de  «  Store- 
brofos  )>  ;  plus  loin,  c'est  la  charmante  vallée  d'Etna. 

La  méthode  thérapeutique  adoptée  à  Tonsaasen  est  celle  de 
Brehmer-Dettweiler  avec  quelques  modifications.  A  signa- 
ler ce  fait  que  les  malades  peuvent  faire  la  cure  à  l'air  libre 


WmWmr'mw 


3 

se 


SA  .V.  I  TORIL'.U  II A  LILA 


iM 


même  par  une  température  de  —  a5°;  ils  ont  des  «  journées 
médicales  »  de  cinq,  sept,  et  même  neuf  heures. 

Depuis  quelque  temps  le  sanatorium  de  ïonsaasen  est 
dirigé  par  M.  le  D1'  J.  Somme.  Tonsaasen  est  desservi  par  le 
chemin  de  1er  de  Christiana  via  le  Randsljord,  Spirillen  ou 
Mjosen,  et  par  celui  de  Bergen  via  Leirdalsoren. 


RUSSIE 


Sanatorium  Halila.  —  Le  sanatorium  Halila  est  situé  sur 
un  plateau  du  haut  pays  de  la  Finlande.  Il  l'ait  partie  du  gouver- 
nement de  Viborg  et  n'est  séparé  que  par  18  kilomètres  de  la 
station  de  chemin  de  fer  de  Nykyrka.  Son  élévation  au-dessus 


Fis.  5S. 


Galerie  pour  eure  au  sanatorium  de  Halila. 


de  la  mer  est  d'environ  200   mètres.    La    place    occupée    par 
rétablissement  est  abritée  par  de  magnifiques  forêts. 

Le  sanatorium  comprend  deux  étages,  et  à  chaque  étage 
s'étendent  de  longs  corridors  sur  lesquels  s'ouvrent  toutes 
les  chambres  des  malades.  Dans  ces  corridors  spacieux  et 
aérés  règne,  en  hiver,  la  même  température  que  dans  les  cham- 
bres des  malades. 


i6  i  YISITES  AUX  SAXATOItlA 

Toutes  ces  pièces,  de  même  grandeur,  à  plafond  élevé, 
sont  très  bien  aérées.  A  chaque  étage  se  trouvent  des  cham- 
bres de  bains  parfaitement  aménagées,  de  même  qu'un  appa- 
reil à  douches.  Le  sanatorium  possède  aussi  des  salmis  de 
conversation,  de  musique,  de  lecture,  de  billard,  etc. 

Partout  éclairage  électrique. 

Dans  le  parc,  les  sentiers  sont  si  liien  entretenus  en  toute 
saison,  qu'à  moins  d'être  positivement  alités  les  malades 
peuvent  y  séjourner  et  s'y  promener  à  leur  aise.  Une  très  grande 
véranda  pour  la  cure  d'air  court  le  long'  de  la  façade  sud. 

Les  malades  prennent  tous  leurs  repas  en  commun.  Il  y  en 
a  cinq  par  jour. 

Il  v  a  tout  près  de  là  un  autre  sanatorium  pour  a5  malades, 
réservé  aux  sujets  prédisposés  ou  suspects. 

L'a  dépense  journalière  d'un  malade  dans  un  bon  sanatorium 
pour  les  pauvres  est,  en  Finlande,  de  4  à  8  francs.  La  durée 
moyenne  du  séjour  est  au  moins  de  200  jours  médicaux. 

Le  sanatorium  Halila  a  été  fondé  par  feu  Sa  Majesté  l'Em- 
pereur Alexandre  III  pour  les  pauvres  et  pour  ceux  qui  n'ont 
pas  assez  de  fortune  pour  aller  se  guérir  à  l'étranger. 


Sl'ISSK 

Sanatorium  du  D  Turban,  à  Davos.  —  La  vallée  de  Da- 
vos, dans  les  Alpes  Rhétiques,  est  orientée  du  nord-est  au 
Sud-Ouest,  et  protégée  au  Nord  par  les  liantes  montagnes  du 
Rhaeticon. 

C'est  en  1S62  (pie  le  D'  Spengler,  médecin  de  Davos,  publia 
les  premières  observations  sur  le  climat  du  pays  et  montra 
son  efficacité  dans  le  traitement  de  la  phtisie. 

Dès  1 863,  le  D1  Unger,  phtisique  lui-même,  vint  à  Davos  et 
y  recouvra  la  santé. 

Depuis,  les  conditions  climatériques  ont  été  étudiées  par 
nombre  de  médecins  et  décrites  d'une  façon  magistrale  dans 
les  livres  de  Jaccoud    1    et  de  Weber  (a). 


(1)  Jaccoud.  Curabilité  cl  traitement  de  la  Phtisie  pulmonaire. 

(•2)  Weber.  Climatothérapie.  (Traduction  française  de  Doyon  cl  Spilluiaun  ) 


DA  VOS  267 

D'après  Weber,  les  différences  de  température  de  l'été  à 
l'hiver  sont  considérables  :  elles  oscillent  entre  un  minimum 
de  —  20°  et  un  maximum  de  +  240  ;  elles  sont  très  accusées  si 
l'on  compare  entre  elles  celles  du  jour  et  celles  de  la  nuit  et 
même  celles  de  plusieurs  jours  consécutifs.  La  température 
moyenne  des  mois  de  novembre,  décembre,  janvier,  février, 
mars  est  prescpie  toujours  au-dessous  de  o°.  Janvier  est  géné- 
ralement le  mois  le  plus  froid  avec  environ  —  6°  à  —  y0;  juillet 
et  août  sont  d'ordinaire  les  plus  chauds,  avec  une  température 
moyenne  de  -+-  i2°à  +  i3°. 

Jaccoud  a  signalé  la  puissance  de  la  radiation  solaire  comme 
un  des  caractères  les  plus  frappants  de  la  climatologie  de 
Davos  et  a  constaté,  le  26  décembre  1880,  le  fait  suivant. 

A  neuf  heures  du  matin,  à  l'air  libre,  son  thermomètre  mar- 
quait —  9"  :  aussitôt  après  il  le  fixait  adossé  à  un  mur  pleine- 
ment exposé  au  soleil,  et  au  bout  d'une  demi-heure  il  était 
monté  à  -f-  i5°. 

Voici,  d'après  la  table  de  Steffen,  la  moyenne  de  la  tempé- 
rature maxima  : 


Oct. 

Nov. 

Dec. 

Janv. 

Fév. 

Mars 

A  l'ombre  . 

15,78 

2,37 

3,89 

2,2} 

i,S 

2,4* 

Au  soleil.    . 

56, 1 5 

41,18 

42,82 

42,39 

44.09 

3o.ii 

Il  est  facile  de  comprendre  qu'avec  une  pareille  température 
le  malade,  même  assez  gravement  atteint,  puisse  rester  assis 
en  plein  air. 

La  moyenne  d'humidité  relative  de  Davos,  ramenée  à  3~°, 
aurait  été  en  1876  de  11,1  p.  100  d'après  Stetfen. 

Le  sanatorium,  sous  la  direction  de  M.  le  D1'  Turban,  secondé 
par  un  médecin  adjoint,  a  été  construit  dans  les  années  1887- 
i S88  par  l'architecte  Erdmann  Hartig  de  Brunswieki.  Il  est 
situé  dans  la  partie  sud-ouest  de  Davos-Platz,  sur  la  pente 
de  la  montagne,  à  une  altitude  de  i.dj3  mètres.  Bien  abrité, 
à  l'écart  et  bien  au-dessus  de  la  grande  route,  il  est  égale- 
ment éloigné  des  grandes  agglomérations  de  bâtiments.  Du 
côté  sud  l'établissement  est  limité  par  de  vastes  prairies  et  la 
vue  se  trouve  entièrement  libre  sur  la  vallée  de  Davos  et  sur 
les  hautes  montagnes.  Les  constructions  s'élèvent  à  la  partie 
inférieure  d'un  jardin  ayant  un  hectare  de  superficie.   Ce  jar- 


268  VISITES  AUX  SANATORIA 

(lin.  plante'1  d'arbres,  est  sillonné  de  sentiers  en  pente  douce, 
où  sont  installés  des  lianes  cl  deux  grands  pavillons.  Le  corps 
du  bâtiment  principal,  à  quatre  étages,  est  orienté  en  plein 
midi.  11  communique  avec  deux  villas,  par  des  galeries  fer- 
mées. L'une  de  ces  villas,  située  à  la  partie  supérieure  (côté 
ouest',  contient  les  appartements  du  médecin  dirigeant  et  du 
directeur  administratif;  dans  l'autre,  située  à  la  partie  infé- 
rieure (côté  est),  sont  réservés  des  appartements  pour  les 
malades.  Devant  la  façade  orientée  au  midi  sont  des  terrasses 
couvertes  sur  une  étendue  de  80  mètres. 

Au  sous-sol  du  bâtiment  principal  se  trouvent  les  cui- 
sines et  l'office  ainsi  que  la  buanderie,  le  séchoir  et  la 
chambre  à  repasser  ;  le  rez-de-chaussée  comprend  :  une  vaste 
salle  à  manger  très  aérée  de  i5  mètres  de  long  sur  10  mètres 
de  large  et  5  mètres  de  haut,  un  salon  de  conversation,  une 
salle  de  lecture  et  un  billard,  la  clinique  et  le  laboratoire 
bactériologique-chimique  avec  pharmacie,  une  salle  pour  la 
gymnastique  hygiénique  et  des  cabines  de  bains  (douches  pou- 
vant être  tempérées  à  volonté  et  bains  chauds  dans  des 
baignoires  émaillées).  Les  étages  supérieurs  du  bâtiment 
principal  ne  comprennent  qu'une  seule  rangée  de  chambres  à 
coucher  au  midi)  et  un  large  corridor  muni  de  fenêtres  ainsi 
que  la  vaste  cage  de  l'escalier  (au  nord).  Go  chambres  en  tout, 
y  compris  celles  de  la  villa  inférieure,  sont  destinées  à  rece- 
voir 60  à  70  malades.  Ces  chambres  sont  pourvues  de  planchers 
et  de  meubles  permettant  un  lavage  régulier;  elles  sont  pres- 
que toutes  orientées  au  midi  et  munies  de  balcons  et  de  ter- 
rasses. Les  corridors  et  une  partie  des  chambres  sont  couverts 
de  linoléum.  Dans  les  villas  sont  installés  des  poêles  que 
l'on  chauffe  au  bois.  Le  chauffage  du  bâtiment  principal  est 
obtenu  par  des  appareils  Bechem  et  Post  (vapeur  à  basse 
pression);  les  cylindres  se  trouvent  dans  une  caisse,  isolante 
avec  un  tiroir  mobile  placé  contre  la  paroi  extérieure,  lequel 
amène  l'air  froid  autour  des  cylindres  où  il  est  chauffé  au  fur 
et  â  mesure.  Dans  la  paroi  opposée  une  conduite  de  venti- 
lation avec  soupape  emmène  l'air  dans  un  espace  ménagé  sous 
le  toit  et  qui  est  fortement  ventilé.  Outre  ces  appareils  instal- 
lés séparément  dans  chaque  chambre,  des  vasistas  sont  pra- 
tiqués au-dessus  des  fenêtres    et   des    portes  de    balcon,   de 


DA  )VS  269 

sorte   qu'il    existe  une  ventilation  triple  sans   courants  d'air. 

Tous  les  locaux,  y  compris  les  chambres  à  coucher,  sont 
très  commodément  éclairés  à  la  lumière  électrique.  Dans  un 
local  spécial  est  installée  une  étuve  de  désinfection  à  vapeur 
courante. 

Une  bibliothèque  choisie,  un  grand  nombre  de  journaux  et 
de  revues  illustrées  et  une  variété  de  jeux  sont  à  la  disposition 
des  malades. 

L'établissement  a  le  premier  pris  pour  tâche,  dans  le  traite- 
ment de  la  tuberculose,  de  combiner  le  séjour  dans  les  hautes 
montagnes  avec  les  principes  établis  parBrehmer  à  Goerbers- 
dorf  et  par  Dettweiler  à  Falkenstein.  Le  malade  peut  jouir  en 
abondance  du  grand  air  par  des  promenades  variées  ;  il  en 
profite  également  en  s'installant  sur  les  terrasses  pour  cure 
d'air,  abritées  par  de  forts  rideaux  et  des  paravents  et  éclairées 
au  moyen  de  24  lampes  électriques  à  incandescence.  Sur  ces 
terrasses  se  trouvent  placées  60  chaises  longues  (modèle  Fal- 
kenstein) garnies  de  coussins  en  crin  animal  pouvant  être 
enlevés  à  volonté. 

Lors  de  ma  visite  à  Davos,  j'ai  été  particulièrement  et  agréa- 
blement surpris  d'y  voir  un  département  spécial  pour  les  gens 
prédisposés  à  la  phtisie  [Prophylactiker). 

Le  directeur  admet  dans  son  sanatorium  les  parents  des  pen- 
sionnaires qui  sont  soumis  au  traitement  prophylactique, 
c'est-à-dire  à  la  gymnastique  respiratoire  avec  ou  sans  l'appa- 
reil de  Gifford,  et  qui  reçoivent  l'instruction  hygiénique  que 
leur  cas  comporte. 

Depuis  cinq  ans,  il  n'admet  plus  de  phtisiques  à  un  degré 
trop  avancé. 

L'indication  spéciale  (1)  du  traitement  par  le  climat  de 
Davos  semble  être  : 

i°  Période  de  début  et  également  prédisposition  ; 

2"  Période  d'infiltration  ou  de  ramollissement,  mais  à  condi- 
tion ,que  la  lésion  ne  soit  pas  trop  étendue  et  que  la  marche  de 
la  maladie  ne  soit  pas  aiguë  ou  rapide. 

Davos-Platz  est  la  gare-terminus  du  chemin  de  fer  à  voie 
étroite  Landquart-Davos. 


(1)  De  la  Harpe.  Formulaire  des  Stations  d'hiver  et  estivales. 


2-0  VISITES  AUX  SÀNATORIA 

Sanatorium  d'Arosa. —  Un  peu  au  nord  de  Davos  se  trouve 
une  vallée  qui  commence  à  être  for!  en  faveur  comme  séjourd'été 
cl  d'hiver  :  nous  voulons  parler  de  la  vallée  d'Arosa.  La  diffi- 
culté  des  communications  avail  empêché  jusqu'ici  cette  localité 
de  prendre  toul  son  essor.  Une  belle  route  relie  actuellement 
Arosa  à  Goire  ;  il  ne  faut  plus  que  cinq  heures  trois  quarts  de 
voilure  pour  parcourir  la  distance  qui  sépare  ces  dmix  localités. 

La  vallée  d'Arosa  est  entourée  de  tous  côtés  d'une  chaîne 
continue  de  montagnes,  dont  les  cimes  atteignent  de  2000 
a  '980  mètres  de  hauteur.  Son  altitude  monte  progressive- 
ment de  1  7.J0  à  1  892  mètres.  La  régularité  des  parois  de  cette 
vallée  est  interrompue  du  côté  du  nord  par  le  Tschuggen, 
montagne  qui  s'avance  vers  le  sud  en  affectant  la  forme  d'un 
bastion  demi-circulaire,  de  telle  sorte  que  la  contrée  est  divi- 
sée en  une  partie  supérieure  et  une  partie  inférieure.  Une'  petite 
rivière,  la  Plessur,  suit  la  direction  S.-O.  au  N.-E.)  de  la 
vallée,  dont  elle  sort  par  une  étroite  fissure. 

Les  versants  des  montagnes  sont  couverts  de  magnifiques 
forêts  de  conifères  qui  s'élèvent  jusqu'à  une  altitude  de  1  900 
mètres  ;  deux  beaux  lacs,  d'un  bleu  foncé,  donnent  à  tout  le 
paysage  un  aspect  vraiment  enchanteur. 

A  120  mètres  au-dessus  du  lit  de  la  Plessur,  sur  le  versant 
méridional  du  Tschuggen,  a  été  bâti  le  nouveau  sanatorium 
(1  856  mètres;  dont  la  construction  ne  date  que  de  i88j-i888. 
Touchant  à  la  forêt  du  côté  est,  l'établissement  est  protégé  au 
nord  par  le  Tschuggen,  tandis  qu'il  a  la  vue  absolument  libre 
au  sud  et  à  l'ouest,  sur  un  panorama  magnifique  constitué 
par  des  prairies  et  des  bois,  lesquels  sont  dominés  par  les 
grandioses  montagnes  environnantes.  Les  ravons  solaires  v 
arrivent  donc  largement;  les  vents  sont,  au  contraire,  arrêtés 
dans  leur  cours,  à  part  l'inévitable  Foehn,  auquel  toutes  les 
localités  des  hautes  altitudes  sont  fatalement  exposées. 

Les  vastes  forêts  qui  entourent  Arosa  exercent  l'influence  ré- 
gulatrice et  modératrice  bien  connue  sur  la  température  atmos- 
phérique ;  ajoutons  à  cela  que  la  prédominance  des  conifères 
dans  la  végétation  de  cette  région  est  des  plus  précieuses  au  point 
de  vue  de  la  tuberculose  pulmonaire.  La  température  moyenne 
et  mininia  d'Arosa  en  hiver  est  de  2  degrés  plus  élevée  que  celle 
île  Davos,   malgré  une   différence  d'altitude  de   3oo   m.;  l'été 


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SANA T0R1CM  D'AROSA  i-'i 

est,  par  contre,  un  peu  moins  chaud.  L'atmosphère  y  est  générale- 
ment sereine  pendant  les  mois  d'hiver  ;  les  jours  pluvieux  sont 
peu  nombreux.  L'élat  hygrométrique  absolu  de  l'air  est  peu 
élevé.  Le  Dr  Ewart,  qui  a  beaucoup  étudié  les  climats  alpestres, 
estime  que  celui  d'Arosa  est  plus  stimulant  que  celui  de  Davos. 
La  situation  isolée  des  bâtiments  empêche  l'air  d'être  vicié 
par  la  poussière  ou  les  vapeurs  ;  les  vents  de  la  vallée  ne  peu- 
vent y  arriver  grâce  à  la  différence  d'altitude  et  à  la  protection 
des  montagnes  voisines. 

La  nouveau  sanatorium  contient  65  chambres,  dont  la  plu- 
part sont  orientées  au  sud  et  au  sud-ouest;  quelques-unes 
d'entre  elles  sont  munies  de  balcons.  Les  chambres  et  les 
corridors  ont  tous  un  plancher  de  bois  recouvert  de  linoléum. 
Chaque  chambre  a  son  foyer  de  chaleur,  dont  le  fonctionne- 
ment est  parfait.  L'escalier  et  les  corridors  sont  chauffés  à 
l'eau  chaude.  Une  salle  à  manger,  suffisament  vaste  et  élevée, 
deux  grandes  salles  de  réunion,  une  salle  de  billard  et  une 
large  véranda  couverte  sont  à  la  disposition  des  pensionnaires. 
Enfin  une  terrasse  couverte,  orientée  vers  le  sud  et  munie  de 
chaises  longues,  permet  la  cure  d'air  par  tous  les  temps  et  en 
toute  saison.  Un  bâtiment  spécial  est  affecté  au  service  des 
bains  et  des  douches.  L'établissement  est  doté  d'une  excel- 
lente eau  potable,  d'une  installation  de  désinfection  à  la  vapeur 
et  d'une  canalisation  parfaitement  aménagée. 

Le  sanatorium  d'Arosa  réunit  donc,  par  son  altitude,  sa 
situation  topographique  et  son  organisation,  les  meilleures 
conditions  possibles  pour  le  traitement  prophylactique  et  cura- 
tif  de  la  tuberculose  pulmonaire.  La  méthode  adoptée  est  celle 
de  la  plupart  des  institutions  similaires  :  ce  sont  les  principes 
de  Brehmer,  perfectionnés  et  élargis  par  Dettweiler,  qui  cons- 
tituent la  base  de  toute  la  thérapeutique.  Le  sanatorium  est 
dirigé  par  M.  le  D1'  E.  Jacobi. 

Pour  se  rendre  à  Arosa,  on  va  de  Bâle  à  Goire  ;  là  on 
trouve  une  voiture  postale  et  des  voitures  particulières  qui 
mènent  le  voyageur  à  Arosa  en  5  heures  par  une  route  traver- 
sant une  suite  de  paysages  grandioses  et  pittoresques  (i). 


(i)  D'après  la  description  de  JVIoeller  et  des  renseignements  fournis  par  M.  le 
Dr  Jacobi. 

Knopf.  Sanatoria.  ■  18 


a74  VISITES  AUX  SANATORIA 

Sanatorium  de  Leysin.  —  Le  village  de  Leysin  est  situé 
sur  un  plateau  assez  étendu,  au  pied  îles  Tours  d'Ai,  sur  le 
versant  méridional  des  Alpes  vaudoises  ;  il  est  réputé  depuis 
longtemps  pour  la  pureté  exceptionnelle  de  son  air,  et  de  nom- 
breuses familles  de  la  Suisse  romande  s'en  disputent  depuis 
plusieurs  années  les  quelques  chalets  assez  vastes  pour  pou- 
voir leur  servir  de  villégiature   pendant  la  belle  saison. 

Le  sanatorium,  commencé  en  1891  et  terminé  en  1892,  est  à 
iioo  mètres  au-dessus  du  village;  il  est  bien  ensoleillé,  bien 
abrité  sur  la  pente  de  la  montagne  et  sur  la  lisière  des  grandes 
forêts  de  sapins  séculaires.  Le  panorama  dont  on  jouit  de  la 
terrasse  et  des  chambres  de  l'établissement  est  tout  à  fait  mer- 
veilleux. On  a  devant  soi,  sur  un  premier  plan,  les  cultures  du 
village  de  Leysin,  puis  de  vertes  prairies  dominées  par  une 
série  de  mamelons  couverts  de  sombres  forêts;  à  droite  une 
grande  étendue  de  la  vallée  du  Rhône;  plus  loin,  et  bornant 
l'horizon  de  tous  côtés,  de  grands  massifs  de  rochers,  les  uns 
couronnés  de  neiges  éternelles,  les  autres  présentant  des 
formes  pittoresques  et  majestueuses. 

Le  sanatorium  de  Leysin  a  été  créé  pour  offrir  dans  un  pays 
tle  langue  française,  aux  personnes  délicates  de  la  poitrine, 
des  installations  aussi  confortables  et  aussi  modernes  que  celles 
qu'on  va  chercher  au  loin  dans  des  contrées  ditférentes  de 
langage  et  d'habitudes  ;  les  montagnes  de  la  Suisse  romande  se 
prêtent  admirablement  à  la  cure  des  affections  pulmonaires. 

Toutes  les  régies  de  l'hygiène  moderne  ont  été  appliquées  à 
la  construction  et  à  l'aménagement  du  sanatorium  de  Leysin, 
et  cela  en  tirant  parti  des  expériences  faites  dans  les  établisse- 
ments analogues.  Il  a  été  édilié  dans  les  pâturages,  loin  de  loti  le 
industrie,  de  tout  ce  qui  peut  vicier  l'atmosphère. 

C'est  un  bâtiment  de  cinq  étages,  en  pierre,  dont  la  façade 
principale  est  orientée  au  sud;  80  chambres  sur  1 10  sont  en 
plein  midi,  les  autres  à  l'est  et  à  l'ouest.  Les  cuisines,  les 
escaliers,  les  offices,  les  logements  des  employés  sont  au  nord. 

La  plupart  des  chambres  ont  des  balcons  assez  larges  pour 
y  placer  les  chaises  longues  des  malades;  aucune  d'elles  qui 
n'ait  au  moins  3  mètres  de  hauteur  et  un  cubage  de  plus  de 
70  mètres.  On  a  choisi  des  meubles,  des  tentures  et  des  tapis 
pouvant  être  aisément  désinfectés  soit  par  des  lavages,  soit  par 


LErsiy  277 

une  étuve  à  désinfection  (système  Geneste  et  Herscher),  ins- 
tallée à  une  petite  distance  de  la  maison. 

Toutes  les  fenêtres  sont  doubles  et  ont  à  leur  partie  supé- 
rieure une  imposte  facile  à  ouvrir  et  à  fermer  au  moyen  d'une 
tige  de  fer  articulée;  chaque  chambre  possède  en  outre  une 
cheminée  d'aération  à  fort  tirage,  en  sorte  que  le  renouvel- 
lement de  l'air  se  fait  jour. et  nuit  d'une  façon  insensible. 

Le  chauffage  de  toute  la  maison  est  obtenu  par  un  calorifère 
central  du  système  Bechem  et  Post;  tous  les  locaux  publics 
peuvent  être  chauffés  à  des  degrés  divers  et  chaque  chambre 
a  son  corps  de  chauffe  spécial,  de  grandeur  variable,  suivant 
la  capacité  de  la  pièce  et  se  réglant  à  volonté.  Beaucoup  de 
chambres  sont  munies  en  outre  de  cheminées  indépendantes. 
Lumière  électrique  partout. 

La  maison  comprend  encore  une  grande  salle  à  manger,  une 
salle  de  restaurant,  un  grand  salon,  un  salon  de  dames,  des 
salons  privés,  une  vaste  salle  de  billard,  une  salle  de  lecture, 
une  belle  galerie  couverte  réservée  aux  appartements  du  rez- 
de-chaussée,  une  autre  galerie  vitrée  attenant  aux  salons  et 
l'aisant  jardin  d'hiver,  des  salles  de  bains  et  de  douches  et  un 
ascenseur  hydraulique  (système  Edoux). 

Une  grande  galerie  à  deux  étages  communique  à  l'Est  avec 
le  rez-de-chaussée  et  avec  le  premier  étage  ;  elle  a  une  lon- 
gueur de  3o  mètres  et  contient  soixante  chaises  longues  pour 
la  cure  d'air.  D'autres  galeries  plus  petites  sont  installées  à 
une  faible  distance  et  permettent  de  disposer  d'une  centaine 
de  places  pour  la  cure.  Un  couloir  chauffé  conduit,  par  derrière 
les  galeries,  à  la  maison  du  directeur. 

Une  vaste  terrasse,  de  nombreux  sentiers,  les  uns  horizon- 
taux, les  autres  en  pente  douce,  tracés  dans  les  pâturages  et 
dans  les  bois  de  sapins  avoisinants,  offrent  aux  malades  des 
promenades  nombreuses,  non  fatigantes,  graduées  selon  leurs 
forces,  et  des  points  de  vue  variés.  L'ne  passerelle  conduit 
du  second  étage  directement  dans  les  bois  de  sapins.  Des 
kiosques  (flg.  61)  et  abris  (sun-boxes)  ont  été  disposés  de 
distance  en  distance,  afin  de  servir  aux  malades  de  reposoir. 
Etang  à  patiner  à  proximité  immédiate. 

Une  eau  potable  d'excellente  qualité,  abondante,  a  été  cap- 
tée au  pied  des  Tours  d'Ai  et  amenée  au  sanatorium  par  des 


2?8 


VISITES  AU.X  SAXATOMA 


(uvaux  métalliques.  Sa  pression  claul  considérable  1  25  mètres 
elle  peut  desservir  tous  les  étages.  Le  système  des  égouts  et 
des  cabinets  ne  laisse  rien  à  désirer. 

Le  climat  de  Levsiif  est  bien  adapté  au  traitement  des  tuber- 
culeux peu  avancés  :  une  altitude  de  1  4''°  mètres  avec  au- 
tant de  soleil  que  possible,  aucune  montagne  n'en  interceptant 
les  rayons  ni  à  Test  ni  au  sud  :  un  air  très  calme  à  cause  des 
hauts   sommets   et  des   forêts  qui    mettenl    Leysin  à  l'abri   du 


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Fig.  62. 


Kiosque  de  repos,  à  Leysin. 


vent;  un  sol  excessivement  sec  formé  par  de  l'humus  et  un 
calcaire  fendillé  très  poreux;  l'hygrométricité  spéciale  à  la 
haute  montagne;  aucune  possibilité  de  poussières  dans  l'air. 
On  peut  dire  que  la  caractéristique  du  climat  de  Leysin  est 
d'être  un  climat  d'altitude  à  réactions  aussi  atténuées  que  pos- 
sible. 

J'ai  visité  le  sanatorium  de  Leysin  quand  M .  le  D1'  Lauth 
était  encore  médecin  de  l'établissement.  Son  successeur  a  été 
M.  le  l)1  Burnier  et  actuellement  le  sanatorium  se  trouve  sous 
l'habile  direction  de  M.  le  D1  Exchaquel.  défenseur  convaincu 
de  la  phtisio-lhérapie  moderne  dans  les  établissements  fermés. 
Depuis  ma  visite,  le  sanatorium  s'est  agrandi  et  peut  recevoir 
à  présent  120  malades.  M.  le  D1'  Exchaquel  m'écrivait  cpie  les 
malades  font  des  séjours  prolongés,  mais  de  durée  très  varia- 
ble, en  général  six  mois  au  minimum. 


LEVSLY  27g 

Il  y  a  une  chapelle  catholique  à  proximité,  et  un  service  re- 
ligieux pour  le  culte  protestant  a  lieu  tous  les  dimanches  au 
sanatorium. 

La  station  de  chemin  de  fer  la  plus  rapprochée  de  Leysin  est 
Aigle,  sur  la  ligne  du  Jura-Simplon. 


CHAPITRE    XII 

Sanatoria  actuellement  en  fonctionnement  ou  en  projet 
dans  les  divers  pays  du  monde. 


La  lisle  suivante  comprend  les  sanatoria,  hôpitaux  spéciaux, 
asiles,  camps  et  colonies  consacrés  au  traitemenl  de  la  tuber- 
culose. Je  n'affirmerai  pas  que  cette  liste  soit  complète.  D'abord 
il  n'est  pas  toujours  facile  d'avoir  des  renseignements  exacts. 

De  plus,  les  sanatoria.  surtout  pour  la  classe  pauvre  —  je  suis 
heureux  de  le  constater  —  sont  partout  créés  si  rapidement 
qu'il  est  difficile  d'avoir  une  lisle  parfaitement  à  jour. 

J'ai  obtenu  une  partie  de  mes  informations,  au  point  de  vue 
de  ces  établissements,  par  des  visites  personnelles  laites  à  un 
certain  nombre  de  sanatoria  en  Europe  el  en  Amérique.  Pour 
les  renseignements  plus  récents  en  ce  qui  concerne  les  Elals- 
l'nis,  je  tiens  à  remercier  ici  MM.  les  secrétaires  des  bureaux 
de  santé  des  divers  Etals  de  l'Union.  Quant  à  ce  qui  s'est 
accompli  de  nouveau  en  faveur  des  sanatoria  depuis  ma  visite 
en  Allemagne,  en  Angleterre,  en  Autriche,  en  France,  en 
Italie,  etc.,  je  dois  les  plus  vifs  remerciments  à  M.  le  profes- 
seur von  Schrœtter  (de  Vienne),  MM.  les  Drs  F.-R.  Walters  (de 
Londres,  L.-II.  Petit  de  Paris',  Georg  Liebe  de  Loslau, 
Allemagne),  Massalongo  (de  Vérone),  Klaus  Hansen  (de  Ber- 
gen, Norvège  .  Chr.  Saugman  (de  Horsens,  Danemark),  Sand- 
ford  Jackson  (de  Brisbane,  Australie')  et  île  Mmc  Poolowskoja, 
docteur  en  médecine  à  Saint-Pétersbourg. 


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CHAPITRE  XIII 
Description  d"un  sanatorium  idéal. 


Nous  avons  décrit  dans  le  chapitre  précédent  plusieurs  des 
sanatoria  les  plus  importants  et  les  plus  intéressants.  Dans  les 
pages  qui  vont  suivre,  nous  nous  efforcerons  d'exposer,  d'après 
les  connaissances  modernes,  le  traitement  hygiéno-diététique 
de  la  tuberculose  pulmonaire  dans  un  sanatorium  idéal.  Cet 
idéal  n'est  pas  très  difficile  à  réaliser,  comme  il  résulte  de 
ce  que  nous  avons  vu  et  appris  à  cet  égard  pendant  nos  voyages 
d'études  en  Europe  et  en  Amérique. 

Emplacement,  climat  et  altitude.  —  Parlons  d'abord  de 
l'emplacement  d'un  pareil  sanatorium. 

Nous  avons  écrit  au  chapitre  de  l'historique  :  «  Fallope  (i5a3- 
i56a)  reconnaît  qu'il  n'y  a  pas  un  même  climat  pour  tous  les 
malades,  que  le  choix  d'un  climat  donné  ne  saurait  con- 
venir à  tous  les  malades,  mais  qu'il  doit  être  subordonné  au 
tempérament  et  à  la  constitution  de  ces  derniers  ». 

l'n  de  nos  phtisio-thérapeutes  les  plus  distingués,  reprenant 
cette  idée,  a  dit  (i)  :  «  Il  n'existe  pas  de  climats  spécifiques  ni 
de  climats  curateurs  de  la  phtisie  pulmonaire  ». 

c  C'est  une  erreur,  a  répondu  Peler  •>  ,de  chercher  un  air  qui 
guérisse  les  tubercules  ou  les  tuberculeux,  ou  une  température 
qui  ait  ce  pouvoir  ». 

Germain  Sée  qualifiait  de  «  divisions  byzantines  »  les  nom- 
breuses classifications  de  climats  fondées  sur  leur  influence  : 


(i)  Daremberg.  Traitement  de  la  Phtisie  pulmonaire. 

(2)  Peter.  Traitement  hygiénique  de  la  Tuberculose.  Bulletin  de  Thérapeu- 
tique, 1.  xcv. 


■ 


Fig.  (i'J.  —  Vue   générale  d'un  sanatorium  idéal  pour  le  traitement  de  la  phtisie  p 


Knopf.  Sanatoria  {p.  290-291). 


naire.  Système  des  établissements  fermés,  combiné  avec  celui  des  pavillons  isolés. 


SANATORIUM  IDEAL  291 

il  espérait  qu'elles  cesseraient  bientôt  et  que  les  voyages  du 
pùle  à  l'équateur  seraient  épargnés  au  phtisique. 

Mais,  s'il  est  vrai  qu'il  n'y  a  pas  de  climat  spécifique  ni  de 
climat  curateur,  il  faut  convenir  avec  Dettweiler  que  certains 
climats  permettent  mieux  que  d'autres  le  traitement  hygiéno- 
diété  tique. 

L'idéal  n'est-il  pas  d'obtenir  les  meilleurs  résultats  chez  le 
plus  grand  nombre  de  malades  ? 

Hiver  sans  rigueurs  extrêmes,  été  sans  fortes  chaleurs,  pluies 
de  fréquence  modérée,  telle  est  la  zone  tempérée  où  sera  établi 
le  sanatorium. 

On  le  bâtira  de  3oo  à  700  mètres  au-dessus  du  niveau  de  la 
mer,  sur  un  sol  incliné,  dans  un  lieu  sec  que  la  nature  aura 
doté  de  pins  et  d'arbres  résineux. 

Est-il  besoin  de  dire  que  l'air  sera  pur,  que  les  influences 
miasmatiques  n'existeront  pas,  qu'une  distance  assez  grande 
le  séparera  des  lieux  habités  ? 

De  hautes  montagnes,  assez  éloignées  pour  ne  pas  arrêter 
les  rayons  du  soleil,  s'opposeront  à  l'influence  des  vents  trop 
froids  et  trop  forts,  sans  que  l'action  bienfaisante  des  brises 
légères,  qui  purifient  l'atmosphère,  soit  empêchée. 

Une  source  voisine,  habilement  captée,  donnera  au  sanato- 
rium de  l'eau  abondante  et  pure. 

Les  pavillons  seront-ils  séparés  comme  aux  Etats-Unis  [Col- 
lage System)'!  N'y  aura-t-il  qu'un  seul  établissement,  fondé 
suivant  les  préceptes  de  Brehmer  ou  de  Dettweiler? 

Les  premiers,  construits  dans  les  «  Adirondacks  »,  ont 
donné  entre  les  mains  de  M.  le  D1'  Trudeau  d'excellents  résul- 
tats, sans  que  les  règles  strictes  des  sanatoria  d'Europe  y 
fussent  appliquées.  Il  y  avait  de  part  et  d'autre  de  tels  avantages 
qu'il  nous  a  paru  bon  de  combiner  les  deux  systèmes. 

Chacun  des  nombreux  chalets  isolés  du  genre  américain 
donne  asile  à  cinq  ou  huit  personnes,  mais  il  est  très  difficile 
au  médecin  d'y  exercer  la  surveillance  de  chaque  instant  d'où 
dépend  tout  le  succès  du  traitement. 

L'agglomération  de  soixante-dix  à  cent  personnes  dans  un 
seul  bâtiment  s  éloigne  davantage  encore  de  la  conception  que 
nous  avons  d'une  demeure  où  le  phtisique  doit  recouvrer  la 
santé. 


*9a  SANATORIUM  IDÉAL 

Système  iu:s  grands  pavillons  réunis  par  m:s  galeries 
vitrées.  —  .Nuire  compatriote  ei  ami  M.  Van  Pelt,  élève  de 
l'école  tirs  Beaux-Arts,  a  bien  voulu  nous  prêter  son  concours 
ei  prendre  le  soin  de  dresser  d'après  les  idées  de  notre  thèse 

le  plan  d'un  sanatorium. 

La  conception  de  ce1  établissement  est  celle  que  nous  avons 
eue  nous-même  :  il  s'est  efforcé  de  mettre  au  service  de  l'archi- 
tecture utile  tout  ce  que  pouvait  avoir  de  ressources  l'archi- 
tecture agréable. 

Notre  gratitude  la  plus  grande  lui  en  demeure  acquise. 

11  nous  suffira  de  suivre  ce  plan  pour  décrire  ce  sanatorium 
idéal. 

i°  En  avant,  en  façade,  s'élèvent  trois  pavillons  que  séparent 
des  galeries  vitrées  de  36  mètres  de  longueur. 

a0  Derrière  le  pavillon  central  sont  disposés  les  bâtiments 
des  services  communs  salle  à  manger,  cuisines,  etc..  :  le 
jardin  d'hiver  leur  est  adjacent. 

3°  Là  se  trouvent  encore  les  bureaux,  les  locaux  de  l'admi- 
nistration, etc.,  etc. 

Ces  constructions  sont  isolées  les  unes  des  autres,  mais 
réunies  par  des  galeries  vitrées. 

4°  La  demeure  du  médecin  est  à  gauche  du  bâtiment  de 
l'administration. 

5°  A  droite,  symétriquement,  se  trouve  une  construction 
semblable    destinée    aux    visiteurs,   aux  parents   des   malades. 

6"  So  mètres  plus  loin,  vers  la  gauche,  un  pavillon  d'iso- 
lement est  aménagé  pour  recevoir,  le  cas  échéant,  les  malades 
que  leur  état  oblige  à  isoler,  ou  qui  sont  atteints  de  maladies 
contagieuses    parfois  importées  du  dehors    i   . 

j°  Symétriquement,  (daté  à  droite,  est  un  pavillon  de  jeu 
dont  ileux  côtés  doivent  être  ouverts  en  même  temps,  les 
Avux  autres  restant  fermes  pour  briser  le  vent. 

8°  Lue  vacherie,  des  ('curies,  sont  plus  loin,  à  -o  mètres 
vers  la  droite;  ia5  mètres  les  séparent  ainsi  des  pavillons 
des  malades. 


(i)  ('.die  construction  nous  a  paru  nécessaire,  car  nous  connaissons  un  sana- 
torium qu'une  scarlatine,  importée  du  dehors  par  un  visiteur  et  contractée  par 
uu  malade.  I!l  déserter  pendant  trois  semaines,  parce  qu  il  n'y  avait  pas  de 
local  d'isolement. 


Fig.  64.  —  Plan  d'un  sanatorium  idéal. 


A.  Pavillon  pour  les  malades.  —  B.  Galeries  vitrées  unissant  les  pavillons.  —  C.  Salle  à  manger.  — 
D.  Jardin  d'hiver.  —  E.  Cuisine.  —  F.  Bâtiment  de  l'administration.  —  G.  Habitation  du  médecin  et 
de  son  assistant.  —  H.  Maison  pour  parents  et  amis  des  malades.  —  I,  J.  Concierge  et  jardinier.  — 
K.  Local  d'isolement.  —  L.  Pavillon  de  récréation.  —  M.  Bâtiment  de  désinfection.  —  N.  Écuries, 
P.  Pavillons  tournants. 


SANATORIUM  IDEAL  296 

90  En  un  même  lieu,  mais  à  gauche,  une  construction  de 
même  forme  loge  l'étuve,  les  appareils  nécessaires  à  la  des- 
truction des  crachats.  Une  salle  dallée  y  est  ménagée  pour 
recevoir  le  corps  s'il  se  produit  un  décès. 

io°  Assez  loin,  à  gauche  et  à  droite,  deux  maisonnettes  loge- 
ront lune  le  concierge,  l'autre  le  jardinier. 

ii°  Dans  une  vallée  de  iao  à  200  mètres  au-dessous  du 
sanatorium  sont  situés  les  machines  à  vapeur,  les  dynamos, 
les  accumulateurs,  les  pompes,  la  blanchisserie,  etc.,  etc., 
pour  que  l'établissement  soit  exempt  de  toute  poussière,  fumée 
et  bruit.  Un  petit  tramway  funiculaire  électrique  relie  le  sana- 
torium à  ces  dépendances. 

£2°  Au  sud  du  pavillon  central  s'étend  un  jardin  où  seront 
disposés  des  bancs,  où  l'on  établira  des  kiosques  tournants; 
les  allées  en  seront  disposées  pour  soumettre  les  malades  à 
des  promenades  progressives. 

Au  fond  du  jardin,  la  promenade  achevée,  un  chalet  suisse 
leur  permettra  le  repos. 

Chacun  des  trois  grands  pavillons  a  la  disposition  suivante  : 

Tout  le  rez-de-chaussée  est  occupé  par  de  petits  salons, 
la  bibliothèque ,  les  installations  pour  l'hydrothérapie,  les 
bains,  etc.;  en  outre,  dans  le  pavillon  central  se  trouvent  un 
cabinet  de  consultation  et  une  chambre  d'inhalations. 

En  plein  midi,  adjacente  au  rez-de-chaussée,  est  une  grande 
véranda  de  45  mètres  de  longueur  sur  6  mètres  de  largeur,  où 
sont  placées  des  chaises  longues  pour  la  cure  de  repos  à  l'air  libre. 

Cette  véranda  est  protégée  par  un  toit  en  verre  à  châssis 
mobiles. 

Des  rideaux  sont  disposés  de  façon  à  protéger  le  malade 
contre  le  vent  et  le  soleil.  Un  vitrage  peut  être  adapté  de  façon 
à  fermer  les  vérandas  entièrement  pendant  la  nuit  ou  en  temps 
de  pluie. 

Au  premier  étage  se  trouvent  quatorze  chambres  de  malades 
dont  chacune  a  65  mètres  cubes  de  capacité.  Toutes  ouvrent 
au  sud,  par  une  large  porte-fenêtre,  sur  un  balcon  de  2  mètres 
de  largeur  où  l'on  peut  placer  une  chaise  longue  si  le  malade 
est  incapable  de  descendre. 

A  chaque  pavillon  sont  annexées  deux  chambres  pour  les 
infirmiers. 


296  sanatorium  IDEM. 

Aménagement  intérieur,  ventilation,  chauffage,  éclai- 
rage, etc.  —  Dans  l'intérieur  des  pièces  comme  dans  l'inté- 
rieur de  tous  les  bâtiments,  les  angles  sont  arrondis  pour  «pie 
la  poussière  ne  séjourne  nulle  pari;  tout  relief  îles  murs,  des 
plafonds,  des  portes,  etc.,  est  soigneusement  évité.  Il  n'y  a  ni 
placards,  ni  meubles  superflus.  Les  rideaux  de  drap,  les  Lapis, 
les  meubles  couverts  de  velours  ou  d'étoffes  sont  bannis.  Les 
bureaux  cl  les  armoires  ont  une  hauteur  limitée  et  sont  sur- 
montés d'une  pyramide  ou  d'un  plan  incliné  pour  que  la  pous- 
sière ne  puisse  s'y  accumuler.  Le  lil  de  fer  à  sommier  d'acier, 
à  matelas  modérément  doux,  est  disposé  pour  éviter  au  malade 
le  courant  d'air  qui  se  fait  de  la  porte  à  la  fenêtre.  Le  par- 
quet de  huiles  les  chambres  est  recouvert  de  linoléum.  Dans 
les  corridors,  les  salles  d'hydrothérapie, dans  les  vvater-closets, 
etc.,  etc.,  le  linoléum   est  remplacé  par  un  carrelage  vitrifié. 

Les  murs  sont  peints  à  l'huile  pour  qu'ils  puissent  être  lavés 
avec  des  solutions  antiseptiques. 

Lorsque  deux  chambres  communiquent,  le  passage  de  l'une  à 
l'autre  se  fait  au  besoin  par  une  double  porte  tapissée  et  mobile. 

La  ventilation  est  assurée  en  partie  par  des  fenêtres  à  va- 
sistas, en  partie  par  un  appel  d'air  au  plafond  :  l'atmosphère 
est  ainsi  constamment  renouvelée. 

Le  chauffage  s'effectue  par  la  vapeur  sous  pression  moyenne. 
C'esl  le  mode  qui  permet  le  mieux  de  réaliser  et  d'entretenir 
une  température  de  +  i8°  dans  des  constructions  séparées.  La 
baisse  de  la  température,  atteignant  rarement  —  i5",  favorise 
cette  disposition  dans  les  contrées  tempérées. 

Les  tuyaux  employés  sont  construits  pour  résister  à  des 
pressions  très  supérieures  à  celle  qui  esl  nécessaire.  La  sur- 
lace chauffante  sera  rendue  assez  étendue  par  la  longueur  de 
ces  tuyaux.  Le  système  à  ailelles  sera  écarté  parce  qu'il  esl 
impossible  à  nettoyer;  les  tuyaux  seront  placés  le  long  du  mur, 
du  côté  opposé  au  lit. 

Le  sanatorium,  éloigné  de  tout  réseau  dégoûts  municipaux, 
aura  sa  canalisation  particulière  :  un  système  diviseur  fonc- 
tionnera loin  de  toute  habitation. 

Tout  rétablissement  sera  éclairé  à  l'électricité, et  pendant  la 
saison  chaude  se  trouveront  distribués  partout,  dans  la  salle  à 
manger  et  dans  la  cuisine,  dans  la  bibliothèque,  dans  les  sa- 


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L'ig.  65.  —  Coupe  du  premier  éloge  d'un  des  pavillons  d'un  sanatorium  idéal. 


Fig.  66.  —  Un  coin  de  la  véranda  où  se  fait  la  cure  d'air  libre  sur  les  chaises  longues. 


SANATORIUM  IDÉAL  299 

Ions,  dans  les  galeries,  clans  les  chambres  de  malades,  etc., 
des  éventails  électriques.  Pour  les  galeries  où  les  malades  font 
leur  cure  de  repos,  de  môme  que  pour  les  chambres,  ces  éven- 
tails seront  plus  petits  et  mobiles  de  manière  à  pouvoir  être 
facilement  déplacés  et  de  façon  à  en  obtenir  le  plus  de  confort 
et  le  moins  de  gène  possible.  Des  sonnettes  électriques  per- 
mettront aux  malades  d'appeler  de  leur  lit,  des  water-closets, 
de  la  véranda  ou  des  salles  de  bains  sans  avoir  à  se  déranger. 

Il  faut,  pour  terminer  le  chapitre  sur  la  construction  et  l'ad- 
ministration d'un  sanatorium  idéal,  que  nous  disions  un  mot 
sur  les  précautions  à  prendre  pour  prévenir  les  accidents  en 
cas  d'incendie. 

Partout  où  se  trouve  un  grand  nombre  d'invalides  plus  ou 
moins  faibles,  les  précautions  devraient  être  doublées.  Les 
escaliers  devraient  être  larges,  construits  de  préférence  en 
pierre  ou  en  fer,  et  on  fera  l'application  d'asbestos  comme 
protection,  partout  où  cela  sera  possible. 

Dans  les  corridors  oii  les  lampes  à  l'huile  restent  allumées 
toute  la  nuit,  des  tuyaux  et  des  seaux  devraient  toujours  être 
prêts  en  cas  de  besoin.  L'administration  devrait  prendre  les 
précautions  nécessaires  pour  qu'il  n'y  ait  jamais  manque  d'eau. 
Le  beau  sanatorium  pour  phtisiques  de  Liberty,  dans  les  Etats- 
Unis,  fut  récemment  (octobre  1899)  totalement  détruit  par 
suite  du  manque  d'eau  dans  les  réservoirs. 

.Mais  un  point  important,  selon  moi,  est  la  formation  d'un 
corps.de  sapeurs-pompiers  composé  des  infirmiers  et  autres 
employés  du  sanatorium.  J'ai  assisté,  pendant  que  je  servais 
comme  aide-médecin  à  FalUenslein,  à  quelques  exercices  du 
corps  des  sapeursqiompiers  du  sanatorium  composé,  ainsi  que 
je  le  dis  plus  haut,  des  employés  de  cet  établissement.  Une  où 
deux  fois  par  mois  on  sonne  l'alarme,  ayant  préalablement 
prévenu  les  malades  que  les  signaux  sont  seulement  pour 
pratiquer  les  manœuvres  :  bien  entendu,  le  personnel  n'est 
pas  averti.  Ces  manœuvres  ne  sont  pas  seulement  un  bon 
exercice  pour  les  infirmiers  et  une  diversion  pour  eux  et  poul- 
ies malades,  mais  elles  donnent  en  même  temps  une  preuve 
de  sécurité  aux  pensionnaires  de  l'établissement. 


CHAPITRE    XIV 

L'hygiène  spéciale  dans  un  sanatorium  ;  des  crachoirs, 
des  crachats,  leur  désinfection,  etc. 


l'n  des  points  les  plus  importants  pour  le  traitement  de  la 
phtisie  pulmonaire  dans  un  établissement  fermé,  c'est  «le  pro- 
téger  le  malade  par  une  hygiène  spéciale  contre  une  infection 
nouvelle,  soit  par  ses  propres  crachais,  soit  par  des  crachais 
d'autres  tuberculeux,  produits  qui,  desséchés  et  pulvérisés, 
flottent  en  abondance  dans  l'atmosphère  des  chambres  des 
phtisiques  libres. 

Instructions  aux  malades.  —  Les  crachats  des  tuberculeux 
sollicitent  toute  l'attention  dans  les  sanatoria  bien  dirigés.  A 
leur  entrée,  on  explique  aux  phtisiques  pourquoi  ils  doivent 
toujours  cracher,  soit  dans  leur  crachoir  de  poche,  soit  dans 
un  petit  crachoir  qui  se  trouve  sur  une  table  de  nuit  ou  sur 
une  table  sous  la  véranda,  soit  enfin  dans  les  très  nombreux 
crachoirs  places  dans  les  corridors,  dans  les  «  halls  »,  et  on 
leur  explique  de  plus  que  tous  les  crachats  doivent  être  re- 
couverts immédiatement,  à  cause  des  mouches  et  autres 
insectes  qui  peuvent  emporter  les  bacilles  et  devenir  une  cause 
d'infection  nouvelle. 

Je  ne  crois  pas  qu'il  soit  nécessaire  de  faire  prendre  aucun 
engagement  au  malade  après  une  semblable  explication.  11 
sait  que  c'est  autant  dans  son  propre  intérêt  que  dans  l'intérêt 
des  autres  qu'il  ne  doit  jamais  cracher  à  terre  ni  dans  son 
mouchoir. 

La  question  des  crachoirs  est  délicate  et  difficile  à  résoudre  : 
la  vue  de  nombreux  crachoirs  sans  couvercles  et  souvent  clans 
un  état  de  propreté  imparfaite  n'est  pas  engageante  pour  les 
malades. 


CRAC/IO/BS  DE  POCHE 


3oi 


Il  faut  avant  tout  éviter  de  provoquer  le  dégoût  des  patients 
par  l'aspect  de  ces  crachoirs  disposés  de  tous  côtés. 

11  importe  de  ne  pas  éveiller  les  répugnances  des  amis  qui 
viennent  accompagner  les  pensionnaires  ou  leur  rendre  visite. 

En  un  mot,  il  faut  avoir  une  grande  propreté,  une  «  religieuse 
propreté  »,  mais  il  faut  qu'elle  passe  inaperçue  comme  les 
moyens  qui  permettent  de  l'obtenir.  Le  crachoir  ne  doit  être 
vu  qu'au  moment  de  l'employer.  La  même  règle  s'applique  aux 
crachoirs  de  poche,  aux  petits  crachoirs  de  «  Kur  »,  et  aux 
grands  crachoirs  fixes. 


Fier.  °7 


Crachoir  de  Dettweiler. 


Fig-.  (58.  —  Crachoir  de  KnopC 


Crachoirs  de  poche  de  Dettweiler,  de  Knopf,  de  Petit, 
de  Vaqlier  et  de  Liebe.  —  J'ai  déjà  décrit  à  la  page  \\  (Pro- 
phylaxie individuelle)  le  crachoir  de  poche  de  Dettweiler,  en 
verre,  et  le  mien,  en  aluminium,  J'ai  énuméré  aussi  les  quel- 
ques désavantages  que  me  semble  présenter  le  crachoir  de 
Dettweiler,  désavantages  que  j'ai  essayé  de  supprimer  au 
moyen  de  quelques  modifications. 

Un  autre  crachoir  en  aluminium  est  celui  de  Yaquier.  Dans 
une  étude  critique  relative  aux  crachoirs  (i),  M.  le  Dr  Ghuquet 


(1)  A.  Chuquet.  Les  Crachoirs  ;  étude  critique.  Communication  au  4°  Congrès 
pour  la  Tuberculose. 


l02 


HYGIENE  1)1    SANATORIUM 


s'exprime  sur  le  crachoir  de  Vaquier  de  la  façon  suivante  :  «  Il 
est  léger,  élégant,  mais  il  est  petit,  ne  s'ouvre  que  difficilement 
d'une  main  et  je  crains  que  l'ébullition  n'altère  rapidement  le 
caoutchouc  de  la  fermeture.  » 

Dans  La  Tuberculose  infantile,  j'ai  lu  aussi  une  bonne 
description  du  crachoir  du  IV  L.-H.  Petit.  Celui-ci  semble 
avoir  un  certain  avantage  sur  le  mien,  car  il  a  le  fond  plus 
large  et  la  fermeture  moins  compliquée.  M.  Chuquet  dit  que 


Crachoi 


île    V'i 


—  Crachoir  île  Petit. 


ce  crachoir  n'est  pas  entièrement  étanche,  mais  on  pourrait 
facilement  remédiera  celle  imperfection. 

Un  cinquième  crachoir  portatif  est  celui  de  M.  le  l)1'  Liebe  (de 
Loslau,  Allemagne),  qui  semble  avoir  un  avantage  spécial: 
c'est  d'être  excessivement  lion  marche  il  ne  coûte  que 
o  fr.  y5).  Ce  détail  est  très  important,  surtout  dans  les  sana- 
toria  pour  les  pauvres  et  dans  les  dispensaires,  où  les  cra- 
choirs sont  délivrés  gratuitement.  Mais,  malheureusement,  ce 
crachoir  est  en  verre,  et  peut  ainsi  devenir  une  source  de 
danger  pour  le  porteur,  au  cas  où  il  lui  arriverait  de  le  casser 
dans  sa  poche.  L'accident  pourrait  alors  être  suivi  d'une  ino- 
culation tuberculeuse  locale. 

Je  reproduis  ici  ces  cinq  crachoirs  de  poche,  en  vogue  dans 
les  sanatoria  d'Europe  et  d'Amérique. 

Chaque  malade  doit  être  pourvu  d'au  moins  deux  crachoirs 


TASSE-CRÂ CHOIR  UÏGIESIQUE 


3o3 


de  poche,  afin  qu'il  en  ait  toujours  un  pendant  que  l'autre  est  à 
la  désinfection. 

Crachoir  de  cure.  —  Le  crachoir  de  «  Kur  »,  à  main,  sou- 
vent en  porcelaine,  ressemble  à  une  tasse  à  bouillon.  Il  n'a 
pas  plus  de  8    centimètres   de   hauteur   sur  7  centimètres   de 


Fig.   71.  —  Crachoir  de  Liebe. 


Fig.  72.  —  Crachoir  de  cure. 


largeur  et  doit  être  muni  d'un  couvercle  et  d'une  anse.  Plus 
volumineux,  il  est  trop  lourd  pour  les  malades  affaiblis. 

Encore  y  aurait-il  avantage,  à  mon  avis,  à  remplacer  ce  cra- 
choir de  porcelaine  par  un  crachoir  d'aluminium  avec  un 
couvercle  et  un  entonnoir  démontable.  Je  donne  aussi  un  dessin 
de  ce  vaisseau  (fig.  67). 

Tasse-crachoir  hygiénique.  —  Aux  Etats-Unis  on  se  sert 
encore  comme  crachoir  de  cure  du  «  Seabury  and  Johnson 
Spitting  Cup  »  (tasse-crachoir  hygiénique). 

Dans  un  cadre  d'aluminium  avec  couvercle  on  place  un  papier 
imperméable,  plié  de  façon  qu'il  remplisse  le  cadre.  La  figure 
ci-après  indique  la  manière  de  monter  ce  récipient.  Quand 
le  crachoir  est  plein,  on  enlève  la  tasse  et  on  la  jette  au  feu. 

Une  troisième  variété  est  celle  des  crachoirs  fixes,  qui  se 
trouvent  le  plus  souvent  placés  à  terre. 

Pendant  mon  voyage  d'études,  j'ai  vu  une  variété  infinie  de 
ces  crachoirs  fixes.  Les  inconvénients  des  crachoirs  placés  à 
terre  sont  connus  :  le  malade  ne  crache  pas  toujours  dedans, 


3o  i 


Ul'GIENE  ùl    SAXATORll  M 


mais  souvent  à  côté;  en  outre,  ces  crachoirs  n'ont  presque 
jamais  de  couvercle. 

Crachoir  élevé  de  ECwopf. —  On  me  pardonnera  si.  au  lieu 
de  signaler  tous  1rs  inconvénients  «les  crachoirs  jusqu'ici  en 
usage,  je  décris   simplement    le   modèle  de   crachoir  qui   me 

semble  le  meilleur,  celui  que  je  désirerais  voir  dans  un  sana- 
torium  nom  ellement  construit. 

I.e  long  des  murs,  dans  les  corridors,  dans  les  salons  et 
autres    lieux    de    réunion    en    commun,    tous    les    dix    mètres 


Fig.    -S.   —   Tasse-crachoir    hygiénique. 

o.  Cadre  d'aluminium;  b.  Carton  imperméable. 

se    trouve    une    niche    située    à    environ    i'",io   au-dessus    du 
parquet. 

Celte  niche  a  une  profondeur  suffisante  pour  contenir  un 
crachoir  de  20  centimètres  de  hauteur  et  de  i(i  centimètres 
de  diamètre.  Elle  ressemble  à  un  tiroir,  A  l'intérieur  de  la 
porte  se  trouve  attaché  un  anneau  de  1er  coudé,  pour  recevoir 
le  crachoir  en  porcelaine  ou  en  verre  de  couleur  bleue.  Le 
crachoir  a  une  ouverture  en  entonnoir  beaucoup  plus  large  que 
celle  (pie  l'on  voit  ordinairement.  Quand  la  porte  est  fermée, 
grâce  à  un  système  automatique,  le  crachoir  est  parfaitement 
obturé.  Ce  système  consiste  en  un  petit  cadre  libre,  sur  lequel 
est  tendue  une  feuille  de  linoléum  placée  sous  le  plafond, 
dans  un  deuxième  cadre  fixé  au  mur.  Le  cadre  de  linoléum  esl 
soulevé  par  le  crachoir  rentrant,  ne  laissant  aucun  espace 
entre  celui-ci   et  le    plafond.  Dans  les  galeries   de  commun:- 


NETTOYAGE  ET  DÉSINFECTION  DES  CRACHOIRS 


3o5 


cation,  de  petites  boites  ayant  la  forme  de  niches  et  montées 
sur  un  pied  en  bois  peuvent  remplacer  les  niches  des  cor- 
ridors. On  peut  faire  de  même  pour  les  crachoirs  disséminés 
dans  les  jardins. 


/?     '  ,  ,      ^y. 


Fiff. 


Crachoir  élevé  do  Knopf  et  sa  niohe. 


Le  crachoir  de   Proedohl  en  métal  émaillé,  déjà  décrit  à  la 
page  45,  peut  aussi  servir  avantageusement  dans  ce  but. 


Nettoyage  et  désinfection  des  crachoirs.  —  Tous  les  cra- 
choirs, sauf  ceux  de  poche,  doivent  contenir  une  solution  sa- 
vonneuse qui  atténue  l'aspect  désagréable  produit  par  une  cer- 
taine quantité  de  crachats  dans  un  liquide  tel  que  l'eau  pure. 

La  recommandation  de  quelques  auteurs,  d'avoir  dans  tous 
Knopf.  Sanatoria.  20 


loi, 


UYGIEXE  Dl    SA.\.II()IUC'M 


les  crachoirs  une  solution  phéniquée,  esl  assez,  lionne  en  prin- 
cipe,  niais  pas  toujours  facile  à  suivre,  surtoul  en  ce  qui  con- 
cerne le  crachoir  de  poche.  L'odeur  de  l'acide  phénique  esl 
fatigante  pour  heaucoup  de  personnes;  d'autre  pari  les  ma- 
lades n'aiment  pas  a  attirer  l'attention  sur  eux,  même  si  l'odeur 
de  l'acide  phénique  ne  leur  esl  pas  désagréable. 

I  ne  solution  de  bichlorure  de  mercure  additionnée  d'un 
peu  d'acide  citrique  esl,  selon  moi,  préférable  pour  empê- 
cher li'  crachat  de  se  dessécher,  si  Ion  ne  veut  pas  se  servir  de 
I  eau  ordinaire  ou  du  vinaigre  de  bois. 

Tous  les  crachoirs  doivent  être  nettoyés  deux  ou  trois  l'ois 
par  jour;  il  y  en  aura  toujours  deux  séries,  pour  que  les  ma- 
lades n'en  soient  jamais  dépourvus.  Le  domestique  chargé  de 
recueillir  et  de  détruire  les  crachais  doit  être  muni  pendant 
ces  opérations  de  forts  gants  de  caoutchouc,  pour  se  protéger 
contre  toute  inoculation  possible. 

Chiffons  mouillés  et  mouchoirs  japonais.  —  Pour  les  ma- 
lades alités  et  trop  faibles  pour  faire  usage  d'un  crachoir  quel- 
conque, on  devrait  placer  prés  du  lit  des  chiffons  mouillés  ou 
du  papier  japonais  (mouchoirs  japonais).  Ces  objets  doivent 
être  enlevés  plusieurs  fois  par  joui1  et  jetés  au  feu.  Dans  le 
sanatorium  du  IV  Trudeau,  à  Saranac  Lake,  on  se  sert  aussi 
de  papiers  japonais  comme  mouchoirs  ordinaires,  et  on  les 
brûle  après  usage. 

Dans  mon  chapitre  sur  la  Prophylaxie  individuelle  p.  4*'1- 
j'ai  déjà  énuméré  les  précautions  (pie  les  malades  sont  obli- 
gés de  prendre  dans  l'emploi  des  mouchoirs  pour  éviter  la 
dissémination  des  bacilles,  ou  une  réinfection  (tuberculose 
nasale,  etc.)  ;  je  ne  reviendrai  donc  pas  sur  ce  sujet. 

Destruction  des  crachats.  —  Malgré  les  nombreux  pro- 
cédés dernièrement  vantés  pour  la  destruction  des  crachats, 
je  crois  qu'aucun  n'est  plus  simple  ni  plus  efficace  que 
celui  (pie  recommande  notre  maître,  M.  le  professeur  (iran- 
cher  (i). 


(i)  Gka>'chek.  Maladies  de  l'appareil  respiratoire,  1890,  \>    jS;. 


DÉSINFECTION  DU  SERVICE  DE  TABLE,  DES  LINGES,  ETC.  ioj 

Voici  ses  recommandations  textuelles  :  «  Les  crachats  des 
tuberculeux  doivent  être  reçus  dans  un  crachoir  humide,  et 
celui-ci  plongé  avec  son  contenu  dans  l'eau  bouillante.  Cela 
sullit.  Si  l'on  ajoute  à  cette  eau  un  peu  de  carbonate  de  soude, 
la  température  de  l'ébullition  atteint  ioa°  à  io3°  centigrades  et 
c'est  mieux,  car  le  crachoir  est  ainsi  lessivé,  et  la  désinfection 
encore  plus  certaine  ». 

Depuis  quelques  années,  M.  le  directeur  de  l'Assistance 
publique  de  Paris  a  déjà  l'ait  installer  plusieurs  services  de  dé- 
sinfection des  crachoirs  dans  différents  hôpitaux,  d'après  les 
indications  de  M.  le  professeur  Grancher. 

La  désinfection  par  le  sublimé  seul,  même  en  solution  forte, 
est  peu  efficace,  car  il  coagule  l'albumine  contenue  dans  les 
sécrétions,  produisant  ainsi  une  véritable  coque  protectrice 
autour  des  bacilles,  au  lieu  de  les  détruire.  Pour  empêcher 
cette  coagulation,  il  faut  employer  le  sublimé  en  combinaison 
avec  l'acide  tartrique  ou  l'acide  citrique.  Une  solution  d'acide 
phénique  à  5  p.  ioo  est  assez  forte  pour  détruire  les  bacilles 
de  Koch  dans  les  expectorations  et  dans  les  autres  sécrétions 
et  excrétions  (selles,  salive,  etc.).  Mais  il  faut  signaler,  comme 
excellent  agent  de  désinfection  des  crachats  tuberculeux,  le 
vinaigre  de  bois,  qui  semble  même  supérieur  à  l'acide  phé- 
nique. 

Les  cas  de  tuberculose  intestinale  demandent  une  désinfec- 
tion des  selles  sur  place. 

Dksiïsfectios  du  servick  de  table,  des  liîsges,  etc.  —  Le 
service  de  table  doit  être  changé  et  passé  à  l'eau  après  chaque 
repas.  Des  raisons  d'ordre  économique  pourraient  empêcher 
de  le  faire  dans  un  sanatorinm.  11  serait  donc  utile  de  rempla- 
cer les  serviettes  en  toile  par  le  papier  japonais,  qui  peut  être 
brûlé  après  usage.  On  éviterait  ainsi  l'accumulation  des  germes 
infectieux  que  la  salive  bacillifère  dépose  sans  cesse  sur  la  ser- 
viette. Les  cuillères,  fourchettes,  verres,  etc.,  doivent  égale- 
ment être  passés  à  l'eau  bouillante  après  chaque  emploi  ou 
stérilisés  dans  un  appareil  spécial  (vapeur  d'eau,  chaleur  sèche 
ou  vapeurs  de  formahléhyde). 

Les  linges  de  lit  et  les  linges  de  corps  devraient  être 
recueillis    soigneusement,  sans  être  secoués,  et  placés  immé- 


3o8  HYGIENE  Dr  SANATORIVM 

diatement  dans  une  solution  antiseptique  ou  dans  un  appareil 
stérilisateur. 

DÉSINFECTION  DES   CHAMBRES    PARIA    VAPEUR    DE    FORMALDEHYDE. 

—  Quoique  les  règles  relatives  à  l'emploi  des  crachoirs  poul- 
ies pensionnaires  soient  très  strictes,  la  désinfection  des 
chambres-  à  des  intervalles  réguliers  et  après  décès  n'en  est 
pas  moins  une  mesure  cpie  toute  administration  doit  considé- 
rer comme  un  devoir  absolu. 

.Nous  avons  sans  aucun  doute  dans  la  vapeur  de  formaldé- 
hyde  un  des  meilleurs  agents  pour  cette  désinfection.  La  Nor- 
mandie médicale  du  i .">  janvier  1897  contient  un  rapport  très 
intéressant,  lu  par  M.  le  Dr  C.  Nicolle  à  la  Société  normande 
d'Hygiène  pratique  dans  sa  séance  du  9  janvier  iS..>j-  et  portant 
pour  titre  :  «  Désinfection  des  locaux  par  les  vapeurs  d'aldé- 
hyde formique   procédé  de  M.  Trillat    ». 

Le  Dr  Nicolle  donne  d'abord  une  liste  des  cultures  patholo- 
giques en  expérience  : 

Staphylocoque  blanc; 

Bacterium  coli  ; 

Bacille  diphtérique  ; 

Bacille  de  Friedlânder  : 

Pus  d'ostéomyélite  à  staphylocoques; 

Crachats  tuberculeux,  etc. 

L'expérience  faite  au  laboratoire  de  bactériologie  a  porté 
sur  un  local  d'une  contenance  île  21S  ni'.  76. 

L'autoclave,  qui  est  à  garniture  intérieure  d'argent  <■[  muni 
d'un  tube  de  dégagement  très  long,  d'un  diamètre  de  1  milli- 
mètre environ,  avait  été  rempli  aux  doy[\  tiers  de  la  solution 
de  formochlorol  mélange  d'aldéhyde  formique  du  commerce 
et  de  chlorure  de  calcium',  les  écrous  bien  visses,  la  lampe 
à  pétrole  allumée.  En  une  demi-heure,  la  pression  intérieure 
était  de  trois  atmosphères  et  la  mise  en  marche  pouvait  avoir 
lieu. 

Le  résultat  île  cette  expérience  a  été  le  suivant  :  aucun  des 
microbes  soumis  au  contact  des  vapeurs  de  formaldéhyde  n'a 
résisté,  quelle  qu'ait  été  sa  situation  dans  le  local.  La  stérili- 
sation s'est  montrée  complète  dès  la   première  prise,  c'est-à- 


NETTOYAGE  SANS  BALAIS  NI  PLUMEAUX 


3og 


dire  vingt  minutes  après  l'arrêt  de  l'autoclave,  soit  une  heure 
et  demie  après  le  début  du  fonctionnement  de  celui-ci.  Ce 
point  est  des  plus  intéressants,  car  il  démontre  la  rapidité  de 
ce  procédé  de  désinfection. 

Glycoformal. —  D'après  les  expé- 
riences de  Walther  et  Schloss- 
mann  (i),  le  «  glycoformal  »  est  un 
mélange  de  4°  P-  I0°  de  formaldé- 
hyde  et  de  10  p.  100  de  glycérine, 
auquel  on  fait  traverser  un  appareil 
rempli  de  vapeur  d'eau.  Ce  «  glyco- 
formal »  aurait  l'avantage,  sur  la 
méthode  de  Trillat,  d'empêcher  la 
polymérisation  de  la  formaldéhyde. 

Je  n'ai  pas  encore  pu  me  procurer 
l'appareil  de  Walther-Schlossmann 
pour  répéter  leurs  expériences  et 
contrôler  les  résultats  annoncés. 

Nettoyage  sans  balais  ni  plu- 
meaux. —  Avant  de  terminer  ce  cha- 
pitre sur  l'hygiène  spéciale  du  sana- 
torium, il  n'est  peut-être  pas  inutile 
d'insister  encore  sur  quelques  dé- 
tails importants  au  point  de  vue  du 
nettoyage  des  chambres  des  phti- 
siques. Enlever,  dans  un  sanatorium, 
et  surtout  dans  la  chambre  du  ma- 
lade ou  en  présence  du  malade,  la 
poussière  de  façon  qu'elle  puisse  se 
répandre  et  être  ainsi  inhalée,  de- 
vrait être  considéré  comme  un  acte 
criminel.  Balais  et  plumeaux  doivent  être  bannis  d'un  sana- 
torium pour  phtisiques.  On  enlève  toutes  les  poussières  avec 
un  linge  humide.  Ce  genre  de  nettoyage  est  facile  à  réaliser 
avec    le    parquet   en    bois    nu   ou   recouvert  de  linoléum.  Le 


Fig.  73.  —  Autoclave  pour  géné- 
rer la  vapeur  de  formaldéhyde. 


(i)  Walther  et  Schlossm.vxx.  Berliner  Iclinische  Wochen.sch.rift,  20  juin  ij 


3io  HYGIÈNE  DC  SANATORIUM 

nettoyage,  L'arrangemeni  de  la  chambre,  l'aération  du  lit.  ont 
lieu  autant  que  possible  pendant  l'absence  du  malade-.  Si 
celui-ci  est  alité,  ce  travail  doit  se  faire  avec  ménagement  tant 
au  point  de  vue  du  bruit  que  des  secousses.  Il  est  bon  que 
tout  sujet  alité  ait  deux  lits,  placés  côte  à  côte,  pour  qu'il  puisse 
être  facilement  transporté  de  l'un  dans  l'autre.  On  peut  ainsi 
donner  aux  lits  du  malade  une  bonne  aération;  c'est  un  grand 
avantage,  et  qui  ajoute  beaucoup  au  confort  du  patient. 


CHAPITRE  XV 
L'aérothérapie  dans  le  traitement  de  la  phtisie  pulmonaire. 

Rejios  prolongé  sur  la  chaise  longue. 

Dans  notre  chapitre  sur  l'Historique  de  la  question,  nous 
avons  longuement  parlé  de  la  valeur  que  les  anciens  théra- 
peutes attribuaient  à  l'air  pur  comme  facteur  curatif  de  la 
phtisie,  et  tous  les  maîtres  de  notre  temps  sont  d'accord  sur 
cette  question. 

Dodieau,  sous  l'inspiration  de  Peter,  présentait,  le  21  no- 
vembre 1889,  une  thèse  sur  l'aération  continue  dans  les  hôpi- 
taux et  concluait  son  travail  par  cette  phrase  significative  : 
«  Puisque,  à  Paris  et  dans  un  hôpital  où  l'on  ne  dispose 
que  de  moyens  restreints,  nous  avons  eu  des  résultats  satis- 
faisants, à  plus  forte  raison  pourrait-on  en  obtenir  dans  des 
établissements  spéciaux.  » 

Il  existe  de  nombreux  ouvrages  et  communications  recom- 
mandant la  cure  à  l'air  libre  pour  les  phtisiques.  Voici  ses 
défenseurs  les  plus  ardents  en  France  :  Bouchard,  Debove, 
Graneher,  Dieulafoy,  Letulle,  Constantin  (Paul),  Daremberg, 
Oulmont,  etc.;  en  Allemagne,  ce  sont:  von  Leyden,  Gerhardl, 
Pentzohl  ;  en  Russie  :  Unterberger,  Pavlowskoja  ;  en  Amé- 
rique :  Flint,  Loomis,  Jacobi,  A.Smith,  Janevvay,  Osier,  Davis. 
De  nombreuses  autres  sommités  médicales  de  tous  les  pays 
voient  aujourd'hui  dans  l'aérothérapie  un  des  plus  puissants 
moyens  de  traitement  de  la  phtisie  pulmonaire. 

Hermann  Weber  (de  Londres),  phtisio-thérapeute  des  plus 
autorisés,  s'exprime  de  la  façon  suivante  (1)  : 


(1)   Hermann    Weber.    Climatothérapie.    Traduit  par  Doyon   et   Spillmann, 
86,  p.  266. 


lia  TH.  I ITEMENT  PAR  L  A  ÊRO  TllliRA  PIF. 

Nous  devons  songer  que  nous  avons  affaire  à  des  surfaces 
irritées,  ulcérées,  en  voie  de  suppuration,  qui  sont  très  sen- 
sibles à  la  moindre  impureté  de  l'air  et  qui  guérissent  plus 
Facilement  dans  un  air  pur  et  aussi  aseptique  que  possible. 

L'air  prit  est  contraire  aux  associations  microbiennes.  — 
On  s'explique  la  disparition  de  la  lièvre  des  tuberculeux, 
après  un  court  séjour  dans  un  sanatorium  situe  dans  une 
atmosphère  pure,  par  l'absence  presque  totale  de  streptocoques 
et  de  staphylocoques. 

Ces  microorganismes  sont  très  abondants  dans  l'atmosphère 
des  chambres  de  nos  malades  libres  ;  ils  se  trouvent  presque 
toujours  associés  dans  les  poumons  des  phtisiques,  et  c'esl 
cette  association  microbienne  qui  est  la  cause  de  ces  fièvres 
hectiques  si  fréquentes  chez  les  tuberculeux. 

Une  des  premières  conditions  de  l'aérothérapie  doit  être  la 
réglementation  de  l'usage  de  l'air  :  il  faut  habituer  graduelle- 
ment le  malade  à  l'influence  excitante  d'un  séjour  prolongé  à 
l'air  et  à  la  lumière,  surtout  si  le  sujet  vient  de  quitter  la 
chambre,  en  ville.  Le  h  jour  médical  »  doit  donc  être  réglé 
par  le  médecin,  avec  la  même  prudence  que  s'il  s'agissait  d'un 
médicament  puissant,  mais  dangereux  lorsqu'il  est  ordonné  au 
delà  de  la  dose  thérapeutique. 

L'aérothérapie  pour  les  malades  fiévreux.  —  D'après  la 
grande  expérience  de  Dettweiler,  le  meilleur  moyen  d'habi- 
tuer le  malade  à  l'air  est  de  l'y  exposer  étant  couché. 

Les  patients  affaiblis  restent  étendus  dans  leur  lit,  qui  est 
placé  sur  le  balcon  communiquant  avec  les  chambres,  jusqu'à 
ce  qu'ils  aient  repris  des   forces  et  qu'ils  puissent  descendre. 

Quelques  médecins  dirigeant  des  sanatoria  obligent  tous  les 
malades  fébricitants  à  rester  au  lit  ;  d'autres  leur  permettent 
«le  faire  la  cure  sur  la  chaise  longue,  mais  avec  défense  abso- 
lut.' de  se  lever.  Je  crois  qu'en  règle  générale  il  n'y  a  aucun 
inconvénient,  mais  qu'il  est  plutôt  avantageux  de  laisser 
un  phtisique  modérément  l'ébricitaut  étendu  sur  sa  chaise 
longue  à  l'air  libre,  pendant  un  temps  limité.  Pouvons-nous 
permettre  à  nos  malades  de  faire  leur  cure  sur  la  chaise 
longue,   l'été    et   l'hiver,    qu'il    fasse    beau  ou   mauvais  temps. 


JOCR  MÉDICAL  3i3 

qu'il  neige  ou  qu'il  pleuve,  qu'il  fasse  du  venl  ou  que  l'air  soit 
calme  ?  D'une  manière  générale,  nous  répondons  :  «  Oui,  tous 
les  temps  sont  bons  pour  la  cure  à  l'air  libre  sur  la  chaise 
longue,  et  peut-être  ne  faut-il  faire  exception  que  pour  les 
vents  trop  forts  ou  trop  froids.  >> 

Cette  restriction  faite,  il  n'y  a  guère  de  temps  qui  ne  permette 
à  la  majorité  des  malades  de  faire  leur  cure.  C'est  un  des  plus 
grands  mérites  de  Dettwciler,  et  de  ses  élèves  Meissen  et 
Blumenfeld  (i),  d'avoir  démontré  que  les  conditions  météo- 
rologiques, avec  leur  diversité  dans  nos  zones  tempérées, 
sont  presque  sans  influence  sur  la  marche  de  la  phtisie  pul- 
monaire, et  que  la  cure  à  l'air  libre  dans  les  établissements 
fermés  —  ou  ailleurs,  si  le  malade  peut  être  constamment  sur- 
veillé par  le  médecin  —  est  possible    pendant    toute    l'année. 

«  Jour  médical  »  et  accoutumance  aux  variations  de  la  tem- 
pérature. —  Combien  de  temps  faut-il  laisser  le  malade  à 
l'air?  Toujours,  même  la  nuit. 

Et  son  «  jour  médical  »,  c'est-à-dire  son  séjour  à  l'air  libre  ? 
Celui-ci  est  «  dosé  »,  comme  nous  le  disions  plus  haut,  par  le 
médecin.  Mais  l'accoutumance  à  laquelle  on  peut  arriver  par 
un  dosage  judicieux  est  vraiment  étonnante. 

Voici  l'expérience  de  Dettweiler  : 

«  Malgré  la  pluie,  les  brouillards,  les  vents  et  la  neige,  mal- 
gré un  froid  dépassant  parfois  —  120,  très  souvent  sans  soleil, 
les  malades  ont  des  «  jours  médicaux  »  de  7  à  10  heures, 
quelques-uns  même  de  1 1  heures.  » 

M.  Andvord  (de  Tonsaasen,  Norvège)  nous  écrit  qu'il  a  pro- 
longé le  «  jour  médical  »  jusqu'à  5,  7  et  même  9  heures,  par 
une  température  de  a50  centigrades  au-dessous  de  zéro. 

C'est  à  cette  cure  permanente  à  l'air  pur  (Dauerluftkur) , 
que  l'on  doit  attribuer  les  bonnes  statistiques  des  sanatoria 
qui  ont  adopté  cette  méthode. 

Où  doit  se  faire  cette  cure  sur  les  chaises  longues  (Liege- 
Jcur  des  Allemands)?  Surtout  sous  la  grande  véranda  exposée 


(1)  Blumenfeld.  De  linlluence  des  phénomènes  météorologiques  sur  le  cours 
de  la  Phtisie  pulmonaire  bacillaire.  Wurtzbourg,  1892.  Traduit  par  Beaulavon 
in  Revue  de  la  Tuberculose,  déc.  1894. 


il  i  TRAITEMENT  PAR  L'AEROTUERAPIE 

au  sud  ou  au  sud-ouest,  spécialement  construite  pour  cela. 
Chaque  patient  a  sa  chaise  longue  à  lui,  sa  petite  table,  ou  de 
plus, comme  au  Canigou,  son  petit  pupitre.  Au  mur  sont  accro- 
chées des  lampes  pour  que  le  malade  puisse  lire,  s'il  prolonge 
la  cure  dans  la  soirée.  Un  infirmier  veille  constamment  pour 
pouvoir  répondre  aux  sonnettes  électriques  qui  se  trouvent  à 
côté  de  chaque  chaise  longue. 

Protection  i>e  la  tète  contre  le  soleil.  —  La  petite  véranda 
communiquant  avec  les  chambres  à  coucher,  dont  nous  avons 
déjà  parlé  dans  la  description  de  notre  sanatorium  idéal,  peut 
également  servir  pour  placer  les  chaises  longues  en  cas  de 
nécessité.  De  plus,  les  pavillons  tournants  peuvent  être  uti- 
lisés pour  la  cure  à  l'air.  .Mais,  si  les  rayons  i\u  soleil  tom- 
bent directement  sur  les  vérandas  et  que  leur  profondeur  ne 
sullise  pas  à  garantir  les  malades,  ceux-ci  doivent  se  protéger 
en  laissant  tomber  les  rideaux  devant  les  galeries,  ou  en  allant 
se  reposer  dans  les  petits  salons  situes  derrière  ces  galeries. 
Ils  peuvent  encore  se  rendre  dans  le  pavillon  de  récréation. 
qui  est  construit  de  façon  à  abriter  les  malades  contre  le 
vent  ou  contre  le  soleil,  sans  qu'ils  perdent  le  bénéfice  de 
l'air  libre. 

Pour  ci'  qui  est  d'exposer  aux  rayons  directs  du  soleil  les 
malades  au  repos,  nous  sommes  absolument  de  l'avis  de 
M.  Sabourin,  qui  voit  là  des  conditions  capables  d'entretenir 
la  fièvre  et  même  de  la  provoquer  chez  ceux  qui  ne  Font  pas, 
sans  compter  les  autres  accidents  imputables  aux  rayons 
solaires. 

DANGER     DE     LA     POSITION      DEMI-ASSISE      TIK>1>     PROLONGEE.      

D'après  les  recommandations  de  Dettweiler,  les  malades  res- 
tent demi-assis  avec  les  jambes  allongées.  Ici  le  célèbre  pro- 
moteur de  cette  excellente  méthode  me  pardonnera  si  je  me 
permets  d'avancer  qu'il  me  semble  utile  de  faire  alterner  de 
temps  en  temps  le  repos  soit  avec  un  peu  d'exercice  simple 
promenade,  exercice  respiratoire),  soit  avec  le  décubitus  dor- 
sal ou  la  position  couchée  sur  l'un  ou  l'autre  cote  du  corps. 
Plusieurs  raisons  me  font  insister  pour  que  la  cure  de  repos. 
c'est-à-dire  la  position  demi-assise,  le  dos  restant  appuyé 
contre  le    dossier  à  une  inclinaison   de   45   degrés,  ne  soit   pas 


LIT  DE  CAMP  DU  D'   WEICKER  3i  5 

trop  prolongée.  D'abord  il  y  a  danger  évident  d'une  hypostase 
des  poumons,  ce  qui  s'observe  fréquemment  dans  les  cas  où  les 
malades  font  durer  la  cure  de  repos  trop  longtemps  et  sans 
interruption.  Ensuite  le  contact  prolongé  du  dos  avec  le  dossier 
rembourré  produit  une  température  locale  plus  élevée,  et  une 
tendance  à  s'enrhumer  plus  facilement.  Les  sujets  qui  suivaient 
ce  traitement  me  disaient  souvent  que,  dès  qu'ils  quittaient 
leur  chaise  lono-ue,  ils  avaient  froid  dans  le  dos.  Je  recommande 
donc  que  la  cure  de  repos  soit  interrompue  toutes  les  demi- 
heures,  soit  par  une  courte  promenade,  soit  par  des  exercices 
respiratoires  sur  lesquels  j'insisterai  plus  loin,  soit  par  le  chan- 
gement de  position  selon  la  condition  et  la  force  du  malade. 

Construction  d'une  chaise  longue.  —  Comment  doit  être 
construite  une  chaise  longue,  destinée  à  servir  au  repos  pro- 
longé ?  Les  matériaux  importent  peu  ;  Dettweiler  recom- 
mande la  canne  de  bambou.  La  forme  est  la  même  dans  pres- 
que tous  les  sanatoria  :  dossier  fixe  à  inclinaison  de  4->° '•  Ho- 
henhonnef  possède  un  modèle  avec  dossier  dont  on  peut  faire 
varier  l'inclinaison. 

A  mon  avis,  les  chaises  longues  pour  la  véranda  doivent 
être  construites  de  façon  que  le  malade  puisse  lui-même,  ou 
avec  l'aide  d'un  infirmier,  passer  de  la  position  assise  au  décu- 
bitus dorsal. 

Le  siège  doit  former  une  légère  courbe  afin  que  les  jambes 
reposent  commodément  et  que  le  corps  ne  glisse  pas.  Deux 
bras  soutiennent  les  coudes  du  malade.  J'ai  dessiné  dans  le 
coin  de  la  véranda  de  mon  sanatorium  idéal  une  chaise-longue 
avec  un  matelas  qui  doit  toujours  être  placé  sur  le  siège  pour 
que  le  malade  puisse  supporter  plus  facilement  la  cure  de  repos. 

Nous  venons  de  dire  que  cette  cure  d'air  sur  la  chaise- 
longue  doit  se  faire  surtout  sous  la  grande  véranda  exposée  au 
Sud  ou  au  Sud-Ouest;  mais  il  n'y  a  aucun  inconvénient  (c'est 
même  un  avantage  s'ils  ne  sont  pas  trop  faibles)  à  ce  que  les 
malades  effectuent  en  temps  agréable  leur  cure  de  repos  dans 
le  parc  ou  le  bois  voisin  du  sanatorium. 

Lit  de  camp  du  Dr  Weicker.  —  Pour  cette  cure  de  repos  en- 
tièrement à  l'air,  libre,  le  lit  de  camp  imaginé  par  le  D1  Weic- 


ii6  TRAITEMENT  l'Ail  L'AÊROTUÉRAPIE 

ker,  peu  coûteux  et  facile  à  transporter  et  à  manipuler,  est  à 
recommander.  C'est  un  lit  constitué  par  vin  cadre  en  fer,  pou- 
vant se  plier  eu  trois  et  supporté  par  quatre  pieds.  Sur  ce 
cadre  est  tendue  une  simple  toile;  si  l'on  veut  transformer  le 
lit  en  chaise  longue,  il  sut  lit  de  relever  plus  ou  moins  une  des 
extrémités  qui  vient  former  dossier. 

Les  malades  reposant  sur  les  chaises  ou  sur  les  lits  de  camp 
doivent  être  toujours  confortablement  enveloppés.  C'est  un 
des  devoirs  les  plus  importants  de  l'infirmier  de  garde  de  veiller 
à  ce  que  le  malades  ne  se  découvrent  pas  pendant  le  sommeil. 
Des  boules  d'eau  chaude,  placées  aux  pieds,  peuvent  être  em- 
ployées en  hiver.  Mais  le  nombre  même  des  couvertures  doit 
être  réglé,  et  les  malades  doivent  être  protégés  autant  contre 
les  causes  qui  les  font  transpirer  ou  les  rendent  susceptibles 
aux  changements  de  température,  que  contre  les  refroidisse- 
ments brusques  et  les  rhumes  intercurrents. 

Le  malade  doit  être  étendu  sur  une  chaise  longue  dans  une 
position  qui  facilite  une  résolution  musculaire  aussi  complète 
cpie  possible,  de  façon  à  épargner  toute  dépense  de  force.  Ce 
repos  à  l'air  pur  et  frais  peut  être  réglé  par  le  médecin  de 
manière  à  constituer  presque  un  repos  absolu,  et  à  devenir 
ainsi  l'adjuvant  le  plus  précieux  dans  le  traitement  de  la 
fièvre. 

Aération  des  chambres  de  malades. 

Ventilation;  aérothérapie  pendant  la  nuit.  —  La  cure  d'air 
du  phtisique  doit  être  continuée  sans  interruption  jour  et  nuit. 
Dans  notre  description  du  sanatorium  idéal,  nous  avons  parlé 
de  la  bonne  ventilation  de  tous  les  appartements  où  logent 
les  phtisiques  ;  il  n'est  donc  guère  nécessaire  d'insister  de 
nouveau  ici  sur  le  fait  que  les  fenêtres  des  chambres  de  tuber- 
culeux doivent  rester  ouvertes  ou  entr'ouvertes  toute  la  nuit 
en  n'importe  quelle  saison.  S'il  y  avait  trop  d'air,  il  serait  bon 
d'entourer  le  lit  d'un  paravent. 

Quand  il  fait  froid,  il  est  nécessaire  de  chauffer  la  chambre, 
pour  que  la  température  ne  descende  jamais  au-dessous  de 
-f-  io°  C.  L'aération  continue  n'empêche  nullement  le  chauffage 
de  la  chambre. 


EXERCICES  RESPIRATOIRES  3i  7 


Exercices  respiratoii'es. 

Quelques  phtisio-thérapeutes  n'attachent  aucune  importance 
à  cette  partie  du  traitement,  d'autres  peu,  et  quelques-uns 
beaucoup.  Je  me  rallie  volontairement  à  l'opinion  des  maîtres 
et  praticiens  qui  considèrent  les  exercices  respiratoires  comme 
une  chose  particulièrement  importante  dans  le  traitement  géné- 
ral d'un  phtisique.  Ces  exercices  sont  indiqués  dans  presque 
tous  les  cas.  Nombreuses  sont  les  recommandations,  les  moyens 
et  les  appareils  pour  apprendre  à  un  tuberculeux  à  respirer,  mais 
tous  ont  le  même  but  :  i°  augmenter  le  champ  de  l'hématose  ; 
20  développer  les  muscles  respiratoires  ;  3°  dissoudre  les 
mucosités  accumulées  dans  les  voies  respiratoires  superficielles 
et  profondes  ;  4°  faciliter  l'expectoration  et  diminuer  ainsi  les 
sensations  dvspnéiques. 

J'ai  essayé,  sur  quelques  malades  et  sur  moi-même,  les 
méthodes  et  les  appareils  habituellement  employés,  mais  j'en 
suis  revenu  à  ce  qui  est  le  plus  simple,  c'est-à-dire  à  la  sup- 
pression de  tout  appareil. 

Dans  notre  chapitre  sur  le  «  Traitement  préventif  de  la  phtisie 
pulmonaire  »,  nous  avons  décrit  un  exercice  respiratoire  que 
je  recommande  aux  prédisposés,  aux  anémiques,  à  tous  les 
enfants  et  adultes  dont  la  respiration  est  défectueuse,  et  aussi 
aux  phtisiques  ;  mais,  pour  ces  derniers,  avec  les  gradations  ou 
les  modifications  que  leur  cas  comporte  et  dont  nous  allons 
parler  à  présent. 

Exercice  I  (pour  malades  alités).  —  Tout  d'abord,  et  surtout 
si  le  malade  n'a  jamais  fait  d'exercices  respiratoires,  ou  s'il 
est  alité,  on  procède  de  la  façon  suivante  :  l'infirmier  place  un 
petit  oreiller  ou  coussin  sous  le  dos,  de  façon  à  réaliser  la 
«  position  de  Sylvester  »  ;  cette  position  est  la  même  qui  est 
employée  pour  faciliter  la  respiration  artilicielle  chez  les 
asphyxiés  et  les  noyés. 

Le  malade  étant  préalablement  avisé  qu'il  doit  toujours  res- 
pirer par  le  nez,  prend  une  forte  inspiration  de  bas  en  haut, 
retient  l'air  pendant  quelques  instants,  puis  il  fait  une  expira- 
tion, suivie  immédiatement  d'un  second  effort  expiratoire. 


ii8 


TRAITEMENT  l'Ali  L'AEROTHERAPIE 


Ce  deuxième  effort  expiratoire  est  eflicacemenl  aidé  par  la 
supination  des  bras  en  les  pressant  contre  le  thorax.  Sur  la 
valeur  de  ce  deuxième  effort  expiratoire,  au  moyen  duquel 
une  plus  grande  quantité  d'air  de  réserve  se  trouve  expulsée, 
laissant  de  la  place  pour  la  rentrée  d'un  volume  plus  grand  d'air 
Irais,  nous  nous  sommes  longuement  expliqué  plus  haut;  nous 


cX* 


Fig.  jli.  —  Exercices  respiratoires  III  et  IV. 

n'y  insisterons  donc  pas  ici.  L'inspiration  protonde  de  lias  en 
haut,  recommandée  aussi  par  M.  Sabourin,  a  pour  but  d'am- 
plifier d'abord  les  régions  inférieure  et  moyenne  de  la  poitrine 
pour  ne  dilater  et  élever  la  partie  supérieure  qu'à  la  fin  de 
l'inspiration. 

Exercice  II.  —  Connue  deuxième  exercice,  j'apprends  à  mes 
malades  à  faire,  dans  la  position  assise  ou  debout,  les  mouve- 
ments respiratoires  que  voici  :  pendant  l'inspiration  le  malade 
exécute  une  rotation  de  l'articulation  scapulo-humérale  en 
arrière;  il  garde  l'air  pendant  quelque  temps  dans  cette  position. 


EXERCICES  RESPIRA  T01RES 


jig 


avant  la  poitrine  bien  projetée  en  avant,  puis  l'ait  son  expiration 
pendant  la  rotation  en  avant,  suivie  également  de  l'expulsion 
forcée.  Cet  exercice  est  le  même  que  nous  avons  conseillé, 
dans  le  traitement  préventif,  aux  prédisposés  qui  veulent  éviter 
que  les  mouvements  des  bras  n'attirent  l'attention  sur  eux. 

Exercice  III.  —  Le  troisième  exercice  est  le  suivant  :  debout, 
la  bouche    restant   fermée,    on   fait   une    inspiration   lente,    en 


Fig.  77  et  78.  —  Exercices  respiratoires  A*  et  VI. 

soulevant  lentement  les  bras  et  les  écartant  jusqu'à  l'horizon- 
tale; on  garde  l'air  pendant  quelques  instants;  l'expiration  se 
fait  un  peu  plus   rapidement  pendant  l'abaissement  des  bras. 

Exercice  IV.  —  Le  quatrième  exercice  diffère  du  précédent 
seulement  en  ce  qu'on  élève  les  bras  au-dessus  de  la  tète 
jusqu'à  ce  qu'ils  se  rencontrent  ;  l'expiration  et  l'abaissement 
des  bras  se  font  de  la  même  façon. 


Exercice  Y.  —  Le  cinquième  exercice  est  celui  que  j'ai  déjà 


3ao  TRAITEMENT  PAR  L'AEROTUERAPIE 

décrit  (p.    120)  dans  le  chapitre  du  «  Traitement  préventif  ».  11 
est  à  recommander  aussi  aux  phtisiques  en  voie  de  guérison. 

Exercice  VI.  —  Pour  l'explication  du  sixième  exercice  iles- 
liné  à  corriger  l'attitude  courbée  que  l'on  rencontre  souvent 
à  un  degré  encore  plus  prononcé  chez  les  tuberculeux  que 
chez  les  jeunes  gens  seulement  prédisposés,  nous  renvoyons 
aussi  nos  lecteurs  à  la  description  de  cet  exercice  (voy.  p.  121). 

Règle  générale.  —  Comme  nous  l'avons  déjà  écrit  à  propos 
des  <<  prédisposés  »,  les  exercices  respiratoires  devraient  tou- 
jours avoir  lieu  à  l'air  libre,  ou  au  moins  devant  une  fenêtre 
ouverte  ;  mais  pour  un  phtisique  en  traitement  il  y  a  une  autre 
r.ègle  importante  à  suivre:  ne  jamais  faire  les  exercices  respi- 
ratoires en  état  de  fatigue,  ni  jamais  jusqu'à  ce  que  le  sujet 
soit  fatigué.  Le  médecin  doit  prescrire  les  exercices  respira- 
toires et  surveiller  leurs  effets  comme  il  ordonne  des  médica- 
ments et  note  leur  action.  La  même  surveillance  médicale  est 
nécessaire  pour  les  promenades.  Les  exercices  respiratoires 
se  font,  par  exemple,  au  nombre  de  6  à  ()  tous  les  200  pas.  Sur 
les  chaises  longues  le  malade  peut  exécuter  le  même  nombre 
d'exercices  toutes  les  dix  minutes  (exercice  II)  et  se  lever  toutes 
les  demi-heures  pour  en  faire  quelques-uns  debout  (exer- 
cices III,  IV  ou  V). 

Exercices  respiratoires  dans  la  symphyse  pleurale.  — 
Chez  les  tuberculeux  ayant  des  adhérences  pleurales,  et  sur- 
tout quand  la  symphyse  pleurale  est  étendue,  ces  exercices  et 
les  ascensions  graduées,  prudemment  dirigées  et  faites  régu- 
lièrement, ont  une  très  grande  valeur.  Les  adhérences  se  déta- 
chent peu  à  peu,  mais  il  est  vrai  que  ce  n'est  pas  sans  douleur. 

Le  médecin  ne  négligera  pas  d'expliquer  au  malade  d'où 
lui  viennent  ces  douleurs  :  c'est  là  le  plus  sur  et  le  meilleur 
calmant. 

Peu  à  peu,  l'habitude  d'exécuter  les  exercices  respiratoires 
deviendra  une  nécessité  pour  beaucoup  de  malades,  et  les 
efforts  de  toux  disparaîtront. 

Souvent  on  peut  voir  que  les  exercices  respiratoires  pro- 
curent au  malade  non  seulement  un  soulagement,  mais  un 
véritable  plaisir. 


PROMENADES  GRADUÉES  3?.I 


Promenades  graduées. 

Les  promenades  graduées,  l'exercice  modéré  se  font  toujours 
à  l'air  libre,  sauf  par  les  temps  qui  ne  le  permettent  pas  sans 
risque  pour  les  malades.  Ici  encore  je  me  permets  de  dire 
que  la  combinaison  des  deux  systèmes,  européen  et  américain, 
adoptée  dans  mon  sanatorium  idéal,  offre  le  très  grand  avan- 
tage suivant.  Les  longues  galeries  de  3o  mètres,  réunissant 
les  pavillons  entre  eux,  sont  un  endroit  très  commode  que  l'on 
peut  chauffer,  où  les  malades  ont  assez  d'espace  pour  effectuer 
leur  cure  lorsqu'il  fait  mauvais  temps. 

Les  allées  graduées,  dans  le  jardin  ou  dans  le  parc,  doivent 
être  tracées  de  façon  à  offrir  une  pente  variant  de  i  mètre 
pour  ioo  mètres  à  i  mètre  pour  20  mètres.  Autrefois,  au 
temps  de  Brehmer,  on  attachait  beaucoup  plus  d'importance 
aux  exercices  à  l'air  libre,  surtout  dans  une  atmosphère  raré- 
fiée qui,  d'après  lui,  avait  le  pouvoir  de  renforcer  «  le  petit 
cœur  »  des  phtisiques. 

La  cure  par  le  repos  (de  Dettweiler)  a  été  une  heureuse  mo- 
dification de  la  thérapeutique;  néanmoins  aujourd'hui  encore 
ces  promenades  progressives  sont  un  adjuvant  précieux  et 
important  dans  le  traitement  de  la  phtisie. 

Précautions  a  prendre.  —  Voici,  à  mon  avis,  les  principes 
qu'il  convient  d'appliquer  dans  le  règlement  des  promenades  : 

D'une  manière  générale,  ne  jamais  marcher  jusqu'à  la 
fatigue;  aller  toujours  à  pas  lents,  avec  des  arrêts  fréquents, 
sans  s'asseoir  ;  ne  jamais  marcher  s'il  y  a  de  la  fièvre. 

Pendant  la  belle  saison,  les  malades  peuvent  se  reposer 
sur  les  bancs  placés  dans  les  jardins  ou  dans  le  parc  ;  s'il  fait 
mauvais  temps,  surtout  s'il  fait  humide,  les  promenades  doivent 
être  abrégées,  de  façon  que  les  malades  puissent  rentrer  au 
sanatorium  sans  être  fatigués. 

Quand  le  sujet  est  en  état  de  faire  une  ascension  d'une 
plus  longue  durée,  ou  une  véritable  excursion,  il  est  bon  de 
commencer  en  choisissant  les  chemins  qui  vont  du  sanatorium 
vers  les  endroits  d'une  altitude  plus  élevée.  Lorsqu'il  se  sent 
fatigué   il  se  repose  un  peu,  et  rentre  au  sanatorium  en  des- 

Kxopf.  Sanatoria.  21 


îaa  TRAITEMENT  l'Ait  VAEROTBERAPIE 

cendant  <'t  sans  fatigue.  Ainsi  on  évite  le  surmenage  du  cœur 
et  ses  conséquences  fâcheuses. 

«  Pendant  les  promenades,  les  phtisiques  ont  soin  de  tou- 
jours emporter,  —  et  la  recommandation  est  plus  stricte  en 
été  qu'en  hiver,  —  un  manteau  de  laine  léger  (macfarlane, 
plaid,  etc.),  facile  à  porter  sur  le  bras  et  à  endosser  (i).  Le 
malade  devra  s'en  couvrir  toutes  les  l'ois  qu'il  s'arrêtera  sur 
un  banc  pour  se  reposer  ;  il  devra,  au  contraire,  être  assez 
légèrement  vêtu  pendant  la  marche,  pour  éviter  la  sueur.  » 
(Beaulavon.) 

De  petits  kiosques  ou  pavillons  mobiles  placés  de  distance 
en  distance  sur  le  chemin  à  parcourir  sont  parfois  très  utiles, 
en  offrant  en  cas  d'orage,  ou  si  un  temps  d'arrêt  devient  néces- 
saire, un  abri  où  le  malade  peut  se  reposer. 

Traitement  dans  le  cas  ou  le  malade  revient  en  transpira- 
tion. —  11  y  a  défense  absolue  île  se  reposer  ou  de  s'asseoir 
en  chemin  si  le  temps  est  humide  ou  froid. 

Le  malade  doit  toujours  veiller  sur  lui-même  pendant  les 
promenades;  il  doit  apprendre  a  ne  pas  marcher  jusqu'à  la 
fatigue,  et  la  moindre  sensation  de  dyspnée  ou  de  palpitations 
cardiaques  doit  lui  enseigner  où  il  devra  s'arrêter  la  pro- 
chaine fois.  Ces  ascensions  réglées,  ces  promenades  graduel- 
lement prolongées  servent  autant  au  développement  du  tonus 
cardiaque  qu'elles  sont  bienfaisantes  par  leurs  effets  sur  les 
fonctions  respiratoires.  Si,  malgré  ces  instructions  précises,  le 
malade  s'aperçoit  qu'il  transpire,  il  doit  se  hâter  de  rentrerai! 
sanatorium,  se  mettre  au  lit,  sonner  l'infirmier,  qui  lui  fera  une 
bonne  friction  à  sec,  autant  que  possible  sans  le  découvrir;  il 
recevra  une  boisson  chaude  avec  une  quantité  de  cognac 
déterminée  et  attendra  l'arrivée  du  médecin. 

Celui-ci  ne  lui  laissera  pas  quitter  le  lit  tant  (pie  tout  danger 
de  refroidissement  ne  sera  pas  écarté  ;  car  il  ne  faut  pas  ou- 
blier que  personne  n'est  plus  exposé  aux  catarrhes  naso- 
pharyngiens  ou  laryngiens  (pie  les  phtisiques,  et,  comme  le 
disait  Detlweiler,  «  tous  les  catarrhes  des  voies   respiratoires 


(i)  Je   recommande   une   simple   petite   pèlerine-waterproof.  Un  tel  vêtement 

est  à  la  lois  léger  et  imperméable 


C A  BISET  PNEUMATIQUE  3 2  3 

supérieures  ont  chez  les  phtisiques  une    tendance   toute  par- 
ticulière à  s'enfoncer  dans  les  voies  profondes  ». 

Exercices  pour  les  tuberculeux  fiévreux.  —  La  tempéra- 
ture d'un  phtisique  est  le  guide  du  médecin  pour  ordonner  la 
distance  et  la  durée  des  promenades.  Dareinberg  donne  des 
indications  précises  à  ce  sujet  lorsqu'il  dit  :  «  Quand  un  tuber- 
culeux n'a  pas  de  fièvre,  il  peut  fort  bien  marcher  une  heure 
le  matin  et  deux  heures  l'après-midi.  Mais  s'il  a  de  la  fièvre  le 
soir,  il  devra  faire  la  cure  d'air  au  repos,  sur  la  chaise  longue, 
depuis  le  déjeuner  jusqu'au  coucher  du  soleil.  Le  matin  il 
pourra  faire  une  promenade  d'une  demi-heure,  selon  l'état  de 
ses  forces  ;  le  phtisique  doit  toujours  se  reposer  avant  qu'il 
sente  la  fatigue.  Si  après  une  promenade  matinale  il  constate 
que  sa  température  a  été  plus  forte  dans  l'après-midi,  le 
lendemain  il  fera  la  cure  au  repos  pendant  toute  la  jour- 
née. Le  phtisique  ne  doit  jamais  marcher  pendant  les  deux 
ou  trois  heures  qui  précèdent  le  moment  de  la  fièvre  vespé- 
rale. 

Les  tuberculeux,  même  ceux  qui  ont  les  apparences  de  la 
guérison,  ne  doivent  pas  se  fatiguer.  S'ils  marchent  quatre  ou 
cinq  heures  par  jour,  s'ils  font  de  grandes  excursions,  ils 
éprouvent  des  rechutes,  des  hémoptysies,  des  congestions 
broncho-pulmonaires  quelquefois  mortelles  (i)  ». 

Notre  expérience  relative  aux  tuberculeux  fébricitants  con- 
corde avec  celle  de  cet  éminent  phtisio-thérapeule.  Il  nous  est 
arrivé  assez  souvent  de  pouvoir  combattre  des  élévations  de 
température  considérables  soit  par  le  repos  absolu,  soit  par 
un  meilleur  ménagement  des  forces  de  nos  malades. 


Cabinet  pneumatique. 

Cet  appareil,  encore  relativement  peu  connu  et  peu  employé 
en  Europe,  a  trouvé  en  Amérique  beaucoup  de  défenseurs, 
et   la  littérature    est    assez   vaste  à    ce   sujet.    Hougliton   (2), 


(1)  Dark.miîekg,  Loc.  cit. 

(■1)  A. -F.  Houghton.  Journal  ofthe  American  Med.  Association,   i885,  7  nov. 


ta4  III  Al  TEME.X  f  l'A  R  L AÉHO  TUERA  PIE 

Jensen  (i),  Williams  {■>.),  Bowditch  (3),  Fox  (4),  Platt  (5),  Ket- 
chum  (6),  Westbrook  (7),  Hudson  (8),  Quimby  (9),  ont  décrit 
cet  appareil,  ses  divers  modes  d'emploi  et  les  effets  qu'il  pro- 
duit. 

Description  du  cabinet.  — ■  Comme  le  montre  la  gravure 
que  je  joins  à  ma  description,  le  cabinet  pneumatique  ressem- 
ble à  un  coffre-fort  d'une  hauteur  de  im,66,  d'une  largeur  de 
(S.")  centimètres,  d'une  profondeur  de  ;.">  centimètres  et  assez 
spacieux  pour  qu'un  homme  puisse  s'asseoir  commodément  à 
l'intérieur.  A  la  partie  antérieure  est  enchâssé  un  grand  car- 
reau de  verre  par  lequel  l'opérateur  peut  surveiller  le  malade. 
Au  milieu  de  ce  carreau  se  trouve  une  ouverture  avec  un  robinet 
par  lequel  l'entrée  de  l'air  extérieur  est  réglée.  La  porte,  gar- 
nie de  caoutchouc,  ferme  hermétiquement.  Par  un  système  de 
levier,  île  soufflet  et  de  soupape,  on  peut  produire  l'air  com- 
primé ou  l'air  raréfié.  Le  levier  par  lequel  l'opérateur  obtient 
le  degré  de  raréfaction  ou  de  compression  désiré,  est  placé 
sur  le  coté  droit  du  cabinet.  Le  malade,  assis  sur  un  petit 
tabouret,  respire  à  l'aide  d'un  tube  en  communication  avec  le 
robinet  du  carreau.  Le  degré  de  raréfaction  ou  de  compression 
de  l'air  qui  se  trouve  à  l'intérieur  du  cabinet  est  indiqué  par 
un    manomètre   dont    l'échelle    se   trouve  prés  du   carreau.    A 


(1)  Jensen.  Journal  of  tke  American  Met! .  Association,   i8S">,  7  nov. 

(a)  H. -F.  Williams.  Anliseptic  treatment  of  pulmonary  diseases  by  means 
of  pneumatic  difTerentiation.  Med.  Record,  1 885 ,  17  janv.  —  Pneumatic 
difTerentiation,  New  York  Med.  Journal,  188),  16  juillet. 

(3)V.-Y.  Bowditch.  Boston  Médical  and  Surgical  Journal.  i88~>.  16  juillet. 
—  Journal  of  tlie  American  Med.  Association,  188Î.    i'r  août. 

(4)  A.  Fox.  A  report  ot  6y  cases  of  lung  disease  treated  with  tlie  pneu- 
matic cabinet.  New  York  Med.  Journal,  1886.  if>  juin. 

(5)  I.-1I.  Platt.  On  tlie  pratical  application  ol  the  pneumatic  cabinet,  Ne» 
York  Med.  Journal,  188G,  26  juin. 

(6)  J.  Ketchum.  The  physics  of  pneumatic  difTerentiation.  New  York  Med 
Record,  1886,  9  janv. 

(7)  B.-F.  Westbrook.  Pneumatic  difTerentiation.  New  York  Med.  Journal, 
1886,  26  janv. 

(8)  E.-D.  Hudson.  Présent  status  of  tlie  pneumatic  treatment  of  respiratory 
diseases.  Med.  Record,   1886,  9  janv. 

(9)  C.-E.  Quimby.  The  pneumatic  cabinet  in  tlie  treatment  ol  pulmonary 
Phtisis.  Intern.  Med.  Magazine,  1895,  janv. 


CABINET  PNEUMATIQUE 


3*5 


côté  de  ce  dernier  on  voit  un  deuxième  robinet  qu'on  ouvre 
pour  rendre  la  pression  atmosphérique  intérieure  égale  à  la 
pression  atmosphérique  extérieure,  condition  nécessaire  pour 
pouvoir  ouvrir  la  porte. 

Si  Ton  place  un  malade  à  l'intérieur  et  que  l'on  ferme  la  porto, 
le  malade  respirant  par  le  tube  en  communication  avec  l'air 


Fig.  7<).  —  Cabinet  pneumatique. 


extérieur,  on  peut,  par  des  mouvements  du  levier,  raréfier 
l'air  dans  le  cabinet,  de  façon  que  le  manomètre  accuse  une 
différence  de  a  centimètres  et  demi  dans  la  colonne  de  mer- 
cure, représentant  ainsi  une  réduction  de  la  pression  atmos- 
phérique d'environ  200  grammes  par  centimètre  carré  de  la 
surface  du  corps  du  malade. 


ii&  TRAITEMENT  l'Ait  L'ÂÊROTIIÉRÀPIE 

RÉSULTATS    lit    TRAITEMENT.    Quels     résultats    1 1  btient-oll    cil 

soumettant  un  tuberculeux  pulmonaire  à  des  séances  répétées 
du  cabinet  pneumatique?  Tous  les  médecins  sont  d'accord  en 
ce  qui  concerne  lu  facilitation  de  la  respiration,  l'augmentation 
de  l'hématose,  le  développement  des  muscles  pectoraux,  la 
diminution  de  la  tendance  aux  congestions  par  uni'  action 
analogue  à  celle  des  ventouses  sèches.  Mais  il  v  a  des  effets 
secondaires  qui  ont  néanmoins  uwi-  importance  assez  grande 
pour  retenir  l'attention,  si  l'on  veut  analyser  les  etï'ets  de  cette 
méthode  pneu niato-thérapi que. 

Quimby  i),  qui  est  peut-être  en  Amérique  le  médecin  ayant 
la  plus  grande  expérience  de  ce  cabinet,  nous  a  donné  un 
résumé  intéressant  sur  les  effets  thérapeutiques  de  cet  appa- 
reil. Depuis,  je  l'ai  employé  moi-même,  avec  une  modification 
sur  laquelle  je  reviendrai  plus  lard  ;  je  ne  peux  (pic  confir- 
mer les  conclusions  de  Quimby,  et  je  me  fais  un  plaisir  de  les 
reproduire  ici.  Il  a  divisé  les  effets  en  destructifs  et  conslr actifs; 
voici  le  tableau  de  ses  observations,  auxquelles  nous  conser- 
vons autant  que  possible  la  forme  qu'elles  ont  dans  le  texte 
anglais  : 


EFFETS    IM      TRAITEMENT    PAR    LE    CABINET    PNEUMATIQUE 

AU    POINT    DE    VUE    DES    AGENTS    DESTRUCTIFS 

DANS    LA    PHTISIE    PULMONAIRE 

A.  —  Effets  spécifiques, 

i.    N'a  pas  d'effets  directs i.   Sur  le  bacille  de  ta  tuberculose. 

■i .   Élimine  par  absorption  rapide.    .   2.   Les  toxines  produites. 

1  B.  —  Effets  locaux  et  mécaniques. 

'■    1      i.    Diminue i .    La  compression  vasculaire  et  des 

tissus,  venant  des 
i  a.  Par  absorption  des    ....  a.  Exsudats  inflammatoires; 

/;.    Par  élimination  des  ....  h.    Produits  nécrotiques. 

|   f      4.    Détache  et  élimine \.    Les   obstructions    alvéolaires   et 

tuberculeuses  qui  produisent: 

n.   I C ii  rouvrant a.   Les  alvéoles  atélectasiqucs  ; 

/■.   En  soulageant h     Les    irritations    locales    des 

tissus: 


(il  C.-E.  Quimby.  Loc.  cit. 


CABINET  PNEUMATIQUE  327 

c.  En  rétablissant c.    L'oxygénation  défectueuse  ; 

d.  En  diminuant d.  La  décomposition  septique,' 

e.  En  prévenant e.    L'infection  du  système  ; 

f.  En  réduisant  au  minimum   .  /'.     La  fièvre  septique. 

5.  Distend  et  absorbe 5.    Les  tissus  fibreux  qui  gênent  : 

»      a.  La  respiration.  )  , 

En  rétablissant >       /,.  La  circulation.  )  0x^natlon- 

C.  —  Effets  systématiques. 

6.  Diminue  et  retarde 6.    La  nutrition  défectueuse  du  sys- 

tème provenant  de  : 
a.   En  éliminant (t.   L'obstruction  de  la  respira- 

tion ; 
/;.    En  accélérant //.   La  circulation  affaiblie. 


EFFETS  DU  TRAITEMENT  PAR  LE  CABINET  PNEUMATIQUE 

AU  POINT  DE  VUE  DE  LA  FORCE  COXSTRUCTIVE 

DANS  LA  PHTISIE  PULMONAIRE 

A.  —  Effets  spécifiques. 

i.    Augmente  la  nutrition  de  ....    i .   La  granulation  tuberculeuse. 

■i.    Rend  dynamique i .    La     valeur     potentielle     de     la 

toxine  (?). 

B.  —  Effets  locaux. 

3.  Favorise  et  modère 3.    L  inflammation    productive    dé- 
pendant de  : 

a.  En  augmentant  traumatique- 
ment a.   L  irritation  locale; 

b.  En  éliminant  l'obstruction  à.  h.    La  circulation  libre  ; 

c.  En  augmentant c.    La  nutrition  vasculaire  : 

d.  En  augmentant d.  L'absorption  lymphatique  ; 

4.  Stimule 4-  La  vitalité  du  tissu  local  de  : 

a.  En  augmentant a.   La  circulation; 

b.  En     rétablissant     normale- 
ment    b.  L'état  anatomique. 

C.  —  Effets  systématiques. 

5.  Stimule 5.    L'activité  ganglionnaire  générale 

provenant  de  : 

a.  Eu  améliorant    ......  a.   La  circulation; 

b.  En  doublant b.    La  capacité  respiratoire. 

Modification  du  traitement  par  l'auteur.  —  Il  n'y  a  donc 
pas  le  moindre  doute  que  le  cabinet  pneumatique  puisse  rendre 
de  grands  services  dans  le  traitement  de  la  tuberculose  pul- 
monaire. Quand  j'ai  commencé  à  employer  le  cabinet  au  service 
extérieur  (Dispensary  Service)  du  New  York  Throat  anclNose. 


3i8  TRAITEMENT  PAR  V AÈR0TUÈRAP1E 

Hospital  (département  pulmonaire),  j'ai  suivi  l'exemple  de  mes 
prédécesseurs  dans  ce  service.  Hommes  et  femmes  étaient  pla- 
cés dans  le  cabinet  entièrement  vêtus,  les  femmes  avec  leur 
corset  serré  et  souvent  leur  jaquette  par-dessus.  On  faisait 
respirer  au  malade  l'air  extérieur,  ou  plutôt  l'air  de  la  salle 
de  consultation,  par  un  tube,  comme  nous  l'avons  décrit  plus 
haut.  Le  sujet  respirait  l'air  en  mettant  le  tube  en  caoutchouc 
dans  sa  bouche. 

Tout  en  appréciant  la  valeur  du  cabinet,  je  ne  tardai  pas  à 
nie  convaincre  que  les  bons  effets  de  cette  pneumato-thérapie 
pourraient  être  augmentés  au  moyen  de  quelques  modifi- 
cations. 

J'insistai  d'abord  pour  que  le  cabinet  fût  placé  devant  la 
fenêtre,  que  j'ai  l'habitude  de  faire  ouvrir  pendant  la  séance 
afin  que  le  malade  puisse  inspirer  le  meilleur  air  possible. 
Ensuite  je  voulus  que  le  malade,  avant  d'entrer  dans  le  cabinet, 
fût  suffisamment  déshabillé  pour  que  l'air  raréfié  fût  en  con- 
tact direct  avec  la  surface  cutanée  du  thorax,  et  pour  qu'il  n'y 
eût  pas  la  moindre  gêne  à  la  respiration  profonde,  par  les 
corsets,  jupes  ou  pantalons  serrés  autour  de  l'abdomen. 
De  cette  manière,  le  cabinet  pneumatique  produit  le  même 
effet  qu'une  application  de  ventouses.  En  outre,  il  est  bon 
aussi  pour  la  peau  de  pouvoir  perspirer  librement,  et  l'expo- 
sition de  la  surlace  cutanée  du  thorax  à  l'air  rend  l'appareil 
respiratoire  moins  sensible  au  refroidissement.  L'habitude  de 
faire  respirer  le  malade  par  la  bouche  dans  le  cabinet,  même 
pour  peu  de  temps  (5  à  10  minutes),  me  semble  mauvaise. 
Quand  il  fait  froid,  le  sujet  respire  par  la  bouche  l'air  d'une 
salle  surchauffée,  ou  si  par  hasard  on  ouvre  la  fenêtre,  il 
respire  une  grande  quantité  d'air  glacé  qui  entre  avec  force 
dans  ses  poumons,  sans  être  préalablement  chauffé  en  passant 
par  le  nez.  De  plus,  les  individus  atteints  de  tuberculose  pul- 
monaire respirent  généralement  assez  mal  sans  qu'on  leur 
fournisse  l'occasion  de  respirer  entièrement  par  la  bouche.  On 
doit  toujours  insister  sur  la  respiration  par  le  nez  en  traitant 
ce  genre  de  malades.  Nous  verrons  plus  loin  quels  bons  effets 
l'emploi  du  cabinet  peut  produire  chez  des  personnes  atteintes 
de  tuberculose  laryngée,  à  condition  que  l'inspiration  ait  lieu 
parle  nez.  Pour  rendre  cette  méthode  applicable,  j'ai  l'ait  cons- 


CABINET  PNEUMATIQUE  3-io, 

traire  un  masque  pour  le  nez,  dont  je  donne  ci-joint  une  gra- 
vure. Ce  masque,  qui  est  en  caoutchouc,  couvre  entièrement 
le  nez,  et  à  sa  partie  antérieure  vient  se  terminer  le  tube  com- 
muniquant avec  l'air  extérieur.  La  partie  postérieure  est  munie 
d'un  bord  pouvant  se  plier  de  façon  à  s'adapter  étroitement  au 


Fig.  80.  —  Masque  pour  le  nez  et  tube  du  cabinet  pneumatique. 

pourtour  du  nez.  Le  masque  est  fixé  par  une  bande  élastique 
autour  de  la  tète,  ou  maintenu  par  les  doigts  du  malade.  Ainsi 
la  respiration  par  le  nez  se  trouve  assurée. 

Depuis  l'emploi  du  cabinet  avec  ces  diverses  modifications, 
j'ai  pu,  dans  un  grand  nombre  de  cas  et  pendant  une  durée 
de  plusieurs  mois,  me  rendre  compte  que  la  valeur  de  ce  mode 
de  pneumato-thérapie  est  véritablement  augmentée. 

A  l'exception  des  tuberculeux  très  affaiblis  ou  très  fébrici- 
tants,  le  traitement  par  le  cabinet  pneumatique  convient  à 
tous  les  poitrinaires .  Les  malades  atteints  d'hémoptysies 
chroniques  bénéficient  particulièrement  de  celte  pneumato- 
thérapie.  Il  y  a,  néanmoins,  quelques  conditions  à  remplir 
avant  de  soumettre  un  sujet  au  traitement  du  cabinet.  Il  faut 
d'abord  s'assurer  que  le  malade  peut  respirer  normalement 
par  le  nez.  Toutes  les  obstructions  locales,  déviations  du  septum 
ou  des  cornets,  polypes,  etc.,  devraient  être  supprimées,  et  les 
déterminations  catarrhales,  aiguës  ou  chroniques,  promptement 
traitées.  Ensuite  j'enseigne  à  mes  malades  les  exercices  respi- 
ratoires déjà  décrits  ;  et  c'est  seulement  lorsqu'ils  savent  res- 
pirer normalement  par  le  nez  que  je  commence  les  séances 
dans  le  cabinet.  Je  ne  fais  pas  faire  dans  cet  appareil  un  deuxième 
effort  expiratoire,  mais  je  dis  à  mes  malades  d'employer 
autant  de  force  que  possible  dans  l'acte  expiratoire.  L'air 
extérieur  étant  plus  dense  que  celui  qui  entoure  le  patient, 
cet  exercice  devient,  pour  ce  dernier,  une  véritable  gymnas- 
tique pulmonaire. 


;  to  TRAITEMENT  l'Ait  V AÈROTUÊRAPIE 

Durée  des  séances.  —  La  séance  ne  doit  durer  au  commen- 
cement que  trois  minutes  au  plus,  et  il  ne  faut  pas  la  prolonger 
au  delà  de  dix  minutes.  Il  est  hou  d'avoir  un  point  d'appui  où 
les  malades  puissent  reposer  leurs  coudes,  surtout  s'ils  tien- 
nent le  masque  avec  la  main.  Quelquefois  le  sujet  transpire 
un  peu  dans  le  cabinet  ;  je  fais  toujours  fermer  la  fenêtre, 
surtout  en  temps  froid,  avant  que  le  malade  sorte  de  l'appareil. 
II  met  aussi  autour  de  sa  poitrine  nue  un  châle  qu'il  ôte  dés 
que  la  porte  di\  cabinet  est  fermée,  et  avec  lequel  il  se  couvre 
au  moment  de  sortir. 

Expérience  personnelle  pendant  une  séance  dans  le 
cabinet.  —  Tous  mes  malades,  à  de  rares  exceptions  prés, 
aiment  les  séances  dans  le  cabinet  pneumatique.  L'augmenta- 
tion de  la  circulation  et  de  l'oxygénation  semble  leur  donner 
une  sensation  de  bien-être  qui  dure  assez  longtemps  après  la 
séance  pour  qu'ils  puissent  suffisamment  l'apprécier.  Afin 
d'étudier  moi-même  les  sensations  souvent  si  vivement  décrites 
par  les  malades,  je  me  suis  soumis  à  l'expérience  d'une 
séance.  Je  ne  puis  dire  que  la  première  sensation,  en  se  trou- 
vant enfermé  dans  un  si  petit  espace  avec  seulement  un  tube 
pour  respirer,  soit  précisément  agréable.  Avec  le  commence- 
ment de  la  raréfaction  de  l'air,  on  éprouve  même  une  sensa- 
tion pénible  dans  les  oreilles,  quoiqu'un  mouvement  de  déglu- 
tition procure  un  soulagement  rapide  en  rétablissant  l'équilibre 
de  la  pression  atmosphérique.  Peu  à  peu  on  sent  que  la  respi- 
ration devient  libre,  plus  profonde,  la  poitrine  se  dilate  à  un 
degré  inaccoutumé,  et  l'air  Irais  entre  avec  force  dans  le  nez, 
ou  il  s'échauffe  suffisamment  avant  d'arriver  dans  les  bronches. 
L'air  pur  va  dans  des  endroits  où  il  paraissait  n'avoir  jamais 
pendre  ;  il  s'insinue  dans  des  régions  du  poumon  qui  ne  ser- 
vent pas  habituellement  à  la  respiration.  Le  résultat  de  tout 
cela  est  une  sensation  d'allégement  et  de  bien-être,  analogue 
a  celle  qu'on  ressent  au  sommet  des  montagnes. 

Protection  contre  les  microbes  de  l'atmosphère  exté- 
rieure. —  Pendant  que  le  malade  inspire  parle  tube  s'ouvrant 
à  l'extérieur,  il  est  bon  de  placer  un  tampon  de  coton  peu  serré 
à  l'orifice  du  tube,  afin  de  filtrer  l'air  et    d'empêcher  l'absorp- 


PROTECTION  CONTRE  LES  MICROBES  DE  L'ATMOSPHÈRE  '33 1 

tion  de  poussières  et  de  germes  qui  pourraient  pénétrer  pro- 
fondément dans  l'arbre  respiratoire.  Si  l'air  était  par  trop  sec, 
on  le  ferait  passer  à  travers  un  flacon  laveur  contenant  de  l'eau 
pure  ou  chargée  de  substances  médicamenteuses. 

On  peut  encore  imprégner  le  coton  avec  des  produits  volatils, 
et  le  placer  devant  le  robinet  extérieur  à  l'aide  d'un  petit  appa- 
reil de  toile  métallique. 

Je  puis  en  toute  assurance  recommander  le  cabinet  pneu- 
matique avec  les  modifications  que  je  viens  de  décrire  comme 
lin  adjuvant  précieux  dans  le  traitement  de  la  phtisie  pulmo- 
naire, et  surtout  là  où  l'altitude  est  peu  considérable. 

Quant  à  la  valeur  de  cet  appareil  dans  le  traitement  de  là 
phtisie  laryngée  et  autres  complications  de  la  tuberculose  pul- 
monaire (emphysème,  etc.),  ainsi  que  pour  le  traitement  des 
tuberculeux  ambulants,  nous  en  parlerons  dans  des  chapitres 
spéciaux. 


C  H  A  P 1 T  R  E  X  V  I 
L'hydrothérapie  dans  le  traitement  de  la  phtisie  pulmonaire. 


Dans  le  chapitre  relatif  à  la  «  Prophylaxie  de  la  phtisie  pul- 
monaire »,  nous  avons  t'ait  allusion  à  l'hydrothérapie  comme 
moyen  d'endurcissement.  L'eau  froide  était  utilisée  depuis 
nombre  d'années  comme  un  moyen  préventif  contre  toutes 
sortes  de  maladies,  surtout  par  la  race  anglo-saxonne  ;  mais 
pour  le  traitement  de  la  phtisie  pulmonaire  on  a  longtemps 
considéré  l'emploi  de  l'hydrothérapie  comme  une  contre-indi- 
cation. Yalleix  traitait  de  «  barbares  »  les  médecins  qui,  à 
l'exemple  de  Fleury,  ne  craignaient  pas  de  soumettre  leurs 
malades  aux  pratiques  hydriatiques  froides  (i). 

Actuellement,  au  contraire,  la  phtisio-thérapie  moderne 
considère  l'hydrothérapie  comme  un  agent  curatif  et  puissant 
à  presque  tous  les  degrés  de  la  phtisie  pulmonaire.  Voici  la 
belle  description  que  nous  donne  Fleury  (2)  relativement  à 
Faction  que  les  douches  froides  d'une  durée  de  dix  secondes 
à  une  minute  exercent  sur  les  phtisiques  : 


«  Action  locale.  —  Elle  prévient,  ralentit  ou  interrompt  le 
travail  de  ramollissement  des  tubercules  pulmonaires  ;  elle 
diminue,  ou  tarit  même  complètement,  la  sécrétion  des  caver- 
nes; elle  diminue,  par  conséquent,  la  toux  et  l'expectoration, 
ou  les  supprime  même  entièrement;  elle  rend  les  hémoptysies, 
lorsqu'il  en  existe,  moins  fréquentes  et  moins  abondantes,  ou 
les  fait  cesser  complètement. 

«  Action  générale.  —    Elle  prévient,  diminue  ou  supprime  la 


(1)  Botteï.  Hydrothérapie  médicale. 

(a)  L.  Fleury.  De  l'Hydrosudopathie.  Archives  générales  de  médecine.  1.  XV 


TEMPÉRATURE  333 

diarrhée,  la  sueur,  la  fièvre  symptomatique  ou  hectique  ;  elle 
maintient,  améliore  ou  rétablit  l'exercice  des  fonctions  de 
digestion  et  d'assimilation.  » 

Peter  (i)  fut  aussi  un  partisan  convaincu  de  l'hydrothérapie 
dans  la  tuberculose  pulmonaire.  Un  admirable  moyen  hygié- 
nique et  thérapeutique  à  la  fois,  dit-il,  c'est  l'hydrothérapie  ; 
mais  que  de  préjugés  à  vaincre,  comme  aussi  que  de  précau- 
tions à  prendre  !  Et  ce  grand  phtisio-thérapeute  a  bien  rai- 
son de  conseiller  la  prudence. 

Comme  nous  avons  dit  à  la  page  i23  en  traitant  de  la 
«  Prophylaxie  de  la  phtisie  pulmonaire  »,  il  est  nécessaire 
de  s'assurer  d'une  réaction  complète,  d'une  éducation  de  la 
peau  et  du  système  nerveux  avant  l'application  de  la  douche. 

La  méthode  de  Peter  (2)  est  adoptée  aujourd'hui  avec 
quelques  modifications  par  presque  tous  les  phtisio-théra- 
peutes  modernes.  Selon  cet  auteur,  on  pratiquera  d'abord  des 
frictions  sèches,  matin  et  soir,  sur  tout  le  corps  pendant 
cinq  minutes.  Puis  on  arrivera  facilement  à  la  friction  avec 
un  stimulant  alcoolique  ou  une  substance  huileuse,  ensuite  à 
la  friction  au  linge  mouillé  d'eau  froide  au  moyen  duquel  on 
frotte  rapidement  la  peau  de  tout  le  corps  pendant  une  minute 
environ,  friction  humide  qui  sera  elle-même  suivie  d'une  fric- 
tion sèche  d'une  à  cinq  minutes  de  durée.  On  est  ainsi  con- 
duit graduellement  à  la  lotion  froide  qu'il  faut  faire  à  l'éponge 
simplement  imbibée,  puis  à  l'éponge  ruisselante  qu'on  ne 
devra  conseiller  que  plus  tard  et  à  bon  escient. 

Température.  —  La  douche  elle-même  doit  être  employée 
aussi  avec  toutes  les  précautions  possibles.  D'abord  on  com- 
mence avec  de  l'eau  ayant  une  température  d'environ  -f-  200, 
et  l'on  descend  graduellement  sans  jamais  dépasser  -f-  10" 
<ui  -j-  90.  Il  est  indispensable  que  la  durée  soit  courte,  surtout 
au  début.  Je  commence  en  général  par  une  douche  d'à  peu  près 
5  secondes  en  augmentant  graduellement  de  3  à  5  secondes 
iliaque  jour  jusqu'à  ce  que  j'arrive  à  25  secondes  environ. 


(1)  Peter.  Leçons  do  clinique  médicale,   t.  II. 

(2)  Petek.  Loc.  cit. 


;  ;  |  traitement  par  l'hydrotherapie 

Gradation  dans  l'application  de  l'eau  froide  pour  malades 
A.L1TÉS. —  Au  début,  l'ablution  froide  doit  être  faite  pendant 
que  le  malade  est  au  lit.  On  se  sert  soit  d'une  éponge,  soit  d'une 
compresse  imbibée  d'eau  froide  à  la  température  prescrite, 
préalablement  exprimée.  On  l'ait  l'ablution  en  exposant  seule- 
ment la  partie  du  corps  sur  laquelle  on  opère,  et  on  la  recou- 
vre aussitôt  essuyée. 

On  procède  dans  l'ordre  suivant  :  mains,  avant-bras,  figure, 
cou,  poitrine,  nuque,  creux  axillaire,  liras,  puis  le  dos,  le 
ventre,  les  fesses,  les  cuisses,  les  jambes,  les  pieds.  Ce  mode 
d'application,  indiqué  par  Winternitz,  a  l'avantage  de  limiter 
l'application  à  une  partie  du  corps,  surtout  si  le  malade  est 
pusillanime. 

Drap  mouillé.  —  Plus  tard,  quand  le  sujet  est  un  peu  plus 
habitué  à  l'eau  froide,  on  peut  employer  les  frictions  avec  le 
drap  mouille. 

Voici  comment  elles  se  pratiquent   : 

On  prend  un  drap  de  moyenne  dimension  que  l'on  trempe 
dans  l'eau  froide,  et  l'on  exprime  tout  le  liquide  qu'il  a  retenu, 
jusqu'à  ce  qu'il  reste  seulement  humide. 

Le  drap  étant  déployé,  on  le  jette  sur  les  épaules  et  le  dos 
du  malade  nu,  en  ramenant  les  extrémités  en  avant,  pour  le 
recouvrir  complètement. 

Le  patient  ressent  alors  une  sensation  de  froid  très  vif  et 
quelquefois  très  pénible,  maison  pratique  immédiatement  des 
frictions  méthodiques  sur  tout  le  corps.  La  réaction  se  produit 
promptement  ;  dès  qu'elle  s'est  effectuée,  on  enlève  le  drap, 
on  enveloppe  le  malade  dans  une  couverture  sèche,  et  on  l'es- 
suie en  le  frottant  légèrement.  Puis  on  lui  l'ail  faire  un  léger 
exercice,  et,  s'il  ne  peut  pas  marcher,  on  le  masse  dans 
son  lit. 

.Mais,  ici  encore,  on  doit  aller  progressivement  si  l'on  craint 
que  le  malade  ne  soit  pas  assez,  vigoureux  pour  supporter 
l'opération  entière. 

On  peut  commencer,  par  exemple,  par  le  membre  supérieur  : 
on  trempe  une  serviette  dans  de  l'eau  à  la  température  vou- 
lue, on  l'exprime,  on  enveloppe  rapidement  le  membre  mis 
à   nu,  et    on  le  frictionne   méthodiquement  jusqu'à    ce    que   la 


EXERCICE  PEXDAXT  LA   DOt'CllE  335 

réaction  se  produise.  On  enlève  alors  la  serviette  mouillée  ,  on 
essuie  le  membre  dans  toute  son  étendue,  et  on  le  recouvre. 

J'ai  essavé  cette  méthode  à  l'hôpital  et  dans  ma  clientèle 
privée,  et  j'en  ai  obtenu  des  résultats  très  satisfaisants.  Elle 
est  facile  à  enseigner  et  à  pratiquer. 

Quand  le  malade  est  assez  fort  pour  qu'on  puisse  lui  donner 
la  douche,  je  préfère  l'appliquer  d'abord  en  forme  de  pluie 
sur  tout  le  corps,  et  ensuite  envoyer  un  jet  direct  avec  un 
peu  plus  de  force  sur  les  sommets  des  poumons.  Ce  jet  direct 
est  un  des  meilleurs  révulsifs  légers  et  il  ne  présente  aucun 
danger. 

J'ai  déjà  décrit,  à  la  page  ia3,  comment  on  peut  provisoi- 
rement faire  une  salle  de  bains  à  l'aide  d'un  tub  anglais, 
d'une  chaise  en  bois  et  de  quelques  cruches  d'eau  froide  ou 
tempérée,  au  cas  où  la. présence  à  la  salle  de  douches  olfre 
des  inconvénients. 

Exercice  pexdaxt  la  douche;  réaction.  —  Mais  dans  les  éta- 
blissements spéciaux  il  y  a  cependant  quelque  chose  sur  quoi 
j'insiste  pour  l'arrangement  d'une  salle  de  douches.  On  appren- 
dra au  malade  à  exercer  autant  de  muscles  que  possible  lors- 
qu'il recevra  l'eau  froide  en  douche  ou  en  jet.  À  cet  effet,  il 
se  tiendra  à  une  barre  placée  en  travers  de  la  chambre  à  la 
hauteur  de  ses  épaules.  Cela  le  préserve  de  glisser  sur  le  par- 
quel  humide,  pendant  qu'il  remue  le  thorax  d'un  côté  et  d'autre, 
soulève  les  pieds  alternativement,  remue  les  bras  et  enfin  agite 
son  corps  en  tous  sens.  Le  choc  produit  par  l'eau  froide  est 
alors   amoindri,  et  une  réaction  plus  rapide  est  assurée. 

La  douche  finie,  le  patient  est  enveloppé  dans  une  grande 
serviette-éponge,  par-dessus  laquelle  l'infirmier  fait  des  fric- 
tions vigoureuses  jusqu'à  ce  que  le  malade  soit  sec  et  bien 
réchauffé. 

Chez  les  tuberculeux  aux  degrés  avancés  comme  chez  les 
prédisposés,  le  meilleur  moment  pour  appliquer  l'hydrothé- 
rapie est  le  matin,  environ  une  demi-heure  après  un  léger 
déjeuner.  Tous  les  malades  qui  ne  sont  pas  alités  et  qui  sont 
assez  forts  pour  effectuer  des  promenades  plus  ou  moins  lon- 
gues, devraient  faire  ces  exercices  pour  assurer  ce  que  les 
hydrothérapeutes  appellent  la  p réaction. 


J36  TRAITEMENT  PAR  L'HYDROTHERAPIE 

Préaction.  —  «  Cette  préaction,  ou  échauffement  préalable 
du  corps  par  un  exercice  approprié,  n'a  pas  seulement  pour 
objet  de  favoriser  la  réaction  consécutive  ;  elle  exerce  aussi 
une  influence  sur  l'intensité  de  l'action  thermogène  et  sur  le 
degré  d'hypothermie  provoquée  par  l'application  froide,  c'est- 
à-dire  sur  l'action  frigorigène  (i).  » 

Ces  exercices  de  marche  seront  appropriés  à  la  vigueur  des 
malades  et  varieront  suivant  les  cas.  Les  sujets  alités  ou  fai- 
bles  et  tous  ceux  qui  s'échauffent  difficilement  devront  rester 
au  lit,  car  la  chaleur  du  lit  est  une  bonne  condition  préparatoire 
à  l'application  froide  faite  dans  la  chambre.  Dans  quelques  cas 
spéciaux,  il  peut  être  utile  de  remplacer  la  préaction  par  des 
séances  de  massage. 

La  douche  latérale,  ou  plutôt  un  jet  latéral  de  force  modé- 
rée, dirigé  vers  la  région  oit  siègent  d'anciennes  adhérences 
pleurales,  aide  souvent  d'une  manière  considérable  la  résorp- 
tion des  exsudats  fibrineux  et  produit  ainsi  une  expansion 
plus  libre  du  thorax. 

Nous  reviendrons  sur  l'emploi  de  l'eau  froide  ou  glacée  dans 
les  cas  de  douleurs  thoraciques,  de  névralgie  intercostale, 
hémoptysie,  fièvre,  sueurs  nocturnes,  etc.,  en  parlant  du  trai- 
tement symptomatique. 

Mon  expérience  personnelle  m'a  démontré  que  l'hydrothé- 
rapie générale  dans  la  phtisie  fait  le  plus  grand  bien  en 
diminuant  la  tendance  au  refroidissement. 

Les  applications  d'eau  froide  d'une  courte  durée,  sur  toute 
l'étendue  de  la  surface  cutanée,  produisent,  par  l'irritation 
thermique  et  mécanique,  l'accroissement  du  tonus  cardiaque. 
la  dilatation  du  système  capillaire  de  la  peau  avec  augmentation 
de  son  pouvoir  contractile,  et  ainsi  l'accélération  de  la  circu- 
lation générale.  En  somme,  l'hydrothérapie  dans  la  phtisie  a 
pour  but  important  de  régulariser  les  échanges  nutritifs,  de 
favoriser  l'hématose  et  de  mettre  l'économie  en  état  de  défense. 

Surveillance  médicale.  —  Dans  les  sanatoria,  les  hôpitaux 
spéciaux,  et  même  dans  les  clientèles  privées, l'application  des 


(i)  Bottey.  Traité  théorique  el  pratique  d'Hydrothérapie  médicale.  Massou, 
éditeur,  Paris. 


SURVEILLANCE  MÉDICALE  337 

diverses  pratiques  de  l'hydrothérapie  devrait  toujours  être 
surveillée  par  le  médecin  ;  car  il  ne  faut  pas  oublier  que, 
quoique  l'eau  froide  soit  un  remède  puissant,  il  peut  devenir 
dangereux  s'il  est  employé  sans  règle  et  sans  jugement. 

Les  douches  froides  devraient  être  réservées  pour  les  pré- 
disposés et  pour  les  tuberculeux  en  état  de  guérison  appa- 
rente. 

Il  faut  se  rappeler  que  la  douche  en  pluie  produit  une  action 
générale  de  réfrigération  saisissante.  La  douche  en  jet  a  une 
action  de  percussion  et  de  réfrigération. 

A  propos  des  résultats  obtenus  dans  le  traitement  de  la 
tuberculose  et  de  la  phtisie  à  tous  ses  degrés  par  l'hydrothé- 
rapie, jointe,  bien  entendu?  au  traitement  hygiénique  et  diété- 
tique, je  ne  puis  mieux  faire  que  de  citer  les  statistiques  de 
Winternilz,  présentées  dernièrement  au  Congrès  de  Berlin  (i). 

Dans  80  p.  100  des  cas  de  phtisie  chronique  il  a  obtenu, 
soit  une  amélioration,  soit  un  arrêt  du  processus  ou  la  guéri- 
son  relative.  Dans  la  phtisie  floride  il  a  vu  survenir,  au  début 
dans  27  p.  100  et  plus  tard  dans  3a  p.  ioo  des  cas,  l'arrêt  plus 
ou  moins  prolongé  du  processus  et  la  guérison  relative.  Dans 
les  cas  désespérés  et  considérés  comme  incurables,  l'hydro- 
thérapie a  produit  des  améliorations  subjectives  permettant 
de  croire  à  la  possibilité  de  la  guérison. 

Un  des  avantages  de  l'hydrothérapie  consiste  en  ce  fait 
que,  chez  les  malades  qui  ne  veulent  pas  ou  ne  peuvent  pas 
quitter  leurs  occupations,  ce  puissant  moyen  thérapeutique 
peut  être  mis  en  œuvre  au  domicile  même  du  malade. 


(i)  R.  Ro.ume.  La  Presse  Médicale,  1899,  3i  mai. 


Knopf.  Sanatoria. 


CHAPITRE  XVII 
Hygiène  du  corps;  vêtements,   etc. 


Bains  hygiéniques.  —  Parmi  les  moyens  que  possède  le  tuber- 
culeux d'éviter  les  maladies  intercurrentes,  il  faut  faire  figu- 
rer une  bonne  hygiène  du  corps;  en  dehors  de  l'hydrothérapie, 
le  malade  iloil  prendre  régulièrement  des  bains  hygiéniques. 
Un  bain  à  l'eau  chaude  par  semaine,  d'une  durée  d'environ 
cinq  à  dix  minutes,  pendant  lequel  le  sujet  peu!  se  savonner 
partout  sans  trop  se  fatiguer,  suivi  d'une  douche  rapide 
d'eau   froide,  est  suffisant. 

Port  de  la  barbe.  —  Aux  hommes  qui  portent  la  barbe,  il 
esl  bon  de  recommander  de  la  faire  tailler  courte,  surtoul  les 
moustaches.  Celle  précaution  rend  le  nettoyage  ou  plutôt  la 
désinfection  plus  facile. 

Désinfection  m:s  vÈTEMEMs.  —  Les  vêlements  d'un  tuber- 
culeux demandent  une  hygiène  spéciale  :  à  son  arrivée  au 
sanatorium  on  prie  le  malade  de  permettre  la  désinfection  à 
l'étuve  de  tous  ses  vêtements  et  linges  de  corps  ;  de  même, 
tous  les  linges  de  lil  salis  par  les  malades  doivent  toujours 
être  passés  à  l'étuve.  Le  patient  doit  toujours  porter  une  che- 
mise et  un  caleçon  de  laine  blanche  à  grosse  trame,  pour 
que  la  peau  subisse  continuellement  une  légère  friction  :  en 
laine  épaisse  pendant  l'hiver  et  plus  légère  pendant  l'été. 
En  dehors  de  cela,  il  doit  s'habiller  avec  îles  vêtements 
chauds  sans  être  lourds  en  hiver,  moins  chauds  en  été, 
mais  toujours  en  laine.  Les  sujets  qui  ont  une  tendance  à 
transpirer  beaucoup  devraient  changer  de  linge  tous  les  jours, 
au  moins  une  fois. 


TOILETTE  NATURELLE  POUR  FEMMES 


33g 


Le  confort  dans  l'habillement.  —  En  règle  générale,  les  vête- 
ments doivent  toujours  être  confectionnés  de  façon  que  toutes 
les  fonctions  du  corps,  et  surtout  celle  de  la  respiration,  ne  soient 
nullement  gênées.  Les  bretelles  en  particulier  font  souvent 
souffrir  les  malades.  Voici  ce  que  je  recommande  : 

On    l'ait   fabriquer,    en  étoffe    légère,   mais  solide    et   élas- 
tique, une  sorte  de  court  gilet,  auquel 
on    adapte    10  à    12    attaches    pour  les 
boutons  du  pantalon  (fig.  81). 

De  cette  manière,  la  pression  qu'exer- 
çaient les  bretelles  sur  un  espace 
étroit  et  sur  le  sommet  des  poumons 
est  répartie  siif  une  surface  plus 
grande  ,  ce  qui  la  rend  beaucoup 
moindre. 

Dans  un  sanatorium,  je  recommande 
aux  hommes  de  porter,  au  lieu  d'une 
chemise  de  jour  avec  devant  imper- 
méable, dur,  et  avec  faux-col  incommode,  des  négligés  en 
laine  ou  en  soie.  Ces  tissus  rendent  les  exercices  respira- 
toires plus  faciles. 


Fig-.  81.  —  Gilet-bretelles  pour 
phtisiques. 


Toilette  naturelle  pour  femmes.  —  Pour  les  femmes,  le 
|)htisio-thérapeute  a  encore  plus  à  faire  en  ce  qui  concerne  les 
vêtements.  Là  il  faut  compter  avec  la  mode,  les  coutumes, 
souvent  avec  la  coquetterie.  Et  jamais  la  réforme  des  vêtements 
de  femmes  n'a  été  plus  indiquée  que  pour  une  phtisique. 

Les  premières  idées  sur  ces  réformes  nécessaires  me  sont 
venues  il  y  a  près  de  dix  ans,  et  j'ai  fait  à  ce  sujet  une  commu- 
nication à  la  Société  médicale  de  Los  Angeles  (Californie)  (1). 

Voici  en  substance  ce  cpie  je  recommandais  et  ce  que  je  recom- 
mande aujourd'hui  encore  avec  plus  de  conviction,  s'il  est 
possible,  surtout  pour  une  femme  phtisique,  dans  un  sanato- 
rium : 

Au  lieu  de  chemises  ou  tricots  et  de  pantalons  séparés,  je 
fais  porter  un  «  Union  suit  »,  c'est-à-dire  un  vêtement  qui  réu- 


(1)  K^opf.  Dress  Reforni  and  its  Relation  to  Medicine.   Southern  California 
Practitioner,   1889,  août. 


340  iiygiem:  dc  corps,  vêtements,  etc. 

[lisse  ces   deux  pièces   en   une  seule,    confectionnée   en    une 
étoffe  de  laine  pure  collant  bien  au  corps. 

Par-dessus,  on  met  une  jupe  faite  à  la  façon  des  «  pantalons 
turcs  ».  (les  deux  vêtements  sont  en  étoffe  de  laine  plus  ou 
moins  épaisse  selon  les  saisons;  ils  protègent  suffisamment  le 
corps  d'une  femme,  sans  qu'elle  ait  à  s'attacher  autour  de  la 
taille  une  demi-douzaine  «le  jupons  qui  compriment  les  or- 
ganes abdominaux  et  pelviens  et  qui  empêchent  toute  respira- 
tion abdominale;  celle-ci,  au  contraire,  n'est  nullement  gênée 
par  le  pantalon  turc  et  par  quelques  jupes  qui  s'attachent  à 
un  tricot  analogue  au  «  gilet  à  bretelles  »  décrit  pour  les 
hommes. 

Respiration  costo-supémeure.  —  Outre  les  congestions  hé- 
patiques et  pelviennes  qu'il  produit,  le  corset  trop  serré  em- 
pêche la  respiration  de  s'effectuer  normalement.  Car  il  ne  faut 
pas  croire  que  la  respiration  costo-supérieure  de  la  femme  soit 
normale  en  dehors  île  l'état  de  grossesse  très  avancée.  J'ai 
cité  dans  ma  communication  les  expériences  de  Kellogg  (i  . 
qui  montrent  bien  que  la  respiration  costo-supérieure  est  pro- 
duite par  le  corset  trop  serré  et  parle  poids  des  jupes.  Voici 
un  résumé  de  ces  expériences  : 

Il  a  comparé  les  tracés  de  la  respiration  abdominale  d'une 
chienne  et  d'un  chien  tic  la  même  taille.  Les  tracés  ont  été  les 
mêmes  pour  les  deux  animaux  ;  il  a  répété  ses  expériences  sur 
un  bœuf  et  une  vache  et  a  obtenu  le  même  résultat.  Enfin,  il  a 
pris  les  tracés  de  la  respiration  de  deux  femmes  enceintes  pen- 
dant toute  la  durée  de  la  grossesse. 

L'une  a  abandonné  le  corset  et  s'est  habillée  de  façon  que 
la  respiration  abdominale  ne  lût  nullement  gênée. 

L'autre  n'a  pas  voulu  entendre  parler  de  k  Dress  relorni  »  et 
a  gardé  son  corset  presque  jusqu'à  la  tin  de  sa  grossesse. 

Voici  les  résultats  : 

Chez  la  première  les  tracés  ont  indiqué  jusqu'à  la  semaine 
qui  a  précédé  l'accouchement  la  respiration  abdominale. 

Chez  la  deuxième  on  a  constaté  la  respiration  costale  supé- 


(i)  Kellogc.  Expérimental  researches  respecting  the  relation  of  dress  lo  pelvic 
diseases  ofwomeu.  Transactions  of  the  Michigan  Med.  Society,  1888. 


COIFFURES  34i 

rieure,  avec  absence  presque  totale  de  la  respiration  abdomi- 
nale, restée  la  même  avant  ou  après  l'accouchement.  Elle  a 
gardé  sa  respiration  produite  par  la  mode. 

Sans  condamner  le  corset,  surtout  chez  les  femmes  dont  les 
seins  sont  très  développés,  je  crois  que  les  phtisio-thérapeutes 
doivent  insister  pour  que  les  femmes  phtisiques  se  lacent  très 
modérément. 

Robes  traînantes.  —  Sans  vouloir  aborder  le  terrain  défendu 
de  «  la  toilette  extérieure  »  des  dames,  je  suis  décidé,  si  jamais 
je  suis  appelé  à  diriger  un  sanatorium,  à  ne  pas  autoriser 
mes  malades  à  porter  des  «  traînes  »,  car  il  me  semble  trop 
dangereux  pour  l'hygiène  de  permettre,  même  à  une  seule 
pensionnaire,  de  soulever  à  chaque  pas  la  poussière,  pendant 
les  promenades,  avec  sa  robe  à  traîne. 

Chaussures.  —  Les  chaussures  des  malades  doivent  tou- 
jours être  confectionnées  de  façon  à  ne  pas  gêner  la  circula- 
tion, et  à  n'être  ni  trop  chaudes  ni  trop  froides.  Bien  qu'elles 
soient  d'un  usage  général,  je  considère  les  chaussures  entiè- 
rement en  cuir  ciré  comme  peu  hygiéniques.  A  cause  de  leur 
imperméabilité,  les  pieds  n'ont  presque  pas  de  ventilation.  Je 
conseille  donc  de  porter,  quand  le  temps  est  au  sec,  des 
chaussures  dont  la  partie  supérieure  est  en  drap  épais  ou  en 
feutre.  Ce  genre  de  chaussure  maintient  les  pieds  chauds  et 
permet  néanmoins  une  bonne  ventilation. 

Dans  les  sanatoria,  les  meilleurs  souliers  à  employer  pour 
l'hiver  sont  les  chaussons  fourrés  de  Strasbourg,  et  les 
galoches  à  semelles  de  bois,  adoptées  par  M.  le  D1'  Sabourin. 

En  temps  de  pluie  et  de  neige  un  tuberculeux  ne  doit  jamais 
sortir  sans  souliers  en  caoutchouc,  et  jamais  sans  porter  sa 
petite  pèlerine  en  «  waterproof  ». 

Coiffures.  —  Je  conseille  aux  hommes  ayant  une  chevelure 
fournie  de  ne  mettre  des  chapeaux  ou  bonnets  que  lorsque  les 
convenances  l'exigent,  et  de  plus  je  recommande  de  ne  jamais 
porter  de  coiffures  trop  lourdes  ;  toutes  doivent  être  munies 
d'un  ou  plusieurs  orifices  pour  la  ventilation.  La  dernière 
règle  s'applique  aussi  à  ceux  qui  sont  chauves  :  rien  n'expose 


!  i  !  UYGIÈNE  DC  CORPS,    VÉTEMEXTS,  ETC. 

si  facilement  au  rhume  que  de  découvrir  une  tète  qui  a  porté 
plus  ou  moins  longtemps  une  coiffure  chaude. 


Tabac.  —  Au  chapitre  de  1  «  Hygiène  personnelle  »,  il  faut 
ajouter  comme  règle  générale  la  défense  de  fumer  pour  tout 
individu  atteint  d'une  affection  pulmonaire  ou  laryngée. 


CHAPITRE    XVIII 

Traitement  diététique.  De  l'alimentation  ;  du  lait  ;  de  l'alcool. 
Quelques  conseils  généraux. 

.  Alimentation. 

Considérations  générales.  —  Comment  doit-on  nourrir  les 
tuberculeux  ?  La  réponse  à  cette  question  est  complexe,  étant 
données  les  modifications  déterminées  dans  l'organisme  par 
la  fièvre  et  l'altération  du  sang,  la  diminution  de  toutes  les 
sécrétions,  surtout  de  celle  du  suc  gastrique,  dans  la  phtisie 
ordinaire. 

Chez  les  fébricitaiits  la  tâche  est  particulièrement  difficile  ; 
mais,  môme  pour  eux,  ou  peut  dire  en  règle  générale  :  des 
repas  légers  mais  fréquents  et  réguliers,  riches  en  graisses 
et  en  hydrocarbones,  des  légumes,  le  tout  très  varié  et  bien 
préparé.  Pour  quelques  auteurs  la  nourriture  végétale  ne  doit 
être  qu'un  faible  appoint  dans  l'alimentation  du  tuberculeux. 

Je  ne  suis  pas  de  cet  avis  :  un  régime  largement  partagé 
entre  les  substances  alimentaires  animales  et  végétales  me 
semble  le  meilleur  pour  les  phtisiques.  Mais  il  convient 
d'ajouter  que  tous  les  aliments  doivent  être  préparés  de 
manière  à  en  faciliter  la  digestion  et  l'assimilation. 

Comme  la  cuisine  devrait  être,  selon  Dettweiler  et  ses  élèves, 
la  pharmacie  d'un  phtisio-thérapeute  moderne,  il  sera  peut- 
être  utile  de  donner  ici  quelques  indications  générales  à 
suivre  dans  l'alimentation  et  dans  la  préparation  de  quelques 
repas. 

L'appétit  d'un  phtisique.  — ■  D'abord  il  faut  se  rappeler  que 
l'appétit  d'un  phtisique  ne  donne  guère  d'indication  pour  ce 


344  TRAITEMENT  DIÉTÉTIQUE 

qu'il  devrait  manger,  ni  de  la  quantité  d'aliments  qu'il  peut 
digérer.  En  réalité,  on  peut  dire  que  le  pouvoir  digestif  d'un 
phtisique  esi  beaucoup  plus  grand  que  son  appétit  ne  le 
ferait  croire.  Parmi  les  aliments  à  prescrire  il  faut  toujours 
donner  la  préférence  à  ceux  qui  se  digèrent  le  plus  aisé- 
ment, c'est-à-dire  qui  séjournent  le  moins  longtemps  dans 
l'estomac. 

Dks  viandes  ,v  recommander.  —  Toutes  les  viandes  (gibier. 
rôti,  volaille,  ris  de  veau,  jambon,  etc.),  bien  préparées,  peu- 
vent être  données  aux  phtisiques  qui  n'ont  pas  de  troubles 
gastriques  prononcés.  La  viande  de  bœuf  crue  sous  forme  de 
pulpe  de  viande  est  particulièrement  à  conseiller.  Voici  le 
procédé  de  préparation  recommandé  par  M.  le  professeur 
Grancher  (i)  : 

i°  Avec  un  couteau  à  lame  mousse,  on  racle  la  surface  de 
la  viande  (rumsteak),  en  enlevant  à  mesure  la  trame  fibreuse, 
et  on  obtient  ainsi  de  la  raclure  de  viande  à  longs  fila- 
ments ; 

2°  On  pile  celle  viande  dans  un  mortier  de  pierre,  de  verre 
ou  de  marbre  ; 

3"  Puis  on  l'étalé  sur  un  tamis  à  purée  et  on  l'écrase  douce- 
ment sur  le  tamis  avec  une  spatule  ou  une  cuillère.  Ce  qui 
passe  dans  le  tamis  est  une  pulpe  de  viande,  sans  filaments 
et  sans  grumeaux,  d'une  digestibilité  et  d'une  nulritivité  par- 
faites. 

Dans  la  saison  froide,  on  peut  préparer  le  malin  la  provi- 
sion du  jour  à  la  condition  de  la  conserver  dans  un  endroit 
frais.  Mieux  vaut  cependant,  même  en  hiver,  quand  on  le  peut, 
la  préparer  au  moment  même  des  repas,  car  elle  s'altère  faci- 
lement. Celle  préparation  extemporanée  est  indispensable  en 
été. 

Celle  pulpe  de  viande  est  ensuite  consommée  par  le  malade 
comme  bon  lui  semble  et  nombreuses  sont  les  manières 
d'accommoder  ou  de  dissimuler  ce  mets.  On  peut  mêler  la 
pulpe  à  du  lait,  à  du  bouillon  tiède,  à  des  purées  de  légumes, 
à    des    confitures.    Ce  dernier    moyen  sera    particulièrement 


(i)  Gbaxchek.  Maladies  de  l'appareil  respiratoire. Paris,  1890. 


CÉRÉALES  345 

goûté  des  enfants.  On  pourra  aussi  la  rouler  en  boulettes 
faciles  à  avaler.  Enfin  on  peut  la  manger  en  sandwichs.'  La 
viande  crue  est  étalée  sur  une  tranche  de  pain  mollet  abon- 
damment beurrée.  On  sale  et  on  poivre,  puis  on  dispose  sur 
le  tout  des  filets  d'anchois,  de  harengs  saurs  ou  autres  mets 
de  haut  goût,  suivant  les  préférences  du  malade.  Un  jaune 
d'œuf  répandu  par-dessus  augmentera  la  qualité  nutritive  de 
ce  repas.  Gomme  on  le  voit,  les  moyens  de  faire  absorber  la 
viande  crue  sont  nombreux  ;  en  mettant  en  œuvre  son  ingé- 
niosité, il  est  bien  rare  que  le  médecin  n'arrive  pointa  la  faire 
accepter  des  malades. 

Les  céréales,  —  Les  céréales,  (blé,  riz,  avoine,  orge,  maïs) 
sont  aussi  à  recommander,  car  ils  contiennent  de  l'azote,  des 
graisses  et  des  substances  hydrocarbonées,  si  essentielles  pour 
l'alimentation. 

Et  comme  M.  Grancher  dit  très  bien  à  propos  de  l'emploi 
des  céréales  :  «  L'utilité  des  céréales,  des  légumes  et  des 
pâtes  dans  l'alimentation  ne  dépend  pas  seulement  de  leur 
pouvoir  nutritif,  de  leur  bonne  digestibilité,  et  de  leur  action 
régulatrice  sur  les  garde-robes.  Elle  découle  aussi  de  l'état 
de  repos  relatif  où  leur  abondant  usage  place  les  organes 
annexes  de  la  digestion,  le  foie  notamment.  En  tant  que  filtre 
alimentaire,  celui-ci,  que  traversent  les  produits  de  la  diges- 
tion, doit  protéger  le  sang  contre  les  toxines  venues  de  l'esto- 
mac et  de  l'intestin.  Or,  ces  toxines  sont  souvent  le  produit 
des  fermentations  de  la  chair  musculaire  ou  de  ses  ptomaïnes, 
et  rien  n'est  plus  commun,  quand  on  surveille  de  près  ses 
malades,  de  voir,  surtout  chez  les  tuberculeux,  le  foie  devenir 
volumineux,  sensible,  en  même  temps  que  la  langue  sale, 
avec  ou  sans  état  diarrhéique.  » 

Le  riz,  préparé  avec  du  lait  ou  du  beurre,  constituera  tou- 
jours un  repas  peu  cher  et  très  nutritif.  Voici  la  recette  don- 
née par  M.  Grancher  pour  en  obtenir  le  meilleur  effet:  «  11 
faut,  à  une  quantité  de  riz  connue,  ajouter  une  égale  quantité 
d'eau  chaude  et  faire  bouillir  le  tout  vivement  jusqu'à  épuise- 
ment de  l'eau.  Cela  dure  une  demi-heure  en  moyenne.  Puis, 
on  retire  du  feu  le  riz  dont  les  grains  ont  grossi,  mais  sont 
restés  indépendants,  et  on  assaisonne  avec  un  peu  de  graisse 


146  TRAITEMENT  DIÉTÉTIQUE 

très  chaude  cl  du  sel.  Ainsi  préparé,  le  riz  csl  un  aliment 
exquis,  dont  on  ne  peut  guère  abuser,  tant  sa  digestibilité  csl 
parfaite.  » 

Cacao.  —  «  Un  aliment  important  pour  les  malades  atteints 
de  tuberculose  chronique  csl  la  décoction  de  farine  de  cacao  ; 
elle  renferme  tontes  les  substances  nutritives,  mais  surtoul 
une  grande  quantité  de  graisse.  Elle  se  prend  de  préférence 
le  matin  de  lionne  heure  et  l'après-midi,  une  pleine  lasse 
chaque  fois.  Le  chocolat  fort  [Kraftchocolade)  convient  aussi 
parfaitement,  car  il  est  complètement  digéré.  De  même  les 
décoctions  de  malto-léguminose,  de  farine  de  légumineuses, 
ainsi  que  de  farine  de  Nestlé,  peuvent  être  administrées  : 
toutefois,  comme  elles  sont  pauvres  en  graisse,  elles  sont 
moins  à  recommander  que  la  farine  de  cacao;  elles  méritent 
la  préférence  lorsque  la  graisse  n'est  pas  supportée  par  le 
malade  (i).  » 

Œufs.  —  Les  œufs  à  la  coque  constituent  un  excellent  plal 
au  déjeuner.  Mais  ils  peuvent  être  pris,  dans  le  cas  où  la 
viande  csl  mal  digérée,  plus  souvenl  et  sous  les  formes  les 
plus  variées,  même  crus.  C'est  un  aliment  presque  aussi  pré- 
cieux que  la  viande  crue,  parce  que  l'œuf  contient  beaucoup 
d'azote   et   une   graisse  très  divisée   et  très  assimilable    2). 

Préparation  dus  légumes.  —  Au  lieu  de  cuire  les  légumes 
à  grande  eau  et  de  jeter  celte  eau  contenant  la  plus  grande 
partie  des  substances  nutritives  extraites  des  légumes,  ceux-ci 
doivent  être  cuits  à  la  vapeur  ou  dans  une  quantité  d'eau 
minime,  sans  ajouter  beaucoup  de  sel,  car  les  sels  naturels 
suffisent  presque  à  donner  aux  légumes  le  goût  désiré. 

De  bon  beurre  ou  d'autres  graisses  animales  ajoutés  larga 
maint  apportent  encore  des  hydrocarbones  qui  contribuent  à 
la  préparation  d'un  aliment  excellent  pour  les  phtisiques.  J'ai 
expérimenté  sur  moi-même  ces  différents  modes  tic  cuisine, 
je  les  ai  recommandés  plusieurs  fois,  et  je  peux  affirmer  que 


(1)  Ml'.nk  et  Ewai.d.  Traité  de  Diététique.  Paris,  18(17. 
(1)  Grakcher.  Loc.  cit. 


RATIOS  MINIMUM  POUR  HOMME  SAIN  347 

les  estomacs  dyspeptiques,  qu'il  s'agisse  de  phtisiques  ou  non, 
acceptent  très  volontiers  un  plat  de  légumes  ainsi  préparé,  sans 
en  éprouver  le  moindre  inconvénient.  Les  sels  de  potasse, 
contenus  en  petite  quantité  dans  les  légumes,  ne  sont  pas 
nuisibles  aux  tuberculeux.  Les  légumes  assaisonnés  de  cette 
façon,  mangés  avec  la  viande  en  quantité  ordinaire,  n'encom- 
brent ni  l'estomac  ni  l'intestin  des  malades,  et  la  cellulose  non 
digérée  est  essentielle  pour  que  le  processus  d'alimentation 
et  d'assimilation  se  poursuive  dans  toutes  ses  phases  de  façon 
physiologique. 

De  plus,  les  hydrates  de  carbone,  tels  que  l'amidon  et  le 
sucre,  contenus  dans  les  légumes,  mélangés  à  la  viande,  au 
beurre  et  à  d'autres  graisses  animales,  sont  des  adjuvants  pré- 
cieux pour  la  restauration  des  forces  d'un  phtisique.  Les  fruits 
frais  ou  préparés  de  la  même  façon  doivent  également  faire 
partie  de  cette  alimentation.  Les  salades  fraîches  seront 
de  préférence  assaisonnées  avec  du  jus  de  citron  au  lieu  de 
vinaigre. 

Paix  de  seigle  et  paix  complet.  —  Gomme  pain  on  ne  doit 
pas  se  contenter  de  donner  aux  phtisiques  le  pain  de  blé  ordi- 
naire. J'ai  mangé  à  Goerbersdorf  un  pain  de  seigle  dont  le  son 
est  resté  mélangé  à  la  farine.  Ce  pain  m'a  paru  doué  de  qualités 
nutritives  extraordinaires;  il  jouit  encore  de  propriétés  légè- 
rement laxatives. 

Le  pain  préparé  avec  la  farine  entière  du  blé  (sans  sépa- 
ration du  son)  connu  sous  le  nom  de  «  pain  complet  »  a  des 
propriétés  analogues  ;  je  le  recommande  toujours  à  mes 
phtisiques,  qui  semblent  le  préférer  au  bout  de  peu  de  temps 
à  tout  autre  pain. 

L'homme  n'est  pas  Carnivore  ni  herbivore,  mais  omnivore  ; 
il  est  organisé  pour  se  nourrir  de  l'animal  comme  du  végétal. 
Et  cela  s'applique  surtout  à  nous,  habitants  des  zones  tempérées. 

Piatiox  minimum  pour  un  homme  saix.  —  Par  une  alimentation 
variée  on  peut  plus  facilement  arriver  à  suralimenter  le  malade 
et  introduire  assez  d'azote,  de  carbone  et  de  sels  (albumine, 
ioo  à  i  io- grammes;  graisse,  5o  à  60  grammes;  hydrates  de 
carbone,  4oo  à  5oo  grammes  ;  chlorure  de  sodium,  quantité 
variable). 


i/,8  TRAITEMENT  DIETETIQUE 

En  dehors  de  cette  discussion  théorique,  l'expérience  de 
presque  Ions  les  phtisio-thérapeutes  ;i  démontré  que  le  meilleur 
régime  pour  les  phtisiques  est  celui  «j ni  suit  cette  règle  natu- 
relle. Daremberg  i)  conseille  à  ses  phtisiques  doués  d'un  bon 
appétit  le  type  alimentaire  suivant  par  jour  :  viande  brute, 
600  grammes;  pain,  35o  grammes;  deux  œufs;  beurre  ou 
matières  grasses  analogues,  80  grammes  ;  pommes  de  terre, 
100  grammes;  riz,  macaroni,  maïs,  pois,  haricots,  lentilles, 
3oo  grammes;  bière,  un  litre;  lait,  un  demi-litre;  cognac, 
■20  grammes  ;  el  on  peut  ajouter  à  cette  ration  du  fromage  el 
des  fruits. 

Combien  de  t'ois  faut-il  donner  à  manger  à  un  tubercu- 
leux ? 

l'as  moins  de  quatre  fois,  et  de  préférence  six  fois  par  jour. 

Menu  quotidien  dans  un  sanatorium;  —  Dettweiler  donne  à 
ses  malades  : 

Le  matin,  entre  7  et  S  heures,  de  bon  café,  du  thé  ou  du 
cacao  suivant  l'indication  ;  on  prend  en  même  temps  à  discré- 
tion des  biscuits  au  beurre,  des  petits  pains  beurrés,  unv 
pâtisserie  tendre  et  peu  grasse;  ensuite,  un  verre  de  lait  par 
petites  gorgées. 

A  10  heures,  un  ou  dvux  verres  de  lait  bus  par  gorgées,  ou 
un  petit  flacon  île  kounivs  avec  pain  beurré.  En  cas  d'indica- 
tions spéciales  :  bouillon  avec  œufs  et  pain  beurré  ou  viande 
froide  avec  pain  beurré  et  un  verre  de  vin.  Si  possible,  de 
l'une  ou  l'autre  manière,  encore  un  verre  de  lait. 

Dîner  à  1  heure.  On  prend  de  tous  les  plats,  c'est-à-dire 
rôti,  légumes  et  dessert  ;  en  outre,  du  vin  coupe  soil  avec  de 
l'eau  de  Seltz  ou  avec  de  l'eau  de  Kronthaler. 

L'après-midi,  à  4  heures,  un  verre  de  lail  fraîchement  Irait 
ou  de  koumys,  ou  un  petit  pain  beurré  et  fourré  qu'on  prend 
avec  du  vin  ou  du  cognac. 

Le  soir,  entre  7  h.  et  7  h.  1/2,  de  la  viande  chaude  avec  pommes 
de  terre,  ri/,  nouilles,  un  plat  de  viande  froide,  du  saucisson 
tin,  de  la  volaille  avec  salade  et  compote  ;  en  plus,  du  vin. 


1)  Dakl.mukrg.  Traitement  de  la  Phtisie  pulmonaire,  t.  II.  Paris,  i883. 


RECETTES  DIVERSES  349 

Le  soir,  tard,  un  verre  de  lait  avec  deux  ou  trois  bonnes 
cuillerées  à  cale  de  cognac. 

D'après  Munie  et  Ewald,  la  ration  de  Dettweiler  représente 
plus  de  3  ooo  calories  par  jour.  Lorsqu'elle  est  bien  absorbée, 
elle  constitue  une  alimentation  très  abondante. 

M.  Sabourin,  autrefois  au  Canigou,  actuellement  à  Durtol, 
nourrit  ses  malades  à  la  mode  française,  comme  nous  l'avons 
déjà  dit,  c'est-à-dire  trois  repas,  plus  l'après-midi  un  goûter 
composé  de  viande  crue  et  de  lait. 

Mais,  en  principe,  MM.  Dettweiler  et  Sabourin  sont  d'accord  : 
il  faut  autant  que  possible  suralimenter  les  malades,  en  tenant 
compte  du  genre  de  vie  des  deux  pays  (en  Allemagne  même, 
un  homme  valide  fait  cinq  repas  par  joui*)  ;  et  je  pense  que  tous 
les  phtisio-thérapeutes  doivent  faire  varier  leur  traitement 
diététique  suivant  les  coutumes  nationales. 

Recettes  diverses  :  gelée  d'os  de  veau,  gelée  de  lait  et 
houillox  ex  bouteille.  —  Avant  de  terminer  ce  qui  a  trait  à 
l'alimentation,  je  tiens  à  donner  ici  quelques  recettes  que  j'ai 
trouvées  d'une  utilité  spéciale  pendant  et  depuis  mon  séjour 
comme  médecin  adjoint  à  Falkenstein. 

i.  Gelée  d'os  de  veau.  On  prend  deux  kilos  et  demi  d'os  de 
veau  avec  dix  litres  d'eau  ou  de  bouillon  très  faible  ;  on  met 
sur  le  feu  jusqu'à  ébiùlition  ;  on  écume,  on  ajoute  un  kilo 
d'orge  et  un  peu  de  sel,  on  fait  cuire  lentement  pendant  cinq 
à  six  heures  et  ensuite  on  passe  au  tamis.  On  en  donne  une 
tasse,  liée  avec  un  jaune  d'œuf.  Au  cas  où  la  gelée  est  trop 
épaisse,  on  la  délaye  avec  un  peu  de  bouillon. 

i.  Gelée  de  lait  (i).  On  fait  bouillir  deux  litres  de  lait  avec 
25o  grammes  de  sucre  pendant  cinq  à  dix  minutes.  Quand  le 
lait  est  refroidi  on  ajoute  3o  grammes  de  gélatine  dissoute 
dans  une  tasse  d'eau,  le  jus  de  trois  ou  quatre  citrons,  plus 
trois  verres  de  bon  bordeaux. 

3.  Bouillon  en  bouteille  (2).  Relativement  concentré  et  riche 
en  azote,  il  est  très  digestible  et  plus  nutritif  et  plus  stimulant 
que  le  bouillon  ordinaire.  On  le  prépare  avec  du  bœuf  ou  du 


(1)  ScHLiisi.xGER.  Aerztliches  Taschcnbuchleiu,  p.  91. 

(i)  Uffelmann.  Die  Flaschenbouillon.  Archiv  fur  Kinderheilkunde,  1.1,3. 


55o 


lit. UTEMENT  DIETETIQUE 


veau  de  la  manière  suivante  :  on  découpe  en  petits  carrés  de 
la  viande  fraîche  et  dépourvue  de  graisse  ;  sans  y  rien  ajouter 
on  la  met  dans  une  bouteille  à  fermeture  brevetée.  On  place 
la  bouteille  dans  un  bassin  d'eau  tiède,  on  chauffe  lentement 
et  on  laisse  bouillir  pendant  vingt  minutes  environ.  La  bou- 
teille renferme  alors  un  liquide  brunâtre  ou  jaunâtre,  suit 
oo  à  ioo  c.  c.  pour  3oo  grammes  de  viande.  C'est  ce  qui  cons- 
titue le  bouillon  en  bouteille,  qu'on  décante  simplement  sans 
même  le  passerai!  tamis  ;  il  aune  très  forte  odeur  de  bouillon 
et  possède  une  réaction  faiblement  acide  ;  sa  saveur  est  celle 
d'un  bouillon  ordinaire  très  concentré. 

Prépare  avec  du  bœuf,  il  renferme  environ  -, 3  p.  ioo  de 
substances  lixes,  dont  5,5  p.  ioo  de  substances  organiques  et 
1,7  p.  ioo  de  sels.  Les  substances  organiques  se  composent 
de  i,8  parties  d'albumine,  de  peptone  et  de  gélatine,  et  de 
3,7  parties  de  substances  extractives.  Le  bouillon  ou  le  potage 
pris  régulièrement  avant  les  principaux  repas  excite  l'appétit 
et  aide  la  digestion  par  la  stimulation  qu'il  exerce  sur  la 
sécrétion  gastrique. 


Du  lait. 

Le  lait,  comme  nous  l'avons  déjà  dit  plus  haut,  a  été 
employé  depuis  l'antiquité  comme  l'aliment  principal  des 
phtisiques.  Arétée  (i)  disait  déjà  en  l'an  ■<5o  avant  1ère  chré- 
tienne, dans  son  ouvrage  sur  la  «  Cure  de  la  phtisie  »,  que  le 
lait  est  une  excellente  boisson  pour  les  phtisiques.  Un  peu 
plus  loin  il  ajoute  :  «  Celui  qui  boit  beaucoup  de  lait  peut  se 
passer  d'autres  aliments  ;  les  peuples  qui  s'en  nourrissent 
n'ont  pas  besoin  de  blé.  »  El  depuis  le  régime  lacté  a  été 
prescrit  dans  la  phtisie  pulmonaire  par  les  médecins  de  tous 
les  temps. 

Quantité  kt  qualité.  —  Dans  quelques  sanatoria  pour  phti- 
siques le  lait  est   pris   en  quantités   considérables    avec    et  en 


(i)  Arétée.   De  morborum   diuturnorum  el  aculorum  causis,  signis  cl  cura- 
Lionc,  chap.  m. 


DU  LAIT  35 1 

dehors  des  repas  réguliers.  Mais  je  crois  qu'il  ne  faut  pas 
donner  le  lait  à  trop  haute  dose  quand  le  malade  digère  et 
assimile  les  aliments  solides  d'une  façon  satisfaisante.  Pris 
aux  trois  repas  principaux  et  au  goûter  (200  à  a5o  grammes 
chaque  fois),  un  litre  par  jour  est  alors  suffisant.  Dans  le  cas 
où  il  y  aurait  lieu  de  prescrire  le  lait  en  quantité  plus  consi- 
dérable, je  préfère  le  donner  dans  les  intervalles  des  repas. 
Là  où  Ton  n'aura  pas  la  certitude  que  le  lait  provient  de 
vaches  bien  saines,  on  recommandera  de  le  donner  bouilli  ou 
stérilisé. 

Koumys  et  képhir. — Au  lieu  de  lait  on  peut  prescrire  aussi  le 
koumys  (lait  de  jument  ayant  subi  la  fermentation  alcoolique  et 
lactique),  ou  le  kéfir  (lait  de  vache  préparé  avec  les  grains  de 
kéfir  ;  composition  et  action  analogues  à  celles  du  koumys). 

Façon  de  boire  le  lait.  —  Comme  rèsle  e-énérale  il  faut 
conseiller  aux  pblisiques  de  boire  le  lait  à  petites  gorgées. 
S'ils  éprouvent  de  la  répugnance,  ils  doivent  remplacer  le 
lait  par  le  koumys  ou  le  kéfir,  ou  bien  y  ajouter  un  peu  de 
cognac,  de  café,  d'eau  de  Vais,  de  Vichy,  de  l'eau  de  chaux  (une 
cuillerée  à  bouche  par  verre),  ou  un  peu  de  bicarbonate  de 
soude  (une  pincée  par  verre).  Ces  alcalins  ont  pour  but  de 
neutraliser  l'acidité  excessive  des  sécrétions  gastriques.  Le 
lait  est  contre-indiqué  en  cas  de  constipation  fréquente,  et 
aussi  en  cas  de  diarrhée  aiguë  et  de  nausées. 

Petit-lait.  —  Quand  les  fonctions  digestives  sont  en  bon  état, 
le  petit-lait  peut  aussi  servir  à  l'alimentation  des  phtisiques. 

A'ous  trouvons  à  ce  sujet  dans  l'excellente  thèse  de  mon 
ami   le   D1'  Comte  de  Goyon  (1)  les  renseignements  suivants  : 

«  Le  petit-lait  à  des  doses  élevées  est  purgatif,  à  des 
petites  doses  il  est  seulement  laxatif  ;  c'est  cette  double 
propriété  que  Ton  recherche  avec  raison,  afin  de  favoriser 
les  sécrétions  intestinales  et  de  combattre  la  pléthore  abdo- 
minale si  fréquente  au  début  de  la  phtisie.  Son  action  sur  la 
muqueuse  bronchique  est  identique  à  celle  qu'il  exerce  sur  les 


(1)  Comte  de  Goyon.  Des  indications  thérapeutiques  du  régime  lacté.  Thèse 
Paris,  i8g5. 


iSï  TRAITEMENT  DIÉTÉTIQUE 

muqueuses  stomacale  et  intestinale,  il  rend  donc  l'expectora- 
tion plus  facile  el  la  toux  moins  pénible.  Il  est  de  plus  un 
excellent  diurétique.  Son  efficacité  n<'  saurait  être  contestée  ; 
les  cas  sont  nombreux  où,  à  la  suite  d'une  cure  de  petit-lait,  les 
phtisies  ont  été  améliorées  ou  même  enrayées  d'une  façon  du- 
rable. Certains  ailleurs  ont  paru  considérer  le  petit-lait  connue 
étant  seul  utile  dans  la  phtisie  pulmonaire,  alors  que  d'autres 
préféraient  l'usage  du  lait  lui-même;  la  vérité  est  que  les  indi- 
cations du  petit-lait  et  celles  du  lait  ne  sont  pas  les  mêmes.  La 
cure  du  petit-lait  sera  conseillée  dans  la  forme  active  et  lors- 
que la  tuberculose  pulmonaire  se  présentera  avec  les  carac- 
tères hémoptoïques  ;  on  ne  la  prescrira  jamais  dans  les  formes 
passives.  11  est  sage  d'admettre  l'opinion  de  Hérard  et  Gornil  : 
«  Autant,  disent-ils,  la  médication  lactée,  tempérante  et  anti- 
phlogistique  nous  parait  avantageuse  dans  les  cas  aigus  ou 
subaigus  chez  les  individus  nerveux,  à  libre  irritable,  hémop- 
toïques, autant  elle  peut  avoir  d'inconvénients  graves  quand  la 
tuberculisation  présente  une  forme  apyrétique,  cl  qu'elle 
s'observe  chez  des  malades  mous  et  lymphatiques,  qui  ont, 
avant  tout,  besoin  d'un  régime  substantiel  et  réparateur.  Les 
purgatiôns  répétées  que  provoque  souvent  le  petit-lait  ne 
peuvent  avoir,  en  pareil  cas,  qu'un  effet  fâcheux.  » 


De  l'alcool. 

L'alcool  est  employé  depuis  longtemps  en  phtisio-thérapie 
et  il  joue  un  rôle  important  pour  le  traitement  dans  les  établis- 
sements fermés.  Les  opinions  sur  la  dose  et  surtout  sur  le 
mode  d'administration  sont  très  variables.  En  le  prescrivant  il 
faut  se  rappeler  les  effets  qu'il  produit  sur  l'organisme  : 

Effets  physiologiques.  —  «  i°  11  est  brûlé  directement  et 
donne  lieu  a  une  production  de  forces  dont  l'organisme  tire 
parti  ;  a"  il  ralentit,  à  doses  modérées,  le  mouvement  de  désas- 
similation,  mais  ce  phénomène  paraît  être  un  signe  de  dépres- 
sion nutritive  ;  3°  il  excite  le  système  nerveux  et  l'excitation 
est  suivie  de  dépression  ;  4°  il  est  diurétique  (i).  » 


(i)  Manquât.  Traité  de  Thérapeutique.  Paris,  189'!,  p.  3îî. 


DE  L'ALCOOL  353 

Mais,  malgré  ces  données  physiologiques  générales,  presque 
chaque  cas  demande  encore  une  indication  spéciale.  À  quel- 
ques phtisiques  il  est  indispensable  de  donner  l'alcool  :  il  est 
devenu  pour  eux  un  véritable  aliment  ou  tout  au  moins  il  cons- 
titue un  adjuvant  précieux  dans  l'alimentation  ;  chez  d'autres, 
il  agit  comme  un  simple  stimulant  cardiaque. 

Alcool  dilué.  —  Pour  beaucoup  il  est  bon  de  le  prescrire 
dilué,  sous  l'orme  de  vin  ou  de  bière.  Le  vin  blanc,  peu  alcoo- 
lisé, est  souvent  à  recommander  comme  boisson  aux  repas. 
Le  vin  rouge  semble  donner  trop  tôt  à  l'estomac  comme  une 
sensation  de  satiété,  et  le  malade  mange  alors  moins  qu'il  ne 
devrait. 

Enfin,  l'administration  continue  de  cognac  peut  devenir 
dangereuse. 

Avant  de  l'employer  comme  antipyrétique,  on  doit  avoir 
recours  à  l'eau  froide,  aux  antifébriles,  etc. 

Surveillance  nécessaire. —  Ici,  comme  pour  l'administration 
d'autres  médicaments,  on  trouve  un  grand  avantage  à  avoir 
son  malade  constamment  sous  les  yeux. 

Il  ne  peut  pas  nous  dire,  comme  les  malades  libres,  surtout 
ceux  qui  ont  une  prédisposition  à  l'éthylisme  :  «  Oui,  je  me 
sens  très  bien  quand  je  prends  un  peu  d'alcool.  »  Dans  un 
établissement  fermé,  en  effet,  on  peut  plus  facilement  obser- 
ver si  ces  périodes  de  bien-être  sont  physiologiques  ou  patho- 
logiques (ivresse). 

Boissons  stimulantes.  —  Le  cale  et  le  thé  peuvent  être  pres- 
crits sans  crainte  aux  phtisiques,  car  ces  breuvages,  pris  en 
quantité  modérée,  exercent  une  action  bienfaisante  sur  le 
cœur. 


Conseils  relatifs  à  l'alimentation  des  phtisiques. 

Nous  allons  examiner  sous  le  titre  «  Traitement  symptoma- 
tique  »  les  diverses  conditions  qui  produisent  les   anorexies 
et  autres  troubles  gastriques  et  intestinaux.  Ici  nous  voulons 
Knopf.  Sanatoria.  23 


35  i  TRAITEMENT  DIÉTÉTIQUE 

seulement  dire  <|tie,  d'une  manière  générale,  les  tubercu- 
leux fébricitants  doivent  manger  dans  l'intervalle  des  accès, 
ou  tout  au  moins  au  moment  où  la  lièvre  est  le  moins 
forte. 

En  dehors  des  sujets  dont  l'état  réclame  un  régime  spé- 
cial, de  très  légers  repas  répétés,  même  toutes  les  heures,  il 
faut  apprendre  aux  malades  à  manger  à  heures  tixes  :  mieux  vaut 
perdre  un  repas  que  de  devenir  irrégulier.  Une  autre  pres- 
cription pour  tous  les  malades  est  de  manger  lentement,  de 
bien  mâcher  tous  les  aliments,  surtout  le  pain,  qui  ne  doit  pas 
être  trop  frais  mais  toujours  bien  cuit;  car,  pour  (pie  l'ami- 
don du  pain  puisse  se  transformer  en  dextrine,  il  faut  qu'il 
y  ait  abondance  de  ptyaline.  Ici,  j'insiste  sur  le  fait  qu'un 
sanatorium  bien  dirigé  doit  être  muni  d'un  fauteuil  de  den- 
tiste et  recevoir  les  visites  régulières  d'un  spécialiste  expé- 
rimenté. Pour  bien  digérer,  il  faut  avoir  toutes  les  dents  en 
bon  état,  car,  avec  de  mauvaises  dents,  on  ne  peut  pas  masli- 
quer. 

A  son  entrée  dans  un  sanatorium,  tout  malade  doit  être 
soumis  à  un  examen  minutieux  non  seulement  des  poumons, 
du  cœur,  du  larynx,  du  pharynx,  de  l'état  général,  mais  aussi 
de  la  bouche  et  des  dents.  L'antisepsie  buccale  sera  régu- 
lièrement pratiquée. 

La  préparation  suivante,  employée  comme  dentifrice  et 
pour  se  rincer  la  bouche  après  chaque  repas,  laisse  une  fraî- 
cheur agréable  et  maintient  les  dents  en  bon  étal  : 

Essence  de  wintergreen XV  gouttes. 

—      de  menthe XX        » 

Thymol '  gramme. 

Acide  benzoïque 10  grammes. 

Alcoolalure  d'eucalyptus 5o  >■ 

Alcool 35o  » 

Une  demi-cuillerée  à  calé  dans  un  grand  verre  d'eau  fraîche. 

Enfin,  tous  les  moyens  possibles,  tous  les  subterfuges  sont  per- 
mis au  médecin  pour  faire  manger  le  malade,  car  le  secret  delà 
guérison  est  de  savoir  combattre  «  la  misère  physiologique  »(i), 


(i)  Grancher.  Maladies  de  l'appareil  respiratoire. 


ALIMENTATION  DES  PHTISIQUES  355 

et  il  ne  faut  jamais  oublier  les  paroles  classiques  de 
Dettweiler  :  «  C'est  la  destinée  particulière  des  phtisiques 
de  voir,  pendant  que  les  tissus  disparaissent  par  le  l'ait  de  la 
dénutrition,  pendant  que  ces  tissus  meurent  de  faim,  la  véri- 
table faim  diminuer  de  plus  en  plus.  » 


CHAPITRE   XIX 
Traitement  symptomatique. 

Nous  allons  maintenant  passer  en  revue  les  symptômes  mul- 
tiples <|iii  peuvent  se  présenter  pendant  la  durée  de  la  phtisie 
pulmonaire. 

Toux.  —  La  toux  sans  cause,  c'est-à-dire  avant  que  le 
crachai  suit  prêt  à  être  expidsé,  n'est  pas  permise  dans  les 
sanatoria. 

Voici  la  phrase,  devenue  classique,  qu'adresse  Dettweiler  à 
tous  les  malades  tuberculeux  (i)  :  «  Quand  vous  axez  une 
démangeaison  en  public,  vous  ne  vous  grattez  pas.  Eh  bien, 
la  toux  sans  crachais,  c'est  le  grattage  de  la  gorge  qui  démange; 
ne  vous  grattez  pas  la  gorge  en  public.  » 

Dans  tous  les  sanatoria  la  même  règle  est  appliquée,  et  l'on 
est  surpris  de  voir  combien  les  malades  toussenl  peu  en  com- 
paraison de  ce  qu'on  entend  dans  les  salles  d'hôpital  et  aussi 
dans  la  clientèle  privée. 

Mais,  voici  une  expérience  qui  démontre  bien  qu'il  faut  une 
détermination  solidement  arrêtée  pour  arriver  à  discipliner 
ainsi  la  toux  tic  u>o  malades  et  plus. 

Lors  de  ma  première  visite  à  Falkenstein,  pendant  le  <  1  î 1 1 <■  i- 
oii  l'on  m'avait  donné  la  place  d'honneur,  près  du  maître,  était 
assis  non  loin  de  nous  un  confrère  phtisique.  Il  toussait, 
toussait  et  continuait  à  tousser.  M.  Dettweiler  me  dit  à  voix 
basse  :  «  Vous  voyez  ce  confrère  qui  tousse.  Eh  bien,  je  lui 
dirai  après  dîner  de  ne  plus  tousser  ou  de  prendre  ses  repas 
chez  lui.  car  il  n'a  pas  besoin  de  tousser.   » 

Le  soir  même,  pendant  le  souper,  notre  malheureux  con- 
frère était  à  sa  place,  mais  il  ne  toussa  pas  une  seule  fois  pen- 
dant toute  la  durée  du  repas. 


(î)  Dettweiler,  cité  par  Darembekg,  m  Traitement  de  la  Phtisie  pulmonaire. 


TOUX  357 

Contre  l'irritation  incessante  une  gorgée  d'une  boisson 
fraîche  est  souvent  suffisante.  Dans  quelques  cas,  on  donne 
une  solution  de  codéine  à  1/200  à  prendre  par  demi-cuillerée 
chaque  fois  que  le  malade  sent  qu'il  va  avoir  une  quinte  de 
toux.  Il  est  facile  de  comprendre  que,  clans  les  établissements 
fermés,  où  le  traitement  par  le  régime  est  la  chose  principale, 
on  évite  autant  que  possible  l'administration  de  médicaments, 
car  non  seulement  les  médicaments,  tels  que  la  codéine  et  sur- 
tout la  morphine,  ont  sur  l'estomac  une  influence  fâcheuse, 
mais   ils  ont  presque   tous   l'inconvénient  d'affaiblir  le  sujet. 

On  doit  donc,  quand  on  se  trouve  en  présence  d'une  toux 
quinteuse  que  la  volonté  du  malade  est  impuissante  à  empê- 
cher, recourir  à  l'injection  sous-cutanée  d'eau  pure  stérilisée 
préconisée  par  M.  le  professeur  Landouzy  en  1880.  Cette 
méthode  est  recommandée  par  Hérard,  Cornil  et  Hanot  (r), 
par  Marfan  (a)  et  d'antres  encore  comme  inoffensive,  rapide  et 
facile  à  employer. 

On  pratique  l'injection  dans  la  région  sous-claviculaire  ou 
cervicale,  et  si  le  malade  peut  localiser  le  point  où  les  picote- 
ments qui  précèdent  la  toux  sont  le  plus  intenses,  on  la  fait 
en  cet  endroit.  On  prépare  une  petite  surface  au  lieu  désigné, 
avec  les  précautions  antiseptiques,  c'est-à-dire  après  avoir 
pratiqué  une  friction  vigoureuse  avec  un  tampon  d'ouate  trempé 
clans  du  sublimé  à  1/1000  ou  1/2000  ou  dans  d'autres  antisep- 
tiques, pour  éviter  la  formation  de  petits  abcès,  puis  on 
injecte  une  seringue  de  Pravaz  pleine  d'eau  distillée. 

Les  malades  qui  ont  besoin  d'expectorer,  mais  dont  les 
crachats  ne  se  détachent  pas  facilement,  sont  traités,  comme 
partout,  par  des  expectorants,  tels  que  les  préparations  de 
terpine,  de  benzoïne,  ou  des  inhalations  d'eau  chaude. 

Un  remède  simple  et  efficace  est  la  potion  suivante  : 

Sirop  de  codéine 80  grammes. 

—     d'éther 20  » 

Eau  de  tilleul 100  » 

4  ou  5  cuillerées  à  soupe  par  jour. 


(1)  Hérard,  Cornil  et  Hanot.  La  Phtisie  pulmonaire,   1888. 

(2)  Marfan.  Art.  «  Phtisie  »,  in  Traité  de  Médecine  de  Charcol  et  Bouchard. 


358  TRAITEMENT  SYMPTOMATIQUE 

Vomissements.  —  Si  la  toux  provoque  des  vomissements, 
on  emploie  la  codéine,  qui,  sans  supprimer  l'expectoration, 
agit  comme  sédatif. 

On  tâche  de  combattre  les  vomissements  qui  ne  dépendent 
pas  de  la  toux  par  des  repas  froids,  petits  mais  assez  fréquents 
pour  bien  nourrir  le  malade,  et  toujours  suivis  d'un  repos 
absolu.  Jaccoud  a  proposé  les  pulvérisations  d'éther  sur 
la  région  épigastrique.  De  simples  compresses  d'eau  froide 
peuvent  aussi  faire  du  bien  en  pareil  cas.  Un  autre  moyen 
qui  m'a  rendu  des  services,  surtout  quand  le  vomissement 
se  produit  le  matin,  consiste  à  faire  boire  un  verre  d'eau 
chaude  au   malade  une  demi-heure  avant  de  se  lever. 

Les  phtisiques  très  avancés  ont  souvent  de  la  difficulté 
à  expulser  leurs  sécrétions  bronchiques.  Le  procédé  que 
Reusner  (de  Saint-Pétersbourg)  a  imaginé  dans  les  cas  de 
myélite  avec  paralysie  des  muscles  thoraciques  pour  expul- 
ser les  sécrétions  de  la  bronchite,  peut  être  aussi  employé 
avec  avantage  chez  les  malades  tuberculeux  trop  faibles 
pour  se  débarrasser  des  exsudats  gênant  la  respiration. 
Voici  ce  procédé,  qu'il  est  facile  d'enseigner  au  gardien 
du  malade.  Il  a  pour  but  de  renforcer  le  diaphragme  et 
les  muscles  abdominaux  dans  l'effort  destiné  à  expulser  les 
mucosités  accumulées  dans  les  bronches.  Le  malade  se  place 
sur  le  dos,  après  avoir  vidé  sa  vessie  ;  l'infirmier  se  met 
du  côté  droit  du  lit,  et  avec  la  main  droite  appliquée  sur 
l'abdomen,  il  l'ait  des  mouvements  progressifs  dans  la  direc- 
tion de  la  vessie.  La  main  gauche  est  mise  à  plat  sur  la 
région  hypogastrique  ;  avec  un  peu  de  force  on  exerce  une 
pression  assez  profonde  pour  sentir  la  pulsation  île  l'aorte. 
Le  malade  commence  à  tousser  presque  immédiatement,  et 
on  maintient  cette  compression  jusqu'à  ce  qu'il  se  sente 
soulagé  par  l'expulsion  des  sécrétions. 

Il  y  a  aussi  des  cas  où  l'accès  de  toux  produit  des  secousses 
vraiment  douloureuses  ;  pour  les  atténuer  je  conseille 
d'entourer  le  thorax  d'une  large  bande  de  flanelle  bien 
serrée. 

De  même,  quand  l'expectoration  est  très  difficile  et  que  la 
rétention  des  crachats  s'accompagne  d'oppression,  il  est 
indiqué  de   faire,  selon  l'expérience  de  notre    très  distingué 


EMPHYSÈME  35g 

confrère  le  Dr  Darèmberg  (i),  des  pulvérisations  d'eau 
chaude,  des  inhalations  d'oxygène,  et  de  temps  en  temps, 
au  moment  des  grands  accès,  des  inhalations  de  pyridine, 
d'iodure  d'éthyle  ou  de  nitrite  d'amyle,  ou  encore  de  poudre 
anti-asthmatique.  Si  l'on  n'a  pas  d'inhalateur  à  vapeur  sous  la 
main,  une  casserole  placée  au-dessus  d'une  lampe  à  alcool 
peut  servir. 

Dyspnée.  —  Dans  la  majorité  des  cas  de  dyspnée  aiguë, 
quelle  qu'en  soit  la  cause,  le  meilleur  moyen  à  employer  me 
semble  être  les  inhalations  d'oxygène,  telles  qu'on  les  pratique 
journellement  dans  les  hôpitaux  de  Paris,  et  j'estime  qu'un 
sanatorium  doit  toujours  être  muni  d'appareils  pour  appliquer 
ce  traitement.  Dans  les  divers  services  que  j'ai  eu  l'honneur 
de  suivre  à  Paris,  j'ai  souvent  vu  des  effets  merveilleux  pro- 
duits par  ce  gaz. 

Je  sais  bien  que  le  remède  le  plus  facile  et  le  plus  souvent 
employé  dans  ces  cas  est  une  injection  de  morphine.  Mais  je 
ne  crois  pas  que  cela  soit  sans  danger,  et  l'on  devrait  tou- 
jours essayer  d'abord  d'autres  médicaments  qui,  contraire- 
ment à  la  morphine,  ne  déprimeraient  pas  davantage  un  cœur 
déjà  fatigué. 

Emphysème.  —  L'emphysème  n'est  pas  rare  chez  les  tuber- 
culeux. Malheureusement,  en  dehors  des  palliatifs  tels  que 
l'oxygène,  le  stramonium,  etc.,  il  y  a  peu  de  médicaments 
qui  soulagent  réellement,  et  encore  moins  qui  guérissent.  Un 
emphysémateux  doit  éviter  le  surmenage  et  toutes  les  causes 
d'excitation.  Les  exercices  respiratoires  lui  font  du  bien, 
mais  ceux  que  nous  avons  décrits  plus  haut  (p.  3oo,-3 12)  ne 
lui  conviennent  pas.  Pour  eux  et  pour  les  asthmatiques,  c'est 
l'expiration  qui  doit  être  plus  longue  que  l'inspiration  ; 
pendant  le  mouvement  inspiratoire,  ces  malades  devraient 
mettre  les  deux  mains  à  plat  sur  la  poitrine.  Le  deuxième 
effort  expiratoire  avec  les  bras  en  supination  comprimant 
avec    force   la    cage   thoracique    est  d'une    haute   importance 


(j)  Dare.mberg.  Traitement  de  la  Phtisie  pulmonaire.  Paris,  1893. 


36o  TRAITEMENT  SYMPTOMATIQUE 

pour  les  emphysémateux,  car  il  aide  à  l'expulsion  de  l'air 
accumulé  dans  les  alvéoles. 

La  rétention  de  l'air  après  l'inspiration,  qui  est  un  avantage 
pour  un  tuberculeux  ordinaire,  n'est  pas  à  conseiller  aux  em- 
physémateux. L'emploi  du  cabinet  pneumatique,  pour  les 
tonnes  chroniques  emphysémateuses  et  dyspnéiques ,  m'a 
rendu  de  bons  services.  Je  fais  inspirer  au  malade  l'air 
extérieur  et  le  fais  expirer  dans  l'atmosphère  raréfiée  du 
cabinet,  c'est-à-dire  qu'à  l'aide  du  tube  il  inspire  par  le 
nez  l'air  extérieur  et  fait,  dans  l'appareil,  une  expiration 
un  peu  forcée  par  la  bouche.  Le  masque  nasal,  relié  au 
tube  venant  de  l'extérieur,  ne  couvre  pas  la  bouche. 

Un  autre  moyen  physique  pour  soulager  les  sensations 
dyspnéiques  des  emphysémateux  et  îles  asthmatiques,  et  qui 
aide  aussi  à  l'expulsion  des  sécrétions  bronchiques  et  pulmo- 
naires, est  le  suivant.  Ce  procédé,  recommandé  par  Gerhardt 
(de  Berlin)  (i),  a  cet  avantage  qu'il  n'exige  aucun  appareil  et 
que  le  malade  peut  l'appliquer  lui-même.  Le  patient  se  met 
sur  le  ventre  et  croise  les  bras  derrière  le  dos.  Les  surfaces 
plantaires  des  pieds  s'appliquent  contre  le  bout  du  lit,  les 
orteils  s'enfonçant  dans  le  matelas.  Un  petit  oreiller  est  placé 
sous  la  partie  supérieure  de  la  poitrine.  Le  front  repose  sur 
un  deuxième  oreiller.  Le  malade  fait  des  inspirations  pro- 
fondes, et,  pendant  chaque  expiration,  il  accomplit  un  fort 
mouvement  d'extension  des  pieds  qui  a  pour  effet  de  projeter 
la  poitrine  contre  l'oreiller. 

Afin  d'éviter  la  gène  produite  sur  la  respiration  par  le 
refoulement  du  diaphragme,  l'emphysémateux  doit  éviter 
toutes  les  substances  alimentaires  susceptibles  de  causer  la 
distension  des  intestins,  telles  (pie  fèves,  haricots,  pommes 
de  terre,  etc. 

Bronchorrhée.  —  Quand  on  se  trouve  en  présence  d'une 
toux  compliquée  de  bronchorrhée  persistante,  les  injections 
intratrachéales,  faites  à  l'aide  d'un  laryngoscope  et  d'une 
seringue   laryngienne  (fig.  82)   après  cocaïnisalion    préalable, 


(1)  Gerhardt.  Befûrderung  (1er  Àusathruung.   Zeitsckrift  fur  diàtetische  iind 
physikalische  Thérapie,  1.  I,  p.  11. 


DOULEURS  THORACIQUES  36i 

sont  indiquées.  Vingt  gouttes  du  mélange  ci-dessous,  une  ou 
deux  fois  par  jour,  agissent  bien  comme  sédatif  et  antisep- 
tique local  sur  la  muqueuse  irritée  : 

Gaïacol \     . .   YV 

_              ,             .  .     aa  XX  gouttes. 

Jisscncc  de  menllie 

Huile  d'olives 4  grammes. 

Douleurs  thoraciques.  —  Contre  les  douleurs  de  la 
névralgie  intercostale,  ou  cette  vague  sensation  d'inquiétude 
que  le  malade  ressent  dans  la  poitrine  à  la  suite  des  accès 
de  toux  douloureuse,  surtout  pendant  la  nuit,  il  n'y  a  rien 
de  mieux  que  d'entourer  tout  le  thorax  d'une  compresse 
froide    telle    que     nous    allons     la     décrire     comme     moyen 


Fig.  S2.  —  Seringue  laryngienne  pour  les  injections  intratrachéales. 


hydrothérapique  contre  les  sueurs  nocturnes  rebelles.  Pour 
les  douleurs  thoraciques,  comme  pour  l'hyperhidrose,  cette 
compresse  à  l'eau  froide  doit  être  appliquée  surtout  le  soir 
avant  le  coucher.  Le  malade  reste  ainsi  enveloppé  toute  la 
nuit. 

Les  révulsifs,  dans  le  traitement  de  la  phtisie  en  gé- 
néral, mais  surtout  quand  il  y  a  des  douleurs  thoraci- 
ques, des  névralgies  intercostales,  etc.,  sont,  selon  moi, 
d'une  grande  valeur,  car  il  est  démontré  aujourd'hui  que 
par  cette  contre-irritation  la  fonction  phagocytique  est  ren- 
due plus  active.  J'ai  déjà  parlé  dans  mon  chapitre  sur 
l'hydrothérapie  de  l'effet  révulsif  que  l'on  produit  en  diri- 
geant un  jet  d'eau  froide  avec  un  peu  de  force  sur  le  som- 
met des  épaules. 

Les  révulsifs  proprement  dits  sont  peu  employés  dans  les 
sanatoria  ;  mais,  pour  ma  part,  je  m'en  voudrais  d'abandonner 


Ï62  TRAITEMENT  SYMPTOMATIQUE 

la  vieille  et  excellente  méthode  des  ventouses  sèches  dans 
les  cas  de  petites  poussées  bronchiques  pleurales  ou  pulmo- 
naires, si  fréquentes  dans  la  phtisie  à  évolution  lente. 
S'il  est  indiqué  d'appliquer  un  vésicatoire,  je  préférerai 
toujours  quelques  pointes  de  l'eu  à  l'aide  du  thermocautère,  ou 
encore  mieux  la  réfrigération  avec  le  chlorure  de  méthyle,  pré- 
conisée par  Debove. 

Fièvre  chronique.  —  La  lièvre  est  le  symptôme  le  plus  dif- 
ficile à  combattre  dans  la  phtisie  pulmonaire.  On  devrait 
toujours  essayer  de  traiter  la  lièvre  ordinaire  des  phti- 
siques par  le  repos  à  l'air  pur  et  frais  et  par  le  régime. 
La  phénacétine  (i5  à  4°  centigrammes),  l'antifébrine  (10  à 
25  centigrammes),  l'antipyrine  (25  centigrammes  à  i  gramme) 
sont  des  remèdes  assez  précieux  en  pareil  cas.  Mais  je  ne 
crois  pas  qu'il  soit  bon  de  continuer  le  même  médicament 
trop  longtemps.  11  vaut  mieux  recourir  de  temps  en  temps 
aux  lotions  fraîches  et  autres  moyens  hydrothérapiques. 
Les  compresses  froides  appliquées  alternativement  sur  les 
diverses  parties  du  corps,  ou  les  épongements  partiels,  m'ont 
souvent  rendu  de  grands  services  dans  la  lièvre  continue  des 
phtisiques. 

Les  boissons  glacées  et  les  potions  alcooliques  contribuent 
à  abaisser  la  température.  Jaccoud  donne  la  formule  d'une 
potion  alcoolique  très  goûtée  des  malades  : 

Vin  rouge ioo  grammes. 

Cognac io  » 

Sirop  d'écorces  d'oranges  amères.    .    .  5o  » 

Teinture  de  cannelle 8  » 

Extrait  de  quinquina 3  » 

Je  préfère  prescrire  celle  potion  entourée  de  glace,  et  au 
lieu  de  4°  grammes  de  cognac,  j'en  mets  seulement  la  moitié 
ou  même  pas  du  tout.  Une  vessie  de  glace  peu  lourde  peut 
être  appliquée  sur  la  région  précordiale  quand  la  lièvre 
atteint  un  certain  degré  d'intensité.  Si,  malgré  tous  ces 
moyens,  la  lièvre  ne  tombe  pas,  Deltweiler  recommande 
les  inhalations  antiseptiques  (créosote,  acide  phénique, 
etc.,  etc.). 

La    quinine    semble    être    peu    utile    comme    antipyrétique 


FIÈVRE  SEPTIQUE  363 

dans  la  fièvre  chronique  des  phtisiques.  Les  médicaments 
que  nous  venons  de  citer  paraissent  agir  plus  avantageu- 
sement. A  petites  doses,  la  quinine  est  indiquée  plutôt 
comme  tonique. 

Fièvre  septique  et  sérum  de  Marmorek.  —  Quand  la  fièvre 
.est  due  aux  associations  microbiennes,  c'est-à-dire  lorsque 
différents  microbes,  en  particulier  les  streptocoques,  se  sont 
associés  aux  bacilles  de  la  tuberculose  et  que  les  moyens 
ordinaires  sont  restés  sans  résultat,  on  est  en  droit  de 
recourir  à  la  sérothérapie.  J'ai  essayé  moi-même  depuis  près 
de  deux  ans  déjà  cette  méthode  thérapeutique  chez  les 
tuberculeux  avec  fièvre,  lorsque  l'examen  bactériologique 
démontrait  la  présence  de  streptococques.  Quoique  nous  ne 
possédions  vraisemblablement  pas  encore  un  sérum  strep- 
tococcique  d'une  intensité  fixe,  le  sérum  de  Marmorek  n'en 
est  pas  moins  doué  de  propriétés  antipyrétiques  incontes- 
tables dans  la  fièvre  mixte  de  la  tuberculose. 

Voici  le  résumé  de  mon  expérience  personnelle  en  ce  qui 
touche  cet  agent  précieux,    dont  l'avenir  me  semble   certain  : 

Quand  la  température  avait  dépassé  pendant  plusieurs 
jours  3o,°5,  je  n'obtenais  aucun  résultat.  Au-dessous  de  ce 
degré,  une  première  injection  abaissait  la  température  d'un 
degré  environ.  Une  seconde  injection  de  10  centimètres 
cubes  ramenait  la  température  presque  à  la  normale.  Une 
troisième,  quatrième,  cinquième  et  sixième  injections,  de 
5  centimètres  cubes  chacune,  pratiquées  toutes  les  vingt- 
quatre  heures  d'abord,  puis  à  intervalles  plus  éloignés, 
maintenaient  la  température  au  voisinage  de  la  normale,  en 
même  temps  que  le  malade  éprouvait  un  soulagement 
marqué. 

Ce  qui  est  essentiel  dans  l'emploi  de  ce  séruum,  c'est  de 
s'assurer  toujours  qu'il  est  en  bon  état,  que  les  injections 
sont  faites  suivant  les  règles  de  l'asepsie  et  dans  des  endroits 
où  l'on  est  sur  de  rencontrer  des  tissus  musculaires  profonds, 
chose  qui  n'est  pas  toujours  facile  avec  les  tuberculeux  amai- 
gris. Je  trouve  que  les  flancs  ou  la  partie  antéro-interne  de  la 
cuisse  sont  les  parties  qui  se  prêtent  le  mieux  aux  injections. 
Pour  éviter  toute  possibilité  d'une  infection  post-opératoire, 


36-1  TRAITEMENT  SrMPTQMATIQUE 

j'ai  l'habitude  de  fermer  la  piqûre  produite  par  l'aiguille  avec 
du  collodion  iodoformé. 

Eu  dehors  des  médicaments  antiseptiques,  le  régime  et  la 
manière  de  vivre  d'un  phtisique  fiévreux  ont  une  importance 
capitale. 

D'abord  il  est  bien  entendu  que  dès  que  la  température 
vespérale  d'un  malade  s'élève  au-dessus  de  3o.°5,  le  repos  au 
lit  dans  une  chambre  aérée  est  de  rigueur.  Quand  la  lièvre 
commence  à  s'abaisser  on  peut  permettre  au  malade  de  l'aire 
sa  cure  d'air  sur  la  véranda  tète  et  corps  à  l'ombre),  mais  sans 
autoriser  les  promenades.  S'il  y  a  fièvre  continue  les  exercices 
sont  absolument  défendus  jusqu'à  ce  que  la  température  soit 
devenue  et  demeure  à  peu  près  normale  pendant  plusieurs  jours. 

Les  fiévreux  doivent  prendre  leur  repas  autant  que  possible 
avant  les  accès  fébriles.  Dans  certains  sanatoria  on  donne 
quelques  verres  (i  ou  2'  de  vin  de  Hongrie,  une  heure  avant 
l'élévation  habituelle  de  la  température  :  c'est  une  pratique  à 
recommander.  En  tous  cas  il  faut  nourrir  les  phtisiques 
fiévreux.  Des  mets  froids,  des  boissons  glacées  (café,  thé, 
limonade)  et  l'habitude  tic  prendre  les  repas  autant  que  possible 
à  l'air  libre,  sont  des  moyens  précieux  pour  faire  manger  un 
tuberculeux  fébricitant. 

Je  ne  suis  pas  d'avis  de  laisser  le  malade  prendre  sa  tempé- 
rature lui-même,  et  je  ne  crois  pas  non  plus  qu'il  soit  néces- 
saire de  la  relever  trop  souvent.  Certains  phtisio-thérapeutes 
recommandent  à  leurs  malades  de  prendre  eux-mêmes  leur 
température  toutes  les  deux  heures  (1).  C'est  une  pratique 
dangereuse  pour  l'esprit  du  patient,  surtout  s'il  est  de  tem- 
pérament nerveux  et  pusillanime.  Pour  se  rendre  compte  du 
degré  thermique  du  malade,  le  médecin  ou  l'infirmier  doit 
prendre  la  température  le  matin  à  9  heures,  l'après-midi  à 
S  heures,  et  enfin  le  soir  à  9  heures.  Le  traitement  moral  et 
suggestif  est  d'une  haute  importance  chez  les  phtisiques 
fiévreux.  Le  malade  n'a  pas  besoin  de  connaître  exactement  sa 
température  ;  il  faut  lui  suggérer  la  patience  et  lui  donner 
l'espoir  que  la  fièvre  va  baisser. 


(11  V.    Jakuntowskï.    Die   gesehlosseneu    Heilanstalten   fur   Lungenkranke 
Berlin,  1896. 


SUEURS  NOCTURNES  365 

Sueurs  nocturnes.  —  Les  sueurs  nocturnes  sont  en  relation 
avec  la  fièvre,  et  on  devrait  autant  que  possible  régler  ainsi 
qu'il  suit  l'administration  des  antipyrétiques.  Pour  obtenir  de 
ces  derniers  l'effet  maximum,  il  conviendrait  de  les  admi- 
nistrer avant  que  la  fièvre  soit  déjà  en  activité.  Néanmoins, 
il  y  a  souvent  occasion  d'employer  des  moyens  antisudori- 
fiques.  On  fait  des  frictions  générales  à  sec  ou  bien  avec  de 
l'eau  vinaigrée  ou  alcoolisée.  Une  friction  pratiquée  soir  et 
matin  avec  de  l'alcool  pur  semble  agir  particulièrement  bien 
contre   les   sueurs  excessives. 

On  donne  en  outre  au  malade,  avant  de  se  coucher,  un 
verre  de  lait  avec  10  à  i5  grammes  de  cognac.  Un  phtisique  ne 
doit  jamais  aller  se  coucher  le  soir  avec  la  moindre  sensation 
de  faim  ;  il  serait  même  bon  qu'il  eût  un  petit  goûter  près 
de  son  lit,  pour  le  prendre  au  cas  où  il  se  réveillerait  en  état 
de  faiblesse. 

Comme  médicament  antisudorifique,  on  utilise  de  préférence 
le  sulfate  d'atropine  à  la  dose  d'un  demi-milligramme  prise  à 
l'heure  du  coucher,  ou  l'agaricine  à  la  dose  d'un  centigramme. 

Dans  le  service  de  notre  vénéré  maître,  M.  le  professeur 
Potain,  nous  avons  vu  employer  avec  succès,  contre  les  sueurs 
nocturnes,  le  phosphate  de  chaux  tribasique,  à  la  dose  de 
4  à  5  grammes. 

Quand  tous  ces  moyens  échouent,  je  recommande  un  procédé 
qui  m'a  souvent  réussi  contre  les  sueurs  nocturnes  rebelles. 

On  prend  une  compresse  de  toile  ou  de  coton  à  grosse 
trame  que  l'on  plie  en  3  ou  4  épaisseurs,  assez  longue  pour 
envelopper  comme  un  châle  le  [borax  et  les  épaules,  et  on 
l'imbibe  d'eau  à  la  température  de  i2-i5°;  on  l'applique  rapi- 
dement sur  le  malade  en  ayant  soin  que  les  sommets  des  pou- 
mons soient  bien  couverts,  et  on  met  par-dessus  unu  com- 
presse de  flanelle  pliée  en  plusieurs  doubles  et  un  peu  plus 
large  que  la  compresse  de  toile. 

Mieux  encore,  au  lieu  d'un  châle  on  prend  trois  com- 
presses, dont  une  grande,  et  deux  petites  d'environ  12  ou 
i5  centimètres  de  largeur,  c'est-à-dire  assez  larges  pour 
couvrir  toute    la    lono-ueur   de   la    clavicule  et  assez  lonoues 

o  o 

pour  qu'elles  s'étendent  du  mamelon  en  avant  jusqu'à  l'angle 
inférieur    de    l'omoplate    en    arrière.    Ces   deux    compresses 


366  TRAITEMENT  SI MPTOMATIQUE 

étant  mises  en  place  sur  les  épaules,  on  enveloppe  le  thorax 
avec  la  troisième.  Les  deux  petites  compresses  sont  ainsi 
maintenues  en  plaee.  Pour  recouvrir  la  toile  humide  on  coupe 
la  flanelle  également  en  trois  morceaux  et  on  l'arrange  de  la 
même  façon  cpie  la  toile.  Ce  procédé  est  moins  gênant  poul- 
ie malade  que  le  châle. 

On  laisse  le  patient  au  repos  dans  cette  compresse  durant 
toute  la  nuit.  Le  plus  souvent,  il  s'endort  et  reste  ainsi 
enveloppe  sans  éprouver  le  moindre  inconvénient  de  la 
chaleur  entretenue  par  la  compresse.  Le  matin,  on  enlève  la 
compresse  et  on  lui  l'ait  une  friction  sèche. 

Cette  méthode  arrête  presque  toujours  les  sueurs  nocturnes, 
lait  disparaître  les  douleurs  thoraciques  et  même  souvent  les  sen- 
sations dyspnéiques.  Cette  compresse  se  distingue  de  la  com- 
presse échauffante  de  Priessnitz,  adoptée  en  Allemagne  et  en 
Russie,  par  l'absence  de  taffetas  gommé  ou  de  toile  cirée  ;  elle 
peut  être  supportée  beaucoup  plus  longtemps  que  cette  der- 
nière. 

En  dehors  du  traitement  symptomatique  de  l'hyperhidrose, 
il  nous  faut  aussi  parler  du  traitement  prophylactique  que  nous 
avons  préconisé  il  y  a  quelques  années,  et  en  laveur  duquel 
nous  pouvons  peut-être  aujourd'hui  plaider  avec  plus  d'expé- 
rience et  d'autorité.  Il  n'y  a  pas  le  moindre  doute  en  notre 
esprit  que  les  sueurs  nocturnes,  chez  les  phtisiques,  ne  soient 
dans  une  grande  mesure  le  résultat  d'une  accumulation  de 
toxines  bactériennes.  L'hyperhidrose  n'est  rien  autre  chose 
qu'un  effort  de  la  nature  cherchant  à  se  débarrasser  des  toxines. 
Le  bain  de  vapeur  est  un  adjuvant  qui  facilite  l'élimination  en 
réduisant  sa  durée  en  même  temps  qu'il  diminue  aussi  les 
chances  de  refroidissement.  Ainsi,  en  présence  d'un  tubercu- 
leux ayant  des  sueurs  nocturnes,  si  l'état  général  n'est  pas  trop 
faible,  nous  prescrivons  un  bain  de  vapeur  de  courte  durée. 
Si,  à  la  suite  de  ce  premier  bain,  le  malade  ne  se  sent  pas  trop 
affaibli  et  si  les  sueurs  nocturnes  sont  devenues  moins  intenses, 
nous  répétons  les  bains  tous  les  deux  ou  trois  jours.  Bien 
entendu,  après  le  bain  le  malade  est  frictionné  avec  une  ser- 
viette-éponge  trempée  dans  l'eau  froide  et  mis  au  lit  pendant 
une  ou  deux  heures;  mais  le  meilleur  moment  pour  appliquer 
ce  traitement  est  le  soir  avant  le  coucher.    Il  y  a   avantage  à 


BAI.\S  DE   VAPEUR 


367 


posséder  un  appareil  portatif,  de  façon  à  pouvoir  administrer  le 
bain  dans  la  chambre  même  du  malade.  La  durée  des  bains  ne 
devrait  jamais  excéder  une  vingtaine  de  minutes  et  être  réglée 
par  l'état  du  malade  après  le  premier  bain.  Pour  augmenter  l'ac- 


Fig.  8!i  et  8-J.  — Appareil  portatif  pour  bains  de  vapeur. 

tion  sudorifique  des  bains  de  vapeur,  il  est  bon  de  les  faire 
précéder  d'un  pédiluve  chaud,  afin  d'éviter  des  maux  de  tète. 
Une  trop  grande  faiblesse  est  une  contre-indication  à  l'emploi 
du  bain.  Il  y  a  actuellement  dans  le  commerce  des  appareils 
très  commodes  pour  appliquer  ce  traitement.  La  figure  ci- 
dessus  montre  un  de  ces  appareils.  S'il  était  impossible  de  se 
les  procurer,  il  faudrait  se  contenter  d'un  bain  ordinaire  bien 
chaud. 


368  TRAITEMENT  SYMPTOMATIQUE 

Frissons.  —  Les  frissons  chez  les  tuberculeux  s'observent 
le  plus  souvent  le  matin  entre  8  et  10  heures.  On  enseigne  au 
malade  à  rester  au  lil  jusqu'à  ce  que  le  frisson  ait  disparu. 
Dettweiler  conseille  de  prévenir  l'accès  en  donnant  au  malade, 
une  heure  au  moins  axant  l'apparition  du  frisson,  des  boissons 
chaudes  alcoolisées,  des  limonades  ou  du  lait  chaud,  puis  on 
le  fait  envelopper  rapidement  dans  la  couverture.  Le  frisson 
se  trouve  ainsi  enrayé.  Quand  le  temps  est  beau,  on  peut 
permettre  au  malade  de  s'exposer  au  soleil,  la  tète  à  l'ombre. 

Anorexie.  —  L'anorexie  constitue,  chez  le  phtisique,  le  symp- 
tôme le  plus  alarmant.  Du  moment  où  le  tuberculeux  cesse  de 
manger,  il  est  condamné.  Heureusement  les  phtisio-thérapeutes 
modernes  se  sont  occupés  de  celte  question  importante,  et 
savoir  l'aire   manger  un    tuberculeux  est   devenu   tout  un  art. 

Nous  avons  déjà  parlé,  dans  le  chapitre  relatif  à  l'alimenta- 
tion, des  conditions  générales  (hygiène de  la  bouche,  nécessité 
de  bien  mâcher  les  aliments,  régularité  des  repas,  etc.)  essen- 
tielles pour  une  bonne  digestion.  Ici  nous  allons  passer  seu- 
lement en  revue  les  causes  diverses  de  l'anorexie,  et  par 
conséquent  de  la  nutrition  défectueuse  chez  les  tuberculeux. 

Dyspepsie  nerveuse.  —  Il  y  a  d'abord  la  dyspepsie  nerveuse, 
que  l'on  peut  dénommer  aussi  psychique,  ou  dyspepsie  sans 
cause  apparente.  Le  traitement  principal  dans  ce  cas  est  le 
traitement  moral.  La  persuasion,  la  suggestion,  l'autorité  du 
médecin  peuventfaire  beaucoup.  Il  faut  convaincre  ces  malades 
(pie  leur  capacité  digestive  est  de  beaucoup  supérieure  à  ce 
que  leur  appétit  semble  indiquer.  Pour  quelques-uns  d'entre 
eux,  chez  lesquels  l'élément  hystérie  est  difficile  à  exclure,  je 
trouve  a  propos  de  les  effrayer  en  leur  disant  :  «  Si  vous  ne 
mangez  pas,  vous  ne  pouvez  pas  guérir  !  » 

Mais  il  est  rare  qu'en  variant  fréquemment  les  petits  repas, 
pris  autant  que  possible  en  plein  air,  et  qu'en  y  apportant 
beaucoup  de  patience,  le  médecin  n'arrive  pas  à  un  résultat 
satisfaisant.  Si  les  mets  chauds  ne  conviennent  pas  aux 
malades,  on  peut  leur  permettre  de  ne  prendre  que  des  plats 
froids  jusqu'à  ce  qu'ils  réclament  d'eux-mêmes  des  plats  chauds. 

Chez    ces    dyspeptiques    on   augmente    les  doses   de   lait   à 


IirPERClILORIIÏDRIE  36c, 

mesure  qu'ils  perdent  l'appétit  pour  les  autres  aliments.  Si  le 
lait  n'est  plus  supporté,  on  commence  à  mêler  à  ce  dernier  de 
l'eau  de  chaux,  du  café,  du  thé,  du  cognac,  ou  l'on  fait  alterner 
le  lait  de  vache  avec  celui  d'ânesse  ou  de  chèvre,  avec  le 
képhir  ou  le  koumys.  Sauf  dans  les  cas  très  avancés,  il  est 
rare  qu'on  ne  puisse,  par  ces  moyens  prudents,  habituer  un 
estomac  à  tolérer  ultérieurement  les  aliments  ordinaires.  La 
viande  crue  est  ici  un  puissant  auxiliaire. 

Les  amers,  la  noix  vomique,  sont  quelquefois  des  adjuvants 
précieux  pour  combattre  une  anorexie  sans  cause  appréciable, 
et  la  formule  donnée  dans  le  Traité  de  médecine  me  semble 
excellente  : 

Teinture  de  quinquina.    ...  \ 

—  de  Colombo àà   5   grammes. 

\ 

—  de  gentiane 

de  noix  vomique    ...  3  — 

A  prendre  :  X  à  XV  gouttes  avant  chacun  des  deux  principaux  repas. 

Hyperchlorhydrie.  —  D'après  les  recherches  d'Immermann 
(de  Bâle),  la  véritable  hyperchlorhydrie  est  rare  chez  les  phti- 
siques ;  c'est,  semble-t-il,  plutôt  l'hyperchlorhydrie  neurasthé- 
nique d'Hayem  qui,  si  elle  ne  cède  pas  par  le  régime  et  le 
séjour  prolongé  à  L'air,  est  aussi  difficile  à  combattre  dans  les 
sanatoria  qu'ailleurs. 

M.  Daremberg,  avec  sa  grande  expérience  de  la  phtisio-thé- 
rapie,  recommande  dans  ces  cas  la  formule  suivante  : 

Salicylate  de  bismuth o,6o  gramme. 

Bicarbonate  de  soude 0,73  » 

SaloI  ou  benzonaphtol o,35         » 

Pour  un  cachet.  — A  prendre  :  un  cachet  semblable  avant  chacun  des  trois  repas. 

Sans  déprécier  la  valeur  du  gavage  avec  la  sonde,  tel  qu'il 
a  été  institué  par  M.  le  professeur  Debove  dans  les  hôpitaux 
de  Paris  pour  quelques  cas  particuliers,  je  crois  cependant 
que  ce  procédé  est  rarement  nécessaire  pour  les  malades 
d'un  sanatorium.  Dans  aucun  des  établissements  de  ce  genre 
([lie  j'ai  visités  à  cet  effet  je  n'ai  vu  emploA'er  cette  méthode 
de  suralimentation  forcée  ;  mais  il  peut  arriver  qu'on  soit 
obligé  d'y  avoir  recours,  et  un  sanatorium  doit  toujours  être 
muni  de  sondes  œsophagiennes. 

Ksopf.  Sanatoria.  24 


3;o  TRAITEMENT  SYMPTOMATIQUE 

Pour  L'alimentation  artificielle,  M.  le  professeur  Debove  (i) 
se  serl  surtoul  de  la  poudre  de  viande  Voici  La  prépara- 
tion :  on  prend  de  la  viande  de  bœuf  aussi  bien  dégraissée 
que  possible  et  séparée  des  tendons  ;  on  la  passe  dans  un 
hachoir  et  on  en  forme  une  pâte  grossière,  qui  est  ensuite 
«'■talée  sur  des  plaques,  pins  desséchée  à  l'étuve  à  une  tem- 
pérature de  ç)<>".  Lorsque  la  viande  est  devenue  dure  par  des- 
siccation, on  la  broie  au  pilon,  puis  on  la  crible  sur  un  lin 
tamis  de  soie.  La  poudre  ainsi  obtenue  est  impalpable  ;  «die 
se  conserve  indéfiniment,  à  condition  d'être  soigneusement 
préservée  de  l'humidité.  Elle  représente  quatre  fois  son  poids 
de  viande  fraîche. 

D'autres  poudres  alimentaires  impalpables,  telles  que  la 
poudre  de  lentilles,  sont  préparées  par  le  même  procédé. 

La  poudre  de  viande  de  Debove  et  les  peptones  solides 
présentées  aux  malades,  une  fois  masquées  par  tics  prépara- 
tions culinaires  qui  les  l'ont  appétissantes,  peuvent  rendre  de 
grands  services. 

J'ai  souvent  réussi  à  nourrir  des  malades  qui  ne  voulaient 
rien  manger  en  leur  prescrivant  ce  qu'on  appelle  en  Amérique 
un  «  egg-nog  ».  On  le  prépare  ainsi  :  on  ajoute  aux  2  3  d'un 
verre  de  lait  1  à  a  cuillerées  à  café  de  bon  cognac,  puis  un 
œuf  cru,  le  blanc  et  le  jaune,  et  1  à  2  cuillerées  de  sucre  en 
poudre. 

Contre  cette  anorexie  que  j'appelle  anorexie  sans  cause 
apparente,  il  y  a  un  moyen  hydrothérapique  a  appliquer,  qui 
«•si  vraiment  précieux.  On  l'appelle  le  «  Winternitz  »,  ^\\\  nom 
de  son  distingué  innovateur  M.  le  professeur  Winternitz  (de 
Vienne).  Voici  le  procédé,  tel  qu'il  est  décrit  dans  le  livre  de 
Bottey  (2),  et  que  nous  nous  taisons  un  plaisir  de  reproduire 
ici  : 

«  Cette  méthode,  dans  laquelle  sont  combinés  le  froid  et  le 
chaud,  consiste  à  envelopper  le  haut  du  corps  et  les  parties 
supérieures  des  cuisses  avec  un  drap  trempé  dans  de  1  eau 
froide  (8°  à  18°  C.)  et  bien  exprimé  ;  ensuite,  avant  d'envelopper 


(1)  Deuove.  Recherches  sur  l'alimentation  artificielle.  Paris,  1882. 

(a)  Bottey. Traité  théorique  et  pratique  d  Hydrothérapie  médicale.  Paris.  i8y5. 


CRYMOTHÉRAPIE  3"i 

le  malade  clans  un  drap  sec,  on  applique  à  la  région  gastrique 
un  treillis  rond  composé  d'un  tube  en  caoutchouc,  dans  lequel 
circule  de  l'eau  chaude  à  4o°  C.  Après  quelques  minutes,  la 
sensation  de  froid  commence  à  disparaître  et  est  remplacée 
par  un  sentiment  de  chaleur  agréable.  » 

L'opération  ne  doit  pas  durer  plus  d'une  vingtaine  de 
minutes,  mais  on  peut  la  répéter  deux  et  même  trois  l'ois  par 
jour  selon  les  indications.  Souvent  les  malades  qui  ne  peuvent 
rien  manger,  ceux  qui  souffrent  de  vomissements  et  de  gas- 
tralgie, peuvent  prendre  et  retenir  sans  douleur  un  demi-litre 
de  soupe  à  la  crème  d'avoine,  à  laquelle  ou  peut  ajouter  une 
préparation  de  peptone  ou  un  jaune  d'oeuf. 

D'après  Schutze  (i),  l'administration  des  médicaments,  mal 
supportée  autrement,  est  également  facilitée  en  les  donnant 
pendant  que  le  malade  est  soumis  à  l'application  du  «  Win- 
ternitz  ». 

Le  dernier  moyen  physique  ajouté  à  la  phtisio-thérapie 
moderne  pour  augmenter  l'appétit  du  phtisique,  aider  la  nutri- 
tion et  le  stimulus,  est  la  cnjnwthérapie.  Ce  nouveau  mode 
de  traitement  des  tuberculeux,  inventé  par  notre  cher  et  dis- 
tingué maître  M.  Letulle  et  par  M.  Ribard,  a  l'ait  l'objet  d'une 
communication  à  la  Société  médicale  des  hôpitaux  dans  sa 
séance  du  18  mars  1898,  et  aussi  le  sujet  d'une  conférence 
devant  les  membres  du  IV  Congrès  de  la  Tuberculose  le 
aj  juillet,  à  l'hôpital  Boucicaut. 

N'ayant  pas  encore  d'expérience  personnelle  sur  ce  nou- 
veau procédé,  je  donne  le  résumé  de  la  conférence  faite  par 
M.  Ribard  (2)  : 

«  Chaz  les  tuberculeux,  dit  M.  Ribard,  l'alimentation  est 
très  difficile.  Or,  l'alimentation  des  tuberculeux  constitue 
précisément,  avec  l'air  et  le  repos,  le  principal  élément  de  leur 
guérison.  L'alimentation  est  difficile  chez  ces  malades  pour  plu- 
sieurs raisons  :  les  uns  sont  atteints  de  dyspepsie  organique, 
les  autres  toussent  et  rejettent  leurs  aliments  en  toussant. 
Nous  avons  donc  fixé  nos  recherches  sur  ce  point  particulier, 
et  nous  avons  été  amenés  à  expérimenter  l'action  des  tempé- 


(1)  Schuetze.  Die  Hydrothérapie  der  Lungenschwin  Isuchl.  Halle, 

(2)  La  Presse  Médicale,  1898,  3o  juillet. 


Ï7-  TRAITEMENT  SVMPTOMATIQUE 

ratures  très  liasses  sur  l'appareil  digestif  tics  tuberculeux. 
.Xmis  avons  appelé  celle  médication  crymothérapie,  du  grec 
xpujjtôc,  grand  froid. 

«  Tout  le  monde  sait  que  l'on  mange  beaucoup  plus  pendant 
l'hiver  que  l'été,  que  les  habitants  des  |>ays  froids  consom- 
ment beaucoup  plus  de  nourriture  que  eviw  des  contrées 
chaudes  du  globe. 

«  J'ai  donc  été  amené  à  essayer  de  la  réfrigération  pour 
relever  la  puissance  d'alimentation  chez  les  malades.  J'ai  pense 
qu'il  v  avait  là  une  idée  rationnelle  dont  on  pouvait  tirer  parti. 
Je  suis  arrivé  à  celle  conviction  qu'un  froid  local  est  1res 
efficace  pour  exciter  l'appétit  des  malades. 

«  Mais  au  lieu  d'appliquer  les  températures  extrêmement 
basses,  de  --  ioo°  à  —  110",  qu'emploie  M.  Pictet,  j'ai  trouvé 
qu'une  température  de  —  8o°  était  suffisante  pour  obtenir  le 
résultat  que  je  cherchais.  J'ai  donc  recherché,  en  consé- 
quence, quel  élait  le  mélange  réfrigérant  le  plus  commode  à 
employer,  et  je  nie  suis  arrêté  à  la  neige  carbonique,  dont  la 
température  est  de  —  8o°,  ainsi  (pie  vous  pouvez  vous  eu  assu- 
rer au  moyen  de  ce  thermomètre  à  toluène. 

«  Voici  quelle  est  la  manière  île  procéder  pour  appliquer  ce 
mode  de  traitement  : 

«  Je  remplis  un  sac  de  toile  grossière  avec  :>.  kilogrammes 
île  <<  neige  carbonique  ",  et,  afin  de  protéger  la  peau  contre 
l'action  directe  d'un  froid  trop  intense,  j'enveloppe  ce  sac  d'une 
couche  assez  épaisse  de  ouale.  L'atténuation  de  l'action  réfri- 
gérante, dans  ces  conditions,  est  telle  que  la  peau  de  la  région 
sur  laquelle  est  appliqué  l'appareil  conserve  une  température 
de  +  f>". 

«  Le  sac  est  appliqué  sur  les  régions  hépatique  et  épigas- 
trique.  Je  laisse  le  sac  en  place  pendant  une  durée  de  trente 
minutes  environ.  Cette  application  est  faite  deux  l'ois  par 
jour,  le  malin  avant  le  déjeuner,  et,  le  soir,  avant  le  dîner.  La 
neige  carbonique  s'évapore  assez  lentement  pour  permettre, 
avec  ■>.  kilogrammes,  de  faire  les  deux  applications  h'  même 
jour. 

«  Le  seul  inconvénient  de  ce  réfrigérant  est  son  prix  élevé 
et  l'irrégularité  île  son  débit.  Le  sac  de  neige  carbonique 
coule   4   francs. 


DYSPEPSIE  ALCOOLIQUE  3-3 

«  Au  bout  de  trois  à  cinq  jours  de  ce  traitement,  les  malades 
ressentent  de  l'appétit  :  ils  ont  faim,  mangent,  ont  une  sensa- 
tion de  bien-être  et  renaissent  à  l'espérance. 

»  Maintenant,  quelle  est  l'explication  physiologique  des 
effets  de  ce  traitement  ? 

«  J'ai  essayé  d'en  donner  une,  autant  que  peut  le  permettre 
l'état  peu  avancé  de  la  science  sur  ce  point.  Voici  les  considé- 
rations auxquelles  je  me  suis  livré. 

«  Etant  donné  un  corps  qui  possède  une  température  infé- 
rieure à  —  6o°,  il  est  impossible  de  trouver  un  corps  isolant 
(ouate,  linge,  liège,  plume,  peau)  capable  de  le  protéger 
contre  les  radiations  calorifiques  environnantes.  On  ne  peut 
obtenir  ce  résultat  qu'au  moyen  d'une  bouteille  à  double  paroi, 
telle  que  celle  employée  par  M.  d'Arsonval  pour  conserver 
l'oxygène  liquide  ou  solide. 

«  Or,  pour  le  corps  humain  que  se  passe-t-il  ?  Ses  diffé- 
rentes parties  sont  inégalement  traversées  par  les  radiations 
calorifiques.  Je  crois,  pour  ma  part,  que  le  foie,  l'estomac  et 
les  reins  se  refroidissent  plus  que  les  autres  parties.  Pour 
lutter  contre  le  refroidissement,  l'organisme  est  obligé  de  réa- 
gir très  violemment,  et  son  moyen  de  défense  —  le  meilleur  et 
le  seul  —  c'est  la  faim,  c'est  l'alimentation  ,  qui  va  fournir  à  la 
machine  le  combustible  nécessaire  à  l'entretien   de  la  chaleur. 

«  De  même  que  nos  yeux  ne  sont  pas  capables  de  percevoir 
les  radiations  infra-rouges  ou  ultra-violettes,  de  même  que 
les  sons  ne  sont  perceptibles  qu'à  partir  d'un  certain  nombre 
de  vibrations,  de  même  notre  peau  n'est  sensible  que  jusqu'à 
un  certain  degré  de  température.  En  général,  on  peut  pro- 
téger la  peau  jusqu'à —  55°.  Mais  au  delà,  aucun  corps  ne  peut 
la  protéger.  Notre  système  nerveux  organique  réagit  incons- 
ciemment. C'est  pour  cela  que  les  malades  ne  ressentent  rien, 
n'éprouvent  aucune  douleur,  et  que,  cependant,  les  80  degrés 
de  froid  passent  à  travers  leur  corps. 

«  Je  donne  cette  explication  sous  toutes  réserves  ». 

Dyspepsie  alcoolique.  —  Chez  quelques  phtisiques  avec 
tendance  à  l'éthylisme ,  la  suppression  de  toutes  boissons 
alcooliques  et  leur  remplacement  par  l'eau  pure  est  souvent 
suffisante  pour  faire  disparaître  les  phénomènes  dyspeptiques. 


3;4  TRAITEMENT  SYMPTOMATIQUE 

Quelquefois  on  est  obligé  de  recourir  à  l'analyse  du  contenu 
stomacal  pour  trouver  la  cause  des  troubles  digestifs.  Des 
lavages  de  l'estomac  peuvenl  aussi  devenir  nécessaires. 

Hypochlorhydbie.  L'hypochlorhydrie,    si    bien    étudiée 

par  M.  le  professeur  Hayem  sous  le  nom  d'hypopepsie  et 
d'apepsie,  joue  un  grand  rôle  dans  la  phtisio-thérapie.  D'après 
Hayem,  elle  est  mieux  combattue  par  l'usage  du  képhir,  lail 
fermenté  acide,  ou  par  l'acide  chlorhydrique  médicinal  en 
solution.  Ce  dernier  médicament  m'a  rendu  des  services  chez 
les  phtisiques  souffrant  d'hypochlorhydrie.  Bien  entendu, 
il  ne  faut  pas  continuel'  cette  médication  acide  trop  .long- 
temps, mais  recourir  aussitôt  que  possible  aux  moyens  diété- 
tiques afin  de  corriger  ce  défaut  d'une  sécrétion  qui  est 
essentielle  pour  une  digestion  et  une  assimilation  satisfai- 
santes. 

Enfin  le  médecin,  le  vrai  phtisio-thérapeute  moderne,  doil 
étudier  le  pouvoir  digestif  de  chacun  de  ses  malades  et  les 
causes  des  troubles  gastro-intestinaux,  comme  nos  grands 
cliniciens  ont  l'habitude  d'étudier  les  bruits  du  cœur,  normaux 
et  anormaux.  Le  phtisio-thérapeute  doit  surveiller  l'effet  d'un 
repas  ou  d'un  médicament  chez  un  phtisique  difficile  à  nourrir, 
comme  le  cardiologue  étudie  l'effet  de  la  digitale  ou  de  tout 
autre  remède  cardiaque  sur  un  cœur  malade. 

Dettweiler,  en  un  article  remarquable  publié  dans  un  ouvrage 
récent  intitulé  :  La  Thérapie  de  ht  Nutrition  et  rédigé  par 
von  Leyden  (i  ,  dit  ceci  :  ci  II  n'y  a  pas  de  lois,  il  n'y  a  pas  un 
schéma  auquel  on  puisse  s'attacher.  On  suit  la  théorie  jusqu'à 
ce  qu'elle  nous  donne  un  bon  résultat.  On  cherche,  on  l'ait  des 
essais,  on  tâche  de  satisfaire  les  côtés  faibles  et  les  caprices 
de  l'estomac  et  de  l'intestin.  Etudier  ces  caprices  et  ces  fai- 
blesses et  trouver  pour  eux  un  remède,  l'ait  du  médecin  un 
artiste  culinaire   ». 

Dilatation  stomacale.  —  Les  cas  de  dilatation  stomacale, 
assez  fréquents    chez  les   phtisiques,    sont    facilement    traites 


in     Non    Leyden.    Handbuch    «1er    Ernhârungslherapie .    T.     II.    chap.    vi. 
Leipzig,  1898. 


CONSTIPATION  375 

dans    un  sanatorium  par  le    régime  sec,    conseillé   par  M.  le 
professeur  Bouchard. 

Là  où  il  y  a  des  flatulences,  la  magnésie  calcinée,  le  charbon 
lavé,  la  craie  lavée,  administrés  avant  les  repas,  donnent  de  bons 
résultats.  Le  massage  abdominal  est  aussi  indiqué  dans  ces  cas. 

Constipation.  —  Tous  les  phtisiques  doivent  surveiller  les 
fonctions  de  leur  intestin.  Peter  a  dit:  «  L'homme  qui  ne 
va  pas  bien  tous  les  jours  à  la  garde-robe  est  un  homme 
malade  »  ;  et  pour  l'homme  phtisique  cette  maxime  est  encore 
plus  vraie.  Sans  parler  de  la  perte  de  l'appétit  ni  des  sensa- 
tions de  plénitude  si  pénible  qui  résultent  de  ce  dérangement, 
il  existe,  de  ce  fait,  d'autres  dangers  pour  les  tuberculeux.  Les 
trop  grands  efforts  pendant  la  défécation  peuvent  être  la  cause 
d'hémoptysies  plus  ou  moins  graves.  A  la  moindre  menace  de 
constipation  le  malade  doit  se  présenter  à  son  médecin. 

Les  moyens  employés  pour  combattre  la  constipation  des 
phtisiques  sont  presque  les  mêmes  dans  tous  les  sanatoria  : 
lavements,  huile  de  ricin,  eau  de  Vichy  et  de  Carlsbad,  etc. 
Mais,  s'il  y  a  tendance  à  la  chronicité,  on  ajoute  au  régime 
ordinaire  du  malade  des  pruneaux  ou  autres  fruits.  On  essaie 
aussi  de  plus  les  laxatifs  légers  et  on  les  varie  de  temps  en 
temps,  pour  ne  pas  affaiblir  leur  effet. 

Depuis  l'introduction  de  la  cascara  sagrada,  «  écorce 
sacrée  »,  dans  la  Pharmacopée  américaine,  il  y  a  une  dizaine 
d'années,  j'ai  étudié  sur  place,  en  Californie,  où  pousse  abon- 
damment le  Pihamnus  Purshiana,  les  effets  de  ce  précieux  mé- 
dicament. 

Pour  moi,  c'est  un  des  moyens  les  plus  efficaces  de  combattre 
la  constipation  chronique  ;  je  l'ai  très  souvent  employé  pour 
les  tuberculeux  de  la  Californie  du  Sud. 

La  meilleure  préparation  est  l'extrait  fluide  ;  on  ne  doit 
jamais  en  donner  plus  de  4  à  5  grammes  (une  cuillerée  à  café) 
à  la  fois.  Une  seule  dose,  prise  le  soir  avant  de  se  coucher,  est 
généralement  suffisante  pour  produire  une  évacuation  natu- 
relle, abondante  et  sans  douleur,  et  pour  laisser  les  fonctions 
intestinales  en  bon  état  pendant  un  certain  temps.  Ce  médica- 
ment semble  agir  comme  cholagogue  et  stimulant  des  sécré- 
tions intestinales. 


f 


3;6  TRAITEMENT  SYMPTOMATIQUE 

Si  l'on  est  obligé  d'en  renouveler  l'usage  ou  de  le  conti- 
nuer pendant  un  certain  temps,  on  doit  diminuer  graduel- 
lement la  dose  et  alterner  la  cascara  avec  un  purgatif  salin,  le 
matin  avant  de  se  lever. 

Des  préparations  laxatives  diverses  obtenues  du  tamarin 
(Tamarinus  indica)  se  montrent  également  agréables  et  com- 
modes chez  les  phtisiques. 

Comme  moyen  non  médicamenteux  dans  la  constipation 
chronique,  le  massage  abdominal,  soigneusement  appliqué, 
fait  toujours  du  bien.  Souvent  de  simples  frictions  à  l'alcool 
suivant  la  direction  du  gros  intestin,  en  commençant  par  le 
côlon  ascendant,  pendant  des  séances  de  cinq  à  dix  minutes 
laites  journellement  durant  une  ou  deux  semaines,  suffisent 
pour  guérir  cet  état  maladif  qui  semble  dû  à  une  paralysie  par- 
tielle du  gros  intestin. 

Pour  une  constipation  plus  ou  moins  opiniâtre,  et  surtout  si 
le  malade  n'est  pas  trop  faible,  j'aime  à  prescrire  0,60  centi- 
grammes de  calomel  avec  (i  grammes  de  lactose  en  9  paquets. 
Je  fais  prendre  au  malade  un  de  ces  paquets  toutes  les 
heures,  jusqu'à  ce  qu'il  ait  eu  une  ou  deux  bonnes  évacua- 
tions. Il  cesse  abus  le  calomel  et  le  lendemain  à  jeun  ingère 
une  dose  de  sel  d'Epsom  ou  de  Seillitz.  Je  ne  suis  pus  en 
faveur  des  lavements  trop  souvent  répétés,  car  ils  oui  une 
tendance  fâcheuse  à  diminuer  le  pouvoir  contractile  du  gros 
intestin. 

Il  reste  encore  une  complication  intestinale  à  combattre,  la 
diarrhée. 

Diarrhée..  —  Il  est  difficile  de  dire  dès  l'abord  si  elle  est  due 
à  une  colonisation  tuberculeuse,  ou  si  elle  a  sa  cause  dans  un 
écart  de  régime  alimentaire.  L'examen  bactériologique  lui-même 
n  est  pas  décisif,    car  le  malade  peut  avoir  avalé  ses  crachats. 

Le  meilleur  moyen  est  peut-être  d'essayer  d'abord  de  net- 
loyer  le  canal  digestif  par  une  dose  d'huile  de  ricin,  puis 
d'instituer  un  régime  antidiarrhéique  ;  si  cela  ne  réussit  pas. 
on  peut  être  à  peu  près  certain  que  l'on  a  affaire  à  yinr  tuber- 
culose intestinale. 

On  supprime  d'abord  le  vin  blanc,  le  lait,  les  fruits  et  l'huile 
de  foie  de  morue,  si  le  malade  en  prend. 


DIARRHÉE  377 

Voici  le  menu  de  Reiboldsgrim  pour  les  phtisiques  ayant  la 
diarrhée  : 

Boire  le  moins  possihle,  et  faire  usage  d'eau  de  riz. 

a)  ier  déjeuner  :  Cacao,  café  ou  thé  peu  sucré  avec  petits 
pains  ou  biscuits. 

2e  déjeuner  :  Vins  de  Bordeaux  contenant  de  l'arrow-root 
(Maranta  arundinacea  L.)  en  dissolution,  des  œufs  à  la  coque 
ou  des  œufs  crus,  du  pain. 

b)  Dîner  :  Potage  mucilagineux,  veau,  poulet,  purée  de 
pommes,  riz. 

c    Repas  à  4  heures,  comme  le  icr  déjeuner. 

d    Souper  comme  le  dîner. 

Pour  les  diarrhées  qui  persistent  malgré  ce  régime  sévère, 
combiné  avec  le  repos  absolu  au  lit,  on  a  le  droit  d'essaver 
tout  :  opium,  sous-nitrate  de  bismuth,  nitrate  d'argent,  tanin, 
benzonaphtol,  acide  lactique,  acide  gallique,  talc  à  haute  dose 
préconisé  par  Debove,  lavements  de  vin,  lavements  créo- 
sotes. 

Les  bons  résultats  obtenus  à  l'aide  de  médicaments  dans 
la  tuberculose  intestinale  sont  malheureusement  très  rares. 
La  présence  de  sang,  même  en  petite  quantité,  dans  les  selles. 
est,  au  point  de  vue  pronostic,  toujours  un  élément  des  plus 
sérieux. 

J'ai  assez  souvent  donné  dans  ces  cas  du  vin  rouge  chaud 
additionné  de  cannelle.  Cette  potion,  prise  une,  deux  ou 
même  trois  fois  par  jour,  parait  produire  d'excellents  effets 
dans  la  diarrhée  persistante.  Voici  comment  on  doit  préparer 
cette  potion  :  on  prend  uo  grammes  de  bon  vin  rouge,  on 
ajoute  une  cuillerée  à  dessert  (10  grammes)  de  cannelle  en 
poudre,  on  met  le  tout  sur  le  feu  jusqu'à  ce  que  le  vin  com- 
mence à  bouillir  ;  on  ajoute  alors  environ  une  cuillerée  à 
dessert  de  sucre  en  poudre,  on  mélange  le  tout  en  le  versant 
dans  une  grande  tasse.  Le  malade  le  boit  aussi  chaud  que 
possible,  en  une  seule  fois. 

Plicque  (  1)  recommande,  dans  un  article  récent  à  propos  de  la 


(1)  A.-F.  Plicque.  La  diarrhée    chez  les   tuberculeux    et  sou  traitement-  La 
Presse  médicale,  7  octobre  1899. 


3 7 8  TRAITEMENT  SYMPTOMATIQUE 

diarrhée  chez  les  phtisiques,  dans  la  diarrhée   liée  à  l'entérite 
tuberculeuse  la  préparation  suivante  : 

Acétate  de  plomb  cristallisé 0,20  centigrammes. 

Extrait  <l  opium o,  jo  gramme. 

Extrait  de  ralanhia 1  gramme. 

Diviser  en  ao  pilules;  une  à  trois  par  jour. 

Hémoptysie  aiguë.  —  II  n'est  pas  toujours  facile  déjuger 
au  premier  abord,  quand  on  est  appelé  auprès  d'un  malade 
ayant  une  hémorrhagie  pulmonaire  considérable,  si  l'on  se 
trouve  en  présence  d'un  processus  congestif  ou  ulcératif.  El  je 
crois  (pie  peu  importe,  après  tout,  le  traitement  immédiat  étant 
le  même  :  repos  absolu  dans  la  position  demi-assise,  glace  sur 
les  sommets,  boissons  glacées  par  très  petites  gorgées  à  la 
t'ois,  ergot  ou  ergotine,  opium  ou  ses  dérivés  (une  ou  deux 
injections  d'un  centigramme  de  chlorhydrate  de  morphine), 
tels  sont  les  meilleurs  moyens  pour  combattre  une  hémor- 
rhagie pulmonaire  aiguë. 

Pour  diminuer  la  pression  artérielle,  on  peut  se  servir  aussi 
avec  avantage  du  sulfate  d'atropine  en  injections  hypodermi- 
ques, à  la  dose  de  1  à  2  milligrammes,  ou  si  on  veut  le  combi- 
ner avec  le  chlorhydrate  de  morphine,  on  peut  se-  contenter 
d'en  injecter  1  milligramme  pour  obtenir  l'effet  désiré.  Voici 
la  formule  la  plus  commode  pour  injections  hypodermiques  : 

Sulfate  d'atropine 1  centigramme. 

Chlorhydrate  de  morphine  ...        10  centigrammes. 
Eau  de  laurier-cerise 20  grammes. 

(1  centimètre  cube  contient  un  demi-milligramme  de  sulfate 
d'atropine  et  5  milligrammes  de  sel  de  morphine)  :  on  injecte 
un  à  deux  centimètres  cubes. 

Si  l'on  ne  peut  passe  procurer  de  glace,  on  la  remplacera  à 
la  rigueur  par  un  procédé  hydrothérapique  indiqué,  je  crois, 
pour  la  première  fois  par  Winternitz.  On  prend  un  morceau 
de  toile  à  grosse  trame,  on  le  trempe  dans  de  l'eau  aussi 
froide  qu'on  peut  se  la  procurer,  on  l'exprime  bien  et  on  le 
plie  en  forme  de  triangle,  on  l'applique  exactement  sur  la 
poitrine,  de  façon  que  le  sommet  du  triangle  recouvre  le  creux 
de  l'estomac  el  que  sa  base  touche  le  cou.  On  ne  met  rien  sur 


TRAITEMENT  PSYCHIQUE  3;9 

la  compresse  de  toile,  et  aussitôt  qu'elle  devient  chaude  on  la 
change.  On  peut  faire  cette  opération  sans  déranger  le  malade. 
L'application  de  la  glace,  de  même  que  l'eau  froide,  est  sur- 
tout indiquée  dans  la  tuberculose  au  début,  alors  que  les  vais- 
seaux sont  encore  bien  contractiles. 

Pour  les  cas  plus  graves,  la  ligature  des  membres,  déjà 
recommandée  par  Galien,  est  beaucoup  en  vogue  dans  quel- 
ques sanatoria  allemands.  On  se  sert  dans  ce  but  d'instruments 
spéciaux  [AssaUinische  Schnallen),  mais  il  faut  dire  que  de 
simples  bandes  de  flanelle,  de  grands  mouchoirs  de  soie,  etc., 
peuvent  les  remplacer.  On  applique  les  ligatures  sur  les  bras, 
sur  les  cuisses,  et  aussi  près  que  possible  du  thorax.  On  relâche 
les  bandes  toutes  les  demi-heures  ou  même  plus  tôt  s'il  y  a  une 
compression  douloureuse  des  nerfs  ou  danger  d'anémie  céré- 
brale. 

Collapsus.  —  La  méthode  de  Kemp  applicable  aux  états  de 
collapsus  post-opératoire  (injection  rectale  d'eau  salée  chaude) 
est  également  indiquée  après  les  hémoptysies  graves.  On  peut 
préparer  rapidement  une  solution  saline  analogue  au  sérum 
artificiel,  en  faisant  bouillir  un  litre  d'eau  dans  laquelle  on  met 
une  cuillerée  à  café  de  sel  ordinaire.  On  peut  injecter  celte 
eau  dans  le  rectum  à  une  température  de  38  à  4§°  C,  à  l'aide 
d'une  canule  à  double  courant.  La  chaleur  ainsi  transmise  au 
corps  et  l'absorption  de  la  solution  saline  par  le  rectum 
agissent  rapidement  en  relevant  les  forces  du  malade  affaibli 
et  refroidi  par  une  perte  de  sang  plus  ou  moins  considé- 
rable. Les  boules  d'eau  chaude  placées  aux  pieds  du  patient 
aideront  aussi  à  le  réchauffer. 

Avant  de  préparer  la  solution  saline  et  les  boules  d'eau 
chaude,  il  est  toujours  bon  et  plus  sûr  de  faire  au  malade  en 
danger  de  collapsus  une  injection  hypodermique  d'éther  ou  de 
caféine. 

Traitement  psychique.  —  Le  traitement  psychique  est  sou- 
vent aussi  important  que  le  traitement  médicamenteux.  On 
s'efforce  de  persuader  le  malade  de  la  bénignité  relative  des 
hémorrhagies,  surtout  de  celles  du  début  (hémoptysies  initiales). 

On  lui  recommande  d'éviter  de  tousser  atin  d'arrêter  l'hé- 


38o  TRAITEMENT  SVMPTOMATiqtE 

morrhagie.  La  suffocation  ou  la  pneumonie  peuvenl  être  la 
conséquence  de  la  rétention  du  sang  dans  les  bronches. 

On  Lui  conseille  de  ne  |>as  s'effrayer  en  cas  de  répétition  de 
l'hémoptysie  et  d'éviter  toute  agitation,  soit  physique,  soit  mo- 
rale. 

W'old  (i)  a  l'habitude  d'avertir  les  sujets  pusillanimes  qui 
n'ont  jamais  craché  de  sang,  que  cela  peut  arriver  et  qu'ils 
doivent  considérer  cel  événemenl  comme  une  phase  d'évolu- 
tion de  la  maladie  n'entravant  pas  matériellement  les  chances 
de  guérison. 

Je  crois  que  l'exemple  de  Wolff  mérite  d'être  imité  lors- 
qu'on se  trouve  en  présence  de   personnes  impressionnables. 

Dans  la  chambre  du  malade,  on  insiste  également  sur  l'ob- 
servation du  silence.  Le  patient  ne  doit  avoir  aucune  occasion 
de  parler,  ni  même  de  remuer  les  bras.  Personne,  en  dehors 
du  médecin  et  de  la  garde-malade,  ne  doit  rester  dans  la 
chambre. 

Hémoptysie  chronique.  —  Quand  l'hémorrhagie  a  perdu  son 
caractère  aigu,  on  prescrit  des  aliments  froids  semi-liquides  et 
des  limonades  glacées.  On  conseille  des  repas  fréquents  et 
légers  pour  attirer  le  sang  vers  les  organes  digestifs.  Il  est 
prudent  de  continuer  ce  régime  antihémorrhagique  pendant 
plusieurs  jours. 

Je  dois  parler  enfin  de  la  valeur  de  la  respiration  profonde, 
tranquille  et  sans  mouvements  des  bras.  Je  recommande  à  mes 
malades,  quand  l'hémorrhagie  aiguë  a  cessé,  de  l'aire  toutes 
les  dix  minutes  pendant  3o  à  60  secondes  deux  ou  trois  inspi- 
rations profondes  suivies  d'une  expiration  tranquille. 

Souvent  les  expectorations  sanguines  s'arrêtent  et  le  malade 
se  sent  moralement  et  physiquement  mieux.  Certains. phtisio- 
thérapeutes  recommandent  le  repos  absolu  durant  plusieurs 
jours  après  la  cessation  de  l'hémorrhagie.  Je  trouve  celle  pra- 
tique dangereuse  à  cause  de  la  possibilité  d'une  congestion 
hypostatique.  En  effet  je  crois  qu'il  vaut  mieux  permettre  au 
malade  de  quitter  le  lit  au  bout  de  quelques  jours,  et  de  faire 


U)  Wolff.  Die  moderne  Behandlung  der  Lungenschwindsucht. 


FAIBLESSE  GENERALE  ALARMANTE  38i 

de  courtes  promenades  à  pas  lents  sous  la  véranda.  Quant  aux 
sujets  chez  lescjuels  le  crachement  de  sang  est  un  accident  chro- 
nique, il  va  sans  dire  qu'on  ne  les  garde  pas  à  la  chambre.  Pour 
eux  l' aérothérapie  est  le  remède  antihémorrhagique  par  excel- 
lence. Les  exercices  respiratoires  surtout  ont  ici  une  valeur 
exceptionnelle.  En  pareil  cas  on  peut  être  certain  d'avoir  à  faire 
à  un  état  congeslif.  Ce  fut  le  grand  et  regretté  clinicien  Traube 
qui,  le  premier,  prescrivit  les  exercices  respiratoires  profonds 
pour  ce  genre  de  malades. 

Le  traitement  dans  le  cabinet  pneumatique  leur  convient 
également.  J'ai  obtenu  d'excellents  résultats  par  ce  dernier 
moyen  chez  plusieurs  de  mes  phtisiques  ambulants  atteints 
d'hémoptysies  persistantes. 

Les  hémopi-iiliques.  —  Parfois  on  observe  des  hémorrhagies 
dont  la  fréquence  et  l'abondance  paraissent  n'avoir  aucun  rap- 
port avec  les  lésions  sans  importance  révélées  par  l'examen 
physique  le  plus  minutieux.  Il  semble  alors  évident  qu'on  ait 
à  faire  à  un  hémophilique  ;  c'est  toujours  un  état  très  grave 
chez  un  phtisique.  Je  me  suis  trouvé  deux  fois  en  présence  de 
cas  pareils.  Après  avoir  essayé  les  astringents  les  plus  variés, 
je  me  décidai  à  soumettre  le  malade  au  traitement  ioduré,  et 
malgré  l'absence  de  tout  antécédent  spécifique,  les  hémorrha- 
gies devinrent  moins  abondantes  et  moins  fréquentes.  Je  don- 
nais l'iodure  de  potassium  en  solution  saturée,  commençant 
par  3  gouttes  dans  un  verre  de  lait,  et  augmentant  graduelle- 
ment la  dose  jusqu'à  i5  gouttes  trois  fois  par  jour  (environ 
3  grammes  dans  les  24  heures). 

Faiblesse  générale  alarmante.  —  Si  la  faiblesse  générale 
s'accentue  d'une  façon  alarmante,  il  faut  prescrire  le  repos 
absolu  au  lit  dans  une  chambre  bien  aérée,  des  repas  très 
légers  mais  très  fréquents  et  composés  de  substances  facile- 
ment digestibles  et  assimilables  (lait,  viande  crue,  etc.).  En- 
suite on  a  recours  au  massage,  d'abord  discrètement,  puis  on 
augmente  progressivement  la  longueur  des  séances. 

J'ai  appliqué  moi-même,  étant  jeune  étudiant,  sur  le  conseil 
de  mes  maîtres,  en  Amérique,  le  massage  d'après  le  système 
de  Metzger  (d'Amsterdam);  j'ai  été  souvent  étonné  des  résultats 


S8i  TRAITEMENT  SYMPTOMATIQUE 

qu'on  peut  obtenir  par  cette  méthode  chez  des  tuberculeux  en 
étal  d'hyposystolie. 

En  combinant  le  massage  avec  la  suralimentation,  <>n  suit 
presque  la  méthode  de  mon  illustre  compatriote  Weir  Mit- 
chell  (<le  Philadelphie  ,  inventée  par  lui  pour  le  traitement  de 
l'hystérie. 

delà  va  nous  servir  de  transition  pour  parler  des  phéno- 
mènes nerveux  chez  les  tuberculeux.  Nous  avons  dit  plus  haut 
comment  nous  devrions  traiter  l'anorexie  d'origine  nerveuse. 
Pour  un  tuberculeux  hystérique,  neurasthénique  ou  mélanco- 
lique, le  sanatorium  semble  être  le  seul  endroit  où  l'on  puisse 
espérer  une  guérison.  Pour  ces  trois  manifestations  nerveuses 
le  traitement  de  Weir  Mitchell,  combiné  avec  l'aéro  et  l'hydro- 
thérapie, est  le  seul  remède  applicable. 

Insomnie.  —  L'insomnie  de  cause  nerveuse  est  rare  chez 
les  tuberculeux  qui  sont  soumis  à  l'aérothérapie  toute  la 
journée,  (l'est  plutôt  la  toux  qui  empêche  alors  le  sommeil. 
La  potion  suivante  m'a  rendu  dans  ce  cas  les  plus  grands 
services  : 

Sirop  de  codéine 3o   grammes. 

Eau  de  laurier-cerise i5  » 

Eau  de  (leurs  d'oranger   .    .    .    .     ) 
Sirop  de  loin S 


a.i    23 


Lorsqu'on  se  trouve  en  présence  d'une  insomnie  d'origine 
nerveuse,  une  ablution  d'eau  froide  ou  tiède  sur  toul  le  corps, 
laite  comme  nous  l'avons  indiqué  dans  le  chapitre  sur  l'hydro- 
thérapie (p.  j.'5.<),  sans  que  le  malade  quitte  le  lit.  trouve  son 
application  ;  l'enveloppement  du  thorax  et  des  sommets  dans 
une  compresse  mouillée  et  exprimée,  recouverte  de  deux  ou 
trois  tours  de  bande  de  flanelle,  est  également  un  bon  moyen 
sédatif. 

Souvent  le  changement  de  position  rend  le  sommeil  plus 
facile.  Le  patient  doit  autant  que  possible  s'habituer  à  dormir 
sur  le  cote  droit.  Si  le  changement  de  position  provoque  la 
toux  et  (pie  le  malade  sente  (pie  l'expectoration  le  soulagera, 
il  vaut  mieux  qu'il  reste  dans  cette  altitude  jusqu'à  ce  (pie  la 
toux  et  l'expectoration  aient  cessé  ;  il  n'en  dormira  (pie  mieux. 


INSOMNIE  38'i 

On  ne  doit  employer  le  sulfonal  que  si  tous  les  autres  moyens 
échouent. 

Les  autres  causes  qui  peuvent  priver  le  malade  de  sommeil 
sont  le  plus  souvent  une  température  élevée  ou  des  sueurs 
nocturnes  excessives.  Nous  avons  déjà  décrit  la  manière  de 
combattre  ces  symptômes. 


CHAPITRE   XX 
Des  maladies  intercurrentes  et  des  complications. 


Protéger  les  tuberculeux  contre  les  maladies  intercurrentes 
est  l'un  des  principaux  devoirs  du  phtisio-thérapeute  moderne; 
c'est  surtout  dans  les  établissements  fermés  qu'on  cherche 
à  prévenir  ces  affections  secondaires.  Mais  malgré  toutes  les 
précautions,  la  bronchite,  le  pneumothorax,  la  pneumonie,  etc., 
peuvent  survenir. 

Coryza  et  broxchites.  —  Les  bronchites,  par  suite  des 
refroidissements  locaux,  débutent  souvent  par  un  coryza 
suivi  de  laryngo-trachéite  avec  enrouement  ou  extinction  de 
voix  complète.  Les  bronchites  chez  les  tuberculeux  ont  une 
tendance  à  la  chronicité,  et  il  faut  savoir  agir  promptement  et 
judicieusement  .  Le  phtisique  sérieusement  enrhumé  doit 
garder  le  lit.  On  lui  applique  des  ventouses  sèches  sur  la 
poitrine  et  dans  le  dos;  on  lui  fait  prendre  des  limonades 
chaudes,  du  sulfate  de  quinine  (o,5o  centigrammes  une  ou 
deux  fois  .  L'application  de  compresses  échauffantes  est  indi- 
quée dans  ces  bronchites  aiguës.  On  les  prépare  de  la  même 
façon  que  la  compresse  froide,  décrite  plus  haut,  mais  on 
place  un  morceau  de  taffetas  gommé  entre  la  toile  et  la  flanelle. 
11  faut  particulièrement  prendre  soin  île  frictionner  le  thorax 
à  l'alcool  ou  à  l'eau  fraîche  après  l'enlèvement  de  la  compresse 
jusqu'à  ce  que  la  peau  devienne  sèche. 

Pour  le  coryza,  l'application  locale  de  cocaïne  i  gramme 
de  chlorhydrate  de  cocaïne  dans  -aj  grammes  d'eau  distillée) 
avec  un  pinceau  procure  souvent  du  soulagement.  Un  peut  se 


SPLÉNOPNEUMONIE  385 

servir  aussi,  après  que  la  période  aiguë  est  passée,  de  la  poudre 
suivante  que  l'on  fait  priser  : 

Sous-nïlrato  de  bismuth        .    .    \    ...     5  mes. 

Poudre  de  laïc ) 

Lactosc j    ââ  40  centigrammes. 

Camphre ) 

Les  aspirations  de  vapeur  d'iode  et  d'ammoniaque  ou  de 
menthol  l'ont  aussi  du  bien. 

La  bronchopneumonie  est  une  complication  sérieuse  contre 
laquelle  le  repos  au  lit  est  de  rigueur.  On  applique  des  révul- 
sifs, et  on  donne  des  expectorants  tels  que  le  kermès,  l'acétate 
d'ammoniaque,  etc. 

Contre  les  quintes  de  toux  et  la  douleur  on  fera  usage  de  la 
potion  ci-dessous,  qu'on  fera  prendre  par  cuillerées  à  soupe 
toutes  les  trois  heures. 

Eau  dé  fleurs  d'oranger.    ...  100    grammes. 

Sirop  de  chloral !..      n 

<-..          ,               ,  .  !    aa     Jo  » 

sirop  de  morphine J 

Eau  de  laurier-cerise 10  » 

Coxgestioxs  pulmox.ures.  —  Les  congestions  pulmonaires 
des  tuberculeux,  qui  surviennent  parfois  sous  l'influence  d'un 
simple  refroidissement,  d'une  baisse  barométrique  brusque, 
du  surmenage  ou  d'un  écart  de  régime,  seront  traitées  par 
des  révulsifs.  Des  ventouses  sèches,  des  sinapismes  et  l'admi- 
nistration d'un  cathartique  salin  pour  produire  une  dériva- 
tion sur  l'intestin,  suffisent  en  général  à  produire  du  sou- 
lagement. Dans  les  cas  plus  sérieux  l'ipéca  à  dose  vomitive, 
indiqué  par  Trousseau,  Barth,  etc.,  sera  prescrit  avantageuse- 
ment. Comme  régime  dans  les  cas  de  pneumonie,  je  suis 
presque  invariablement  le  conseil  de  mon  maître,  M.  le  pro- 
fesseur Janeway,  qui  recommande  depuis  des  années  le  régime 
lacté  dans  la  pneumonie.  Il  va  sans  dire  qu'en  cas  de  dyspnée 
il  faut  recourir  aux  inhalations  d'oxygène. 

Spléxopxeumoxie.  —  «  La  congestion  pulmonaire  peut  être 
suivie  d'exsudation  séreuse  dans  la  trame  du  poumon,  d'un 
véritable  œdème  subinflammatoire  auquel  Grancher,  qui  l'a 
observé  avec  soin,  a  donné  le  nom  de  splénopneiimonie  tuber- 

Kxopf.  Sanatoiia.  23 


(86  DES  MALADIES  INTERCURRENTES 

culeuse  ;   cette  complication   se   traduil   par   des   signes    très 

analogues  à  veux  d'un  épanchement  pleural  :  matité  à  la  per- 
cussion, abolition  des  vibrations  thoraciques,  souille  lubaire 
doux  et  voilé,  égophonie  ;  la  toux  est  sèche,  la  dyspnée  en 
rapport  avec  l'étendue  de  la  splénisation.  Ces  symptômes  per- 
sistent pendant  plusieurs  semaines,  puis  la  résolution  se  t'ait 
peu  à  peu. 

«  Les  ventouses  sèches  et  scarifiées  au  début,  plus  tard  les 
vésicatoires,  l'ergot  de  seigle  à  l'intérieur,  sont  les  seuls 
moyens  thérapeutiques  à   employer  (i)  ». 

Mais  comme  nous  l'avons  déjà  dit  au  chapitre  «  Traitement 
pédagogique  »,  la  cure  principale  en  ce  qui  concerne  les 
rhumes  et  leurs  conséquences  (bronchite,  congestion  pulmo- 
naire, etc.  chez  les  phtisiques,  c'est  la  prophylaxie,  qui  consiste 
à  préserver  les  malades  contre  le  surmenage.  In  tuberculeux 
surmené  s'enrhume  dix  fois  plus  facilement  qu'un  tuberculeux 
prudent. 

Pleurésies.  —  Les  pleurésies  sérofibrineuses  primitives, 
qui  sont  dans  l'immense  majorité  des  cas  la  première  mani- 
festation de  la  tuberculose,  devraient  être  traitées,  aussitôt 
que  la  phase  aiguë  est  passée,  par  la  méthode  hygiéno-diété- 
tique,  et  il  serait  nécessaire  que  le  malade  restât  sous  l'obser- 
vation du  médecin  pendant  plusieurs  mois. 

L'état  aigu  ne  peut  être  traité  que  symptomatiquement. 

La  thoracentèse  devient  plus  souvent  nécessaire  dans  les 
pleurésies  primitives  que  dans  les  pleurésies  secondaires.  Au 
point  de  vue  île  l'indication  ou  de  l'utilité  de  la  thoracentèse, 
je  ne  puis  cpie  conseiller  de  suivre  le  précepte  de  M.  le  pro- 
fesseur Dieulafoy,  que  j'ai  eu  l'honneur  d'entendre  souvent 
dire  ceci  :  «  La  thoracentèse,  méthodiquement  pratiquée,  ne 
détermine  jamais  ni  accident,  ni  incident  fâcheux  ;  tandis  que 
la  thoracentèse,  imprudemment  rejetée  ou  imprudemment 
différée,  expose  à  la  mort  subite  tout  malade  atteint  d'un  grand 
épanchement.  » 

La  pleurésie  tuberculeuse  secondaire,  quoiqu'elle  puisse 
revêtir  toutes   les  formes,  est  généralement  sèche  ou  légère- 


li)  H.  Bartii.  Thérapeutique  île  la  Tuberculose.  Paris,  i8y6. 


PYOPSEUMOTUORAX  38? 

ment  exsudative.  Quand  un  tuberculeux  présente  les  symp- 
tômes d'une  pleurésie  aiguë  on  le  met  au  lit,  on  applique  clés 
ventouses  sèches  ou  même  scarifiées,  on  calme  la  douleur 
par  les  opiacés,  l'antipyrine,  etc.  Les  diurétiques,  les  sudori- 
fiques  et  les  purgatifs  peuvent  être  aussi  indiqués.  En  ce  qui 
concerne  la  thoracentèse  dans  le  cas  d'une  pleurésie  secondaire 
chez  un  tuberculeux,  je  me  range  à  la  conclusion  à  laquelle 
arrivait  mon  ami  M.  le  Dr  Alexandre  Iv.  Smolianoff,  dans  son 
excellente  thèse  (i)  :  «  Le  terrain  nettement  tuberculeux,  les 
lésions  avancées,  surtout  du  poumon  sous-jacent  à  l'épan- 
chement,  doivent  être  pris  en  considération  quand  on  décide 
la  thoracentèse,  car  la  phtisie  aiguë  pourrait  en  être  la  consé- 
quence ». 

Pneumothorax  et  hydropxeumothorax.  —  Le  pneumothorax 
des  tuberculeux  est  souvent  le  résultat  d'un  effort  physique 
exagéré,  d'un  violent  accès  de  toux,  etc.,  mais  il  peut  aussi 
survenir  sans  cause  apparente  par  suite  de  l'ulcération  lente  et 
de  la  perforation  d'un  lobule  pulmonaire  superficiel.  Le  repos 
au  lit,  une  injection  de  morphine,  un  régime  liquide  stimulant, 
sont  fortement  indiqués.  Von  Leyden  (de  Berlin)  recommande 
dans  ces  cas  le  gavage.  On  applique  localement  l'eau  froide 
ou  la  glace. 

L  hvdropneumothorax  est  traité  de  préférence  par  le  repos 
et  non  par  la  thoracentèse,  car  l'évolution  de  la  tuberculose 
peut  être  enrayée  par  suite  de  la  compression  du  poumon. 
Notre  vénéré  maître,  M.  le  professeur  Potain,  a  obtenu  des 
résultats  surprenants  à  la  suite  d'injections  pleurales  d'air 
stérilisé. 

Pyopxeoiothorax.  —  Si  le  liquide  qui  se  trouve  en  même 
temps  que  l'air  dans  la  cavité  de  la  plèvre  est  purulent,  l'em- 
pyènie  est  le  seul  moyen  qui  puisse  donner  l'espoir  d'une 
guérison,  quoique  M.  Dieulafoy  ait  traité  avec  succès  un  cas 
de  pyopneumothorax  par  des  ponctions  multiples  suivies 
d'injections  intrapleurales  d'une  solution  de  sublimé  (2). 


(1)  A.  I.  S.moliaxoff.  Nature  et  traitement  des  Pleurésies  sérolibrineuses  pri- 
mitives.  Thèse.  Paris,  1898. 

(2)  Cherriek.  Revue  de  médecine,  1892.  10  Février. 


388  DES  MALADIES  INTERCURRENTES 

Gangrène  pulmonaire.  —  On  voit  aussi  survenir  à  titre  de 
complication  au  cours  de  la  tuberculose  pulmonaire  avancée 
la  gangrène  pulmonaire.  Le  terrain  pour  l'invasion  des 
microorganismes  de  la  putréfaction  est  alors  préparé  par  la 
présence  des  cavernes. 

L'antisepsie  doit  être  la  base  du  traitement.  Le  malade  sera 
placé  dans  une  grande  chambre  (s'il  est  dans  un  sanatorium, 
il  occupera  le  pavillon  d'isolement).  Pour  réaliser  l'antisepsie 
pulmonaire  on  pourra  recourir  à  l'une  des  potions  suivantes  : 

i.      Alcoolature  d'eucalyptus 2   grammes. 

Julcp  diacodc 120  » 

V.  S.  A.  —  A  prendre  par  cuillerées  à  soupe  dans  les  vingt-quatre  heures. 

2.      Liqueur  de  Labarraque 4    grammes. 

Hyposulfile  de  sourie 3  » 

Julep  gommeux 120  » 

F.  S    A.  —  A  prendre  par  cuillerées  à  soupe  dans  les  vingt-quatre  heures. 

Les  inhalations  antiseptiques  sont  aussi  très  utiles  : 

Acide  phéniquc 5o  grammes. 

Eau g5o  » 

Mettre  dans  un  flacon  et  taire  respirer  tes  vapeurs. 

Trousseau  préconisait  l'essence  de  térébenthine.  On  verse 
quelques  cuillerées  à  café  d'essence  dans  de  l'eau  chaude  et 
on  fait  inhaler. 

Comme  antiseptique  interne,  Jaccoud  recommande  l'acide 
salieylique  à  la  dose    de  5o  centigrammes  par  jour. 

On  emploiera  larga  manu  les  toniques  sous  toutes  les 
formes. 

La  digitale  et  la  caféine  sont  les  meilleurs  médicaments  à 
prescrire  en  cas  de  collapsus  imminent. 

S'il  y  a  des  foyers  multiples,  le  traitement  médical  est  seul 
possible.  Mais  si  la  gangrène  est  bien  limitée  et  que  la  médi- 
cation interne  ne  produise  pas  d'effets  rapides,  il  faut  faire  la 
pneumotomie,  c'est-à-dire  ouvrir  largement  le  foyer  pulmo- 
naire en  traversant  la  paroi  thoraciquc  et  le  drainer.  Quelques 
chirurgiens  ont  même  pratiqué  la  résection  d'une  partie  du 
poumon. 

Obésité.  —  De   temps    en  temps  on   rencontre  un  phtisique 


GOUTTE  38g 

gras,  obèse  ;  chez  lui  l'augmentation  de  poids  n'est  pas  un 
symptôme  favorable.  Il  souffre  davantage  de  dyspnée,  il  s'en- 
rhume facilement, '  et  le  cœur  surtout  fonctionne  mal;  les 
syncopes  sont  à  craindre  ainsi  que  les  pneumonies  aiguës  et 
autres  complications  résultant  d'une  circulation  imparfaite. 
Chez  ces  malades  on  ne  doit  pas  essayer  de  combattre  l'obésité 
par  un  régime  sévère,  tel  qu'il  est  indiqué  par  Harvey, 
Srhweninger,  Ebstein  et  d'autres  auteurs  allemands;  mais  il 
faut  que  la  perte  de  poids  soit  plutôt  produite  par  des  exercices 
de  marche,  des  exercices  respiratoires,  etc.  Je  suis  à  ce  point 
de  vue  absolument  de  l'avis  de  mon  ancien  collègue  M.  le 
Dr  Blumenfeld  (de  Falkenstein)  (i),  quand  il  dit  qu'un  tuber- 
culeux obèse  ne  doit  pas  perdre  plus  d'un  kilo  par  mois.  On 
peut  supprimer  dans  une  certaine  mesure  les  pommes  de 
terre,  le  pain,  le  beurre  et  le  sucre.  Souvent  on  est  obligé  de 
supprimer  entièrement  le  lait.  La  bière  et  les  extraits  de  malt 
sont  absolument  défendus.  Comme  boisson,  le  vin  blanc  lar- 
gement dilué  avec  de  l'eau  de  Vichy  est  à  recommander. 

Diabète.  —  Chez  un  phtisique  glycosurique  on  doit,  selon 
von  Noorden,  insister  avec  plus  de  force  que  jamais  sur  le 
traitement  antidiabétique.  De  grandes  quantités  de  substances 
grasses  devraient  constituer  les  aliments  principaux  d'un 
pareil  malade.  Von  Noorden  recommande  surtout  l'alcool  en 
abondance.  Pour  ma  part,  je  trouve  que  l'alcool  à  très  haute 
dose  n'est  pas  toujours  bien  supporté  par  ces  malades.  Le 
plus  que  j'aie  pu  faire  prendre  est  une  demi-bouteille  de  vin 
blanc  à  chaque  repas  à  des  sujets  qui  n'étaient  pas  des 
éthyliques. 

Il  faut  éviter  les  sinapismes  et  les  pointes  de  feu  chez  les 
phtisiques  diabétiques. 

Pour  ce  genre  de  malades  un  climat  doux  est  toujours  à 
rechercher. 

Goutte.  —  Au  phtisique  goutteux  on  doit  défendre  tous  les 
alcools   sous    n'importe   quelle    forme,    et    aussi    les    viandes 


(i)   Blumenfeld.  Speciellc  Diillelik  und  Hygiène  des   Lungen-und   Kehlkopf- 
schwindsiichtigen.  Berlin,  1897. 


390  DES  MALADIES  INTERCURRENTES 

noires  ;  en  même  temps  on  insistera  sur  les  exercices,  soit 
actifs,  soit  passifs  [massage  . 

Néphrites  chroniques.  —  Quand  une  néphrite  chronique 
s'associe  à  La  tuberculose,  il  faut  autant  que  possible  mettre  le 
patient  au  régime  lacté  et  observer  toutes  les  autres  règles 
d'hygiène  indiquées  en  cas  de  maladie  de  Bright. 

Pityriasis.  —  Quoiqu'on  ne  puisse  guère  de  notre  temps 
considérer  le  pityriasis  versicolor  (1)  comme  symptomatique 
de  la  phtisie,  j'ai  trouvé  assez  souvent  des  éruptions  pityria- 
siques  chez  les  phtisiques  pour  qu'il  me  soit  permis  de  dire 
dans  ce  traite  quelle  est  la  méthode  thérapeutique  qui  m'a 
le  mieux  réussi.  Je  lave  le  soir  toutes  les  parties  affectées 
avec  «Ile  savon  noir  ou  vert,  puis  j'applique  unecouche  d'ichtyol, 
je  couvre  le  tout  avec  un  morceau  de  toile  ou  une  pièce  de 
taffetas  gommé.  Le  matin  je  nettoie  la  peau  avec  une  solution 
de  sublimé  à  1  p.  dooo.  M.  le  docteur  Gaucher,  dans  ses 
intéressantes  leçons  sur  les  maladies  de  la  peau  2  .  recom- 
mande pour  les  cas  tenaces  la  lotion  suivante  : 

Acide  salicylique 1   gramme. 

Alcool 10  grammes. 

Eau 90  » 

Mais  ce  qui  est  surtout  important,  c'est  de  faire  bouillir  et 
désinfecter  les  chemises  de  nuit  et  les  flanelles  du  malade  pour 
éviter  une  réinfection. 

Tuberculose  miliaire. —  Contre  la  tuberculose  miliaire  nous 
ne  pouvons  qu'instituer  un  traitement  symptomatique.  Le  seul 
remède  qui  me  semble  donner  quelques  résultats  dans  celle 
maladie  désolante,  c'est  le  tanin  a  haute  dose.  Voici  une  façon 
agréable  de  l'administrer: 

Tanin |   à   6   grammes. 

Sirop  d'écorce  d'oranges  amères.  5o  » 

Eau  distillée i5o  » 

V .  S.  A.  —  A  prendre  clans  les  2.J  heures,  par  cuillerées  à  soupe  d'heure  en 
heure. 


in   Les  squames  renferment  un  parasite  appelé!  le  microsporon  fin-fur. 
(a)  Gvucher.  Leçons  sur  les  maladies  de  la  peau.  Paris,   i8çp. 


TUBERCULOSES  LOCALES  3<)I 

Tuberculoses  locales.  —  Les  manifestations  locales  de  la 
tuberculose,  telles  que  le  lupus,  les  ostéites  et  la  tuberculose 
des  articulations,  peuvent  compliquer  la  tuberculose  pulmo- 
naire, mais  le  traitement  de  ces  affections  relève  des  derma- 
tologistes  et  des  chirurgiens,  car  elles  n'appartiennent  pas  au 
domaine  de  la  phtisio-thérapie  proprement  dite. 


CHAPITRE  XXI 
La  tuberculose  laryngée. 


La  thérapeutique  de  la  tuberculose  laryngée  se  divise  en 
traitement  prophylactique,  traitement  hygiénique,  traitement 
symptomatique,  traitement  local  el  traitement  chirurgical. 

Prophylaxie.  —  La  prophylaxie  de  la  tuberculose  laryngée 
primitive  est  celle  de  la  tuberculose  pulmonaire  telle  que  nous 
l'avons  déjà  décrite  dans  les  chapitres  précédents. 

La  prophylaxie  de  la  tuberculose  laryngée  secondaire  est  le 
traitement   hygiéno-diététique   de  la  tuberculose  pulmonaire. 

Nous  avons  parlé  plus  haut  de  la  plupart  des  précautions 
que  le  tuberculeux  pulmonaire  doit  prendre  contre  l'infection 
des  voies  supérieures;  nous  voulons  seulement  répéter  ici  que 
l'emploi  du  mouchoir  avant  servi  à  nettoyer  la  bouche  après 
l'expectoration  est  souvent  la  cause  dune  infection  secondaire. 
Nous  croyons  qu'il  est  important  d'insister  encore  une  fois  sur 
la  nécessité  de  traiter  soigneusement  et  promptement  toutes 
les  rhinites  ou  trachéo-laryngiles  au  début,  si  l'on  veut  éviter 
la  chronicité  et  l'invasion  probable  des  organes  malades  par 
la  tuberculose. 

Hygiène.  —  L'hygiène  des  tuberculeux  du  larynx  consiste 
surtout  dans  le  silence.  Parler  aussi  peu  que  possible  et  fuir 
les  endroits  oit  il  y  a  des  poussières  ou  des  vapeurs  irritantes, 
respirer  toujours  par  le  nez  en  tenant  la  bouche  bien  fermée, 
surtout  en  temps  de  grand  froid,  de  brouillard  ou  de  vent 
fort.  Nous  répétons  que  pour  les  tuberculeux  du  larynx  un 
climat  doux  et  suffisamment  humide  est  à  rechercher. 

Protéger  le  cou  de  façon  à  y  avoir  modérément  chaud  est 
essentiel,  niais  il  faut  surveiller  le  malade  pour  que  le  cache-nez. 


TOUX  ET  DYSPHAGIE  3$i 

ou  le  mouchoir  de  soie  ne  se  trouve  pas  trop  serré  (i).  La  sur- 
veillance médicale  d'un  tuberculeux  du  larynx  est  d'une  haute 
importance.  Le  malade  doit  être  averti  que  parler  même  à  voix 
basse  empêche  la  guérison,  car  les  cordes  vocales  sont  peut- 
être  plus  tendues  par  le  chuchotement  forcé  que  par  la  parole 
ordinaire.  Il  y  a  des  malades  qui  répondent  au  moindre  cha- 
touillement de  la  gorge  par  une  véritable  explosion  de  toux  (2). 
L'éducation  peut  faire  beaucoup  de  bien  dans  ces  cas. 

AÉROTHÉRAPIE    ET     CABINET    PNEUMATIQUE  DANS    LA   TUBERCULOSE 

laryngée.  —  Il  va  sans  dire  que  l'aérothérapie  est  aussi  im- 
portante pour  les  tuberculeux  laryngés  que  pour  les  tubercu- 
leux pulmonaires.  Les  exercices  respiratoires  doivent  être 
réglés  d'après  la  force  du  malade.  La  modification  que  j'ai  ap- 
portée au  cabinet  pneumatique  (respiration  par  le  nez  à  l'aide 
du  masque)  et  que  j'ai  décrite  plus  haut,  permet  aussi  aux 
tuberculeux  laryngés  de  profiter  des  avantages  de  ce  traite- 
ment. J'ai  observé  un  certain  nombre  de  résultats  heureux 
chez  quelques  sujets  atteints  de  tuberculose  laryngée  ;  il 
semble  que  l'air  Irais  rentrant  avec  un  peu  de  force  dans  le 
larynx,  après  s'être  tempéré  au  contact  des  muqueuses  du 
nasopharynx,  agisse  d'une  façon  bienfaisante  sur  les  granula- 
tions et  les  ulcérations  du  larynx.  De  plus,  grâce  à  l'oxygéna- 
tion supplémentaire  résultant  de  ces  exercices,  l'état  général 
du  malade  s'améliore. 

Toux  et  dysphagie.  —  Souvent  la  cause  de  la  toux  réside 
dans  un  catarrhe  sec  des  muqueuses  nasopharyngiennes,  et 
le  traitement  ordinaire  de  cette  affection  soulage  le  patient. 

Le  régime  des  tuberculeux  laryngés  demande  une  attention 
particulière.  Comme  chez  les  tuberculeux  pulmonaires,  une 
bonne  alimentation,  ou,  mieux,  la  suralimentation,  sont  indis- 
pensables. Mais  la  dysphagie  rend  la  tâche  du  médecin  parti- 
culièrement difficile.  Il  faut  produire  une  anesthésie  locale  du 
larynx   pour    combattre    les    douleurs   pendant  la   déglutition 


(1)  M.  Schmidt.  Die  Kraukheiten  der  oberen  Luftwege.  Berlin,  1894. 

(2)  Besold.  Ueber  die  Miterkrankung  des  Kelilkopfes  bei  Lungenluberkulose. 
Mûnchener  med.  Wochenschrift.  n°  26,  1898. 


lui  LA   TUBERCULOSE  LARYNGÉE 

Dans  les  formes  légères,  les  pastilles  d'Avellis,  dont  chacune 
contient  2  milligrammes  de  cocaïne  el  20  centigrammes  d'an- 
tipyrine, agissenl  assez  bien  <'l  le  malade  peut  placer  lui-même 
ces  pastilles  une  avant  chacun  (les  principaux  repas  sur  la  hase 
de  la  langue  (1). 

La  solution  suivante,  portée  avec  un  pinceau  sur  la  paroi 
postérieure  du  pharynx,  l'épiglotte,  etc.,  facilite  aussi  la  dé- 
glutition en  cas  de  dysphagie  tuberculeuse  (y.)  : 

Antipyrine 2   grammes, 

Chlorhydrate  de  cocaïne i    gramme. 

Eau  distillée 10   grammes. 

Dans  ces  derniers  temps,  on  a  employé  avec  avantage  un 
nous  eau  remède  appelé  1'  <<  orthoforme  ».  D'après  Goldscheider, 
l'effet  en  est  plus  sue  quand  on  l'applique  sous  forme  de 
poudre   3  . 

Alimentation.  —  Pour  faciliter  la  déglutition  en  cas  d'ul- 
et  rations  profondes  et  douloureuses,  on  peut  recourir  à  la 
méthode  de  Wolfenden  \.  Le  malade  se  penche  en  travers 
i\i>  lit,  de  façon  que  la  tète  et  les  bras  pendent  librement 
au  dehors,  et  que  les  extrémités  inférieures  soient  plus  élevées 
que  l'autre  partie  du  corps.  11  y  a  îles  sujets  qui  trouvent 
qu'ils  déglutissent  plus  facilement  en  se  reposant  sur  les  ge- 
noux et  les  coudes,  el  d'autres  qui  ont  moins  de  dysphagie 
quand  ils  prennent  leurs  aliments  étant  couchés  sur  l'abdomen. 

Les  aliments  des  tuberculeux  laryngés  ne  devraient  être  ni 
trop  chauds,  ni  trop  froids,  ni  trop  assaisonnés;  les  acides 
(vinaigre,  moutarde,  etc.)  sont  à  éviter;  les  boissons  peuvenl 
être  prises  froides,  surtout  si  le  malade  en  éprouve  ensuite 
du  soulagement.  Tous  les  aliments  devraient  être  de  consis- 
tance liquide    ou  semi-liquide  ;  les  substances  solides    provo- 


(i)  Bllmenfeld.  Specielle  Diâtetili  und  Hygiène  des  Lungen-  und  Kehlkopf- 
schwindsùchtigen.  Berlin.  1897. 

(2)  \\  KouLEwsKi.  Die  Behandlung  des  Schluckwehs. 

(3)  Goldscheider.  Ueber  das  Verhalten  des  Orlhoforms  im  Organismus. 
Berliner  klin.  Wochenschrift,  1898,   i5  Août. 

(-i)  Wolfenden.  A  simple  method  of  procuring  déglutition,  where  such  is 
impeded  bj  reason  of  extensive  ulcération  ofthe  epiglottis.  The  Lancet,  1887, 
1  Juillet. 


TRAITEMENT  CHIRURGICAL  3yo 

quent  des  douleurs,  non  seulement  en  avalant,  mais  encore 
par  suite  de  la  longue  mastication  qu'elles  nécessitent.  Le  lait  et 
les  œul's  crus  formeront  toujours  la  base  de  l'alimentation  dans 
la  phtisie  du  larynx.  On  peut  donner  aussi  des  omelettes,  du 
ris  de  veau,  des  purées  diverses,  bouillies  dans  du  lait  ou  du 
bouillon,  etc.  En  fait  d'alcool,  on  ne  doit  jamais  prescrire 
que  du  vin  largement  dilué  avec  de  l'eau  pure.  L'«  egg-nogg  », 
dont  nous  avons  déjà  parlé,  est  un  adjuvant  précieux  pour 
l'alimentation  des  tuberculeux  du  larynx.  Le  gavage  même 
peut  devenir  nécessaire. 

Contre  les  douleurs  laryngiennes,  les  cravates  de  glace  ou 
des  compresses  froides  autour  du  cou  rendent  des  services, 
surtout  pendant  la  nuit.  Les  pulvérisations  d'une  solution  très 
faible  de  chlorure  de  sodium  sont  également  bienfaisantes,  car 
elles  facilitent  les  expectorations  tenaces. 

Traitement  local  par  l'acide  lactique.  —  Comme  traitement 
de  la  tuberculose  laryngée,  l'acide  lactique  en  application  locale 
semble  avoir  donné  d'excellents  résultats.  On  fait  d'abord  l'anes- 
thésie  locale  par  la  cocaïne,  puis  on  applique  l'acide  laclique 
en  solution  de  5  à  j5  p.  ioo  sur  la  surface  ulcérée.  Quelques 
auteurs  conseillent  l'injection  sous-muqueuse. 

Traitement  chirurgical.  —  Il  y  a  des  cas  où  l'intervention 
chirurgicale,  c'est-à-dire  l'ablation  des  produits  tuberculeux 
gênant  la  respiration  et  la  déglutition,  devient  absolument 
nécessaire.  La  gravité  de  cette  intervention  dépend  du  volume 
de  la  masse  à  enlever  et  de  sa  situation.  Un  véritable  grattage 
peut  devenir  nécessaire.  Pour  ce  grattage  ou  curettage,  on  se 
sert  soit  de  la  curette  de  Krause,  soit  de  remporte-pièce  de 
Gougenheim  ou  de  la  curette  double  rotatoire. 

Quoique  chaque  cas  doive  être  étudié  soigneusement  avant 
de  se  décider  à  tenter  une  opération  de  ce  genre,  il  me  semble 
utile  de  reproduire  ici  les  indications  et  contre-indications  du 
curettage  telles  que  mon  ami  le  Dr  Gleitsmann  les  a  présentées 
au  dernier  Congrès  international,  à  Moscou  (i)  : 


(i)  J.-W.   Gleitsmann.   Report  of  the    progress   made    in  the  treatment    of 

laryngeal  Tuberculosis  since  the  last  International  Congress.    Xew   York  Mel. 
Record,    1897,  4  Dec 


396  LA   TUBERCULOSE  LARYNGÉE 

Indications.  1.  Dans  le  cas  où  il  s'agit  dune  affection  pri- 
maire sans  complications  pulmonaires  ; 

2.  Au  cas  où  les  ulcérations  et  infiltrations  sont  limitées  au 
larynx  ; 

3.  Lorsqu'il  y  a  des  infiltrations  denses  et  dures  de  la  région 
arvténoïdienne  postérieure,  des  bandes  ventriculaires  et  de 
l'épiglotte  ; 

4-  Quand  l'affection  pulmonaire  n'est  encore  qu'au  premier 
degré  et  apyrétique  ; 

5.  Enfin  dans  les  cas  de  phtisie  avancée,  compliquée  par  une 
dysphagie  extrême  résultant  de  l'infiltration  des  aryténoïdes. 

Contre  -indications .  1.  Phtisie  pulmonaire  avancée  avec 
symptômes  d'hecticité  ; 

a.   Tuberculose  disséminée  du  larynx  ; 

3.  Infiltrations  étendues  produisant  la  sténose  grave,  cas  où 
la  possibilité  de  la  trachéotomie  ou  de  la  laryngotomie  doivent 
être  envisagées. 

D'après  Gleitsmann,  le  curettage  est  contre-indiqué  si  le 
malade  est  méfiant  et  pusillanime. 

Revillet  a  rapporté,  dans  la  Revue  de  la  Tuberculose 
d'avril  1897,  un  cas  de  tuberculose  laryngée  aiguë  traitée  par 
les  rayons  de  Rœntgen.  Il  croit  avoir  observé  une  action 
sédative  sur  le  système  nerveux,  et  il  attribue  cette  action 
sédative  à  la  diminution,  puis  à  la  disparition  de  la  dysphagie, 
alors  que  l'examen  laryngoscopique  ne  montrait  que  peu 
d'atténuation  dans  les  lésions  du  larynx. 

De  tout  ce  qui  vient  d'être  dit  sur  la  nécessité  d'examiner 
souvent  le  larynx,  soit  pour  le  traitement  chirurgical,  soit 
pour  l'application  d'un  anesthésique  destiné  à  faciliter  la 
déglutition,  il  résulte  que  pour  un  malade  atteint  de  phtisie 
laryngée,  le  sanatorium  est  le  seul  endroit  où  il  puisse  espérer 
guérir. 


CHAPITRE  XXII 
Traitement  moral  et  pédagogique. 


On  ne  peut  nier  que  le  traitement  moral  et  pédagogique  tel 
qu'on  le  fait  suivre  clans  un  sanatorium  ne  produise  le  plus 
grand  bien.  Nous  allons  donc  décrire  dans  ce  chapitre  ce  que 
doit  être,  selon  notre  conception,  ce  traitement,  que  nous 
conseillons  de  prescrire  même  en  dehors  du  sanatorium,  dans 
les  cas  où  le  placement  du  malade  dans  un  établissement 
fermé  n'est  pas  possible. 

Occupations  du  malade.  —  L'occupation  principale  du  malade 
sera  toujours  de  se  guérir.  Tout  son  temps  doit  être  employé 
de  manière  à  atteindre  ce  but.  Rendre  le  moins  pénible  qu'il 
se  pourra  cette  tâche,  qui  demande  de  la  part  du  sujet  beau- 
coup d'abnégation,  de  patience  et  de  soumission,  tel  est  le 
devoir  du  médecin,  de  ses  aides  et  de  toutes  les  personnes  qui 
entourent  un  phtisique. 

Le  phtisio-thérapeute  moderne  doit  savoir  occuper  le  malade 
toute  la  journée  avec  son  traitement. 

A  telle  heure,  repas  ;  à  telle  autre,  cure  d'air  sur  la  chaise 
longue  ;  à  telle  autre,  promenades,  hydrothérapie,  exercices 
respiratoires,  etc.,  etc.  Et  de  son  côté,  le  malade  doit  être 
persuadé  de  l'importance  de  ces  occupations  et  convaincu  qu'il 
n'a  pas  le  temps  de  faire  autre  chose  que  sa  cure. 

La  vie  clans  un  sanatorium  doit  être  agréable,  pour  faire 
moins  regretter  la  vie  de  famille  que  le  malade  vient  de  quitter; 
celui-ci  sera  entouré  de  la  sollicitude  du  médecin  et  de  tout 
le  personnel;  on  lui  procurera  des  divertissements  tranquilles. 
Beaucoup  de  tact,  beaucoup  d'amour  de  l'art  médical  et  de 
l'humanité,  sont  nécessaires  pour  vivre  avec  les  tuberculeux. 
Il  y   a  des    phtisiques    doux,   résignés  ;    mais    beaucoup    sont 


3y8  TRAlTEMETiT  MORAL  ET  PÉDAGOGIQUE 

irritables.  Le  médecin,  les  infirmiers,  etc.,  doivenl  sentir  la 
grandeur  de  leur  mission  et  ne  pas  oublier  que  leurs  pension- 
naires soiil  des  malades  et  qu'ils  sont  sujets  à  des  névroses 
particulières.  On  doit  permettre  aux  phtisiques  les  lectures 
tranquilles,  les  jeux  non  excitants,  même  la  musique. 

Rôle  du  médecin.  —  De  temps  en  temps  on  doit  organiser 
de  petites  réunions,  se  rappeler  le  jour  de  fête  des  malades, 
leur  l'aire  à  l'occasion  de  Noël  ou  du  jour  de  l'an  de  petites 
surprises  agréables.  Tout  cela  contribue  à  leur  rendre  moins 
dure  l'absence  de  la  Camille  ;  ils  ne  se  sentent  pas  étrangers 
parmi  des  étrangers. 

Enfin  le  traitement  hygiéno-diététique  dans  les  établisse- 
ments Termes  a  pour  dernier  objet  de  faire  connaître  au  patient 
la  vraie  nature  de  son  affection,  de  lui  montrer  combien  il 
dépend  de  lui-même  de  ne  pas  l'aggraver  et  de  guérir,  et, 
quoique  malade,  combien  il  peut  l'aire  par  ses  propres  efforts 
pour  supprimer  cette  terrible  maladie  parmi  les  nations 
civilisées. 

Ici  commence  le  traitement  moral  et  pédagogique,  rôle 
important  du  médecin  qui  devient  à  la  fois  conseiller  médical, 
instructeur,  tuteur,  confesseur  et  ami  intime  ilu  malade.  S'il 
ne  connaît  pas  l'état  psychique  de  ses  pensionnaires  aussi 
bien  que  leur  état  physique,  le  médecin  d'un  sanatorium  ne 
peut   pas  avoir  grand  succès. 

A  son  entrée  au  sanatorium,  le  médecin  s'entretient  longue- 
ment avec  le  nouvel  arrivé.  Il  recueille  les  commémoratifs  et 
étudie  en  même  temps  l'état  moral  du  sujet,  puis  il  procède 
à  l'examen  physique.  Et  après  cela,  doit-il  dire  au  malade  la 
vérité  ?  Oui,  assez  souvent,  mais  avec  ménagement  :  aux  phti- 
siques  très  avancés  il  faut  dire  que  leur  vie  peut  être  pro- 
longée et  qu'il  dépend  beaucoup  d'eux  d'y  arriver. 

Pronostic.  —  Vis-à-vis  de  malades  avant  une  apparence 
de  guérison  presque  certaine,  il  faut  encore  se  garder  de  faire 
un  pronostic  trop  positif.  On  peut  se  tromper  sur  les  signes 
physiques,  et  l'absence  ou  le  peu  d'abondance  des  bacilles  est 
encore  plus  souvent  une  cause  d'erreur. 

Quand    on   pratique    le   premier  examen    bactériologique,  il 


PRONOSTIC  399 

faut  toujours  se  rappeler  «  que  les  bacilles  peuvent  faire  mo- 
mentanément défaut  dans  l'expectoration,  dans  la  phtisie 
confirmée,  quand  le  foyer  ramolli  cesse  pendant  un  certain 
temps  de  se  déverser  clans  les  bronches  »  (1).  De  même  la 
présence  inattendue  d'un  très  grand  nombre  de  bacilles,  due 
à  une  «  débâcle  »  d'un  petit  foyer  riche  en  microbes,  n'indique 
pas  que  le  cas  est  plus  grave  que  l'examen  physique  ne  le 
révèle.  Il  faut  donc  faire  clés  examens  bactériologiques  répé- 
tés. En  présence  d'un  tuberculeux  nouvellement  arrivé,  je  ne. 
connais  pas  de  meilleurs  conseils  à  suivre  que  ceux  de 
M.  le  professeur  Grancher  :  «  Les  signes  précoces  de  la 
tuberculose  pulmonaire  commune  (altération  de  la  respira- 
tion, particulièrement  de  l'inspiration)  précèdent  quelquefois 
la  toux  et  l'expectoration,  la  submatité,  la  bronchophonie,  etc., 
pendant  un  long  espace  de  temps.  Ces  signes  appartiennent  à 
la  période  de  germination  de  la  tuberculose  pulmonaire  (ce 
que  Bayle  appelait  la  phtisie  actuelle). 

«  La  présence  bien  constatée  des  bacilles  tuberculeux  dans 
les  crachats  est  un  signe  certain  de  tuberculose,  mais  ce  n'est 
pas  un  signe  précoce.  Le  plus  souvent,  les  signes  physiques 
et  rationnels  sont  antérieurs  à  l'apparition  des  bacilles  clans  les 
crachats,  et  le  médecin  ne  doit  pas  attendre  la  présence  des 
bacilles  pour  instituer  un  diagnostic  et  une  thérapeutique. 

«  Si  le  diagnostic  par  les  signes  physiques  et  rationnels 
offre  des  incertitudes  et  des  écueils,  la  recherche  du  bacille 
n'est  pas  exempte  de  causes  d'erreurs,  qui  sont  inhérentes  à  la 
méthode,   aux  réactifs,  aux  observateurs  (2)  ». 

Le  pesage  du  malade  l'ait  partie  de  ces  examens.  Tous  les 
malades  sont  pesés  à  des  intervalles  réguliers,  et  on  en  tient 
compte  clans  l'évolution  de  la  maladie  soit  vers  la  guérison, 
soit  vers  la  mort.  Et  pour  revenir  au  pronostic:  il  faut  toujours 
considérer  l'état  social  du  malade,  sa  profession,  son  tempé- 
rament, son  caractère,  «  car  l'homme  meurt  souvent  cle  son  ca- 
ractère. »  Voici  la  devise  du  professeur  Grancher  :  «  Le  pro- 
nostic cle  la  phtisie  pulmonaire  commune  dépend  en  effet  du 
malade  autant  et  plus  que  de  la  maladie.  » 


(1)  Straus.  La  tuberculose  cl  son  bacille,  p.  68:2. 

(■1)  Grancher.  Maladi.es  de  l'appareil  respiratoire,  pp.  187-188. 


joo  TRAITEMENT  MORAL  ET  PEDAGOGIQUE 

Quand  on  est  assez  heureux  pour  avoir  répondu  à  la  satis- 
faction du  malade  sur  la  question  du  pronostic,  on  est  presque 
invariablement  interpellé  par  lui  de  la  manière  suivante  : 
«  Docteur,  combien  de  temps  nie  faut-il  pour  guérir  ?  » 
Nous  savons  tous  combien  il  esl  difficile  de  répondre  à  cette 
question  avec  certitude,  même  dans  des  cas  qui  présentent 
toutes  chances  de  guérison.  Je  réponds  toujours  avec  fran- 
chise, en  disant  au  patient  :  «  Monsieur,  je  ne  peux  pas  vous 
le  dire,  car  cela  dépend  autant  de  vous  que  de  moi  ». 

Des  malades  ont  été  guéris,  ou  du  moins  suffisamment  amé- 
liores pour  rentrer  chez  eux  et  reprendre  leurs  occupations 
en  menant  une  vie  prudente,  après  un  séjour  de  4  à  6  mois 
dans  un  établissement  fermé.  Chez  d'autres  la  guérison  ne 
s'est  effectuée  qu'après  un  et  même  deux  ans  de  séjour  dans 
le  sanatorium.  Il  n'y  a  pas  deux  tuberculeux,  même  à  égalité 
de  lésions,  qui  réagissent  de  la  même  façon  au  traitement.  Il 
va  sans  dire  que  les  cas  où  le  pronostic  est  peu  favorable 
doivent  rester  indéfiniment  soumis  à  la  surveillance  d'un 
médecin. 

Discipline.  Les  malades  de  nationalités  diverses  dans  un 
sanatorium.  -  -  Toutes  les  personnes  qui  ont  ouï  parler  d'un 
sanatorium  pour  tuberculeux  ont  souvent  entendu  le  mot  «  disci- 
pline »  ;  ce  mot,  qui  effraie  souvent  les  phtisiques  en  dehors 
d'un  sanatorium,  pourrait  être  facilement  remplacé  par  un 
terme  plus  agréable,  car  il  faut  savoir  que  toute  l'histoire  de 
celte  discipline  peut  tenir  dans  les  deux  phrases  suivantes  : 

La  volonté  arrêtée,  de  lapait  du  malade,  de  suivre  les  con- 
seils du  médecin,  et,  de  la  part  du  médecin,  une  indulgence 
extrême  pour  tout  ce  qu'il  peut  permettre  à  ses  malades, 
une  fermeté  inébranlable  pour  interdire  tout  ce  qui  leur  est 
préjudiciable. 

On  a  dit  que  les  Français,  les  Américains,  et  surtout  les 
Anglais  ne  se  soumettent  pas  facilement  à  la  vie  régulière  et 
surveillée  des  sanatoria.  Cela  esl  inexact.  L'expérience  du 
moins  m'a  démontré  qu'avec  du  tact  on  peut  arriver  à  faire 
comprendre  à  un  Fiançais,  un  Américain  ou  un  Anglais  que 
se  soumettre  au  règlement  strict  de  l'établissement  dans 
lequel  il  est  venu  pour  se  guérir,   ne  lui  enlève  aucun  de  ses 


ixsriiL'CrroNs  pour  éviter  les  rhumes  401 

privilèges  d'homme  libre,  de  républicain,  ou  de  sujet  libre  de 
S.  M.  la  Reine  Victoria. 

Pendant  que  j'étais  médecin  adjoint  à  Falkenstein,  j'ai  été  en 
contact  avec  des  malades  de  diverses  nationalités.  J'ai  trouvé 
(pie  les  Français,  les  Anglais,  et  mes  compatriotes  les  Améri- 
cains, se  pliaient  d'aussi  bonne  grâce  aux  règles  de  l'établis- 
sement que  les  Allemands  mêmes.  Que  la  nostalgie  s'empare 
d'un  Français  dans  un  sanatorium  allemand,  qu'un  Américain 
ou  un  Anglais  préférât  être  plus  près  de  son  «  home  »,  cela 
est  bien  naturel.  C'est  pour  cette  raison  que  je  souhaite  de 
tout  mon  cœur  voir  bientôt  construire  dans  tous  les  pays  un 
nombre  suffisant  de  sanatoria  pour  que  la  nostalgie  ne  figure 
plus  comme  un  l'acteur  désavantageux  dans  le  traitement  des 
phtisiques,  qui  sont  actuellement  obligés  d'aller  chercher  ces 
établissements  loin  de  leur  foyer  et  parfois  à  l'étranger. 

Un  des  premiers  conseils  à  donner  au  malade  est  de  ne  pas 
venir  au  sanatorium  sans  être  certain  qu'il  y  a  de  la  place,  et 
sans  être  muni  d'une  lettre  de  son  médecin  ordinaire. 

Tous  les  autres  points  (expectoration,  toux,  promenades, 
etc.,  etc.)  qu'on  a  aussi  classés  dans  le  chapitre  discipline 
sont  traités  sous  leurs  titres  respectifs,  et  nous  n'y  revien- 
drons pas. 

Instructions  pour  éviter  les  rhumes,  etc.  —  Pour  éviter 
les  maladies  intercurrentes,  les  rhumes,  les  refroidissements, 
il  faut,  en  dehors  de  l'endurcissement,  de  l'hygiène  de  la  peau 
et  des  vêtements,  etc.,  faire  aux  malades  quelques  recom- 
mandations : 

Respirer  toujours  par  le  nez,  fermer  la  bouche,  et  éviter  de 
parler  pendant  les  promenades  ascendantes;  surtout  ne  pas 
ouvrir  la  bouche  trop  fréquemment  quand  il  fait  très  froid  oii 
quand  les  vents  sont  très  forts.  Pour  conjurer  les  effets  sou- 
vent fâcheux  d'un  exercice  exagéré,  le  malade  doit  se  rappeler, 
en  faisant  ses  promenades,  qu'il  n'est  jamais  nécessaire  d'ar- 
river à  tel  ou  tel  point  qui  lui  est  désigné  ou  qu'il  se  désigne 
lui-même. 

Les  tours  de  force  sont  absolument  nuisibles  à  tous  les 
phtisiques,  qu'ils  soient  en  voie  de  guérison  ou  même  guéris. 
Trop  de  travail  intellectuel  est  également   dangereux  et  doit 

Knopf.   Sanatoria.  26 


io-2  TRA1TEMEST  MORAL  ET  PÉDAGOGIQUE 

être  évité.  Ainsi  les  tuberculeux  peuvent  s'épargner  les  fièvres 
du  surmenage  <|iii  non  seulemenl  retardent  la  guérison,  niais 
sont  encore  assez  souvent  la  cause  de  nouvelles  poussées 
aiguës.  Il  faut  toujours  se  rappeler  que  la  plupart  des  rhumes, 
même  des  rhumes  simples,  sont  plutôt  le  résultai  d'un  sur- 
menage rendant  une  infection  plus  facile  que  la  conséquence 
de  toute  autre  cause. 

Pendant  qu'ils  font  leur  cure  de  repos,  les  malades  peuvent 
lire,  écrire,  et  les  daines  peuvent  même  faire  un  peu  de  travail 
à  l'aiguille  à  condition  de  ne  pas  se  pencher  trop  sur  leur 
ouvrage.  On  facilite  la  position  pour  écrire  ou  faire  la  lecture 
en  plaçant  devant  le  malade  un  petit  pupitre.  Pour  les  sujets 
fiévreux,  la  lecture  ne  doit  pas  être  d'un  genre  excitant. 
M.  Wolff  (de  Reiboldsgrùn)  a  marqué  d'une  étoile  tous  les 
livres  de  la  bibliothèque  qui  ne  sont  pas  permis  aux  fébri- 
citanls. 

A  propos  des  livres  et  d'une  bibliothèque,  je  tiens  à  rappeler 
ici  une  petite  communication  que  j'ai  publiée  récemment  dans 
la  Presse  médicale  sur  l'infection  des  livres  par  les  bacilles 
de  la  tuberculose  et  leur  désinfection  (i). 

Il  faut  conseiller  aux  malades  de  ne  pas  dormir  trop  long- 
temps après  le  repas  sur  leurs  chaises  longues.  Dans  un  sana- 
torium il  est  bon  de  dire  aux  pensionnaires  de  veiller  alternati- 
vement les  uns  sur  les  autres,  et  de  ne  pas  se  permettre 
mutuellement  un  sommeil  de  plus  de  10  à  i5  minutes  après  le 
dîner  et  le  déjeuner.  Un  sommeil  plus  prolongé  tend  à  mettre 
le  sujet,  entièrement  habillé,  trop  facilement  en  état  de 
transpiration. 

Pendant  son  séjour  au  sanatorium,  le  malade  doit  apprendre 
à  s'habiller  rapidement  le  matin;  les  daines  surtout  resteront 
à  leur  toilette  aussi  peu  de  temps  que  possible,  pour  ne  pas 
s'exposer  à  s'enrhumer  pendant  qu'elles   sont  peu  couvertes. 

Dans  les  endroits  où  la  température  change  brusquement,  le 
malade  ne  sortira  ni  avant  le  lever  ni  après  le  coucher  du  soleil. 

Si  pendant  la  nuit  le  patient  a  besoin  de  se  lever,  il  ne  doit 
jamais  quitter  le  lit  sans  se  couvrir  de  son  «  saut  tic  lit  »  (2). 


(1)  La  Presse  Médicale,  1900. 

(i)  Espèce  de  manteau  de  laine,  fort  ample,  qui  couvre  tout  le  corps 


CONFERENCES  ET  CAUSERIES  4o3 

J'ai  vu  des  malades  s'enrhumer  presque  toutes  les  nuits  sans 
cause  apparente,  jusqu'à  ce  que  j'eusse  découvert  qu'ils  se 
levaient  en  pleine  transpiration  une  ou  deux  fois  par  nuit  pour 
uriner;  ou  bien  encore  ils  se  penchaient  plusieurs  fois  hors 
de  leur  lit  pour  cracher  dans  un  vase  posé  à  terre.  La  recom- 
mandation de  se  servir  d'un  urinai,  et  de  cracher  aussi  pendant 
la  nuit  dans  le  crachoir  de  poche,  placé  avant  de  se  coucher 
sous  l'oreiller,  a  pour  effet  d'éviter  les  refroidissements. 

Il  faut  étudier,  chez  chaque  malade,  ces  mêmes  détails  qui, 
bien  que  futiles  en  apparence,  peuvent  néanmoins  entraîner 
de  graves  conséquences. 

Les  devoirs  du  malade  envers  le  médecin.  —  Pour  obtenir 
un  réel  bénéfice  des  soins  qui  lui  sont  donnés  dans  le  sana- 
torium, le  malade  doit  sentir  que  lui  aussi  a  des  devoirs  envers 
le  médecin  qui  le  traite,  le  personnel  qui  le  sert  et  envers 
les  autres  pensionnaires.  Nous  avons  déjà  parlé  de  l'obéissance, 
de  l'abnégation  et  de  la  patience,  mais  le  tuberculeux  doit 
faire  davantage.  Il  doit  avoir  une  confiance  absolue  dans  son 
médecin,  et  l'aider  tant  qu'il  le  peut.  Ce  devrait  être  un  point 
d'honneur  pour  chaque  malade,  non  seulement  de  suivre  toutes 
les  règles  de  l'établissement,  mais  aussi  de  ne  jamais  permettre 
qu'un  autre  pensionnaire  commette  des  imprudences  ou  une 
infraction  aux  règles  d'hygiène  ou  de  discipline  du  sanatorium. 

Dans  un  sanatorium  on  trouve  des  malades  appartenant  à 
différentes  classes  de  la  société.  Les  médecins  reoarderont 
ceux  qui  sont  doués  d'une  éducation  et  d'une  nature  supé- 
rieures comme  des  auxiliaires  précieux  pour  faire,  autant 
que  possible,  de  la  société  du  sanatorium  une  société  de  bon 
ton.  Ceux  qui  sont  d'une  nature  enjouée  aideront  à  la  gué- 
rison  des  mélancoliques.  Le  médecin  d'un  sanatorium  doit 
présider  aux  repas,  pris  dans  la  salle  à  manger.  Pendant 
l'après-midi,  de  i  à  4  heures,  tous  les  malades  non  alités 
doivent  rester  sur  des  chaises  longues.  Chacun  est  alors  visité 
par  le  médecin.  Les  patients  alités  sont  visités  deux  fois  par 
jour.  Tous  les  pensionnaires  du  sanatorium  sont  soumis  une 
fois  par  mois  à  un  examen  minutieux  dans  le  cabinet  du  mé- 
decin dirigeant. 

Conférences   et  causeries.  —    Les    petites  conférences  ou 


4oî  TRAITEMENT  MORAL  ET  PEDAGOGIQVE 

causeries  faites  aux  malades  par  le  médecin  sur  les  causes  de 
la  phtisie,  la  prédisposition,  l'hygiène  générale  el  l'hygiène 
spéciale  qu'exige  la  tuberculose,  la  curabilité  de  celle  maladie 
que  le  public  croit  à  lort  incurable,  toul  cela  l'ait  partie  du  trai- 
tement pédagogique  et  moral  d'un  pensionnaire  de  sanato- 
rium. 

Le  malade  ne  doit  pas  seulement  être  guéri,  mais  il  doit 
l'ester  guéri,  et  les  instructions  qu'il  reçoit  à  sou  départ  du 
sanatorium  oui  pour  but  de  lui  enseigner  tout  ce  qui  contribue 
à  maintenir  sa  guérison  :  résidence,  profession,  mariage, 
progéniture. 

Mais  c'est  surtout  dans  les  conversations  intimes  avec  le 
malade  que  le  médecin  doit  établir  le  traitement  psychique, 
par  îles  encouragements,  des  consolations,  en  citant  des 
exemples  de  guérison,  etc.,  etc. 

Là  aussi,  h1  médecin  donne  des  avis  que  l'intimité  seule 
permet  :  il  explique  les  lois  de  l'hérédité  et  les  causes  qui 
ag-oravcnt  souvent  la  maladie. 

Les  mots  classiques  de  Peter  :  «  fille  pas  de  mariage,  femme 
pas  d'enfants,  mère  pas  d'allaitement  »,  ne  peuvent  pas  être 
acceptés  comme  règle  absolue  aujourd'hui. 

Mariage  et  grossesse.  —  Un  tuberculeux  guéri  depuis  deux 
ans,  c'est-à-dire  qui  n'a  pas  eu  d'accidents  depuis  deux  ans, 
peut  se  marier,  à  condition  qu'il  se  ménage  et  mène  une  vie 
calme.  Cette  règle  est  applicable  aux  hommes  aussi  bien  qu'aux 
femmes.  Une  jeune  tille  guérie  de  la  tuberculose  peut  se  marier 
et  avoir  des  enfants,  mais  l'allaitement  doit  être  considéré 
comme  une  cause  d'affaiblissement  et  il  vaut  mieux  que  la 
mère  conserve  toutes  ses  forces.  Mais  il  y  a  des  cas  où  un 
tuberculeux,  et  le  plus  souvent  une  tuberculeuse,  dont  le  mal 
évolue  lentement,  se  trouve  dans  un  étal  d'âme  où  l'inter- 
diction du  mariage  est  purement  et  simplement  une  condam- 
nation à  une  mort  prématurée. 

Dans  ce  cas,  je  crois  que  nous  sommes  autorisés  à  permettre 
le  mariage  à  la  femme  en  lui  fournissant  les  indications  pour 
ne  pas  devenir  enceinte,  en  instituant  le  traitement  hygiéno- 
diététique  et  en  donnant  au  mari  les  conseils  (pie  la  situation 
comporte. 


MARIAGE  ET  GROSSESSE  4o5 

J'estime  qu'une  femme  dans  ces  conditions,  placée,  après  le 
mariage,  dans  un  sanatorium  pas  trop  éloigné  de  son  mari  et 
de  sa  'famille,  a  plus  de  chances  de  guérison  comme  femme 
mariée  quelle  n'en  aurait  eu  si  on  l'eût  laissée  dans  la  situa- 
tion d'une  fiancée  sans  espoir  de  se  marier  jamais. 

Les  avis  sur  la  marche  de  la  grossesse  chez  les  femmes 
tuberculeuses  sont  partagés  :  les  uns  soutiennent  qu'elle  active 
l'évolution  de  la  phtisie,  les  autres  qu'elle  la  ralentit  et  que  la 
maladie  ne  reprend  sa  marche  qu'après  l'accouchement. 

M.  le  professeur  Tarnier,  dans  le  service  duquel  j'ai  eu 
l'honneur  de  faire  mon  stage  obstétrical,  nous  a  enseigné  que 
la  phtisie  marche  plus  vite  pendant  le  cours  de  la  grossesse, 
et  cela,  qu'elle  ait  débuté  pendant  ou  avant  cette  grossesse. 

Dans  le  Journal  des  sages-femmes  du  icr  octobre  1894  est 
relaté  un  cas  qui  semble  de  nouveau  confirmer  cette  con- 
clusion du  maître  :  «  Une  femme  enceinte  du  service  de 
clinique  de  M.  Tarnier  se  portait  bien  il  y  a  un  an;  pendant  les 
cinq  derniers  mois  elle  était  arrivée  au  troisième  degré  de  la 
phtisie.  »  Pour  M.  Tarnier,  il  faut  éviter  la  grossesse  chez  une 
phtisique,  et  empêcher  aussi  qu'une  phtisique  n'allaite. 

M.  Pinard  se  range  à  l'opinion  dflérard  et  Gornil.  «  Dans  la 
majorité  des  cas,  dit-il,  la  grossesse,  loin  d'enrayer  la  phtisie 
pulmonaire,  en  accélère  au  contraire  la  marche.  Mais  il  faut 
reconnaître  aussi  que  quelquefois  la  maladie  n'est  influencée 
ni  en  bien  ni  en  mal,  et  que  même,  dans  un  petit  nombre  de 
cas,  les  symptômes  paraissent  manifestement  arrêtés.  » 

Cet  avis  est  également  partagé  par  Ribemont-Dessaignes  et 
Lepage  dans  leur  Précis  d'obstétrique  (1). 

En  résumé,  on  peut  dire  avec  Herrgott  fils  :  «  La  plupart  des 
auteurs  considèrent  la  grossesse  comme  un  puissant  agent 
accélérateur  de  la  marche  de  la  tuberculose.  » 

Notre  maître,  M.  le  professeur  Lusk  (de  New-York),  se 
range  à  cet  avis. 

Quelle  conduite  suivre,  si,  malgré  les  avis  du  médecin,  une 
femme  tuberculeuse  devient  enceinte  ?  Discuter  cette  question 
dépasse  le  but  de  notre  travail.  Elle  est  traitée  dans  tous  les 
livres  classiques  d!accouchement,  et,  il  y  a  quelque  temps,  M.  le 


(1)  Pubemont-Dessaignes  et  Lepage.  Précis  d'Obstétrique,  p.  646. 


io6  TRAITEMENT  MORAL  ET  PEDAGOGIQUE 

professeur  Gaillard  (de  Lille)  (1)  a  publié  des  notions  précises 
sur  ce  problème  difficile  et  encore  loin  d'être  résolu. 

La  diversité  extrême  cpii  règne  en  matière  d'avor'tement 
provoqué  chez  une  femme  phtisique,  m'a  amené  à  faire  une 
enquête  au  sujet  des  femmes  enceintes  en  traitement  dans 
les  sanatoria. 

J'ai  adressé  à  plusieurs  directeurs  de  ces  établissements  la 
question  suivante  : 

«  Avez-vous  eu  l'occasion  d'observer  le  résultat  du  traite- 
ment hygiéno-diététique  appliqué  aux  femmes  tuberculeuses 
en  état  de  grossesse  ?  » 

RÉSULTATS     OBTENUS    PAU    LE     TRAITEMENT     HYGIENO-DIETETIQUE 

chez  les  femmes  EXCEiNTEs.  —  Yoici  les  résultais  :  trois  méde- 
cins dirigeants  ont  observé  que  les  femmes  tuberculeuses 
enceintes  se  trouvent  remarquablement  bien  pendant  leur 
séjour  au  sanatorium  ;  mais  les  améliorations  apparentes 
cessent  après  l'accouchement  et  dans  la  majorité  des  cas  la 
terminaison  est  fatale. 

Néanmoins,  Dellweiler  a  été  surpris  de  voir  plusieurs  cas 
soumis  à  la  «  Kur  »  pendant  un  temps  prolongé  suivre  la  voie 
de  la  guérison  après  l'accouchement. 

Meissen  (de  Hohenhonnef)  a  observé  les  mêmes  faits. 

YY'ollf  a  été  exceptionnellement  heureux  à  ce  sujet.  11  a  eu 
au  cours  des  trois  dernières  années  cinq  femmes  enceintes 
tuberculeuses  dans  son  sanatorium. 

Toutes  ont  l'ait  une  cure  exemplaire  pendant  la  durée  de  la 
grossesse  et  ont  accouché  normalement;  quatre  nul  repris 
rapidement  leurs  forces  après  l'accouchement,  la  cinquième 
est  morte  peu  de  temps  après. 

Rompler  a  cité  quelques  cas  où  il  a  pu  suivre  la  mère  pen- 
dant plusieurs  années;  elle  a  continué  à  demeurer  valide  sans 
que  les  lésions  pulmonaires  se  soient  renouvelées. 

Turban  a  enregistré  des  résultats  excellents  chez  plusieurs 
femmes  dont  l'état  s'est  amélioré  tout  en  accouchant  de  beaux 
et  vigoureux  enfants,  mais  il  ajoute  que  ses  malades  n'étaient 
que  légèrement  atteintes  par  la  tuberculose. 


(i)  Galxakd.  La  Presse  médicale,   i8y.j,  S  déc. 


LE  DÉCALOGUE  DES  PHTISIQUES  407 

Trudeau  (de  Saranac  Lake,  New- York)  a  obtenu  également 
des  résultats  très  satisfaisants  du  traitement  hygiéno-dié- 
tétique  chez  les  femmes  tuberculeuses  enceintes.  Mais  il 
insiste  surtout  pour  que  ce  traitement  soit  continué  ;  immé- 
diatement après  l'accouchement,  on  donne  une  nourrice  à 
l'enfant. 

Moi-même  je  soigne  depuis  deux  ans  deux  femmes  tuber- 
culeuses, qui  sont  accouchées,  Tune  il  y  a  un  an,  l'autre  dix- 
huit  mois.  Les  deux  femmes  se  trouvent  aujourd'hui  dans  un 
état  très  satisfaisant,  mais  l'enfant  de  l'une  est  mort.  Il  est  vrai 
que  chez  toutes  deux  la  tuberculose  était  au  début,  mais  je 
suis  néanmoins  convaincu  que  sans  le  traitement  hygiéno-dié- 
tétique,  commencé  plusieurs  mois  avant  l'accouchement  et 
continué  jusqu'au  jour  même,  les  résultats  auraient  été  bien 
moins  satisfaisants. 

Sabourin,  Achtermann  et  Weicker  ont  eu  l'occasion  de 
constater,  chez  les  femmes  enceintes  de  leur  sanatoria,  un 
arrêt  presque  complet  de  tout  processus  tuberculeux  pendant 
toute  la  durée  de  la  grossesse,  suivi  d'une  déchéance  rapide 
après  l'accouchement. 

Admettant  avec  conviction  la  parole  de  notre  très  regretté 
maître  M.  le  professeur  Tarnier  :  «  Il  faut  éviter  la  grossesse 
chez  une  femme  phtisique  »,  il  me  semble  préférable,  quand 
la  grossesse  est  survenue,  d'essayer  le  traitemement  hygiéno- 
diététique  chez  les  femmes  tuberculeuses  plutôt  que  de  tenter 
les  incertitudes  d'un  avortement  provoqué.  Les  quelques  sta- 
tistiques recueillies  plaident  certainement  en  faveur  du  traite- 
ment hygiéno-diététique  et  non  de  l'intervention  obstétricale. 

Le  décalogle  des  phtisiques.  —  Quand  le  malade  quitte  le 
sanatorium,  guéri  ou  suffisamment  amélioré  pour  reprendre 
la  vie  ordinaire,  le  déealogue  qui  a  paru  le  18  avril  1898  dans 
le  Lyon  médical  peut  lui  servir  de  ligne  de  conduite  pour 
l'avenir. 

Je  me  suis  permis  de  changer  une  seule  phrase  de  ce  déea- 
logue intéressant.  L'auteur  dit  comme  troisième  commande- 
ment :  «  Qu'uniforme  soit  le  climat,  Est  précepte  très  impor- 
tant. »  C'est  vraiment  impossible  de  demander  à  des  milliers 
de  tuberculeux  de  ne  demeurer  que  dans  des  climats  uniformes. 


io8  TRAITEMENT  MOU. IL   ET  PÉDAGOGIQUE 

Il  me  semble  que  tout  ce  (|iii  est  nécessaire  <•!  tout  ce  que  l'on 
peut  espérer  de  voir  se  réaliser,  c'est  que  ces  malades  cher- 
chent à  habiter  des  climats  où  les  températures  extrêmes  ne 
soienl  pas  trop  prononcées.  J'ai  (loue  remplacé  le  premier  vers 

par  les  iimls  suivants  :  «  sans  extrêmes  soit  le  rliinat  ». 


DÉCALOGUE     : 

Toujours  air  pur  respireras 
Des  le  début  du  traitement. 

A  l'air  libre  t'exerceras 
Pour  le  guérir  rapidement. 

Sans  extrêmes  suit  le  climat 
Est  précepte  ires  important. 

Par  le  temps  Irais  tu  porteras 
Des  habits  chauds  suffisamment 

Avec  Phébus  te  lèveras, 
Te  coucheras  pareillement. 

Travail  quelconque  ne  feras 
Qu  en  dehors  de  l'appartement. 

Jamais  départ  tu  ne  prendras 
Qu  aux  jeux  le  thorax  dilatant. 

1  )  être  propre  il  t'importera 
En  toute  chose  absolument. 

Des  précautions  tu  prendras 
Contre  le  refroidissement. 

Vénus  tu  ne  fréquenteras, 
Mais  mangeras  abondamment. 


Écoles  spéciales  pour  les  infirmiers.  —  La  profession  d'in- 
firmier  ou    infirmière    dans    un  sanatorium   on  hôpital   pour 


L'IIYPURGIE  409 

phtisiques,  demande  du  dévouement  et  une  éducation  particu- 
lière (1). 

Aux  Etats-Unis  nous  avons  attaché  au  sanatorium  de  Liberty 
une  école  pour  infirmières,  où  les  jeunes  dames  qui  se  sont 
consacrées  à  la  profession  de  garde-malade  reçoivent  une 
instruction  spéciale  pour  soigner  les  tuberculeux. 

Choix  des  gardes-malades.  —  Les  conditions  principales 
pour  toute  personne  qui  désire  se  spécialiser  dans  les  soins  à 
donner  aux  phtisiques  sont  :  d'abord  une  santé  parfaite,  un 
dévouement  sincère,  une  vie  sobre,  la  recherche  de  l'air  frais 
et  pur,  une  aversion  naturelle  contre  les  poussières  et  les  mau- 
vaises odeurs.  Des  notions  exactes  sur  la  prophylaxie  de  la 
tuberculose,  sur  l'application  des  moyens  hydrolhérapiques 
et  sur  les  premiers"  soins  à  donner  en  cas  d'hémorragie  et 
autres  accidents,  lui  seront  enseignés  par  les  médecins  de 
l'établissement. 

Les  gens  nerveux  font  de  mauvais  gardes-malades  pour 
phtisiques. 

Pour  que  l'infirmier  dans  un  sanatorium  ou  hôpital  spécial 
fasse  bien  son  service,  pour  qu'il  n'ait  jamais  la  tentation  de 
donner  à  un  malade  des  soins  particuliers  en  vue  d'une  rétri- 
bution (pourboire),  enfin  pour  qu'il  n'y  ail  rien  qui  puisse 
excuser  une  négligence  envers  un  autre  malade,  l'infirmier 
doit  recevoir  une  juste  rémunération  de  ses  peines. 

Il  ne  faut  pas  que  les  gardes-malades  soient  surmenés  par 
le  travail.  Comme  les  pensionnaires  du  sanatorium,  les  infir- 
miers ont  aussi  besoin  de  respirer  et  de  s'exercer  de  temps 
en  temps  à  l'air  libre.  Le  service  de  l'infirmier  doit  être  réglé 
de  façon  que  la  durée  de  travail  constant  auprès  des  malades 
ne  dépasse  jamais  plus  de  huit  heures  par  jour. 

Entre  les  médecins,  l'administration  et  les  infirmiers  d'un 
sanatorium  pour  tuberculeux  il  doit  toujours  exister  une  bonne 
entente,  nécessaire  dans  l'intérêt  du  malade  et  pour  l'honneur 
de  la  noble  mission  à  laquelle  tous  se  sont  consacrés,  c'est-à- 
dire  soulager  la  souffrance  de  leurs  semblables. 


(1)  G.    Liebe.  Die   Aufgabe    des    Pilegcpersonals    in    der   modernen  Volks- 
heilstalle  fur  Lungenkranke.  Deutsclie  Krankenpflege  Zeïtung,  189S,  5  avril. 


4io  TRAITEMENT  MORAL  ET  PEDAGOGIQUE 

On  peut  me  faire  le  reproche  d'avoir  été  trop  minutieux 
dans  ma  description  de  tout  ce  qui  touche  à  l'hygiène,  au 
régime,  au  traitement  moral,  etc.  Je  puis  dire  pour  ma  défense 
qu'avant  beaucoup  vécu  avec  les  phtisiques,  j'ai  appris  que  le 
traitement  de  la  phtisie  exige  que  rien  ne  soit  négligé.  L'en- 
semble des  soins,  grands  et  petits,  donnés  aux  tuberculeux, 
constitue  le  vrai  traitement. 

L'  «  hypurgie  ».  —  C'est  à  V  hypurgie  (i),  autrement  dit  à 
l'art  de  soigner  le  malade  scientifiquement,  de  savoir  lui  pro- 
curer le  confort,  l'hygiène,  le  régime  et  le  soutien  moral, 
qu'est  dû  en  majeure  partie  le  succès  de  la  phtisio-thérapie 
moderne. 

Je  ne  prétends  nullement  qu'il  soit  impossible  d'instituer 
dans  la  clientèle  privée  un  traitement  hygiéno-diététique  satis- 
faisant et  suffisant. 

('.nies,  il  y  a  des  malades  favorisés  par  la  fortune  qui  peu- 
vent s'entourer  de  tous  les  soins  nécessaires,  et  il  s'en  trouve 
parmi  eux  dont  la  patience  saura  admettre  et  supporter,  sans 
qu'une  surveillance  constante  soit  indispensable,  la  vie  sobre 
et  prudente  qui  leur  convient.  11  en  est  qui  se  soumettront 
strictement  à  tous  les  ordres  du  médecin  ;  mais  combien  ceux- 
là  soûl  rares  parmi  les  riches!  (l'est  pourquoi  je  ne  me  lasse 
pas  de  répéter  que,  pour  la  majorité  des  phtisiques,  quelle  que 
snil  leur  situation  de  fortune,  mais  surtout  pour  ceux  qui  sont 
atteints  d'une  tuberculose  pulmonaire  en  voie  d'évolution,  le 
traitement  dans  les  établissements  fermés  est  celui  qui  donne 
le  plus  de  garantie  de  succès. 


(il  Ou  peut  trouver  déjà  dans  les  Œuvres  d  Hippocrale  le  mot  hypurgie  (de 
ûitoupYSÏv,  faire  emploi  des  adjuvants).  Littré  le  traduisait  par  cette  belle 
phrase  :  «  la  bonne  volonté  pour  ce  qui  est  à  faire  ».  Mendelsohn  (Die  Kran- 
kenpflege,  Vienne  cl  Leipzig)  se  sert  de  ce  mot  pour  marquer  la  différence  entre 
les  services  rendus  au  malade  par  l'infirmier  [Krankenwartungi  service  auprès 
du  malade)  et  le  service  rendu  par  le  médecin,  non  par  l'administration  des 
médicaments,  mais  par  1  emploi  scientifique  des  nombreux  autres  agents  théra- 
peutiques (hygiène,  régime,  confort,  exercice,  etc.)  qui  peuvent  aider  au  réta- 
blissement d  un  malade. 


CHAPITRE   XXIII 
Climat,  altitude  et  médicaments  spéciaux. 


Considérant  le  traitement  hygiénique  et  diététique  comme  le 
meilleur  qui  existe  jusqu'à  ce  jour,  nous  débarrassant  des  an- 
ciennes idées  sur  Faction  spécifique  de  certains  climats,  sur  la 
vertu  spéciale  de  quelques  médicaments,  nous  pouvons,  avec 
plus  de  clarté  et  de -sûreté,  faire  usage  de  tous  les  adjuvants 
qui  nous  sont  offerts,  soit  par  un  climat  ou  une  altitude  déter- 
minée, soit  par  les  substances  médicamenteuses  ou  tous  autres 
moyens. 

Considérations  générales  sur  la  phtisic-climato-thérapie. 
—  Si  l'on  veut  savoir  quel  est  le  meilleur  climat,  il  faut 
d'abord  envisager  le  degré  de  la  maladie.  En  ce  qui  concerne 
les  malades  trop  avancés  pour  qu'une  guérison  soit  à  espérer, 
le  climat  le  plus  favorable  et  le  meilleur  est  celui  qu'ils  habi- 
tent. 

Pour  les  malades  anémiés,  avec  tendance  extrême  au  catarrhe 
laryngé  ou  bronchique,  un  climat  doux,  tel  que  celui  du  littoral 
méditerranéen,  est  indiqué. 

Les  hautes  altitudes  :  Davos,  Arosa,  Leysin,  etc.,  ne  convien- 
nent qu'aux  tuberculeux  peu  avancés. 

Mais  il  faut  dire  qu'aucune  forme  de  phtisie  n'est  immuable. 
Une  phtisie  à  forme  torpide  peut  évoluer  vers  la  forme  éré- 
thique  et  vice-versa.  Sur  une  tuberculose  pulmonaire  en  voie  de 
guérison  une  tuberculose  laryngée  peut  se  greffer,  ou,  réci- 
proquement, la  tuberculose  du  larynx  peut  descendre  dans  les 
organes  respiratoires  profonds. 

Le  meilleur  climat  pour  un  tuberculeux  est  celui  qui  lui 
permet  de  séjourner  le  plus  longtemps  à  l'air  libre,  pendant  le 
plus  grand  nombre  de  journées  et  avec  le  moins  de  danger. 


4ii  CLIMAT.  ALTITUDE  ET  MEDICAMENTS  SPECIAUX 

En  général,  on  peut  dire  qu'un  changement  de  climal  ou 
d'altitude  fait  souvent  du  bien  à  tous  les  tuberculeux  peu 
avancés.  Quelques  phtisiques  sont  améliorés  par  l'air  de  la 
mer,  surtout  s'ils  peuvenl  vivre  sur  des  côtes  ensoleillées, 
jouissant  d'une  température  modérément  douce  avec  de  rares 
brouillards  et  peu  do  pluie,  l'u  voyage  sur  mer  peut  même  être 
avantageux  pour  un  tuberculeux  qui  n'est  que  peu  sujet  au 
mal  de  nier.  Des  voyages  sur  terre  trop  fréquents  font  au 
contraire  du  mal   aux  tuberculeux  à  n'importe  quel  degré. 

Pour  choisir  entre  un  climat  froid  et  un  climal  chaud,  je 
crois  que  la  meilleure  chose  à  l'aire  est  de  demander  au 
malade  s'il  se  sent  mieux  l'hiver  que  l'été.  S'il  souffre  moins 
pendant  l'été,  envoyez-le  aux  pays  chauds.  Si  au  contraire,  il  se 
trouve  mieux  en  hiver, conseillez-lui  les  pays  froids.  En  dehors 
de  cela,  il  y  a  autant  d'idiosyncrasies  pour  les  climats  et  les 
altitudes  que  pour  les  médicaments.  .Mais,  ainsi  que  nous  le 
disons  dans  un  autre  chapitre  de  ce  travail,  il  faut  encore 
prendre  en  considération  les  conditions  sociales  :  une  règle 
générale  pour  un  tuberculeux  guérissable,  obligé  après  sa 
guérison  de  travailler  pour  gagner  sa  vie,  est  de  choisie  le 
climat  le  plus  semblable  à  celui  ou  il  scia  contraint  de  vivre 
après  sa  guérison. 

«  Home  climates.  »  —  A  ce  propos  il  y  a  un  l'ail  qui,  à  mon 
avis,  n'a  pas  encore  été  mis  suffisamment  en  évidence,  et  sur 
lequel  on  ne  saurait  trop  insister  si  l'on  envisage  la  tuberculose 
connue  un  problème  social,  .le  répète  que  j'ai  souvent  observé 
(pie  les  guérisons  obtenues  dans  les  climats  habituels  home 
climate),  c'est-à-dire  les  climats  ordinairement  considérés 
comme  peu  favorables  à  la  guérison  de  la  phtisie,  ont  été 
d'une  durée  plus  longue  que  les  guérisons  obtenues  dans  des 
climats  plus  doux  et  ayant  la  réputation  d'être  plus  ou  moins 
«  spécifiques  »  dans  le  traitement  de  la  tuberculose  pulmo- 
naire. 

.Nous  ne  pouvons  pas  nous  étendre  plus  longuement  sur  la 
climato-thérapie  sans  dépasser  le  but  de  notre  travail.  D'excel- 
lents  ouvrages   ont   été   publiés  à   ce   sujet    par  Jaccoud   (i), 


(i)  S.  Jaccoud.  Curabilitè  cl  traitement  de  la  Phtisie  pulmonaire.  Paris. 


III  ILE  DE  FOIE  DE  MORVE  î  «3 

Weber  (i),  Solly  (a),  de  la  Harpe  (3)  et  d'autres  auteurs.  Nous 
dirons  seulement  que  les  bons  effets  produits  sur  un  phti- 
sique par  un  climat  et  une  altitude  qui  lui  conviennent  par- 
ticulièrement, seraient  décuplés  s'il  se  trouvait  dans  un 
sanatorium  placé  en  cet  endroit. 

Je  vais  encore  plus  loin,  et  si  l'on  me  donne  le  choix  d'en- 
voyer un  phtisique  ayant  quelque  chance  de  guérison  en  un 
climat  et  à  une  altitude  où  il  n'existe  pas  de  sanatorium  et 
où  il  sera  libre  d'agir  à  sa  guise,  ou  bien  de  l'envoyer  dans  un 
établissement  fermé  où  toutes  les  conditions  climatériques  et 
d'altitude  sont  d'ordinaire  celles  de  nos  plaines,  je  l'enverrai 
dans  ce  dernier  endroit,  étant  convaincu  qu'il  a  plus  de 
chances  de  guérison  dans  un  climat  relativement  défavorable 
avec  le  régime,  l'hygiène  et  la  surveillance  permanente  du 
médecin,  que  dans  un  climat  idéal  sans  les  avantages  qu'offre 
un  sanatorium. 

Médicaments  SPÉCIAUX.  —  L'adjuvant  le  plus  précieux,  après 
le  climat  et  l'altitude,  est  la  médication. 

Je  n'ai  pas  l'intention  de  passer  en  revue  dans  ce  chapitre 
tous  les  médicaments  qui  sont  employés  aujourd'hui  en 
phlisio-thérapie.  Je  veux  parler  seulement  de  quelques  modi- 
ficateurs  de  la  nutrition,  de  quelques  remèdes  réputés  bacilli- 
cides,  enfin  dire  quelques  mots  sur  la  sérothérapie  anti- 
tuberculeuse et  les  essais  de  vaccination  par  des  produits 
bactériens  de  la  tuberculose,  et  donner  les  raisons  pourquoi 
je  préfère  le  traitement  hygiéno-diététique  au  traitement 
réputé  spécifique  à  l'aide  des  antitoxines  ou  des  toxines. 

Huile  de  foie  de  morue.  —  L'huile  de  foie  ce  morue  est 
et  sera  toujours  un  médicament  précieux  pour  modifier  la  nu- 
trition. 

Employée  chez    les    phtisiques   pour  la  première   fois    par 


(i)  H.  Weber.  Clhnatothérapie.  Paris,  1 8S6. 

(2)  S.-E.  Solly.  Médical  Climatology.  Philadelphie,  1897. 

(3)  De    la   Harpe.    Formulaire    des    stations    d'hiver    et  des   stations    d'été. 
Paris,  1895. 


il  i  CLIMAT,  ALTITUDE  ET  MEDICAMENTS  SPECIAUX 

Pereeval  (1790),  elle  est  ordonnée  aujourd'hui  aux  malades 
atteints  de  tuberculose,  quelle  que  soit  sa  localisation,  dans 
Ions  les  pays.  D'après  les  belles  recherches  de  M.  Gautier,  les 
huiles  fauves  et  blondes  sont  les  plus  nutritives  et  sont  préfé- 
rables aux  lniiles  blanches  et  noires.  Pour  que  l'huile  de  l'oie 
de  morue  produise  des  effets  notables,  nous  pensons  avec 
MM.  Grancher,  Jaccoud  et  Daremberg  que  la  dose  niiniina  doit 
être  de  4  cuillerées  à  soupe  par  jour,  et  on  doit  s'efforcer 
d'arriver  graduellement  à  10  et  12.  Mais  il  faut  compter  avec  la 
fonction  stomacale  :  il  y  a  des  phtisiques  qui  ne  peuvent 
prendre  que  des  quantités  minimes  de  ce  médicament,  sur- 
tout au  début,  et  il  faut  augmenter  graduellement  même  pour 
arriver  à  la  dose  de  5o  grammes  par  jour. 

Connue  M.  Créquy  (1),  je  pense  que  l'administration  de 
l'huile  de  l'oie  de  morue  (ou  de  tous  autres  médicaments)  par 
cuillerées  est  infidèle  et  qu'il  vaut  beaucoup  mieux  se  servir  de 
flacons  gradués  portant  des  divisions  mathématiques.  Si 
l'huile  de  foie  de  morue  est  mal  tolérée,  on  la  remplace  par  la 
glycérine. 

Pour  rendre  l'huile  de  foie  de  morue  moins  désagréable  à 
prendre,  on  peut  l'aromatiser,  à  l'exemple  de  Duquesnel  (2),  en 
ajoutant  j5  gouttes  d'essence  d'eucalyptus  par  litre  d'huile  de 
foie  de  morue  jaune. 

Gomme  succédané  de  l'huile  de  foie  de  morue,  je  tiens  en- 
core à  citer  la  solution  chlorodn'omo-iodurée  de  mon  vénéré 
maître  le  professeur  Potain  (de  Paris)  : 

Chlorure  de  sodium 10  grammes. 

Bromure  de  sodium 5          — 

Iodure  de  sodium i    gr.    5o 

Eau  distillée ioo   grammes. 

A  prendre  :  une  cuillerée  à  ea  lé  le  malin  dans  une  tasse  de  lait. 

«  Tropon.  o  —  Récemment,  en  Allemagne,  on  a  fait  de  nom- 
breux essais  avec  une  préparation  albumincuse,  appelée 
«  tropon  »,  qui  a  été  recommandée   pour  la   première   fois  par 


(i)  Créquy.  Société  de  Thérapeutique,  i8g5,  28  février. 

(2)  Duquesnel.  Gazelle  hebdomadaire  de  inéd .  et   de  cliir.,    189S.    1 .}   juillet. 


SOMATOSE  4l5 

Finkler  (i)  (de  Bonn)  comme  un  adjuvant  précieux  dans  le 
traitement  de  la  phtisie.  C'est  une  poudre  fine,  sans  goût  et  sans 
odeur,  d'une  couleur  brun  jaunâtre,  insoluble  dans  l'eau. 
D'après  Finkler,  elle  ne  contiendrait  pas  moins  de  94  p.  100 
d'albumine  et  serait  très  facilement  assimilable.  On  donne  le 
«  tropon  »  mélangé  avec  du  lait,  du  cacao  ou  de  la  soupe, 
3o  grammes  environ  par  demi-litre  de  lait  et  ao  grammes  par 
demi-litre  de  bouillon.  Mais  il  est  nécessaire,  à  cause  de  son 
insolubilité,  de  le  mettre  dans  le  liquide  bouillant  d'abord  en 
petite  quantité,  puis  on  ajoute  le  reste  peu  à  peu.  Pris  en  solu 
tion,  il  semble  que  le  «  tropon  »  laisse  tout  de  même  assez 
souvent  un  goût  désagréable  dans  la  bouche  du  malade.  Plaut  (2) 
recommande  alors  de  remplacer  le  «  tropon  »  par  1'  «  eucasine  », 
la  «  nulrose  »  ou  le  «  sanatogène  »  (3). 

Somatose.  —  Sur  la  valeur  alimentaire  de  la  somatose,  un 
remède  bien  indiqué  clans  la  tuberculose,  la  Presse  médicale 
du  a4  septembre  1898  publiait  la  note  suivante  : 

D'après  Hildebrandt,  qui  en  a  fait  une  étude  très  conscien- 
cieuse, la  somatose  constitue  un  des  meilleurs  agents  théra- 
peutiques et  alimentaires  dont  nous  puissions  disposer  pour 
lutter  contre  la  déchéance  organique  qui  se  manifeste  au  cours 
de  certains  états  pathologiques,  et  notamment,  pour  combattre 
l'anorexie  et  les  troubles  dyspeptiques  des  individus  trop 
profondément  anémiés  par  un   processus  morbide  antérieur. 

Au  dire  des  auteurs  qui  l'ont  expérimentée,  la  somatose 
devrait  ses  propriétés  reconstituantes  à  sa  riche  teneur  en 
principes  albuminoïdes  facilement  assimilables  ;  en  effet,  si 
l'on  consulte  les  données  fournies  par  les  expériences  et  par 
les  observations  cliniques,  on  voit  que  cette  préparation  pos- 
sède une  valeur  alimentaire  quatre  fois  supérieure  à  celle  de 
la  bonne  viande  de  boucherie  :  c'est,  du  moins,  ce  qui  res- 
sort des  faits  rapportés  par  Hildebrandt,  Drews,  Adrian,  etc. 

Un  autre  hygiéniste  fort  distingué,  M.  Maassen  (de  Vienne), 


(1)  Finkler.  Berliner  klin.    Wochenschrift,  1898,  nos  3o,  3i,  32,  33. 

(2)  Plaxjt.   Zeiisclirift  /'.    diàtetische  itnd  physikalischc   Thérapie.  Leipzig, 
1898,  n°  9. 

(3)  Treltel  et  Vis.  Mùnchener  med.  Wochenschrift,   189S,  n°  9. 


416  CLIMAT,  ALTITUDE  ET  MÉDICAMENTS  SPÉCIAUX 

s'est,  de  son  côté,  livré  à  des  recherches  en  vue  d'établir  si  la 
somatose  exerce  aussi  une  influence  sur  le  chiffre  «les  héma- 
ties et  sur  le  taux  <le  l'hémoglobine  <\\\  sang;  pour  donner  à 
ses  expériences  toute  la  rigueur  scientifique  désirable,  il  s'esl 
servi  de  l'hématimètre  de  Zeiss-Thoma,  el  de  Phémoglobini- 
inètre  de  Gowers.  Dans  tous  les  cas  par  lui  observés,' sauf  un, 
l'auteur  affirme  avoir  relevé  un  accroissement  net  <lu  nombre 
des  globules  rouges,  el  une  augmentation  des  plus  manifestes 
<lu  [aux  de  l'hémoglobine;  de  plus,  fait  importanl  à  retenir  el 
sur  lequel  M.  Maassen  insisie  beaucoup,  les  modifications 
survenues  sous  l'influence  de  celle  médication  auraient  été 
appréciables  dès  le  premier  jour  du  traitement. 

Quoi  qu'il  en  soil  de  toutes  ces  assertions,  deux  points 
essentiels  sur  lesquels  toiil  le  monde  est  d'accord,  c'est  : 
i"  que  l'ingestion  de  la  somatose  n'inspire  aucune  répugnance 
aux  malades:  20  que  la  somatose  est  non  seulement  bien  tolé- 
rée par  le  tube  digestif,  mais  qu'elle  offre  encore  l'avantage 
de  réveiller  l'appétit  languissant  de  ces  sortes  de  malades. 

M.  .Maassen  recommande  de  prescrire  la  somatose  à  la  dose 
de  i  cuillerées  à  cale  par  jour;  dans  la  grande  majorité  des 
cas,  il  n'y  a  aucune  utilité  à  modifier  le  régime  alimentaire 
habituel  des  malades. 

Les  phosphates,  les  préparations  martiales,  la  stuyciinixe. 
-  En  dehors  de  l'huile  de  foie  de  morue  et  de  la  ylvcérine, 
j'ai  vu  employer  dans  les  sanatoria,  comme  médicaments  ayant 
pour  but  de  transformer  l'organisme  : 

i"  L'arsenic  sous  des  formes  variées  ; 

a"  La  strychnine  (noix  vomique)  ; 

3°  Les  préparations  ferrugineuses  ; 

4  Les  phosphates  et  les  hypophosphites  ; 

À"  Les  iodures,  les  chlorures   de  sodium,  etc.,  etc.' 

Maragliano  a  eu  l'idée  de  réunir  presque  tous  ces  médica- 
ments en  une  seule  formule  (pie  voici  : 

Phosphate  de  calcium    .../.. 

f   ,  aa   2d  centigrammes. 

Menthol ) 

Bicarbonate  de  soude    ...  20 

Poudre  de  noix  vomique  .    .    /   . . 

a  a      ■>  — 

Lactatc  de  fer ^ 

Tour  un  paquet.  —  A  prendre  :  î  paquets  par  jour  pendant  lo  repus. 


CRÉOSOTAL  4i7 

Mais  on  voit  que  les  substances  employées  comme  modifi- 
catrices de  l'état  général  dans  les  sanatoria  sont  les  mêmes 
que  celles  dont  on  se  sert  depuis  des  années  dans  les  hôpi- 
taux et  dans  la  clientèle  en  général. 


& 


Créosote.  —  Comme  remède  réputé  bacillicicle,  la  créosote 
occupe  la  première  place.  On  ne  peut  nier  que  ce  médicament 
judicieusement  administré  ne  fasse  du  bien  dans  bon  nombre 
de  cas.  Il  agit  comme  altérant  ou  peut-être  comme  stimulant. 
La  meilleure  méthode  pour  donner  la  créosote  consiste,  selon 
moi,  à  commencer  par  des  doses  minimes  de  2  ou  3  gouttes  dans 
un  verre  de  lait  trois  l'ois  par  jour,  et  à  ne  jamais  dépasser 
45  à  60  gouttes  par  jour.  Dès  que  l'administration  de  la 
créosote  détermine  des  troubles  digestifs  on  ne  doit  plus 
l'administrer  par  la  voie  buccale. 

D'après  Tapret,  "cité  par  Daremberg,  les  pulvérisations  de 
créosote  calmeraient  la  toux  et  arrêteraient  l'amaigrissement. 

Voici  la  solution  à  répandre  pendant  plusieurs  heures  dans 
la  chambre  à  l'aide  d'un  pulvérisateur  à  vapeur  : 

Créosote 10  grammes. 

Alcool       200           — 

Glycérine 20 

Eau 770           — 

Créosotal.  —  Le  créosotal  est  peut-être  de  toutes  les  pré- 
parations créosotées  la  mieux  supportée  par  l'estomac.  Il  est 
recommandé  par  von  Leyden  (de  Berlin),  Janeway  de  (New- 
York),  et  au  dernier  Congrès  de  la  Tuberculose  M.  le  Dr  Sicard 
de  Plauzoles  (de  Paris)  faisait  une  communication  sur  les 
«  avantages  de  l'emploi  du  créosotal  dans  le  traitement  de  la 
tuberculose  pulmonaire  ». 

Le  créosotal  renferme  90  p.  100  de  son  poids  de  créosote 
pure.  Voici  ce  que  dit  M.  Sicard  au  point  de  vue  de  l'adminis- 
tration du  créosotal  : 

«  Le  créosotal  peut  être  pris  pur,  par  cuillerées  à  café  ou 
en  capsules,  émulsionné  dans  du  lait  avec  un  jaune  d'œuf, 
associé  à  l'huile  de  foie  de  morue,  etc.. 

«  La  dose  quotidienne  pour  les  adultes  varie  de  4  à 
6  grammes  en  plusieurs  fois.  Il  faut  débuter  par  de  petites 
doses,  o  gr.  5o  à  1  gramme  par  jour,  augmentées  progressive- 

Knopf.  Sanatoria.  27 


iiS  CLIMAT,  ALTITUDE  ET  MÉDICAMENTS  SPÉCIAUX 

nu 'ii l .  |>uis  diminuées  au  besoin.  On  détermine  ainsi,  pour 
chaque  malade,  la  dose  à  laquelle  le  médicament  produit  ses 
plus  heureux  effets. 

«  Chez  les  malades  atteints  de  troubles  digestifs,  on  donne 
d'abord  le  créosotal  par  gouttes,  V  à  X  par  jour. 

«   Chez  les  enfants,  on  l'emploie  aux  doses  suivantes: 
«  Au-dessous  de  trois  ans.  o  gr.  loào  gr.   5o  par  jour; 
De  trois  à  cinq  ans,  ogr.  5o  à   i  gramme  par  jour; 
De  cinq  à  dix  ans,  o  gr.  5o  à  ■>  et  4  grammes  par  jour.  » 

Gaïacol. —  L'élément  principal  de  la  créosote  est  le  gaïacol. 
Il  a  les  mêmes  propriétés  que  la  créosote,  sur  laquelle  il  a 
l'avantage  d'avoir  une  composition  fixe.  Labadie-Lagrave^ 
Fraentzel,  Bourget  <•!  Pignol  ont  propose'',  non  sans  succès, 
de  le  substituera  la  créosote  dans  le  traitement  de  la  phtisie 
pulmonaire.  Mais  c'est  surtout  à  mon  ami  le  D1  Artault  de 
Vevey  (i)  que  L'on  doit  des  expériences  cliniques  el  de  labo- 
ratoire très  intéressantes  sur  les  injections  huileuses  de 
gaïacol  dans  la  phtisie.  Voici  les  conclusions  auxquelles 
M.  Artault  est  arrivé  relativement  aux  effets  thérapeutiques  du 
gaïacol  : 

«   Le  gaïacol,    par  son    action   tonique   et    stimulante    de  la 
nutrition,  devient  un  adjuvant  utile  du   traitemenl   diététique 
et  hygiénique   de  la  tuberculose,  a  la  condition  d  être  injeeti 
a  assez,  hautes  doses,  au  moins  o,5o  centigrammes  a  i  gramme, 
avec  5  à  io  centimètres  cubes  d'huile  au  moins.    » 

Dans  les  tuberculoses  à  forme  rapide  on  peut  se  servir 
aussi  du  e-aïacol  en  badigeonnasses  selon  la  formule  suivante: 


ol 


Gaïacol  pur  synthétique i    gramme. 

Huile  d'olive i 

A  appliquer  t. -us  Les  trois  jours. 

IoDOFORMK.  —  Les  pilules  d'iodoforme  sont  encore  prescrites 
par  quelques  thérapeutes;  mais  a  cause  des  troubles  gastriques 
tpie  l'administration  de  ce  médicament  produit,  j'en  ai  aban- 
donne l'emploi  depuis  plusieurs  années. 

Chlorure  de  sodium.  —  Il  est  reconnu  que  l'inhalation  d'une 


(il  S.  Artaclt  de  Vevey.   Tuberculose  et  injections  huileuses.  Paris,  1897. 


CHLORURE  DE  SODIUM  /,ig 

solution  fortement  saline  augmente  les  sécrétions  clés  bron- 
ches et  facilite  l'expectoration. 

Drozda  (i)  (de  Vienne)  pensait  que  le  chlorure  de  sodium 
ingéré  en  grande  quantité  avec  les  aliments  doit  aussi  agir 
d'une  façon  bienfaisante  sur  l'état  général  du  malade.  Il  cons- 
tatait que  les  ganglions  engorgés  du  cou  et  des  creux  axillaires 
devenaient  plus  petits  et  finalement  normaux  par  suite  dune 
administration  abondante  de  sel  ordinaire.  J'ai  fait  des  essais 
avec  le  chlorure  de  sodium  sur  plusieurs  de  mes  malades,  et  j'ai 
pu  observer  que  chez  eux  aussi  la  toux  devenait  moins  pénible 
et  l'expectoration  beaucoup  plus  facile,  pendant  que  l'état  géné- 
ral s'améliorait. 

Je  ne  crois  pas  que  Ton  puisse  dire  que  le  chlorure  de 
sodium  possède  la  moindre  action  antibacillaire,  mais  les  bons 
résultats  qu'il  produit  trouvent  plutôt  leur  explication  dans  ce 
l'ait  que  le  sel  augmente  la  liquéfaction  du  tissu  pulmonaire 
dégénéré,  et  qu'il  devient  ainsi  un  adjuvant  précieux  pour  l'éli- 
mination des  subtances  toxiques. 

Essence  de  menthe.  —  Comme  médicament  volatil  l'essence 
de  menthe  semble  avoir  une  action  particulièrement  bienfai- 
sante, surtout  quand  on  la  respire  au  moyen  du  cabinet  pneu- 
matique. 


(i)  J.-Y.  Dkozda.  Grundzûge  einer  rationellen  Phtisiotherapie.  Vienne, 


CHAPITRE  XXIV 

Du   sérum   antituberculeux,  de   la   tuberculine, 
de   Tantiphtisine,  etc. 


Parler  de  la  sérothérapie  appliquée  à  la  tuberculose  en  détail 
ri  passer  en  revue  tous  les  essais  laits  dans  cette  direction 
sciait  dépasser  le  but  de  notre  travail.  Les  conclusions  géné- 
rales auxquelles  M.  le  professeur  Landouzy  est  arrivé  dans 
son  rapport  au  dernier  Congrès  sur  l'emploi  des  sérumset  des 
toxines  pour  le  traitement  de  la  tuberculose  exposent  nette- 
ment l'état  actuel  des  choses. 

«  La  sérothérapie  appliquée  a  la  tuberculose,  cl i t  cet  auteur,  ne 
nous  a  pas  donné  encore  des  résultats  suffisamment  appréciables, 
assez,  constants,  assez  complets  et  s'appliquant  assez  a  la  géné- 
ralité des  affections  tuberculeuses,  pour  que  nous  nous  croyions 
en  pleine  puissance  d'un  traitement  vraiment  spécifique,  iinimi- 
nisateur  et  curateur    1    ». 

Et  que  dire  des  essais  multiples  avec  la  tuberculine  ancienne, 
la  tuberculocidine,  l'antiphtisine  de  Klebs,  le  tuberculinum 
purificatum  de  von  Ruck  et  la  tuberculine  purifiée  de  W'hilman, 
['oxytuberculine  de  Hirschfelder ,  et  le  dernier  produit  de 
Koch  :  la  tuberculine  lî  '.' 

Je  ne  veux  pas  parler  ici  du  mérite  de  ces  préparations  ; 
mais  je  désire  signaler  en  toute  franchise  ce  que  l'expérience 
de  ces  produits  nous  a  enseigné.  Chaque  lois  qu'un  de  ces  nou- 
veaux remèdes  nous  arrive,  les  conditions  de  son  emploi  sont 
spécifiées  de  la  façon  suivante  :  «  N'est  pas  à  employer  dans 
les  cas  trop  avancés.  »  —  «  N'est  pas  à  employer  dans  les  in- 
fections  mixtes.  »   —   «  N'est  pas   à  employer   seul,  mais  en 


(i)  Landouzy.  La  Presse  médicale,  1898,  n°  63,  p.  55. 


SÉRUM  ANTITUBERCULEUX,   TIRERCUL1XE  421 

le  combinant  avec  une  bonne  hygiène  et  une  bonne  ali- 
mentation ».  —  «  Ne  pas  négliger  le  traitement  symptoma- 
tique  ». 

Les  résultats  publiés  par  les  premiers  expérimentateurs  se 
traduisent  à  peu  près  de  la  façon  suivante  :  «  Parmi  les  malades 
soumis  au  traitement,  un  assez  grand  nombre  de  tuberculeux 
au  premier  degré  de  la  maladie  a  été  guéri.  Un  petit  nombre 
dans  des  états  avancés  en  a  bénéficié.  Un  plus  petit  nombre 
est  resté  indifférent  au  traitement,  et  quelques-uns  sont  morts.  » 

Puis  viennent  des  observations  et  des  rapports  d'autres 
expérimentateurs  qui  arrivent  à  des  conclusions  contraires 
avec  le  même  remède.  Les  uns  le  déclarent  peu  curatif,  mais 
tout  à  fait  inoffensif.  Un  autre  le  considère  comme  dangereux 
dans  quelques  cas,  admissible  pour  d'autres.  Un  troisième 
s'inscrit  contre  son  emploi  et  donne  des  statistiques  absolu- 
ment décourageantes.  Au  bout  de  quelques  mois  on  a  oublié  le 
«  spécifique  »  jusqu'au  jour  où  un  autre  se  montre  à  l'horizon. 

Depuis  les  effets  désastreux  produits  par  la  première  tuber- 
cidine  de  Koch  clans  le  traitement  de  la  phtisie  pulmonaire,  je 
me  suis  contenté  de  suivre  les  essais  et  expériences  d'autres 
phtisio-thérapeutes  plus  courageux.  Il  n'y  a,  selon  moi,  aucun 
produit  bactérien  qui  ait  jusqu'aujourd'hui  mérité  le  nom  de 
spécifique.  Il  n'y  en  a  aucun  qui  puisse  remplacer  le  traite- 
ment hygiéno-diététique.  Il  n'est  même  pas  un  produit  déri- 
vant du  bacille  de  la  tuberculose  que  je  voudrais  considérer 
ou  employer  comme  un  adjuvant  dans  le  traitement  de  la  tuber- 
culose pulmonaire. 

J'ai  trouvé  que  le  traitement  hygiéno-diététique,  sous  l'étroite 
surveillance  d'un  médecin  compétent  ou  dans  un  établissement 
fermé,  constitue  la  meilleure  thérapeutique  pour  toutes  les 
formes  de  phtisie  pulmonaire,  ainsi  que  le  démontrent  les 
statistiques  ;  mais  il  convient  surtout  d'ajouter  que  les  guéri- 
sons  obtenues  par  la  cure  simple  hygiéno-diététique  sont  d'une 
durée  plus  longue  et  plus  certaine  que  toutes  les  guérisons 
consécutives  à  l'emploi  de  la  tuberculine  ou  de  ses  dérivés. 

Dans  notre  chapitre  «  Preuves  cliniques  de  la  curabilité  de 
la  tuberculose  »,  nous  avons  déjà  donné  une  statistique  com- 
plète en  ce  qui  touche  les  résultats  obtenus  dans  les  divers 
sanatoria  par  le  traitement  hygiéno-diététique,    et  nous   ren- 


422  SERUM  ANTITUBERCULEUX,   TUBERCULINE 

voyons   nus    lecteurs    à    la    table    |».   Si    jointe  à  ce  chapitre. 

Je  ue  crois  même  pas  que  nous  ayons  le  droil  d'employer  la 
tuberculine  comme  moyen  diagnostique.  Quand  on  a  été 
témoin  d'une  tuberculose  se  niellant  à  évoluer  d'une  manière 
rapide  à  la  suite  d'une  injection  de  tuberculine  faite  dans  le 
luit  tle  vérifier  un  diagnostic  incertain,  on  v  regarde  à  deux 
t'ois  avant  de  recommander  un  tel  procédé. 

Les  moyens  d'investigation  physiques  que  nous  possédons 
pour  établir  un  diagnostic  précis  dans  un  cas  douteux  de  tuber- 
culose pulmonaire  sont  suffisants,  et  la  découverte  de  Rôntgen 
nous  est  un  auxiliaire  précieux  à  ce  point  de  vue. 

Pour  les  détails  de  l'application  des  ravons  Rôntgen  au  dia- 
gnostic de  la  tuberculose  pulmonaire,  on  se  reportera  aux 
communications  de  Bouchard, Claude  et  liée  1ère,  au  IVe <  longrès 
pour  l'étude  de  la  tuberculose  (  i  )  et  à  l'ouvrage  de  Hé- 
bert (2). 

L'emploi  des  rayons  X  dans  un  but  curatif,  disons-le  en  pas- 
sant, n'a  ilonné  jusqu'à  ce  jour  aucun  résultat  satisfaisant.  Des 
expériences  faites  à  la  fin  de  l'année  1897  dans  le  laboratoire 
de  M.  le  profeseur  Potain,  par  M.  Pierre  Teissier,  ont  démon- 
tré que  l'action  des  rayons  X  sur  la  tuberculose  expérimentale 
est  absolument  nulle  (3). 

Donc,  si  nous  nous  résumons,  nous  pouvons  dire  que  malgré 
les  recherches  brillantes  de  nos  bactério-thérapeutes,  le  trai- 
tement hygiénique  et  diététique  est  après  tout  celui  qui  nous 
a  donné  jusqu'ici  les  meilleurs  résultats,  tant  au  point  de  vue 
de  la  prophylaxie  que  de  la  curabilité. 

On  trouvera  peut-être  un  jour  un  sérum,  une  antitoxine 
pour  toutes  les  manifestations  aiguës  de  la  pathologie  humaine 
Et  même  dans  les  cas  où  nous  avons  à  traiter,  au  cours  de  la 
phtisie  chronique,  une  poussée  aiguë  due  à  une  association 
nouvelle  du  microorganisme,  nous  avons  le  droit  d'espérer 
quelque  chose  de  la  sérothérapie.  Mais  pour  guérir  une 
lésion  tuberculeuse,  pour  produire  des  tissus  neufs,  pour 
que   la   phagocytose   s'exerce  dans  de   bonnes  conditions,    la 


(1)  La  Presse  médicale,  1898,  10  août. 

(2)  A.  Hébekt.  La  tec/mif/iie  des  Rayons  X.GeorgcsCarrê  clC.  Naud,  Paris,  1897. 

(3)  La  Presse  médicale,  1898,  10  août. 


SÉRUM  ANTITUBERCULEUX,  TUBERCULINE  4^3 

suralimentation  et  une  hygiène  supérieure,  une  surabondance 
de  bon  air  pur  sont  absolument  indispensables. 

En  admettant  que  l'avenir  nous  donne  le  remède  véritable- 
ment spécifique,  le  traitement  hygiénique  et  diététique  restera 
toujours  la  condition  sine  qua  non,  le  fonds  de  réserve  sans 
lequel  on  ne  saurait  combattre  la  misère  physiologique  des 
phtisiques. 


CHAPITRE  XXV 


Traitement  de  la  phtisie  pulmonaire  dans  les  stations  libres 
et  dans  les  colonies.   Divertissements  et  sports  divers. 


Los  Angeles,  dans  la  Californie  du  Sud,  et  ses  environs. 
sont,  en  Amérique,  le  lieu  de  prédilection  pour  le  traitement 
climatérique  de  la  tuberculose  pulmonaire.    Des    milliers    de 

tuberculeux  viennent  tous  les  hivers  passer  quelques  mois 
sous  ce  climat  doux  et  agréable,  où  les  malades  peuvent  rester 
dehors  jour  et  nuit  pendant  325  jours  de  l'année.  La  facilité 
avec  laquelle  on  se  déplace  et  on  change  de  résidence  aux 
Etats-Unis,  fait  que  beaucoup  de  malades  y  restent  et  s'y  ins- 
tallent d'une  façon  permanente  pour  échapper  aux  rigueurs  de 
l'hiver  de  V  «  Est  ». 

Quelle  est  la  mortalité  dans  ce  paradis  des  phtisiques  ? 

D'après  un  ouvrage  publié  aux  Etats-Unis  sur  la  distri- 
bution géographique  des  maladies,  la  mortalité  parphtisie  est: 

Pour  i  ooo  habitants  à  Los  Angeles 3,i8 

Et  pour  i  ooo  habitants  aux  Etats-Unis,  en  général  .       •->.">  i  seulement. 

M.  le  Dr  Bullard,  clans  une  communication  faite  à  la  Société 
médicale  de  la  Californie  du  Sud,  a  expliqué  que  cette  mor- 
talité élevée  était  presque  exclusivement  due  à  l'immigration 
des  tuberculeux  (i). 

D'après  les  relevés  dans  les  hôpitaux  et  dans  les  bureaux 
de  la  municipalité,  à  Los  Angeles  : 

60  p.    100  des    dérès   par    phtisie  concernent    des    malades 

avant  vécu  à  Los  Angeles,  moins  Je 4    ans. 

18  p.    ioo  des  décès  par   phtisie    concernent   «tes    malades 

ayant  vécu  à   Lus  Angeles,  moins  de 6    ans. 


(i)    Bullard.  Apparent    and  Aclual  Mortality.    Southern  California  Praeti- 
tioner,  i8g3,  juin. 


DANGER  DE  LA   PROPAGATION  DE  LA   TUBERCULOSE  423 

19,8  p.  100  des   décès  par  phtisie  concernent  des   malades 

ayant  vécu  à  Los  Angeles,  plus  de 6    ans. 

2,2  p.  100  seulement  des  décès  par  phtisie  concernent  des 
malades  nés  à  Los  Angeles. 

On  ne  peut  donc  pas  accuser  le  climat  du  pays  de  cette 
effrayante  mortalité,  et  s'il  est  permis  de  parler  d'immunité, 
on  peut  dire  qu'en  dehors  de  la  phtisie  importée,  la  Californie 
du  Sud  est  aussi  préservée  qu'on  peut  l'imaginer. 

Il  faut  donc  chercher  dans  ce  pays,  qui  devrait  être  privilégié, 
la  vraie  cause  de  cette  mortalité  élevée  par  tuberculose. 

On  la  trouve  : 

i°  Dans  le  fait  que  les  malades  sont  le  plus  souvent  envoyés 
à  une  période  trop  avancée  pour  que  la  guérison  puisse 
s'effectuer  ; 

a0  Dans  le  fait  que  les  malades  ayant  toutes  chances  de  gué- 
rison, se  sentant  mieux,  grâce  au  séjour  prolongé  à  l'air  libre, 
oublient  bientôt  leur  maladie,  entreprennent  des  affaires,  font 
des  spéculations  de  toutes  sortes  pour  s'enrichir  le  plus  vite 
possible,  travaillent  sans  cesse,  se  trouvent  souvent  dans  une 
agitation  permanente,  commettent  toutes  les  imprudences  et 
meurent  enfin  au  bout  de  quelques  années  ;  les  statistiques 
sont  ainsi  chargées  ; 

3°  Les  malades,  inconscients  de  ce  qu'ils  font,  ne  prennent 
même  pas  conseil  d'un  médecin.  Trop  fréquemment,  mal  ins- 
truits par  celui  qu'ils  ont  consulté,  ils  crachent  partout  à  terre  ; 
les  expectorations  sèchent  rapidement  et  les  bacilles  flottent 
dans  l'air  par  milliards,  pour  être  inspirés  de  nouveau  par  les 
mêmes  malades  ou  par  d'autres. 

DAXGER    DE    LA  PROPAGATION    DE   LA  TUBERCULOSE.    J'ai   décrit 

cette  station  hivernale  comme  type,  car  je  la  connais  non  par 
une  courte  visite,  mais  par  un  séjour  de  plusieurs  années. 

Les  stations  méditerranéennes  n'en  diffèrent  guère ,  sauf 
peut-être  qu'ici  les  malades  convalescents  s'occupent  moins 
d'affaires  et  un  peu  plus  de  plaisirs.  J'ai  visité  Nice,  Cannes, 
Monte-Carlo,  etc.,  etc.  ;  j'ai  vu  les  tuberculeux,  à  tous  les  degrés 
de  la  maladie,  se  promener  partout,  cracher  à  terre,  se  mêler  à 
la  foule  dans  les  casinos,  où  la  poussière  est  incessamment 
soulevée. 


TRAITEMENT  DANS  LES   STATIONS  LIBRES  II   LES  COLONIES 

Beaucoup  s'asseyent  à  la  table  de  jeu,  restenl  là  jusqu'à 
minuit  el  plus,  fumant  des  cigarettes  et  respirant  dans  la  |ilus 
malsaine  des  atmosphères. 

Souvent  ils  changenl  leur  station  pour  une  autre,  car  ils  ne  se 
trouvent  pas  mieux  et  ils  accusent  le  médecin  de  les  avoir 
envoyés  dans  un  cl i mal  qui  ne  leur  apporte  aucun  soulagement. 

A  chaque  nouvelle  station  les  mêmes  errements  recom- 
mencent, jusqu'à  l'heure  où  le  phtisique  s'arrête  pour  mourir. 

A  table,  le  malade  mange  peu,  «m  se  nourrit  de  mets  donl  il 
devrait  s'abstenir  ;  il  prend  un  médecin  de  la  station  donl  il  ne 
suit  guère  les  avis  ;  il  trouve  d'autres  fois  ses  conseils  clans  la 
liasse  d'ordonnances  qu'il  a  apportées  avec  lui;  bien  mieux, 
il  ne  l'ait  rien,  mettant  toute  sa  foi  dans  le  climat. 

Il  y  a  même  des  stations  hivernales  <>ii  les  malades  peu  gra- 
vemenl  atteints  en  apparence  se  croient  autorisés  a  aller  au 
haï.  ou  au  moins  à  prendre  pari  aux  petites  réunions  de  danse. 
arrangées  plusieurs  fois  par  semaine  au  casino  ou  ailleurs.  El 
dans  le  lourliillon  du  plaisir  le  candidat  à  la  phtisie  oublie 
qu'il  se  trouve  dans  l'atmosphère  la  plus  malsaine,  surchauffée 
et  pleine  de  poussière,  el  qu'il  se  livre  a  un  exercice  absolument 
dangereux  pour  sa  santé. 

Telle  est  la  vie  du  tuberculeux  dans  les  stations  hivernales: 
il  vil  a  sa  guise  et  selon  ses  fantaisies.  S'ils  ne  commel  pas 
d'imprudences  en  cherchant  le  plaisir,  il  en  commet  souvent 
par  les  tours  de  force  qu'il  l'ait  pour  guérir.  Il  gravit  des  mon- 
tagnes, court  les  chemins;  s'il  vil  dans  une  station  alpine  o  il 
fait  la  lugue  <>  (traîneau  de  montagne  et  patin,  etc.,  etc.). 

Canotage,  golf  et  croquet.  —  Tous  les  sports,  même  ceux 
à  l'air  libre,  qui  exigent  qu'on  se  courbe  beaucoup,  sont 
nuisibles  aux  tuberculeux.  Ramer  esl  absolument  dangereux. 
Le  golf  aussi  demande  trop  de  surmenage,  et  on  doit  le  défendre 
à  ces  malades.  Le  croquel  est  à  la  ligueur  autorisé,  surtout  si 
on  peut  s'y  livrer  sur  le  terrain  (\\\  sanatorium,  où  on  peut  sur- 
veiller le  joueur  imprudent.  Pour  éviter  que  le  malade  ne  se 
baisse  trop,  je  conseille  d'avoir  des  maillets  plus  longs  que 
d'ordinaire. 

Bicyclette.  —  La  bicyclette,  souvent  recommandée  pour 
les  tuberculeux  au  début  de  la  maladie,  me  semble  peu  suscep- 


BICYCLETTE  4^7 

tible  d'enrayer  la  tuberculose  pulmonaire.  Ce  sport  a  certaine- 
ment une  grande  valeur  thérapeutique  dans  beaucoup  d'autres 
maladies,  mais  pour  un  tuberculeux,  ou  pour  un  individu  en 
train  de  le  devenir,  trop  de  dangers  résultent  de  son  emploi. 
D'abord  le  surmenage  :  le  bieyeliste  dépense  en  général  beau- 
coup plus  d'énergie  musculaire,  suivie  de  perte  de  tissu,  qu'un 
individu  qui  s'exerce  normalement,  et  le  tuberculeux  a  plus  de 
difficulté  pour  remplacer  cette  perte  de  tissu.  D'un  autre  côté, 
M.  le  professeur  Bouchard  a  démontré  que  la  perte  considé- 
rable de  tissu  par  suite  d'exercices  exagérés,  associée  à  la 
production  de  toxines,  rend  un  individu  plus  susceptible  de 
contracter  les  maladies  infectieuses,  et  surtout  la  tuberculose 
pulmonaire. 

Les  tuberculeux,  de  même  que  les  sujets  tuberculisables, 
ont  généralement  le  cœur  plus  ou  moins  faible.  Toutes  les 
personnes  qui  pratiquent  la  bicyclette  savent  combien  il  est 
facile  d'en  faire  trop,  et  d'exiger  ainsi  de  la  part  du  cœur  un 
travail  extraordinaire.  Les  cas  de  mort  subite  par  suite  de 
l'exercice  de  la  bicyclette  sont  déjà  nombreux  dans  la  littéra- 
ture médicale.  Mendelsohn  en  rapporte  plusieurs  dans  ses 
communications  des  3o  avril  et  1 8  juin  1896(1).  L'attitude  penchée 
acquise  par  un  grand  nombre  de  bicyclistes  est  certainement 
peu  avantageuse  aux  invalides  pulmonaires.  Les  muscles  tho- 
raciques  et  respiratoires  entrent  peu  en  jeu  pendant  qu'on  est 
assis  sur  la  bicyclette,  et  je  n'ai  jamais  vu  de  coureurs  profes- 
sionnels qui  eussent  ces  groupes  de  muscles  bien  développés. 

Un  autre  danger  pour  le  bieyeliste  tuberculeux  réside  dans 
la  facilité  avec  laquelle  il  prend  des  rhumes  graves,  et  cela 
d'une  manière  tout  à  fait  inconsciente.  Rapidement  et  joyeu- 
sement on  «  couvre  »  de  longues  distances,  et  c'est  seulement 
au  moment  où  l'on  s'arrête,  soit  pour  se  reposer,  soit  pour 
arranger  sa  machine,  qu'on  se  sent  en  pleine  transpiration, 
transpiration  qui,  en  temps  froid,  est  bientôt  suivie  d'un  fris- 
son plus  ou  moins  intense. 

Même  dès  le  commencement,  le  sjiort  de  la  bicyclette 
n'est  pas  sans  danger  pour  un  tuberculeux,  car  en  l'apprenant 
tout  son  être  se  trouve  dans  une  tension  nerveuse,  difficile  à 


(1)  Mendelsohn.  Deutsche  med.   JVochenschrift,  1896,  3o  avril  et  18  juin. 


4*8        TRAITEMENT  dans  les  stations  libres  et  les  colonies 

décrire,  mais  que  la  majorité  des  bicyclistes  ont  éprouvée.  Pour 

toutes  ces  raisons,  je  suis  d'avis,  eu  règle  générale,  <le  ne  pas 
permettre  à  un  tuberculeux  ou  à  individu  prédisposé  à  la 
tuberculose  l'emploi  de  la  bicyclette.  Une  tricyclelte  ou  tout 
autre  véhicule  dans  le  genre  automobile  est  certainement 
préférable  pour  les  invalides  pulmonaires. 

Y  a-t-il dans  les  stations  hivernales  un  danger  de  contagion 
pour  les  personnes  indigènes  bien  portantes? 

Bennet  (i)  a  déjà  noté  une  augmentation  du  chiffre  des 
phtisiques  parmi  les  indigènes  à  Menton,  niais  il  explique 
cet  accroissement,  non  par  la  contagion  (qu'il  n'admet  que 
dans  des  conditions  tout  à  l'ail  spéciales),  mais  par  l'abandon 
du  travail  dans  les  champs.  Je  crois  qu'ici  le  célèbre  phtisio- 
thérapeute  s'est  trompé,  car  nous  verrons  plus  lard  que, 
dans  les  trois  grands  établissements  fermés  de  Goerbers- 
dorf  (2)  et  dans  d'autres  encore,  les  infirmiers,  presque  exclu- 
sivement recrutés  parmi  la  population  indigène,  donnent, 
malgré  le  travail  très  dur  accompli  souvent  jour  et  nuit,  une 
mortalité  extrêmement  faible. 

J'ai  toujours  pensé  qu'on  doit  chercher  la  cause  de  la  mor- 
talité croissante  par  phtisie  chez  les  indigènes  des  stations 
hivernales  dans  des  fautes  d'hygiène,  qui  en  grande  partie 
peuvent  être  évitées  par  des  lois  sanitaires  et  avec  le  concours 
des  médecins  de  ces  stations. 

Y  a-l-il  véritablement  lieu  de  s'alarmer  ? 

On  trouve  encore  des  médecins  qui  ne  le  croient  pas;  quel- 
ques-uns disent  même  «  de  se  taire  sur  le  danger  de  la  conta- 
gion ».  Je  nie  rattache  volontiers  à  l'opinion  de  ceux  qui 
craignent,  et  je  sais  que  je  partage  ainsi  l'avis  de  lajdupart  de 
mes  maîtres  et  de  mes  confrères. 

Il  n'est  pas  toujours  facile  d'obtenir  des  renseignements 
sur  les  conditions  hygiéniques  dans  les  stations  libres.  Sou- 
vent les  autorités  hésitent  à  les  fournir  pour  des  raisons 
diverses. 

Mais  j'ai  été  exceptionnellement  heureux  dans  celle  partie 
de    mon  empiète.  J'ai  reçu   des  réponses  nettes   et   décisives. 


(1)  Bennet  .On  the  contagion  of  Phtisis  pulmonalis. 

(2)  Rômpler.  Beitràge  zur  Lehre  der  chronischen  Lungenschwinctsucht. 


PROPAGATIOy  PAR  CO.\TAGION  4*9 

des  municipalités  qui  placent  l'intérêt  général  plus  haut  que 
celui  de  quelques  riches  commerçants  ou  hôteliers,  lesquels 
craignent  de  voir  leur  fortune  atteinte  si  la  vérité  connue 
écarte  quelques  riches  visiteurs. 

Voici  un  exemple  : 

C'est  l'extrait  d'une  lettre  que  j'ai  déjà  publiée  dans  mon 
chapitre  «Lois  sanitaires  »,  émanant  de  la  mairie  de  Nice,  ser- 
vice d'hygiène  et  de  salubrité,  signée  du  très  distingué  D1'  Ba- 
lestre.  chef  de  ce  service. 

«  Il  est  de  notoriété  publique  que  Nice  et  surtout  Menton 
ont  vu  augmenter  dans  une  proportion  énorme  le  nombre  de 
leurs  tuberculeux  depuis  que  les  phtisiques  ont  fréquenté 
cette  station.  » 

Pour  revenir  encore  une  fois  aux  Etats-Unis,  je  parlerai 
d'une  section  de  ce  vaste  pays  qui  est  devenue  moitié  colonie 
et  moitié  station  hivernale  pour  phtisiques.  Il  s'agit  du 
Nouveau-Mexique.  Voici  la  lettre  que  j'ai  reçue  l'année  der- 
nière de  M.  le  Dr  F. -II.  Atkins,  secrétaire  général  du  New 
Mexico  Board  of  Health,  East  Las  Vegas,  New-Mexico  : 

«  Comme  les  autres  communautés  qui  sont  beaucoup  fré- 
quentées par  les  phtisiques,  nous  aussi,  nous  observons  chaque 
année  des  cas  de  phtisie  pulmonaire  au  Nouveau-Mexique 
parmi  les  gens  nés  ici  ou  qui  sont  arrivés  récemment  en  pleine 
santé  et  pour  lesquels  on  peut  remonter  à  un  contact  indubi- 
table avec  des  phtisiques  visiteurs  ou  colonistes,  et  reconnaître 
la  possibilité  de  l'infection  par  le  bacille  de  la  tuberculose.  » 

Il  y  a  peu  de  temps  que  j'ai  visité  de  nouveau  notre  célèbre 
région  «  les  Adirondacks  »,  montagnes  couvertes  par  les  vastes 
forêts  naturelles  de  l'Etat  de  New- York.  Le  sanatorium,  dirigé 
par  mon  ami  le  Dr  Trudeau,  a  attiré  dans  le  voisinage  un  grand 
nombre  de  tuberculeux  qui  ne  peuvent  pas  ou  ne  veulent  pas 
se  soumettre  aux  règles  strictes  de  nos  établissements  fermés, 
mais  qui  préfèrent  rester  dans  les  pensions  de  familles  board- 
ing houses).  Dans  ma  courte  visite,  j'ai  pu  noter  trois  cas  d'in- 
fection dans  trois  familles  différentes  qui  dirigent  ces  pensions 
de  famille. 

Ce  n'est  pas  l'air  que  les  phtisiques  aspirent  qui  est  conta- 
gieux, ni  l'encombrement,  ni  le  contact  des  indigènes  avec  les 
phtisiques,  mais  nous  répétons  que  les  crachats  seuls,  dessé- 


,  io  TRAITEMENT  DANS   LES  STATIONS  LIBRES  ET  LES  COLONIES 

chés  et  pulvérisés,  flottant  dans  l'air,  sont  dans  ces  stations  la 
cause  principale  de  la  propagation  de  la  tuberculose  pulmo- 
naire. 

Brehmer  a  cru  dans  l'immunité  de  Goerbersdorf. 

Acceptons  pour  le  moment  la  théorie  de  l'immunité,  et  nous 
avons  le  droit  de  dire  que  la  Californie  du  Sud,  le  Nouveau- 
Mexique  et  les  stations  méditerranéennes  ont  été  à  une  époque 
donnée  aussi  indemnes  que  Goerbersdorf.  C'est  la  propreté 
régnant  dans  cette  dernière  localité,  visitée  depuis  quarante  ans 
par  25.ooo  phtisiques,  qui  a  fait  que  pendant  ces  longues  années 
la  mortalité  de  ses  habitants  par  phtisie  pulmonaire  n'a  jamais 
dépassé  la  moyenne  ordinaire. 

Au  contraire,  elle  a  diminué  dans  le  village  de  Goerbersdorf, 
proportionnellement  beaucoup  plus  qu'ailleurs.  Cette  diminu- 
tion est  sans  doute  due  à  l'exemple  donné  par  les  pensionnaires 
des  sanatoria  de  Goerbersdorf.  Nous  pouvons  en  dire  autan I 
de  Falkenstein.  Nous  avons  déjà  donné  en  détail  les  stastis- 
tiques  officielles  de  la  mortalité  par  tuberculose  de  ces  deux 
villages  de  Goerbersdorf,  pendant  une  période  de  cent  ans.  et 
de  Falkenstein,  durant  une  période  de  quarante  ans)  dans  notre 
chapitre  des  sanatoria  en  général  p.  i3i).  Nous  dirons  seule- 
ment ici  (pie  dans  ces  deux  villages,  où  sont  situés  cinq  grands 
sanatoria,  la  mortalité  par  tuberculose  parmi  les  habitants  est 
actuellement  d'un  tiers  moins  élevée  qu'avant  l'établissement 
de  ces  institutions. 

Les  municipalités  d'un  grandnombre  de  stations  hivernales, 
surtout  celles  de  la  Méditerranée  française,  l'ont  depuis  quelque 
temps  des  efforts  héroïques  afin  île  supprimer  autant  que  pos- 
sible la  propagation  de  la  tuberculose. 

Toutes  attendent  avec  impatience  que  la  loi  vienne  à  leur 
aide  pour  qu'elles  puissent,  sous  son  égide,  exécuter  leurs 
règlements  sanitaires. 

Après  les  faits  que  je  viens  de  citer,  il  est  difficile  de 
nier  qu'il  y  ait  une  corrélation  entre  la  diminution  de  la 
mortalité  et  les  mesures  prophylactiques  prises  à  l'égard  des 
crachats. 

El  il  faut  espérer  que  la  loi  sur  la  propagation  par  contagion, 
attendue  par  de  nombreux  médecins,  verra  bientôt  la  lumière. 

Mais  quand   le   grand  jour  sera    venu   où  l'hygiène   régnera 


PROPAGATIOX  PAR  COXTAGWX  43  i 

dans    nos    stations    hivernales,    pourrons-nous    envoyer   sans 
crainte  nos  tuberculeux  clans  les  stations  libres  ? 

Oui,  une  certaine  .classe  d'entre  eux  ;  et  je  suis  parfaitement 
d'accord  avec  M.  le  D'  Frémy  quand  il  dit  :  «  Qu'on  réserve 
les  endroits  de  cure  ouverts  aux  héréditaires,  aux  prédispo- 
sés, aux  suspects,  aux  scrofuleux,  à  certains  bronchitiques,  etc., 
c'est-à-dire  à  ceux  qui  n'ont  pas  besoin  d'une  surveillance 
rigoureuse,  d'un  traitement  méthodique. 

«  Qu'on  les  réserve  encore  pour  les  convalescents  de  phtisie 
qui  ne  présentent  plus  de  bacilles  dans  l'expectoration,  qui 
n'ont  plus  à  l'auscultation  que  les  résidus  inévitables  de  grands 
désordres  ;  ceux-là,  pendant  longtemps  encore,  auront  besoin 
de  ménagements,  mais  non  pas  de  traitement  méthodique, 
puisqu'ils  ne  sont  plus  malades. 

«  Ainsi  on  fera  de  la  thérapeutique  préservatrice  et  conser- 
vatrice, et  les  climats  reprendront  toute  la  valeur  de  leurs 
divisions  (i)  ». 

Mais,  pour  un  sujet  tuberculeux  cpii  peut  aggraver  son  état 
par  la  moindre  imprudence  ou  faute  d'hygiène,  pour  un  homme 
dont  la  surveillance  continue,  l'éducation  physique  et  morale, 
constituent  le  traitement  principal,  l'établissement  fermé  est  le 
seul  endroit  où  il  puisse  espérer  la  guérison  ;  et  je  déclare 
en  toute  conviction  que  pour  un  phtisique  en  voie  cV évolution, 
le  traitement  dans  les  stations  libres  est  illusoire  (2). 


(1)  Communication  faite  au  Congrès  de  la  tuberculose  de  1888. 

(2)  Comme  nous  l'avons  déjà  dit  à  propos  du  traitement  moral  et  pédago- 
gique, il  y  a  néanmoins  de  rares  exceptions  :  ce  sont  des  cas  de  malades 
favorisés  par  la  fortune,  qui  peuvent  s'entourer  de  tous  les  soins  néces- 
saires, et  il  s'en  trouve  parmi  eux  dont  la  patience  saura  admettre  et  sup- 
porter, sans  qu'une  surveillance  constante  soit  indispensable,  la  vie  sobre  et 
prudente  qui  leur  convient.  Il  eu  est  qui  se  soumettront  strictement  à  tous  les 
ordres  du  médecin;  mais  combien  ceux-là  sont  rares  parmi  les  tuberculeux, 
surtout  au    commencement  de  l'évolution  de  leur  maladie  ? 


CHAPITRE   XXVI 

Traitement  des  tuberculeux  non  ambulants  chez  eux 
(Sanatorium  à  domicile). 


Le  traitement  hygiéno-diététique  des  tuberculeux  en  dehors 
d'un  établissement  peut  être  institué  avec  succès  partout  où  l'air 
est  pur  et  où  la  situation  sociale  du  malade  est  telle  qu'il 
puisse  s'entourer  de  tous  les  soins  hygiéniques  et  diététiques 
nécessaires  pour  la  cure,  et  recevoir  les  visites  fréquentes  d'un 
médecin  expérimenté  en  phtisio-thérapie. 

Pour  ces  malades  favorises  par  la  fortune  et  décides  à  se 
soumettre  strictement  à  tous  le>  ordres  du  médecin,  ce  traite- 
ment n'est  pas  seulement  possible,  mais  presque  facile.  Par 
contre,  il  est  un  assez  grand  nombre  île  tuberculeux  arrivés  à 
divers  degrés  de  la  maladie  et  dont  les  moyens  sont  modères. 
qui  ne  peuvent  aller  ni  dans  un  sanatorium,  ni  dans  un  hôpital 
spécial,  ni  dans  une  station  hivernale.  Ils  ne  peuvent  même 
pas  suivre  le  traitement  ambulatoire,  et  sont  obligés  de  rester 
chez  eux.  Ce  qu'il  y  a  île  mieux  à  faire  avec  ces  malades  est 
de  leur  faire  suivie  simplement  à  domicile  le  traitement  tel  que 
nous  l'avons  décrit  pour  les  établissements  fermés. 

Pour  faciliter  cette  tache,  souvent  très  ardue  dans  les  cir- 
constances cpie  nous  venons  d'indiquer  (i),  je  me  permets  de 
donner  quelques  indications  pour  l'arrangement  d'une  sorte 
de  petit  sanatorium  à  domicile. 

("est  l'expérience  acquise  ces  dernières  années  vis-à-vis  de 
ce  genre  de  malades  qui  m'a  renseigné  à  ce  point  de  vue.  On 
choisira  pour  la  demeure  du  patient  la  chambre  la  |>ln s  vaste, 
la  plus  agréable,  la  mieux  ensoleillée;  on  ôtera  tous  les  tapis 


(i)  Dans  une  famille  pauvre,  il  est  impossihle  d'appliquer  le  traitement  qui 
convient  à  un  tuberculeux,  et  le  sanatorium  public  est  le  seul  endroit  où  ton 
puisse  espérer  lui  faire  du  bien. 


LA   CURE  D'AIR  AU  REPOS  CHEZ  SOI 


433 


cloués,  rideaux  et  meubles  non  nécessaires,  sans  pour  cela 
rendre  l'aspect  de  la  chambre  triste  ;  au  contraire,  on  doit 
faire  tout  pour  que  l'on  n'y  voie  cpie  des  choses  agréables. 
Quelques  petits  tapis  mobiles  et  des  rideaux  en  dentelles 
peuvent  être  permis.  Mais  toutes  les  règles  de  la  prophylaxie 
et  de  l'hygiène  exposées  dans  les  pages  précédentes  devien- 


Fig.   85.  —  Installation  pour  cure  d'air  chez  soi. 

dront  des  lois  dans  les  maisons  privées  :  pas  de  poussière  et 
toujours  de  l'air  frais. 


La  cure  d'air  au  repos  chez  soi.  —  La  cure  d'air  au  repos 
se  fait  sur  une  chaise  longue  devant  la  fenêtre  ouverte,  sous  la 
véranda  ou  dans  le  jardin.  Au  jardin  on  peut,  à  l'aide  d'un 
toit-abri  placé  contre  le  mur  de  la  maison,  s'arranger  une 
petite  «  Liegehalle  »  où,  si  le  temps  le  permet,  le  malade 
prendra  ses  repas.  Lne  simple  «  steamer-chair  »  sur  laquelle 

Kxopf.  SanatoHa.  28 


434  SANATORIUM  .1  DOMICILE 

on  pose  un  matelas  peut  remplacer  la  chaise  longue,  qui  n'esl 

pas  à  la  portée  de  toutes  les  bourses. 

Tue  installation  simple  etéconomique  est  celle  qu'a  signalée 
Daremberg.  «  Elle  est  composée  d'une  vaste  guérite  de  bains 
de  mer  capitonnée  et  dépourvue  de  siège.  Celle  guérite  mobile 
est  assez  large  pour  que  la  chaise  longue  s'y  introduise.  Le 
phtisique  ainsi  étendu  est  protégé  contre  le  vent  et  le  soleil. 
Si  le  vent  tourne,  on  déplace  la  guérite  et  la  chaise  longue. 
Le  malade  peut  avoir  à  côté  de  lui  une  table  sur  laquelle  il 
installe  son  lait,  des  livres;  il  peut  aussi  fixera  sa  chaise  longue 
une  planchette,  pour  lire,  écrire  ou  dessiner  (fig.  85  ».  Le 
médecin  surveillera  ces  installations  et  prescrira  l'exercice 
respiratoire,  repos,  promenades,  etc. 

.Nous  avons  indiqué  dans  notre  chapitre  «  Traitement  pré- 
ventif» comment  on  peut  improviser  une  salle  de  bains  à  peu 
île  frais,  à  l'aide  d'un  «  lui)  »  anglais,  que  nous  conseillons 
comme  équipement  du  sanatorium  à  domicile  (p.  124).  Autant 
que  possible,  un  ami  ou  un  parent  dévoué  devrait  coucher  dans 
une  chambre  voisine  de  celle  du  malade.  Si  une  garde-malade 
devient  nécessaire,  elle  seule  doit  régler  les  soins  à  donner 
au  patient  pendant  l'absence  du  médecin.  Les  visites  des  amis 
intimes  sont  permises,  mais  il  doit  être  entendu  que  les  con- 
seils de  ces  derniers,  tant  au  point  de  vue  de  la  nourriture 
que  à\i  traitement,  seront  reçus  avec  reconnaissance  et  mis  de 
côté  avec  empressement.  Trop  de  visites,  trop  de  conversa- 
tions, surtout  au  sujet  de  la  maladie,  doivent  être  évitées. 

Si  le  malade  est  alité,  on  peut  installer  près  de  lui  un  ou 
deux  petits  arbres  de  la  famille  des  conifères,  et  produire 
l'atmosphère  d'une  forêt  de    pins   dans   sa    chambre    (p.  460  . 

Le  traitement  d'un  phtisique  dans  sa  famille  est  le  trai- 
tement prophylactique  dans  le  sens  le  plus  strict  du  mot. 
Même  si  le  médecin  traitant  n'a  pas  le  bonheur  de  sauver 
son  malade,  en  surveillant  les  autres  membres  de  la  famille, 
en  leur  conseillant  de  bonne  heure  un  traitement  préventif,  en 
les  protégeant  en  un  mot  contre  une  infection  possible  venant 
du  phtisique,  il  fait  de  la  vraie  phtisiothérapie  moderne. 


CHAPITRE   XXVII 

Le  traitement  du  tuberculeux  ambulant  dans  les  dispensaires 
et  dans  la  clientèle  privée. 


Le  dernier  chapitre  de  ce  livre  sera  une  étude  consacrée 
aux  sauatoria  destinés  au  traitement  des  pauvres,  et  nous 
espérons  ne  pas  plaider  en  vain  la  cause  de  la  création  mul- 
tiple de  ces  établissements. 

Bien  qu'il  soit  démontré  que  le  meilleur  traitement  pour  un 
phtisique  est  celui  qu'il  reçoit  dans  un  établissement  fermé,  il 
y  a  pour  le  moment  encore  trop  de  tuberculeux  et  trop  peu 
d'établissements  de  ce  genre  pour  que  tous  ces  malades  puis- 
sent bénéficier  du  traitement  dans  un  sanatorium.  Il  y  a  en 
outre  un  certain  nombre  de  malades  qui,  pour  diverses  rai- 
sons, ne  peuvent  être  traités  que  d'une  façon  ambulatoire,  c'est- 
à-dire  les  malades  non  alités,  visitant  régulièrement  leur 
médecin  ou  les  dispensaires  pour  recevoir  traitement  et 
conseil. 

Ainsi  que  je  le  dis  dans  la  préface  de  cet  ouvrage,  je  me  suis 
particulièrement  attaché  à  étudier  dans  mon  service  de  con- 
sultation la  méthode  la  meilleure  et  la  plus  pratique  d'appliquer 
le  traitement  hygiénique  et  diététique  aux  malades  ambu- 
lants. 

Un  grand  nombre  de  tuberculeux  de  la  classe  pauvre  ne 
peuvent  pas  venir  journellement  aux  dispensaires,  car  ils  sont 
souvent  obligés  de  continuer  à  travailler.  Pour  qu'ils  com- 
prennent bien  leur  devoir,  voici  la  feuille  d'instruction  que 
j'ai  rédigée  pour  eux. 


436  TRAITEMENT  DANS  LES  DISPENSAIRES 


ENVELOPPE 


Hôpital  de ...  . 

N° 

Service  de 

Consultation. 

N'1 
Service  du 

D' 

rue 

i.   Lisez  celt 
■i.   Gardez-la 
3.   Apportez- 

Instructions 

b  feuille  d'instruction 
propre  et  replacez-la 
la  toujours  quand  vo 

avoir 

lue. 

avec  soin. 

dans  l'enveloppe  après 
us  venez  pour  consulter. 

FEUILLE     I)    INSTRUCTIONS 
N"  du  malade  


Date Instructions  pour  M. 


Conseils  généraux. 

Tâchez  de  vous  distraire.  Ayez  bon  espoir,  car  votre  maladie  est  gué- 
rissable. 

Evitez  autant  que  possible  les  soucis. 

La  meilleure  occupation  pour  un  tuberculeux,  c'est  de  faire  tout  pour 
se  guérir. 

Ayez  au  moins  neuf  heures  de  sommeil  par  jour. 

Séjournez  autant  que  possible  à  l'air  libre  ;  ne  craignez  pas  le  temps 
froid,  seulement  ne  sortez  pas  pendant  les  vents  forts  ni  à  la  pluie. 

Vous  pouvez  vous  exposer  au  soleil,  à  condition  que  vous  vous  proté- 
giez la  tête.  Le  meilleur  endroit  pour  faire  la  cure  d'air  est  devant  la 
fenêtre,  s  il  n'y  a  pas  de  jardin  ni  de  véranda. 

Faites  la  cure  d'air  au  repos  en  vous  étendant  sur  un  sofa  ou  une 
chaise  longue,  la  tête  à  l'ombre. 

Evitez  les  courants  d'air,  les  endroits  humides  et  tous  ceux  où  il  y  a  de 
la  poussière.  Evitez  aussi  les  locaux  où  l'air  est  contaminé  (théâtres, 
salles  de  concerts,  etc.). 

Dormez  toujours  avec  les  fenêtres  ouvertes  ou  entr'ouvertes.  L'air  de 
la  nuit  est  aussi  bon  que  l'air  du  jour,  et  même,  dans  les  grandes  villes, 
plus  pur. 


ET  LA   CLIENTELE  PRIVÉE  437 

Ne  couchez  ni  ne  séjournez  jamais  dans  une  chambre  surchauffée  et  ne 
dormez  avec  une  autre  personne  ni  dans  le  même  lit,  ni  dans  la  même 
chambre. 

En  règle  générale,  ne  sortez  pas  avant  le  lever  du  soleil  ni  après  son 
coucher. 

Vous  pouvez  sortir  après  la  pluie,  ou  quand  il  neige,  si  vous  vous 
habillez  chaudement  et  portez  des  caoutchoucs. 

Habillez-vous  confortablement,  ni  trop  chaudement,  ni  trop  légère- 
ment, pour  que  vous  ne  transpiriez  pas  trop  facilement  ;  portez  des  fla- 
nelles variant  d'épaisseur  selon  les  saisons. 

Crachez  toujours  dans  un  vaisseau  rempli  en  partie  avec  une  solution 
d'acide  phénique  (1  partie  d'acide  pour  20  parties  d'eau).  S'il  n'y  a  pas  de 
crachoirs  lîxes,  servez-vous  de  votre  crachoir  de  poche.  Vous  ne  devez 
jamais  sortir  sans  le  crachoir  de  poche.  Nettoyez  ce  dernier  en  jetant 
contenant  et  contenu  dans  l'eau  bouillante,  à  laquelle  vous  ajouterez  un 
peu  de  carbonate  de  soude.  Après  quelques  minutes,  tous  les  germes 
contenus  dans  les  expectorations  seront  tués.  Si  la  désinfection  par  l'eau 
bouillante  n'est  pas  possible,  videz  votre  crachoir  dans  les  latrines. 

N'avalez  jamais  vos  crachats  ;  n'emploj'ez  jamais  pour  votre  nez  le 
même  mouchoir  que  vous  aurez  employé  pour  votre  bouche  ou  votre 
moustache,  après  une  expectoration.  Couvrez-vous  la  bouche  pendant  une 
quinte  de  toux  ;  couvrez  vous  aussi  la  bouche  et  le  nez  pendant  l'éternue- 
ment. 

Un  malade  qui  crache,  en  suivant  ces  avis  avec  exactitude,  se  protégera 
lui-même  contre  une  nouvelle  infection,  c'est-à-dire  que  les  germes 
détruits  ne  peuvent  plus  lui  faire  de  mal,  et  il  protège  ses  semblables 
contre  la  possibilité  d 'acquérir  la  tuberculose. 

Faites  vos  exercices  respiratoires  toujours  à  l'air  libre,  ou  au  moins 
devant  une  fenêtre  ouverte;  jamais  dans  les  lieux  où  l'air  est  malsain  et 
où  il  y  a  de  la  poussière. 

Direction  spéciale  pour  l'aêrothérapic  : 

Reposez  sur  la  chaise  longue  :  le  matin  entre heures  et heures; 

l'après-midi  entre  heures  et heures;  le  soir  entre  heures  et 

heures.   Faites  une  promenade,    le    matin,  d'une    durée    de  heures 

minutes  ;  l'après-midi,  d'une  durée  de heures minutes.  Exé- 
cutez votre  exercice  respiratoire  n° ;  répétez fois  toutes heures. 

Lavez-vous  la  poitrine  tous  les  matins  à  l'eau  froide  et  frictionnez-la 
ensuite  avec  une  serviette-éponge.  Une  fois  ou  deux  par  semaine,  prenez  un 
bain  chaud,  d'une  durée  de  5  à  10  minutes  environ,  suivi  d'un  épongeaient 
rapide  à  l'eau  froide  et  de  frictions  vigoureuses  avec  une  serviette-éponge. 


;38 


TRAITEMENT  DANS  LES  DISPENSA1RI  S 


Direction  spéciale  pour  l hydrothérapie 


Direction  pour  l'alimentation  : 


A  L 1  M  E  N  T  S     i 


DÉFENDUS 

AUTORISÉS 

RECOMMANDÉS 

Gibier. 

Croissants,  petits  pains 

Fromages  (Gruyère,  Ca- 

Homards,  langoustes. 

Chocolat 

membert  .     Roquefort , 

EcreVisses. 

Ci  Mililures. 

etc.) 

Vin. 

Sucre. 

(  .renie  fraîche. 

Alcool. 

Châtaignes  cuite-. 

Beurre  frais    ou  saléi . 

Liqueurs  quelconques. 

Marrons  cuits. 

Rillettes. 

Bonbons, sucre  d'orge. 

Bière. 

1  oie  gras. 

Biscuits. 

Café. 

Saucisson. 

Prunes. 

Thé. 

Graisse  ti  oie. 

Groseilles. 

Cerises. 

Jambon. 

Noix. 

Fraises. 

Poulet  rôti. 

Noisettes. 

Abricots. 

Rosbif  froid  ou  chaud. 

Aman  (les. 

Poires. 

<  ligot  froid  ou  chaud. 

<  iâteaux. 

Œufs  frais. 

Pommes. 

Sardines,    thon,    maque- 

Figues. 

reaux  à  1  huile. 

Dattes. 

Huîtres. 

Pâtisseries. 

Oranges. 

Pain  d'épice. 

Raisin. 

Pêches. 

Miel. 

(  liteaux  secs 

Viande  de  bœuf  crue     _■   . 

(i)  J'ai  emprunté  cette  liste  au  rapport  lu  au  Congrès  par  M.  Letulle  sur  ['Hos- 
pitalisation des  indigents  tuberculeux  de  Paris  (27  juillel  1898).  J'ai  ajouté  à  cette 
liste  la  viande  de  bœuf  crue,  le  gigot  el  le  rosbif  chauds,  car  je  ne  vois  aucune 
raison   pour  défendre  ces  mets. 

(2)  La  viande  de  bœuf  crue  doit  subir  trois  manipulations  successives  '  le  raclage. 
le  pilon,  1»'  tamisage. 


Mangez  lentement;  mâchez  bien;  buvez  surtout  du  lait  ( litres  par 

jour),  mais  prenez-le  par  petites  gorgées.  Brossez-vous  bien  les  dents  après 
chaque  repas. 


ET  LA  CLIE.\TÉLE  PRIVÉE  43g 

Direction  spéciale  pour  l'alimentation  : 


Direction  médicale  : 


Tous  les  symptômes  intercurrents  ou  nouveaux,  tels  que  :  indigestion, 
diarrhée,  constipation,  augmentation  de  la  toux  et  de  l'expectoration, 
douleur,  crachement  de  sang  ou  hémorragie,  devraient  être  rapportés  au 
médecin. 

Xe  soyez  pas  alarmé  par  la  vue  du  sang  craché,  car  ces  hémorragies 
ne  sont  que  des  symptômes  ordinaires  de  la  tuberculose  et  n'amoin- 
drissent pas  les  chances  de  guérison. 

Un  tuberculeux  prudent  et  qui  suit  religieusement  les  conseils  de  son 
médecin  a  vingt  fois  plus  de  chances  de  guérir  que  celui  qui  est  impru- 
dent et  désobéissant. 

Dr ,  médecin  en  chef. 

Le  traitement  par  le  cabinet  pneumatique  p.  a38^  des  tuber- 
culeux ambulants  a  une  valeur  tout  à  fait  exceptionnelle,  mais 
surtout  pour  le  malade  du  dispensaire.  Chez  lui,  en  dehors  des 
bons  effets  sur  l'oxygénation,  la  diminution  des  crachats,  etc., 
l'action  psychique  de  ce  traitement  compte  pour  beaucoup.  Il 
voit  qu'on  s'intéresse  à  son  cas.  et  il  en  résulte  qu'il  a  une 
confiance  absolue  dans  son  médecin,  ce  qui  rend  le  traitement 
hygiéno diététique  plus  réalisable  chez  ce  genre  de  malades. 


CHAPITRE   XXVIII 

Le  traitement  de  la  tuberculose  pulmonaire  en  ville,  dans  les 

établissements  pour  réception  et  isolement 

(Hôpitaux  spéciaux). 


Le  but  de  ces  établissements.  —  Selon  notre  conception 
de  la  meilleure  méthode  à  suivre  pour  combattre  la  tubercu- 
lose pulmonaire,  l'établissement  destiné  aux  tuberculeux,  situé 
dans  l'intérieur  ou  tout  près  d'une  ville,  doit  servir  à  un  double 
but.  En  premier  lieu,  ce  sera  comme  un  sanatorium  de  récep- 
tion pour  tous  les  genres  de  tuberculose  à  n'importe  quel  degré. 
En  deuxième  lieu,  on  y  isolera  les  malades  trop  avances  pour 
qu'on  puisse  espérer  leur  guérison.  On  gardera  en  observation 
pendant  quelques  jours  tous  les  sujets  tuberculeux  peu  atteints 
dans  ce  sanatorium  de  réception,  et  on  commencera  en  même 
temps  le  traitement  moral  et  pédagogique  comme  stage  prépa- 
ratoire pour  leur  entrée  avi  sanatorium  éloigné  de  la  ville,  et  de 
préférence  clans  les  régions  montagneuses. 

Le  fait  même  que  tous  les  tuberculeux,  à  n'importe  quel 
degré,  y  sont  reçus,  dissuadera  le  public  de  cette  idée  que 
l'institution  de  la  ville  ne  sert  qu'aux  malades  sans  espoir  de 
guérison. 

Dire  à  un  phtisique  qu'on  le  dirigera,  non  sur  un  hospice,  ni 
même  sur  un  hôpital  spécial,  mais  qu'il  sera  traité  dans  un 
sanatorium,  influera  très  heureusement  sur  son  état  moral  et 
ajoutera  ainsi  aux  chances  de  guérison. 

L'espoir  de  guérir  est  déjà  la  moitié  de  la  guérison. 


OÙ      FAUT-IL     CONSTRUIRE     LE     SANATORIUM     URBAIN  ?    A    quel 

endroit  doit-on  bâtir  cet  établissement  pour  tuberculeux  ?  Dans 
l'intérieur  ou  près  d'une  ville,  sur  un  terrain  aussi   sain  que 


SANATORIUM  URBAIN  44 1 

possible,  dans  un  quartier  tranquille,  de  préférence  un  peu 
élevé,  et  là  où  le  trafic  est  aussi  peu  étendu  et  l'air  aussi  pur 
qu'on  peut  l'espérer  clans  de  telles  conditions. 

Quel  genre  de  bâtiment  doit-on  choisir  ?  La  Ville  de  Paris  a 
été  dotée  dernièrement,  grâce  à  la  munificence  d'une  dame 
philanthrope,  M"ie  Boucicaut,  d'un  hôpital  construit  en  vue 
d'assurer  un  service  modèle  pour  les  tuberculeux  indigents. 
Je  me  fais  un  devoir  de  parler  de  cet  établissement  d'une 
manière  détaillée. 

Voici  l'extrait  de  l'intéressante  description  de  Y  Hôpital  Bou- 
cicaut, faite  dans  la  Presse  médicale  du  i"  décembre  1897 
par  M.  le  Dr  F.  Jayle,  et  que  M.  le  Dr  Pierrhugu.es  a  reproduite 
dans  son  excellente  thèse  (1). 

Le  1e1'  décembre  1897,  le  Président  de  la  République  inau- 
gurait à  Paris  l'hôpital  Boucicaut,  dû  au  legs  généreux  de 
Mmo  veuve  Boucicaut,  propriétaire  des  magasins  du  Bon-Marché. 

Le  nouvel  hôpital  est  situé  au  n°  6a  de  la  rue  de  la  Conven- 
tion, clans  le  quartier  de  Javel.  Il  se  trouve  complètement  isolé, 
par  les  rues  qui  l'entourent  sur  ses  quatre  côtés,  des  maisons 
ou  usines  du  voisinage,  dans  un  quartier  encore  peu  peuplé, 
non  loin  des  fortifications,  ce  qui  le  place  clans  d'excellentes 
conditions  hygiéniques. 

Il  occupe  un  terrain  d'une  superficie  de  3o  000  mètres  carrés, 
dont  les  bâtiments  ne  couvrent  que  7  5oo  mètres  carrés.  Le 
reste  est  formé  de  cours  et  jardins  assurant  une  large  part  à  la 
lumière  et  à  l'air. 

Les  matériaux  employés  pour  la  construction  sont  :  la 
pierre,  la  brique  et  le  fer.  Le  bâtiment  d'entrée,  qui  forme 
façade  et  où  se  trouvent  les  locaux  réservés  à  l'administration 
et  au  service  de  consultation,  est  en  pierre.  Les  pavillons  pour 
les  malades  ainsi  que  les  services  généraux  sont  en  brique  et 
fer,  sur  soubassement  en  meulière.  La  couverture  est  en  tuile 
rouge  à  emboîtement.  Le  tout  est  d'un  aspect  coquet  et 
agréable. 

Nous  prenons  le  malade  dès  son  arrivée  à  l'hôpital  :  il 
passe  par  le  service  de  la  consultation.  Là,  une  fois  admis,  il 


(1)  Piekkbugues.  Le  phtisique  parisien  à  l'hôpital.  Thèse.  Paris, 


442  TRAITEMENT  DE  LA    TUBERCULOSE  PULMONAIRE  EN   VII. I.i: 

est  aussitôt  dirigé  sur  la  salle  de  bains,  oii,  suivant  les  instruc- 
tions du  médecin,  il  lui  esl  donné  soil  un  bain  complet,  soit 
u  ne  simple  douche. 

Tous  ses  effets  d'habillement  lui  sont  retirés,  réunis  en  un 
paquet;  ils  sont  dirigés  par  les  sous-sols  à  la  salle  réservée  à 
la  désinfection  où  fonctionnent  les  étuves  ilu  système  Geneste 
et  Herscher. 

Au  sortir  du  bain,  il  revêt  des  vêtements  appartenant  à  l'hô- 
pital, qu'il  conservera  pendant  son  séjour  :  ces  vêtements  ont 
été  préalablement  passés  à  l'étuve.  Cet  habillement  comprend 
pour  les  hommes  comme  pour  les  femmes  une  longue  veste, 
sorte  île  robe  de  chambre  ;  pour  les  uns  un  pantalon,  pour  les 
autres  un  jupon,  des  pantoufles  et  des  bas. 

Alors  le  malade  esl  dirigé  sur  le  service  où  il  sera  traité, 
et  où,  par  suite  des  dispositions  prises,  il  ne  pénétrera  que 
dans  un  état  de  propreté'  1res  satisfaisant. 

Les  services  hospitaliers  sont  au  nombre  de  trois  :  un  ser- 
vice de  médecine,  un  service  de  chirurgie  et  un  service  d'ac- 
couchement complètement  isolé  des  deux  autres  services;  ils 
forment  un  ensemble  de  160  lits.  Le  service  de  la  Maternité 
esl  situé  au  fond  de  l'hôpital. 

De  chaque  côté  de  l'allée  centrale,  sont  places  les  deux 
autres  services  :  à  gauche  le  service  de  chirurgie  et  à  droite 
le  service  de  médecine,  comprenant  chacun  quatre  pavillons 
disposés  en  deux  rangées.  Il  faut  y  ajouter  deux  petit  pavillons 
d'isolement  situés  de  chaque  côté  du  pavillon  d'entrée.  En 
chirurgie,  les  suppurants  et  les  non  suppurants  sont  séparés. 

Dans  le  service  de  médecine,  il  est  réservé  deux  pavillons 
aux  phtisiques  :  l'un,  de  ai  lits,  pour  les  hommes,  l'autre, 
de  i4,  pour  les  femmes.  Il  est  à  remarquer  qu'à  Boucicaut  le 
nombre  de  lits  pour  hommes  remporte  d'un  tiers  sur  ceux 
réservés  aux  femmes,  car  d'après  la  statistique  hospitalière, 
il  esl  démontré  que  les  demandes  d'admission  à  l'hôpital 
sont  beaucoup  plus  élevées  de  la  part  des  hommes  que  de 
celle  des  femmes. 

On  a  donc  ainsi  exaucé  les  vumx  de  la  Commission  de  1896,. 
réclamant  l'isolement  des  tuberculeux. 

A  part  les  deux  pavillons  d'isolement,  destinés  aux  douteux 
et  aux  contagieux  non  transportables,  qui  contiennent  chacun 


HOPITAL  DOVCICALT  445 

quatre  lits,  les  autres  pavillons  sont  établis  d'après  un  plan  à 
peu  près  identique. 

Ils  comprennent  extérieurement  deux  parties,  la  première 
plus  étendue,  n'ayant  qu'un  rez-de-chaussée,  la  seconde 
surmontée  d'un  premier  étage  avec  deux  fenêtres  de  façade 
(fig.  86). 

Le  rez-de-chaussée  est  composé  de  deux  parties  :  la  première 
précède  la  salle,  elle  présente  en  son  milieu  un  corridor;  à 
droite  et  à  gauche  de  celui-ci  se  trouvent  l'office,  la  lingerie, 
les  water-closets  avec  bidet,  le  réfectoire.  Celui-ci,  heureuse 
innovation,  permettra  au  malade  de  manger  de  meilleur  appétit 
et  évitera  la  souillure  de  son  linge  de  lit.  Le  repas  se  prend 
dans  une  salle  bien  éclairée,  sur  une  table  de  marbre.  En  face 
du  réfectoire  se  trouve  une  salle  d'isolement  à  deux  lits.  Chez 
les  femmes  il  existe  une  deuxième  salle  avec  une  table  à  spé- 
culum. Une  troisième  salle  d'isolement  pour  un  lit  se  trouve 
encore  chez  les  hommes.  Avant  de  pénétrer  dans  la  salle  on 
aperçoit  le  cabinet  de  la  sœur  surveillante,  qui  de  sa  place  peut 
voir  sans  se  déranger  tous  les  malades,  grâce  à  une  large  baie 
vitrée  située  devant  son  bureau. 

Au-dessus  de  cette  première  partie  se  trouve  un  premier 
étage  contenant  deux  chambres  à  un  lit,  réservées  aux  employés 
du  Bon-Marché,  suivant  les  dispositions  testamentaires  de 
Mmc  Boucicaut.  Chaque  chambre  possède  une  large  fenêtre. 
En  plus,  il  y  a  un  lavabo  et  un  water-eloset.  Le  service  du 
premier  étage  est  assuré,  dans  chaque  pavillon,  par  un  ascen- 
seur. 

La  salle  pour  les  malades  est  d'allure  ogivale  ;  elle  a  l'aspect 
d'une  coque  de  vaisseau  renversée.  La  hauteur  maxima  est  de 
6  mètres,  la  largeur  de  9  mètres.  Chaque  lit  a  ainsi  un  cube 
d'air  considérable  (80  à  90  mètres  cubes),  tandis  que  dans  les 
hôpitaux  actuels,  le  cubage  d'un  lit  est  seulement  de  45  à 
5o  mètres  cubes  d'air. 

Les  fenêtres  s'ouvrent  à  trois  hauteurs  et  suivant  des  modes 
différents.  Elles  sont  séparées  par  un  trumeau  devant  lequel 
se  trouve  un  lit.  Il  n'existe  pas  d'angles  droits  dans  la  salle, 
tous  sont  arrondis.  Les  parois  des  murs  sont  enduites  de 
ripolin,  qui  a  l'avantage  de  pouvoir  se  laver  facilement;  cette 
peinture  vernie  rappelle  le  poli  de  la  porcelaine.   Le  ton  est 


mi'i  TRAITEMENT  DE  LA    TUBERCULOSE  PULMONAIRE  EN   VU. LE 

d'un  vert  tendre  cl 1 1  meilleur  effet  à  l'oeil.  Le  sol  est  garni  de 
carreaux  blancs  jaune  clair   lig.  87). 

L'éclairage  est  électrique.  Ce  moyen  est  parfait,  car  il 
évite  toute  viciation  île  L'air  par  les  produits  de  la  combustion 
comme  cela  a  lieu  ilaus  l'éclairage  au  gaz  ou  au  pétrole.  Les 
lampes  a  incandescence  sont  placées  a  environ  mi-hauteur 
du  trumeau.  Elles  nous  paraissent  insuffisantes  pour  l'éclairage 
de  la  salle.  Pour  la  nuit,  une  lampe  avec  une  ampoule  en  verre 
bleu  foncé  sert  de  veilleuse. 

Le  chauffage  est  à  liasse  pression.  La  vapeur  d'eau  au-des- 
sous de  t'u'wx  atmosphères  arrive  dans  les  tubes  disposes  en 
batteries,  (les  tubes  sous  ailettes  sont  ouverts  à  leur  extré- 
mité ;  ils  sont  placés  dans  l'embrasure  des  fenêtres.  I  11  robinet 
commande  l'arrivée  de  la  vapeur  et  permet  de  régler  facile- 
ment la  température  de  la  salle.  Ce  système  est  préférable  à 
tout  autre,  même  aux  systèmes  a  eau  chaude  qui  sont  insuffi- 
sants pendant  les  grands  froids  et  de  plus  peu  maniables,  les 
tuyaux  à  eau  chaude  niellant  un  certain  temps  à  se  refroidir, 
même  quand  on  a  fermé  les  robinets. 

L'aération  est  parfaite,  mais  insuffisante  pour  faire  la  cure 
d'air.  Le  soubassement  des  fenêtres  est  perforé,  en  arrière 
des  liatleries  de  chauffe;  ainsi  se  trouve  établie  la  prise  d'air. 
<>l  air  se  trouve  chauffé  dès  son  entrée  dans  la  salle  et  il  est 
repris  au  sommet  de  la  voûte  par  des  soupiraux  qui  corres- 
pondent à  des  lanterneaux  situés  au-dessus  du  toit.  L'ouver- 
ture ou  la  fermeture  des  prises  d'air  permet  de  régler  l'aéra- 
tion. 

Le  malade  éprouve  un  bien-être,  dans  une  atmosphère 
pareille,  qu'il  ne  ressent  nulle  part,  pas  même  dans  les  hôpi- 
taux étrangers.  On  croirait,  en  passant  d'Andral  à  Boucicaut, 
vivre  à  une  autre  époque. 

Enfin  la  véranda  peut  compléter  cette  salle  où  Ton  respire 
librement.  Elle  est  située  à  son  extrémité  ;  elle  en  occupe 
toute  la  largeur  et  n'en  est  séparée  que  par  un  vitrage.  Son  peu 
de  profondeur  est  son  inconvénient;  elle  égayé  la  salle  des 
malades  et  on  sait  que  l'effet  moral  chez  le  phtisique  est  un 
grand  point.  Elle  communique  avec  la  salle  par  deux  portes  ; 
une  fenêtre  de  chaque  côté  en  permet  l'aération.  Des  plantes 
vertes   ornent  cette   sorte  de   serre;   les  carreaux   dépolis,    de 


HOPITAL  BOVCICAVT  449 

différentes  nuances,  atténuent  les  rayons  du  soleil,  donnant  au 
visiteur  qui  pénètre  dans  la  salle  l'illusion  d'un  beau  coucher 
de  soleil  sous  un  ciel  toujours  pur  (flg.  88  et  89). 

Telle  est  la  disposition  intérieure  des  pavillons  ;  la  note  qui 
domine  dans  la  construction  est  le  souci  de  l'hygiène  et  de 
l'élégance.  Nous  allons  voir  que  l'aménagement  de  ces  salles 
a  été  également  fait  avec  un  arrand  soin  et  conformément  aux 
mesures  que  l'on  réclamait  depuis  longtemps  déjà. 

Les  lits  sont  tous  du  système  Herbet.  En  arrière  du 
dossier  de  la  tète  du  lit  se  trouve  une  tringle  de  fer  dissi- 
mulée par  le  traversin  et  l'oreiller  ;  elle  sert  à  supporter 
les  vêtements  du  malade.  Au-dessous,  une  tablette  en  fer 
doit  recevoir  les  bas  et  les  chaussures.  Le  malade  trouve  ainsi 
à  placer  ses  vêtements  et  n'est  plus  obligé,  comme  autrefois, 
de  les  glisser  sous  son  traversin  ou  de  les  entasser  dans  sa 
table  de  nuit. 

Les  tables  de  nuit  sont  constituées  par  quatre  piliers  en  métal 
peint,  réunis  à  deux  hauteurs  différentes  par  des  tringles 
également  métalliques  sur  lesquelles  reposent  deux  plateaux 
en  porcelaine.  Le  plateau  supérieur  est  entouré  sur  trois  de 
ses  côtés  par  une  galerie  ;  le  plateau  inférieur  se  trouve  à 
mi-hauteur  de  ce  meuble.  Ces  tables  ont  l'avantage  d'être 
d'un  nettoyage  des  plus  faciles,  à  l'aide  de  linges  imbibés 
d'une  solution  antiseptique.  Elles  ont  encore  celui  d'em- 
pêcher les  malades  d'y  cacher,  comme  dans  les  tables  de 
bois,    des    quantités    d'objets   d'une    propreté    douteuse. 

Des  chaises  et  des  fauteuils  en  fer,  à  siège  formé  de  lames 
de  bois,  qui  ne  sont  autres  que  des  meubles  de  jardin,  rem- 
placent les  anciennes  chaises  de  paille  et  sont  d'un  nettoyage 
commode.  Mais  nous  aurions  préféré  cependant  la  chaise 
totalement  en  fer,  comme  on  en  trouve  dans  les  jardins  publics 
de  Paris. 

A  ces  anciens  meubles  encombrants,  en  bois  recouvert  d'une 
épaisse  plaque  de  marbre,  connus  sous  le  nom  d'appareils 
de  salle,  qu'on  trouve  dans  les  autres  hôpitaux  et  qui  devien- 
nent le  meuble  de  débarras  de  la  salle,  c'est-à-dire  le  réservoir 
aux  fouillis,  on  a  substitué  de  grandes  tables  en  fer  et  lave 
émaillée. 

Les  pieds  de  tous  les  meubles  étaient  garnis,  au  début,  de 

Kxopf.  Sanatoria.  29 


45o  TRAITEMENT  DE  LA    TUBERCULOSE  PULMONAIRE  ES  VILLE 

petits  manchons  en  bois,  destines  à  empêcher  la  détérioration 
du  carrelage.  On  n'a  pu  les  conserver,  un  grand  nombre 
s'étant  brisés,  el  le  personnel  ne  prenant  ni  le  temps  ni  la 
patience  de  les  replacer  après  le  nettoyage. 

Pour  compléter  ce  mobilier  on  a  mis  des  lavabos  roulants 
avec  brosses  et  cure-ongles  ;  des  chariots  roulants  à  linge 
propre  et  à  linge  sale  ;  des  chariots  à  distribution  :  tous  sont 
en  fer  et  à  roues  caoutchoutées.  Pour  recevoir  les  pansements 
sales,  il  existe  des  bacs  émaillés  ;  les  pansements  sont  ensuite 
transportés  au  four  à  incinération  et  détruits. 

Au  début,  Ions  les  récipients,  verres,  brocs,  pots,  etc., 
étaient  munis  d'un  couvercle  métallique  et  pouvant  facilement 
se  stériliser,  ils  axaient  pour  but  d'éviter  cpie  la  poussière 
ne  tombât  dedans  ;  mais  malheureusement  déjà  la  plupart  en 
sont  privés. 

Il  existe  encore  une  balance  pour  prendre  le  poids  des 
malades.  Deux  baignoires  sont  affectées  à  chaque  salle. 

Les  crachoirs  ont  été  l'objet  d'un  soin  tout  particulier.  11 
en  existe  deux  modèles  :  l'un,  le  crachoir  individuel;  l'autre,  le 
grand  crachoir  (.'01111111111. 

Les  crachoirs  individuels  (fig.  90)  sont  en  verre  bleu  ou 
blanc;  ils  ont  une  contenance  de  trois  quarts  de  litre  envi- 
ron. C'est  le  modèle  de  Duguet,  un  peu  plus  petit  cependant. 
L'expérience  a  démontré  (pie  les  crachoirs  en  verre  bleu 
étaient  plus  cassants  après  leur  passage  à  létuve  que  ceux 
en  verre  blanc  ;  leur  seul  avantage  est  d'atténuer  la  vue  peu 
agréable  des  crachats  purulents  des  phtisiques. 

Les  grands  crachoirs  (fig.  91)  sont  montés  sur  un  pied  très 
lourd  afin  d'assurer  leur  assise  ;  d'autres  sont  fixes  aux  murs 
des  salles,  tles  couloirs,  des  corridors,  des  escaliers  à  l'aide 
d'un  cercle  de  fer  sur  lequel  ils  reposent.  Ce  modèle  a  été 
établi  par  le  D'  Thoinot  et  M.  Nielly,  chef  de  division  à  l'Assis- 
tance publique.  Ces  crachoirs  sont  distants  du  sol  de  85  centi- 
mètres. Ils  se  composent  d'un  récipient  de  forme  légèrement 
conique,  à  fond  concave,  ayant  25  centimètres  de  diamètre. 
A  leur  partie  supérieure,  ils  sont  munis  d'un  couvercle  en 
forme  d'entonnoir,  pourvu  d'un  large  orifice.  Les  crachats  ne 
peuvent  adhérer  contre  les  parois,  vu  l'inclinaison  de  ce 
couvercle.  Ces  crachoirs  collectifs  sont  en  tôle  émaillée.   Ils 


HOPITAL  HOl'CICAVT 


453 


ont  été  distribués  à  profusion  clans  tout  l'hôpital,  et  au-des- 
sus de  chacun  d'eux  est  affiché  sur  le  mur  l'avis  suivant  : 


CRACHOIR 


Par  mesure  d'hygiène ,  il  est  expressément 
recommandé  de  se  servir  du  crachoir.  Aucun 
crachat    ne    doit    tomber    sur    le    sol. 


Tous  les  crachoirs  individuels  ou  collectifs  contiennent  de 
l'eau  phéniquée.  Chaque  jour  les  infirmiers  sanitaires  sont 
chargés  d'enlever  à  heure  déterminée  les  crachoirs  et  de  les 
échanger  contre  d'autres  propres.  Les  crachoirs  en  verre  sont 
recueillis  dans  des  paniers  métalliques  entrant  directement  à 
l'autoclave.  Cet  autoclave  existe  dans  chaque  pavillon  ;  le  mo- 
dèle en  a  été  dressé  par  MM.  Thoinot  et  Legueu.  Les  crachoirs 
collectifs  sont  reçus  dans  un  chariot  muni  de  deux  casiers 
mobiles.  Crachoirs  et  casiers  sont  introduits  dans  un  appareil 
à  désinfection  ;  en  vingt  minutes  on  élève  la  température  à 
1 15°  ;  les  vingt  minutes  suivantes,  pendant  lesquelles  on  laisse 
encore  les  crachoirs  avec  leur  contenu,  suffisent  à  assurer  la 
stérilisation  des  crachats. 

La  plus  grande  partie  du  service  du  pavillon  se  fait  par  le 
sous- sol.  Ces  sous-sols  sont  une  véritable  merveille.  L'éclai- 
rage y  est  largement  suffisant;  des  rails  placés  au  milieu  per- 
mettent de  pousser  les  wagonnets.  Les  tuyaux  de  chauffage, 
d'éclairage,  d'eau  sont  fixés  contre  les  parois. 

Des  trémies,  faisant  communiquer  les  salles  avec  le  sous-sol, 
servent  à  y  déverser  le  linge  sale.  Des  monte-charges  per- 
mettent de  monter  les  aliments.  Mais  il  eût  été  désirable  que 
le  service  se  fit  totalement  par  les  sous-sols.  On  aurait  pu  faire 
descendre  jusqu'à  eux  les  ascenseurs  destinés  à  desservir  le 
premier  étage  et  qui  s'arrêtent  au  rez-de-chaussée  ;  ils  eussent 
permis  ainsi,  par  exemple,  de  faire  passer  par  les  souterrains 
les  civières  servant  à  transporter  les  cadavres  à  l'amphithéâtre, 


454  TRAITEMENT  DE  LA   TUBERCULOSE  IHI.MOy.iim-:  EN   VILLE 

comme  cela  a  lieu  à  l'hôpital  Urbain  de  Berlin,  et  l'on  eût 
évité  le  spectacle  peu  attrayant  de  les  promener  à  travers  les 
cours  et  les  jardins. 

Nous  ajouterons  que  le  balayage  à  sec  est  proscrit.  Le  net- 
toyage devrait  se  faire  à  grande  eau,  avec  îles  solutions  anti- 
septiques :  cependant  on  se  contente  le  plus  souvent  de  passeï 
un  linge  humide  sur  le  sol.  L'époussetage  est  également 
interdit;  il  devrait  être  remplacé  par  l'essuyage  à  la  serviette 
humide,  mais  malheureusement  la  théorie  n'est  pas  appliquée 
avec  toute  la  rigueur  qu'elle  exige  et  qui  serait  cependant  si 
nécessaire. 

Tel  est  l'aménagement  des  salles  à  l'hôpital  Boucicaut.  On 
voit  que  les  règles  d'hygiène  destinées  à  éviter  la  contagion 
de  la  tuberculose  ont  été  scrupuleusement  observées.  L'Assis- 
tance publique  a  sagement  suivi  les  conseils  qui  lui  axaient 
été  fournis  par  la  Commission  de  1896. 

Mais  ce  n'était  pas  tout  ;  il  fallait  encore  faire  comprendre 
aux  intéressés,  c'est-à-dire  aux  malades,  l'utilité  de  ces 
réformes  et  les  inviter  a  se  soumettre  aux  dispositions  néces- 
saires  pour  obtenir  de  bons  résultats.  C'est  dans  ce  but  qu'à 
Boucicaut  les  prescriptions  suivantes,  édictées  par  M.  le 
D'  Letulle,   ont  été  affichées  partout  : 

1"  Tout  malade  admis  dans  nos  salles  doit  entrer  propre  dans  un  lit 
propre  : 

2"  Il  reçoit  en  lion  éliil  1rs  vêtements  qui  conviennent  à  son  sexe  ei  en 
demeure  responsable  jusqu'à  sa  sortie  de  l'hôpital; 

!"  A  moins  de  contre-ordre  du  médecin  traitant,  tout  malade  hospita- 
lisé doit  prendre  un  bain  par  semaine; 

'1"  11  est  de  même  obligé  de  prendre  un  ou  deux  bains  de  pied  par 
semaine; 

V  Tout  malade  valide  doit  faire  sa  toilette  chaque  matin  dans  le  lavabo 
annexé  à  le  salle.  Alité,  il  doit  chaque  matin  être  débarbouillé,  et  ses 
mains  doivent  être  lavées  par  les  soins  de  l'infirmière  de  service; 

G"  A  son  entrée,  chaque  malade  reçoit  une  brosse  a  dents  (qui  devient 
sa  propriété)  et  une  serviette  : 

70  11  trouve  au  lavabo  le  savon,  ainsi  que  les  brosses  et  limes  a  ongles 
communes  à  tout  le  service; 

■S"  Il  est  absolument  défendu  de  fumer,  de  chiquer  ou  priser  dans  les 
salles  de  malade-  : 


HOPITAL  BOVCICAVT  45" 

9°  Il  est  de  même  expressément  interdit  de  jouer  de  l'argent  ; 

io°  Tout  malade  convalescent,  qui  désire  se  promener  dans  la  partie  du 
jardin  qui  lui  est  réservée,  ne  doit  sortir  du  pavillon  que  revêtu  des 
effets  qui  lui  ont  été  délivrés  (capote,  pantalon  ou  jupon,  bonnet,  etc.)  ; 

ii°  Il  est  défendu  aux  malades  de  déposer  leurs  vêtements  sur  leur 
lit  ;   ils  doivent  les  accrocher  à  la  barre  horizontale  placée  à  la  tête  du  lit  ; 

12°  Aucun  malade  ne  peut  conserver  sur  lui,  dans  son  lit,  d'autre  vête- 
ment que  chemise,  camisole,  bonnet  ; 

i3°  La  table  de  nuit  doit  être  constamment  propre;  elle  sera,  en  parti- 
culier, nettoyée  après  chaque  repas. 

Le  personnel  hospitalier  a  été  également  l'objet  d'instruc- 
tions spéciales.  A  son  entrée,  tout  infirmier  ou  infirmière  subit 
un  examen  médical  rigoureux  ;  tous  ceux 
atteints  d'une  affection  organique  quelconque 
sont  refusés.  Une  fois  admis,  chacun  reçoit  un 
carnet  individuel  où  sont  mentionnées  des 
notions  d'hygiène  hospitalière,  surtout  les 
moyens  de  prophylaxie  en  ce  qui  concerne  la 
tuberculose.  Ce  personnel  doit  être  revêtu 
d'une  blouse  dans  les  salles  de  malades  ;  il 
doit  se  laver  les  mains  avant  d'entrer  dans  les     Fis-  9°-  —  Crachoir 

..  ,,  ....  .  individuel,  modèle 

salles  et  avant  d  en  sortir.    Il  doit  prendre  au        de  Du°-uet. 
moins  un  bain  par  semaine. 

Le  personnel  médical  lui-même  n'échappe  pas  aux  obliga- 
tions hygiéniques.  Voici  le  tableau  qui  les  prescrit  et  qui  est 
encore  dû  à  AI.  Letulle  : 

i°  Le  personnel  médical  doit  donner  au  personnel  hospitalier  l'exemple 
de  l'observation  rigoureuse  des  règlements  ; 

2°  Tout  médecin,  étudiant  ou  docteur  qui  entre  dans  les  pavillons  doit 
se  revêtir  de  la  blouse  hygiénique.  Si  ses  fonctions  l'appellent  dans  le 
service,  il  doit  : 

a)  Pielever  ses  manches  bien  au-dessus  des  poignets,  afin  d'éviter  toute 
contamination  de  ses  vêtements  (chemise  ou  jaquette)  ; 

b)  Se  laver  les  mains  soigneusement  aux  lavabos,  qui  se  trouvent  en 
grand  nombre  dans  le  service.  La  même  précaution  est  indispensable  en 
quittant  le  pavillon; 

3°  Il  lui  est  instamment  recommandé  de  ne  jamais  mettre  dans  sa  bouche 
un  objet  quelconque  pendant  son  séjour  dans  la  salle  des  malades  ; 
4°  Il  lui  est  recommandé  de  ne  pas  fumer  à  l'intérieur  de  l'hôpital; 


[58  TRAITEMENT  DE  LA  TUBERCULOSE  PULMONAIRE  EN  VILLE 

5°  L'exactitude  dans  le  service  est  une  qualité  professionnelle  de  pre- 
mier ordre  que  1  on  doil  acquérir  dès  les  premiers  jours  des  études  médi- 
cales. 

Pour  terminer  celle  élude  sur  l'hôpital  Boucicaut,  nous 
dirons  encore  que,  comme  le  voulait  la  Commission,  le  loge- 
ment du  personnel  hospitalisé'  a  été:  compris  d'une  façon  beau- 
coup plus  avantageuse  et  plus  humanitaire  que  dans  les  autres 
hôpitaux.  Les  dortoirs  communs  ont  été  supprimés  et  rem- 
placés par  de  petites  chambres  à  un  ou  deux  lits,  qui,  si  elles 
ne  constituent  pas  encore  l'idéal,  sont  suffisamment  propres 
et  assez  bien  aménagées. 

Quand  on  a  suivi,  comme  je  l'ai  fait,  pendant  près  de  six  ans 
les  divers  services  des  hôpitaux  de  Paris  avant  l'année  1896, 
c'est-à-dire  avant  que  l'administration  de  l'Assistance  publique 
se  fût  décidée  à  suivre  les  conseils  qui  lui  avaient  été 
fournis  par  la  Commission  pour  l'étude  de  la  Tuberculose  el 
des  réformes  hospitalières;  quand  on  est  élève  <le  Grancher 
et  de  Letulle,  et  qu'on  présente  comme  thèse  inaugurale  un 
travail  qui  contient  une  description  de  la  triste  situation  des 
tuberculeux  dans  les  hôpitaux  de  Paris  et  presque  toutes  les 
grandes  villes  du  momie  ;  quand  on  a  enfin  essaye  de  se  joindre 
aux  défenseurs  d'une  cause  aussi  juste  et  aussi  urgente  que  la 
création  des  sanatoria  et  des  hôpitaux  spéciaux  pour  tuber- 
culeux pauvres,  on  ne  peut  que  ressentir  une  véritable  satis- 
faction en  assistant  à  l'aurore  de  celte  ère  nouvelle,  inaugurée 
par  l'établissement  de  l'hôpital  Boucicaut  à  Paris. 

Dans  la  construction  de  ce  bel  hôpital  il  y  a  cependant 
une  chose  que  je  regrette,  c'est  que  les  tuberculeux  soient 
réunis  dans  de  grandes  salles  au  lieu  d'avoir  chacun  une 
chambre  à  part.  Mes  raisons  pour  défendre  le  système  des 
chambres  séparées,  ayant  chacune  unv  fenêtre,  sont  les  sui- 
vantes :  souvent  la  toux  d'un  malade  ne  permet  pas  un  som- 
meil tranquille  à  son  voisin.  Le  même  degré  de  température 
ne  convient  pas  toujours  à  tous  les  sujets  tuberculeux,  tandis 
que,  avec  les  petits  ventilateurs  séparés,  et  une  fenêtre  dans 
chaque  chambre  séparée,  la  température  peut  être  réglée  pour 
chaque  malade  selon  les  indications.  Enfin,  les  chambres  sépa- 
rées épargnent  aux  voisins  le  triste  spectacle  d'un  compagnon 


HOPITAL  BOUCICAUT  45g 

de  chambre  mourant.  Le  paravent  employé  dans  ces  occasions 
n'atténue  guère   ces    impressions  pénibles   pour  les    témoins 
involontaires  d'une  scène  aussi  navrante. 
Je  suis  donc  d'avis  que  le  placement  d'un  tuberculeux  dans 


Fis 


Grand  crachoir,  modèle  de  Thoinot. 


une  chambre  séparée  est  préférable  à  tous  les  points  de  vue. 
L'idée  que  la  solitude  peut  être  déprimante  pour  le  malade, 
idée  qu'on  pourrait  invoquer  contre  ce  système,  ne  saurait  pré- 
valoir si  les  pavillons  sont  bâtis  de  façon  que,  autour  de  chaque 


(60  TBAITEMENT  DE  LA   TUBERCULOSE  PULMONAIRE  EN  VILLE 

étage,  se  trouvenl  tics  vérandas  où  les  patients  font  leur  cure 
d'air  pendant  la  plus  grande  partie  de  La  journée  i  1).  Durant 
la  nuit  le  malade  préfère  rester  seul. 

En  ce  qui  concerne  l'aménagement  hygiénique,  il  n'y  a 
rien  à  ajouter  aux  excellentes  prescriptions  de  M.  Lelulle.  Seu- 
lement je  voudrais  voir  remplacer  le  crachoir  individuel  |  fig.  90) 
en  verre  bleu  par  un  crachoir  en  fer-blanc  émaillé  en  bleu,  ou 
par  [[n  crachoir  en  aluminium.  Pour  atténuer  la  vue  désagréable 
des  crachats  purulents  des  phtisiques,  on  peut  remplir  le  cra- 
choir d'aluminium  en  partie  avec  une  solution  savonneuse. 
Mon  objection  à  l'emploi  du  crachoir  en  verre  est,  ainsi  que  je 
l'ai  dit,  qu'il  peut  se  briser  et  exposer  le  malade  et  l'infirmier 
à  une  inoculation  locale. 

Les  grands  crachoirs  (fig.  91)  de  MM.  Thoinot  et  Nielly  sont 
1res  bien  compris.  Pour  compléter  néanmoins  l'équipement  des 
malades  et  assurer  une  prophylaxie  parfaite,  il  me  semble 
qu'on  devrait  fournir  aux  tuberculeux  hospitalises  un  crachoir 
de  poche,  tel  que  celui  de  Dettweiler  (de  préférence  en  métal), 
de  Vaquier,  de  Petit,  etc.  En  effet,  les  malades  sont  obligés 
de  se  promener,  et  pendant  les  promenades  il  faut  qu'ils  pos- 
sèdent un  flacon  quelconque  pour  recueillir  leurs  expectora- 
tions. 

Il  serait  en  outre  désirable  que  les  infirmiers  fussent  habi- 
tués à  préparer  et  à  mettre  des  chiffons  mouillés  prés  du  lit  des 
malades  alites  et  trop  affaiblis  pour  faire  emploi  de  leur  cra- 
choir, et  à  s'assurer  de  plus  que  les  expectorations  ne  souille- 
ront pas  la  literie.  Les  chiffons  devraient  être  enlevés  assez 
souvent  et  brûlés  avant  de  redevenir  secs. 

Atmosphère  artificielle  mes  forêts  i>e  pins  dans  les 
salles  d'hôpitaux.  —  Le  traitement  dans  un  hôpital  spécial 
doit  se  rapprocher  autant  que  possible  de  celui  qu'on  fait  suivre 
dans  un  sanatorium.  La  seule  chose  qui  soit  difficile  à  rem- 
placer, c'est  l'air  du  sanatorium  dans  les  régions  montagneuses 
et  boisées.  Mais  il  y  a  tout  de  même  quelque  chose  à  faire 
dans  ce    sens.  Voici    l'ingénieux  procédé  inauguré  par  M.  le 


(1)  La  véran  la  qui  existe  au  bout  de  chaque  salle,  à  Boucicaut,  est  trop  petite 
pour  contenir  les  20  malades  hospitalisés. 


PRODUCTION  D'OZONE  DANS  LES  CHAMBRES  461 

D1'  Unterberger,  de  l'hôpital  militaire  de  Tsarskoié-Sélo,  pour 
produire  dans  les  hôpitaux  de  tuberculeux  une  atmosphère 
pure  et  fraîche,  rappelant  celle  dune  forêt  de  sapins  : 

«  Dans  le  dortoir  et  la  chambre  destinée  au  séjour  pendant 
la  journée  se  trouvent  des  sapins  transplantés  avec  les  racines 
dans  des  caisses  remplies  de  sable  mouillé  dans  lesquelles  ils 
conservent  leur  verdure  près  de  six  semaines.  Tous  les  soirs 
les  arbres  perdant  leur  arôme  sont  pulvérisés  avec  une 
solution  d'huile  de  pin  sylvestre  (10),  d'huile  de  térébenthine 
pure  (3o)  et  d'eau  de  fontaine  (3oo).  La  température  du  dortoir 
est  de  8°  à  io°  R.,  celle  du  salon  de  io°  à  i4°  R.  (1).  » 

Production  d'ozone  dans  les  chambres  de  phtisiques.  — 
Pour  obtenir  de  l'ozone  on  peut  se  servir  d'une  machine  élec- 
trique, ou  si  par  raison  d'économie  ce  procédé  n'est  pas  utili- 
sable, je  conseille  le  suivant  :  on  expose  au  dehors,  à  un  vent 
fort  et  sec  pendant  un  temps  plus  ou  moins  long,  des  draps  de 
lit  secs,  et  on  les  rapporte  ensuite  dans  les  chambres  des 
malades  où  on  les  suspend.  L'odeur  de  l'ozone  se  perçoit 
immédiatement  (2).  Il  est  particulièrement  à  recommander  que 
les  malades  fassent  des  exercices  respiratoires  dans  ces  atmos- 
phères. 


(1)  Petit.    La   Tuberculose    dans    le    Congrès.    Revue   de    la    Tul/erculose, 
1897,  déc. 

(2)  Bluhm.   Zeitschvift  fur  diàtetische    and  physikalische  Thérapie.    1S9P, 
T.  I,  Fasc.  3. 


CHAPITRE    XXIX 

Des  maternités-sauatoria;  des  hôpitaux  et  écoles 
pour  enfants  tuberculeux. 


.Nous  avons  parle  dans  le  chapitre  XXII,  à  propos  tlu  trai- 
tement moral,  des  conseils  à  donner  aux  femmes  phtisiques  au 
point  de  vue  de  leur  progéniture,  et  nous  avons  dit  aussi  que  si, 
malgré  ces  conseils,  une  femme  tuberculeuse  devient  enceinte, 
la  meilleure  chance  pour  la  vie  de  la  mère,  autant  que  pour 
relie  de  l'enfant,  consistera  dans  le  traitement  hygiéno-diété- 
lique  institué  de  bonne  heure  et  continué  longtemps  après 
l'accouchement,  et  de  préférence  dans  un  établissement  fermé. 

Parmi  les  nombreuses  femmes  pauvres  qui  accouchent  clans 
nos  maternités  publiques,  beaucoup  sont  atteintes  de  tuber- 
culose. Elles  sont  toujours  reçues,  el  quelques-unes  d'entre 
elles  ^e  sentent  même  un  peu  mieux  pendant  et  peu  de  temps 
après  la  grossesse.  On  les  renvoie  du  neuvième  au  dixième 
jour  après  l'accouchement,  le  plus  souvent  pour  mourir  chez 
elles,  et  fréquemment  après  avoir  infecte  le  nouveau-né.  Dans 
les  services  d'accouchement  que  j'ai  suivis  en  Europe  et  en 
Amérique,  j'ai  vu  les  soins  particuliers  donnes  aux  femmes 
syphilitiques  pendant  et  après  leur  grossesse,  mais  je  ne  me 
souviens  pas  d'avoir  jamais  observé  qu'on  s'occupât  des  pauvres 
phtisiques,  ni  au  point  de  vue  de  la  prophylaxie  ni  au  point 
de  vue  du  traitement.  Et  combien  n'y  a-t-il  pas  à  faire  dans 
I  intérêt  «le  ces  malheureuses  mères  et  de  leurs  enfants,  ainsi 
que  dans  l'intérêt  général? 

La  femme  tuberculeuse  enceinte  peut  guérir.  —  Peut-être 
mon  opinion  au  point  de  vue  de  la  possibilité  de  sauver  un 
assez  grand  nombre  de  femmes  tuberculeuses  enceintes  n'est- 


INFECTION  TUBERCULEUSE  POST-NATALE  463 

elle  pas  partagée  par  beaucoup  de  mes  confrères.  Mais  je 
prie  ceux  qui  en  doutent  d'essayer  le  traitement  hygiéno-diété- 
tique  pendant  trois  à  six  mois  avant,  et  pendant  la  même  durée 
après  l'accouchement.  J'invite  aussi  les  autorités  des  grandes 
villes  à  créer  des  maternités-sanatoria  où  les  tuberculeuses 
pauvres  pourront  avoir,  quelques  mois  avant  et  après  leur 
accouchement,  les  soins  particuliers  que  leur  état  demande. 
Les  patientes  recevront  de  plus  des  instructions  hygiéniques, 
si  essentielles  pour  élever  leurs  enfants. 

Il  est  de  l'intérêt  de  la  communauté  que  cette  méthode  soit 
adoptée.  Ce  que  disait  M.  Grancher  dans  son  remarquable 
rapport  à  l'Académie  de  médecine,  au  sujet  de  l'hôpital  géné- 
ral, est  surtout  applicable  aux  sanatoria  pour  tuberculeux  et 
particulièrement  aux  maternités-sanatoria  et  aux  hôpitaux- 
écoles  pour  enfants  tuberculeux. 

Un  établissement  où  l'on  soigne  des  tuberculeux  devrait  être 
«  une  école  de  propreté  et  de  santé  pour  tous  les  malades  qui 
le  traversent  et  qui  viennent  lui  demander  un  asile  tempo- 
raire ».  Là  les  tuberculeux  apprendraient  «  non  seulement  à 
se  guérir,  mais  encore  à  éviter  à  eux-mêmes  de  nouvelles 
infections  et  à  leur  famille  la  contagion  »  (i). 

Infection  tuberculeuse  post-natale.  —  La  transmission 
directe  de  la  tuberculose  de  la  mère  à  l'enfant  pendant  la  vie 
foetale  est  si  rare  qu'elle  est  presque  négligeable.  Par  contre, 
je  suis  convaincu  que  la  transmission  de  la  tuberculose  post- 
natale de  la  mère  à  l'enfant  par  voie  d'infection  (crachat  ou 
salive)  est  beaucoup  plus  fréquente  qu'on  ne  le  croit.  L'in- 
fection des  enfants  semble  se  faire  le  plus  souvent  à  l'âge  oii 
les  petits  jouent  par  terre  et  souillent  leurs  doigts  avec  la  pous- 
sière du  parquet.  L'habitude  des  enfants  de  mettre  leurs 
doigts  dans  la  bouche  explique  enfin  l'infection  de  ces  petits 
êtres  dans  les  endroits  où  demeurent  des  tuberculeux  adultes 
non  consciencieux  ou  ignorants.  Cette  infection  peut  être 
évitée  grâce  à  l'instruction  hygiénique  reçue  par  la  mère 
dans  une  maternité-sanatorium. 


(i)  Grakchi-r.  Rapport  à  l'Acad.  de  Méd.,    1898,  3  mai. 


i ti  ;  DES  MATERNITÉS-SANATORIA 

Ces  maternités-sanatoria  devraient  être  construites  non 
loin  de  la  ville  et  sur  un  terrain  particulièrement  sain.  L'amé- 
nagement d'un  pareil  établissement  doil  comprendre  tout 
ce  qui  est  nécessaire  à  un  sanatorium  pour  tuberculeux  el  à 
une  maison  d'accouchement,  d'après  la  conception  moderne 
de  la  phtisio-thérapie  et  de  l'art  obstétrical.  La  direction 
devrait  en  être  confiée  à  un  phtisio-thérapeute  et  accoucheur 
expérimenté. 

On  ne  peut  nier  que  par  la  création  d'un  nombre  suffisant  de 
maternités-sanatoria.  le  problème  d'une  prophylaxie  sérieuse 
de  la  tuberculose  parmi  les  familles  pauvres  n'approche  con- 
sidérablement de  sa  solution.  L'instruction  hygiénique  que  la 
mère  aura  reçue  dans  le  maternité-sanatorium  suffira  peut-être 
pour  mener  à  bien  l'élevage  de  l'enfant  en  le  protégeant 
contre  l'infection  tuberculeuse.  Mais  si  la  mère  a  succombé, 
si  malgré  toutes  les  précautions  l'enfant  est  devenu  tuber- 
culeux et  s'il  arrive  à  l'âge  de  7  ou  8  ans,  faudra-t-il  l'envoyer 
à  l'école  publique  ?  N'a-t-il  pas  là  très  peu  de  chance  de 
se  guérir  et  n'est-il  pas  même  un  danger  pour  ses  cama- 
rades ? 

Au  Canada  et  aux  Etats-Unis,  dans  quelques  villes,  on  refuse 
d'admettre  les  enfants  tuberculeux  dans  les  écoles  publiques; 
mais  on  n'a  pris  jusqu'à  présent  aucune  mesure  pour  les  ins- 
truire: ni  au  Canada,  ni  aux  Etats-Unis,  il  n'y  a  d'écoles  pour 
les  enfants  tuberculeux.  En  France,  en  Belgique,  en  Danemark, 
en  Allemagne  et  en  Italie,  on  a  au  moins  des  écoles  pour  les 
enfants  scrofuleux  et  atteints  de  tuberculose  osseuse  ou  arti- 
culaire; mais  nulle  part  il  n'existe  d'écoles  publiques  pour  les 
enfants  pauvres  tuberculeux.  Davos  est,  à  ma  connaissance, 
la  seule  ville  pourvue  d'une  école  privée  où  l'on  reçoive  les 
enfants  atteints  de  tuberculose  pulmonaire  ou  simplement 
prédisposés.  Il  est  donc  absolument  nécessaire  que  les 
grandes  villes  fondent  pour  les  enfants  phtisiques  des  sana- 
toria,  soit  séparés,  soit  comme  annexes  aux  sanatoria  pour 
adultes. 

Statistique  de  quelques  sanatoria  pour  enfants  tuber- 
culeux. —  Les  résultats  obtenus  dans  les  hôpitaux  spéciaux 
pour  enfants  scrofuleux  et  tuberculeux  sont  particulièrement 


STATISTIQVE  DE  QUELQUES  SAXATORIA 


465 


encourageants.  Voici    quelques    renseignements    statistiques 
que  j'ai  pu  recueillir  : 


NOM    DE    L'HÔPITAL 

RAPPORTEUR 

GUÉRI- 
SOXS 

AMÉLIO- 
RATIONS 

DURÉE 

moyenne 
de  séjour. 

DÉPENSES 

journalières 

P.    100. 

P.   100. 

Dr  Léon  Petit. 

2} 

35 

6  à  8  mois. 

I,  60 

Forges-lcs-Bains    .    . 

Dr  Doumenge. 

5o 

25 

12  mois. 

1 ,  60  à  1 ,  80 

Refsna?s  (Danemark). 

D'Schepelern. 

5 1 ,  1 5 

42,04 

2S2  jours. 

Hospice  Maritime  de 

l'impératrice  Frédé- 

ric. Nordcney  (Alle- 
magne)     

Prof.  C.  A. 

Ewald(i). 

5o 

Des  Sanatoria  mariti- 

mes en  Belgique.    . 

» 

-o 

Des  Sanatoria  mariti- 

mes en  Italie   .    .    . 

» 

J3 

(i)  Beil.  klin.  Woclienschrift,  n   se 

alembrc 

189s- 

Kno.t.  Sanatoria. 


3o 


CHAPITRE   XXX 

Sanatoria  pour  les  pauvres  ;  la  tuberculose  pulmonaire  comme 
problème  social  ;  caisse  de  secours  ;  assurance  contre  la 
phtisie. 


Aucune  maladie  n'a  autant  occupé  dans  ces  dernières 
années  les  esprits  des  médecins,  des  philanthropes  et  des 
hommes  d'Etal  que  la  tuberculose  pulmonaire.  Le  médecin,  a 
la  veille  du  vingtième  siècle,  comprend  ses  devoirs  d'une  façon 
autre  que  ses  ancêtres. 

Lors  de  l'ouverture  de  l'Institut  Pasteur,  à  New-York, 
son  distingué  directeur,  mon  ami  M.  le  docteur  Gibier, 
s'exprimait,  en  parlant  du  médecin  de  l'avenir,  de  la  façon 
suivante  : 

«  Il  est  de  son  devoir  et  de  son  intérêt  de  se  faire  le  cham- 
pion de  l'hygiène  sociale  aussi  bien  que  île  l'hygiène  sans 
épithèle.  Devant  les  assemblées  et  les  pouvoirs  de  la  nation, 
point  n'est  besoin  pour  lui  de  faire  appel  aux  intérêts  poli- 
tiques; sa  force  réside  dans  le  calme  de  la  science  qui  sans 
artifice  de  rhétorique  et  sans  provoquer  d'émotions  sentimen- 
tales, froidement  déploie  les  faits  et  force  l'homme  à  penser 
et  à  agir.  » 

Un  des  premiers  savants  qui  ait  envisagé  la  vie  f\y\  phti- 
sique pauvre,  sa  situation  sociale,  ses  entourages  malsains  et 
son    triste  avenir,    est  M.    le   professeur   Grancher. 

Une  série  d'articles  publiés  dans  la  Gazelle  médicale,  en 
i8j8,  donne  une  description  précise  du  traitement  de  la  phtisie 
pulmonaire  dans  les  hôpitaux  généraux.  M.  Grancher  y  décrit 
le  traitement  dans  les  hôpitaux  de  Paris  ;  il  aurait  aussi  bien 
pu  intituler  cet  article  :  le  traitement  de  la  phtisie  pulmonaire 
dans  les  hôpitaux  généraux  du  inonde  civilisé.  Il  y  a  quelques 
années,  j'ai  visité  les  hôpitaux  généraux  de  plusieurs  capitales 


LE  TUBERCULEUX  PAUVRE  CHEZ  LUI  467 

d'Europe,  ceux  de  Londres,  Edimbourg,  Berlin,  Vienne,  Buda- 
pest, Athènes,  Florence,  Rome,  et  je  peux  dire  qu'en  dehors 
de  quelques  établissements  spéciaux  fonctionnant  à  Londres, 
il  n'y  a  pas  la  moindre  différence  entre  les  hôpitaux  généraux 
de  ces  pays  et  ceux  de  Paris. 

Même  chose  pour  la  plupart  des  hôpitaux  de  nos  grandes 
villes  des  États-Unis.  Quelques  localités  seulement  (Boston, 
Chicago  et  New-York)  font,  depuis  quelque  temps,  des  efforts 
héroïques  pour  séparer  les  tuberculeux  des  autres  malades,  en 
les  envoyant  dans  des  hôpitaux  excentriques  jusqu'à  ce  que  des 
bâtiments  spéciaux    soient  construits  pour  les  hospitaliser. 

Le  tuberculeux  pauvre  chez  lui.  —  Quelle  est  la  situation 
d'un  phtisique  pauvre  dans  une  grande  ville,  telle  que  Paris, 
Berlin  ou  Vienne,  par  exemple  ? 

Voici  le  récit  de  ce  que  M.  Grancher  appelle  Y  Odyssée  d'un 
phtisique  à  Paris  : 

«  Aux  premières  atteintes  du  mal,  ils  se  soignent  chez  eux 
et  épuisent  rapidement  les  quelques  ressources  accumulées 
pendant  plusieurs  années  de  travail  et  d'économie.  Souvent 
même,  ils  s'endettent,  puis,  le  crédit  usé,  ils  viennent  demander 
leur  admission  à  l'hôpital.  On  les  y  soigne,  ou  plutôt  on  leur 
permet  de  s'y  reposer  pendant  quelques  semaines,  après  quoi 
on  est  forcé  de  les  renvoyer  pour  donner  leur  place  à  de 
nouveaux  solliciteurs.  Ils  reprennent  leur  travail,  mais  ne 
peuvent  plus  gagner  leur  vie  comme  autrefois  ;  la  fatigue  et 
l'inanition  a°-Q-ravent  bien  vite  leur  mal  et  les  oblig-ent  à  un 
nouveau  séjour  à  l'hôpital.  Gela  se  répète  plusieurs  fois,  et 
les  visites  qu'ils  nous  rendent  se  rapprochent  de  plus  en 
plus. 

«  Mais  souvent  il  n'y  a  pas  de  places  vacantes  dans  nos  salles, 
et  les  malades  sont  dirigés  sur  le  Bureau  central.  Là,  on 
dispose  chaque  jour  d'une  dizaine  de  lits  au  plus,  et  l'on  doit 
faire  lace  à  plus  de  cent  demandes  d'admission  ;  les  lits  dis- 
ponibles sont  distribués  aux  fiévreux,  et  les  phtisiques  sont 
renvoyés  au  lendemain.  Huit  ou  dix  jours  de  suite  ils  renou- 
vellent leurs  tentatives  infructueuses,  soit  au  Bureau  cen- 
tral, soit  dans  les  hôpitaux.  Pendant  ce  temps,  ils  ne  tra- 
vaillent pas  et  en  conséquence  ne  mangent  pas  ;  la  maladie  fait 


.;68  SANATORIA  POLR  LES  PAUVRES 

des  progrès  rapides.  Enfin,  ils  sont  reçus  à  l'hôpital  —  et  ils 
y  meurent à  moins  qu'ils  ne  soient  morts  en  chemin. 

«  Dans  chacun  des  séjours  qu'il  fait  à  l'hôpital,  le  phtisique  est 
soumis  aux  médications  les  plus  variées,  car  les  ressources 
thérapeutiques  dont  nous  disposons,  pour  être  à  peu  près  inu- 
tiles, n'en  sont  pas  moins  nombreuses.  » 

Puis  M.  Grancher  décrit  la  triste  vie  de  ce  phtisique  à 
l'hôpital  général  de  la  façon  suivante  :  «  Les  remèdes  ne 
manquent  pas  plus  à  nos  malades  de  l'hôpital  qu'à  ceux  de  la 
ville  ;  mais  ce  qui  leur  fait  absolument  défaut,  c'est  l'hygiène, 
c'est-à-dire  l'air,  l'aliment,  le  vêtement,  le  repos.  II  est  inutile 
de  démontrer  ce  qui  est  évident,  c'est-à-dire  que  l'air  d'une 
salle  d'hôpital  ne  convient  pas  aux  phtisiques.  Celte  atmos- 
phère est  toujours  viciée  par  l'encombrement,  les  poussières 
et  les  déjections.  Malgré  l'emploi  des  meilleurs  systèmes 
connus  de  ventilation,  l'air  est  insuffisamment  renouvelé,  cl 
l'ouverture  des  fenêtres  n'est  possible  (pie  dans  une  mesure 
restreinte,  s'il  existe,  comme  toujours,  dans  le  service  des 
pneumoniques  ou  des  rhumatisants. 

«  Les  aliments,  sauf  le  pain  et  le  vin,  sont  défectueux.  La 
côtelette  supplémentaire  n'arrive  au  malade  qu'après  un  long 
voyage  de  la  cuisine  à  son  lit,  froide  et  peu  appétissante. 

«  Les  excitants  naturels  de  l'appétit,  les  assaisonnements  un 
peu  variés,  font  absolument  défaut;  il  n'est  pas  jusqu'à  l'insuf- 
fisance du  service  et  cette  promiscuité  sur  une  même  table 
de  nuit,  de  l'assiette  et  du  crachoir,  de  l'urinoir  et  du  verre, 
qui  n'ajoute  au  dégoût  naturel  du  phtisique  pour  les  aliments. 

«  Le  vêtement  est  aussi  incomplet  (pie  la  nourriture.  La 
capote  d'hôpital  ne  protège  pas  suffisamment  contre  les  cou- 
rants d'air  des  cours  et  des  couloirs.  Il  faut  un  bon  spécial  du 
médecin  pour  obtenir  un  ti;ïlet  de  flanelle,  et  c'est  une  faveur 
qui,  une  fois  accordée,  ne  peut  guère  se  renouveler  pour  le 
même  malade.  Mais  ([ne  dire  du  repos  si  nécessaire  à  ces 
pauvres  malades,  et  cependant  si  rare  à  l'hôpital  ?  Tous  les 
jours,  et  dès  le  matin,  le  service  de  propreté  commence  et  ne 
cesse  plus  de  toute  la  journée,  sauf  aux  heures  de  visite  du 
médecin  ou  des  parents.  Les  infirmiers  nettoient  les  crachoirs 
et  les  vases  de  nuit,  frottent,  époussettent,  refont  les  lits,  les 
roulent  au  milieu  de  la  salle,  empilent  les  chaises  et  les  tables 


LE  TUBERCULEUX  PAUVRE  CHEZ  LUI 


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4;o  SANAT0R1A  l'Oili  LES  PAUVRES 

de  nuit  ;  bref  déménagent  et  emménagent  chaque  malade  au 
moins  une  fois  par  jour.  Pendant  la  nuit,  le  voisin  tousse,  <>u 
o-émit,  ou  crie,  l'infirmier  va  et  vient  dans  la  salle  et  la  sœur 
l'ail  sa  ronde  de  surveillance...  Le  malheureux  phtisique,  tenu 
en  éveil  par  luus  ces  bruits  el  par  sa  propre  toux,  ne  dort 
guère  el  empêche  ses  voisins  de  dormir.  » 

M.  Grancher  donne  enfin  un  calcul  des  dépenses  des  phti- 
siques dans  les  hôpitaux  généraux,  el  il  termine  par  ces 
paroles  significatives.  «  Avec  l'organisation  actuelle  tous  les 
phtisiques  sont  trailés  indistinctement  à  ■>.  fr.  o,3.  et  ils  meurent 
tous.  » 

Et  dans  les  autres  pays  l'état  de  choses  n'est  pas  meilleur, 
comme  on  peut  s'en  convaincre  par  la  lecture  du  tableau 
(page  469),  où  figurent  les  statistiques  qu'il  m'a  été  donné  de 
recueillir  tant  en  Europe  qu'en  Amérique. 

Les  guérisons,  comme  l'indique  la  cinquième  colonne  dudit 
tableau,  sont  dont'  de  zéro  presque  partout. 
.Néanmoins  : 
L'Autriche  dépense  journellement,  pour  un  phtisique  qu'elle 

ne  guérit  pas 
L'Allemagne  — 

L'Amérique  — 

L'Italie  — 

La  Suisse  —  — 

La  valeur  des  améliorations  dans  les  hôpitaux  généraux  est 
connue  ;  elles  sont  le  plus  souvent  très  temporaires,  et  le 
malade  revient  bientôt  se  réfugier  à  l'hôpital,  aussitôt  qu'il  y 
a  une  place  libre. 

Mais  revenons  à  Paris  :  on  y  pourrait  compter  aussi  bien 
environ  5o  p.  100  d'améliorations,  car  la  moitié  au  moins  des 
phtisiques  quittent  l'hôpital  une  l'ois  avant  d'y  revenir  mourir. 
Contentons-nous  donc  de  la  statistique  des  guérisons  ;  or,  il 
n'y  a  pas  de  guérison  de  la  phtisie  dans  les  hôpitaux  généraux, 
pas  plus  à  Paris  qu'ailleurs.  C'est  cet  état  de  choses  qui  a  porté 
depuis  plusieurs  années  M.  le  professeur  Grancher  à  plaider 
avec  tant  d'éloquence  la  cause  des  phtisiques  pauvres  et  à 
demander  la  construction  de  sanatoria  qui  leur  soient  réservés. 
C'est  pour  cela  qu'à  l'heure  actuelle,  nous  voyons  tous  les  pays 


.  fr. 

75 

3  — 

25 

5  — 

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1  — 

90 

3  — 

■  5o 

LE  TUBERCULEUX  PAUVRE  CHEZ  LUI  \~  I 

civilisés  s'agiter  pour  fonder  des  sanatoria,  des  hôpitaux  spé- 
ciaux, des  colonies  pour  les  tuberculeux,  et  que  les  derniers 
Congrès  de  la  Tuberculose  ont  conclu  en  faveur  de  la  création 
en  aussi  grand  nombre  que  possible  de  sanatoria  pour  les  phti- 
siques pauvres.  C'est  pour  cela  enfin  que  dans  tous  les  pays 
les  médecins  les  plus  illustres  sont  devenus  les  défenseurs  de 
cette  juste  et  généreuse  cause.  Pour  la  France,  une  Commission 
désignée  par  l'Académie  de  Médecine  dans  les  séances  du 
3  mai  et  du  18  juin  1898  a  exprimé  ses  sentiments  à  cet  égard 
(Voir  page  79).  Cette  Commission  était  composée  de  MM.  Rous- 
sel, président;  Bergeron,  vice-président;  Besnier,  Brouardel, 
Colin,  Magnan,  Monod,  Motet,  Xapias,  A'oeard,  Proust,  Roux, 
Vallin  et  Grancher,  rapporteur. 

Pour  l'Allemagne,  Dettweiler  (1),  von  Leyden  (2)  et  Liebe  (3)  ; 
pouiT'Autriche,.von  Schrœtter(4);  pour  l'Angleterre,  Weber  (5). 
Lindsey  (6)  et  YYalters  (7);  pour  le  Danemark,  Saugmann  (8); 
pour  la  Norvège,  Hansen  (9)  ;  et  pour  les  Etats-Unis,  Bow- 
ditch  (10),  Biggs    et  Prudden   (n),    Lee    (12),    Trudeau    (i3), 


(1)  Dettweiler.  Mittheilungen  ùber  die  erste  Yolksheilsliitte  fur  unbeinittelle 
LungenkrankeinFalkenstemi.Tauiius.i)e'!<7st'7<e  med.  Wochenselirift,  1892,11° 48. 

(2)  Vos  Leyden.  Ueber  die  gegcmvartige  Behandluug  Tuberkulôser  und  die 
staalliche  Fùrsorgc  fur  dieselben.    Congrès  internat,  de  Moscou,  1897,25  août. 

(3)  G.     Liebe.    Die   Bekâmpfung  der  Tuberkulose.    Deutsche    Vierteljahrs- 
schrift  fur  ijffentliche  Gesundheitspflege.  1898. 

(4)  Von  Schrotter.  Uber  den  gegenwiirtigen  Sland  der  Frage  der  Errichtung 
eigener    HeilstUtten  fur  die  Tuberkulose.  Allgem.  Wiener  med.  Zeitung,  1892. 

(5)  H.  AYeber.  Croonian  Lectures  on  the  Hygienic  and  Climatic  Treatment 
ofClironic  Pulmonary  Phthisis.  Londres,  i885. 

(6)  Lindsey.  Problem  of  the  consumptive  poor.  The  Lancet,  Londres,    1897, 
4  déc. 

(7)  \Yalters.  Sanatoria  for  consumptive  patients.  The  Practitioner,  1898,  juin. 

(8)  C.  Saugmann.   Sanatorier  for  Brystsyge.  Copenhague,  1S97. 

(g)  K.    Hansen.   Forslag  til  offentlige   Foranstaltninger  mod   Tubcrkulisen. 
Christiania,  1893. 

(10)  Bowditch.  Treatment  of  Phthisis  in  Sanatoria  near  oui-  Homes.  Animal 
Meeting  of  the  Mass.  Med.  Society,  1896,  juin. 

(11)  Biggs  et  Prudden.   Communication  to   the  lion.  C.   G.   YS  ilson,   Prési- 
dent   of  the    Board    of   Health.  New  York  Med.  Journal,   1897,  27  janv. 

(12)  B.  Lee.  Présent   Attitude   of  Sanitarians    and   Boards  of  Health  toward 
Pulmonary  Consumption.  Journal  ofthe  American  Med.  Assoc,  1897,  3o  oct. 

(i3)  Trudeau.  Sanatoria   for  the    treatment  of  incipient  Tuberculosis.    New 
York  Med.  Record,  1897,  i3  fév. 


472  SANATORIA  POLR  LES  PAUVRES 

Flick(i),  Hinsdale(a),  Otis  (3),  Gibier  (4),  Shrady  (5),  Rose  (6) 
et  Mannheimer  (7)  ont  préconisé  la  création  de  sanatoria  pour 
les  tuberculeux  pauvres. 

Colonisation  des  tuberculeux.  —  Etudions  à  présent  quel- 
(|iics  autres  projets  intéressants  au  point  de  vue  du  placement 
des  tuberculeux  pauvres. 

In  de  mes  maîtres,  M.  le  professeur  agrégé  Letulle,  a  t'ait 
depuis  quelques  années  plusieurs  communications  à  ce  sujet(8). 

En  1894,  au  Congrès  d'hydrothérapie  maritime  de  Boulogne- 
Sur-Mer,  il  a  résumé  ses  travaux  antérieurs.  11  démontre  : 
1"  que  l'encombrement  des  hôpitaux  parisiens  s'accroît  de 
jour  en  jour;  a"  que  les  phtisiques  et  les  tuberculeux  dépen- 
sent dans  les  hôpitaux  de  Paris,  qui  ne  leur  sont  pas  destinés, 
au  moins  le  i/5  des  journées,  et  par  conséquent  de  l'argent 
qui  devrait  être  attribué  aux  seules  maladies  aiguës  acciden- 
telles, curables,  du  moins  en  théorie.  Puis,  M.  Letulle  arrive 
à  cette  conclusion  :  que  l'encombrement  des  hôpitaux  généraux 
par  les  tuberculeux  soit  supprimé  le  plus  tôt  possible,  et  qu'il 
devienne  irréalisable  dorénavant,  au  moyen  des  mesures  sui- 
vantes : 

i°  Reconnaissance  rapide  et  classement  des  tuberculeux 
parisiens  indigents; 

a0  Émigration  rationnelle  des  tuberculeux  curables,  et  dis- 
tribution des  malades  dans  les  sanatoria  provinciaux  et  dans 
les  colonies  de  tuberculeux  (Corse,  Algérie  et  Tunisie)  ; 


(1)  Flick.  Spécial  hospilals  for  the  treatment  of  Tuberculosis.  Times  and 
Register,  1890,   i5  mars. 

(2)  Hinsd.vle.  Récent  mcasurcs  foi'  the  prévention  and  treatment  of  Tubercu- 
losis.  The  Med.  News.    1 89  { ,  août. 

(3)  Otis.  The  Sanatorium  or  closed  treatment  of  Phtisis.  New  York  Med. 
Journal,  1896,  i3juin. 

(4)  P.  Gibier.  Proposée!  Sanatorium  for  Physicians  affected  wilh  Tubercu- 
losis of  the  Lungs.   Bulletin  ofthe  Pasteur  Institute.  New-York,   1897. 

("))  Shrady.  New  York  Med.  Record,  t.  LU,  p.  63a. 

(6)  Rose.  Gaillard  s  Med.  Journal.  New-York,    1893,  1.  IX. 

(7)  Mannheimer.  New  York  med.  Monatsschrift.   1897,  mai. 

(8)  Letulle.  Hospitalisation  des  phtisiques.  Semaine  Médicale,  189a,  4  mai. 
—  ae  communication  à  la  Société  de  médecine  publique,  d'hygiène  et  de  police 
sanitaire,     1892,  23  nov. 


COLONISATION  DES  TUBERCULEUX  l\f!> 

3°  Création  de  lits  d'hospice  (ou  de  services  particuliers  dans 
les  hôpitaux  généraux)  pour  les  phtisiques  non  transportables. 
La  journée  d'hôpital  étant  pour  ces  malades  une  dépense 
inutile,  leur  séjour  dans  les  salles  communes  constitue  un 
danger  redoutable. 

M.  Letulle  propose  donc,  outre  les  sanatoria,  des  colonies 
de  tuberculeux. 

C'est  en  effet  un  excellent  moyen  de  décentralisation  des 
tuberculeux,  mais  pour  que  cette  décentralisation  ne  devienne 
pas  une  dissémination  de  la  tuberculose  dans  les  pays  loin- 
tains, je  voudrais  que  tout  candidat  désigné  pour  une  colonie 
fît  d'abord  un  stage  de  trois  mois  comme  pensionnaire  dans 
un  sanatorium,  pour  qu'il  y  put  apprendre  l'hygiène  théo- 
rique et  pratique.  Le  malade,  avant  d'être  abandonné  à  lui- 
même,  doit  avoir  la  notion  juste  de  son  état;  il  faut  qu'il  sache 
quel  genre  de  vie  il  doit  mener;  en  un  mot,  il  doit  être  devenu 
son  propre  médecin  et  le  gardien  de  sa  santé. 

M.  Letulle  émet  le  vœu  qu'une  commission  médicale  et 
administrative  examine  les  malades,  dès  le  début  du  mal, 
c'est-à-dire  sitôt  qu'ils  se  présenteront  à  l'assistance  publique  : 
«  elle  les  classera  pour  les  différentes  régions  du  territoire  et 
les  y  conduira,  en  tenant  compte,  non  seulement  des  indica- 
tions cliniques  du  mal,  mais  encore  des  aptitudes  et  des  goûts 
individuels.  » 

Il  est  difficile  d'imaginer  un  meilleur  projet  :  au  point  de 
vue  de  la  méthode  d'examen,  il  vise  toutes  les  possibilités  ; 
seulement,  je  me  demande  s'il  est  possible  de  déterminer 
toutes  ces  conditions  :  état  physique  et  moral,  aptitudes  et 
goûts  individuels,  dans  un  seul  examen  qui,  les  malades  se 
présentant  en  grand  nombre,  ne  pourra  être  ni  très  long  ni 
très  minutieux. 

Avant  de  désigner  un  tuberculeux  du  ier  degré  pour  une 
colonie,  je  préférerais  l'envoyer,  pendant  2  à  3  mois,  soit  dans 
un  sanatorium  urbain,  soit  dans  un  sanatorium  de  province, 
non  comme  malade,  mais  comme  pensionnaire,  où,  pour 
payer  sa  pension  et  pour  son  instruction,  il  sera  obligé  de  faire 
des  travaux  légers  qui  lui  seront  désignés  par  le  médecin  et 
non  par  l'économe. 


\-\  SÂNATORIA  POUR  LES  PAUVRES 

Travail  pour  tuberculeux  peu  atteints.  —  Je  ne  crois  pas 
qu'un  travail  léger,  durant  quelques  heures,  dans  un  lieu 
sain,  soit  nuisible  pendant  la  période  «le  début  du  mal  ou 
pendant  la  convalescence,  surtout  si  ce  travail  est  réglé  par 
un  examen  médical  répété. 

Les  dépenses  de  ces  établissements  pourraient  donc  être 
réduites  d'une  façon  notable.  .Mais,  chose  plus  importante,  le 
malade  fait  ainsi  une  sorte  de  stage  d'essai  :  peut-être  recu- 
lera-l-il  devant  le  projet  d'émigration,  peut-être  le  médecin  ne 
trouvera-t-il  pas,  après  un  examen  répété  de  son  état  physique 
et  moral,  les  qualités  nécessaires  à  un  bon  sujet  puni- la  colo- 
nisation. 

On  aura  de  la  sorte  évité  des  frais  de  déplacement  inutiles, 
et  même,  s'il  revient  dans  ses  loyers,  le  patient  constituera  un 
avantage  pour  la  communauté  :  il  aura  appris  an  sanatorium 
la  sobriété  et  la  tempérance,  l'hygiène  nécessaire  pour  éviter  la 
propagation  de  sa  maladie  dans  sa  famille  et  parmi  ses  sem- 
blables ;  un  foyer  d'infection  possible  est  supprimé,  et  une 
tendance  vers  l'éthyliome  peut  être  guérie. 

.Mais  mon  excellent  maître  a  raison  quand  il  demande  la 
création  de  colonies  pour  les  malades  guéris,  «  ou  tout  au 
moins  améliorés  au  point  de  pouvoir  et  de  vouloir  reprendre 
une  vie  active.  Il  est  impossible  de  rêver  pour  eux  mi  séjour 
indéfini  et  inactif  dans  la  maison  mère  à  laquelle  ils  auront  dû 
leur  retour  à  la  santé  »  (i). 

.M.  Letulle  a  réfuté  l'objection  tirée  de  la  famille  et  des 
affections  amicales  du  malade  :  il  y  répond  par  l'offre  de  l'émi- 
gration, non  plus  personnelle,  mais  familiale. 

Pour  les  tuberculeux  déjà  phtisiques,  mais  dont  l'état 
empêche  qu'on  puisse  les  transporter  dans  les  colonies,  le 
sanatorium,  c'est-à-dire  rétablissement  fermé,  est  le  seul 
endroit  où  ils  puissent  être  placés. 

Mais,  où  dirigerons-nous  ces  malades  '.' 

Enverrons-nous  ceux  qui  ont  une  chance  de  guérison  direc- 
tement dans  un  sanatorium  provincial  éloigné  ? 

Il  est  inévitable  que  des  erreurs  soient  journellement  com- 
mises. 


(i)  Lltl'lll.  La  Presse  médicale,   1894,  11  août. 


SANATORIUM  D'AXGICOURT  4;5 

Et  les  malades  en  apparence  incurables,  les  consignerons- 
nous  immédiatement  dans  les  hospices  ? 

11  est  impossible,  même  aux  cliniciens  les  plus  habiles,  de 
se  prononcer  d'une  façon  certaine  sur  le  pronostic  de  la 
maladie;  car  nous  avons  vu  dans  les  hôpitaux  spéciaux,  dans 
les  sanatoria  et  dans  la  clientèle  privée,  survenir  des  guéri- 
sons  inespérées,  et  succomber  d'autre  part  des  malades  pour 
lesquels  l'examen  minutieux  avait  laissé  un  ferme  espoir. 

Et  puis,  autre  considération  non  moins  importante,  nous 
aurons  l'opinion  publique  contre  nous,  on  nous  accusera  de 
condamner  les  malades  d'avance. 

Il  est  donc  préférable  de  créer,  dans  l'intérieur  ou  autour  des 
grandes  villes,  des  sanatoria  pour  recevoir  des  tuberculeux  à 
tous  les  degrés,  même  une  partie  de  ceux  qui  désirent  faire 
le  stage  pour  une  colonisation  ultérieure. 

Sanatorium  d'Angicourt.  —  Le  sanatorium  d'Angicourt  est 
destiné  à  recevoir,  non  pas  les  phtisiques  ou  les  tuberculeux 
à  cavernes,  mais  seulement  les  tuberculeux  au  début  (i).  Les 
tuberculeux  à  cavernes  et  les  phtisiques  ne  sont-ils  pas  cura- 
bles ?  Nos  maîtres  les  plus  éminents,  Bouchard,  Grancher,  Jac- 
coud,  etc.,  n'ont-ils  pas  dit  que  la  tuberculose  est  curable  dans 
le  plus  grand  nombre  de  cas  et  presque  à  tous  les  degrés  ? 

On  a  proposé  de  mettre  les  phtisiques  incurables  en  appa- 
rence dans  des  hospices,  par  raison  d'économie  (2).  Mais  avec 
les  notions  modernes  sur  la  contagiosité  de  la  tuberculose  pul- 
monaire et  la  connaissance  des  bienfaits  du  traitement  hygiéno- 
diétélique  des  tuberculeux,  traiterons-nous  les  phtisiques  dans 
les  hôpitaux  spéciaux  et  dans  les  hospices  autrement  que  dans 
les  sanatoria  ? 

Les  dépenses  dans  un  hospice  ordinaire  sont  diminuées, 
parce  que  les  malades  ont  besoin  de  moins  de  soins  médicaux 
et  que  les  infirmiers  sont  en  plus  petit  nombre  que  dans  un 
hôpital  pour  les  maladies  aiguës,  où  les  dépenses  générales 
sont  innombrables.  Mais,  dans  un  hospice  pour  les  tubercu- 
leux, l'état  de  choses  n'est  pas  le  même.  Il  faut,  au  contraire, 


(1)  Plicque.  Le  Sanatorium  d'Angicourt. 

(2)  L.  Petit.  Le  Phtisique  et  son  traitement  hygiénique. 


476  SANATORIA    POUR  LES  PAUVRES 

si  nous  voulons  supprimer  les  foyers  de  contamination,  une 
surveillance  exceptionnelle,  un  service  composé  de  médecins 
expérimentés  en  phtisio-thérapie  et  aidés  par  une  escouade 
d'infirmiers  sanitaires  (i). 

Transformation  d'hôpitaux  ex  sanatoria.  —  Pourquoi  donc 
appeler  un  établissement  destiné  à  soigner  les  phtisiques  et  à 
empêcher  la  dissémination  des  foyers  de  contagion  autrement 
cpie  «  sanatorium  »  ? 

«  Brompton  Ilospital  »,  à  Londres,  hôpital  spécial  par  excel- 
lence, situé  au  centre  même  de  la  ville,  ne  diffère  des  sana- 
toria du  continent  que  par  une  seule  chose  :  il  lui  manque  les 
galeries  vitrées  pour  la  cure  sur  les  chaises  longues. 

J'ose  dire  que  si  l'on  transformait,  dans  chaque  grande  ville, 
un  ou  deux  des  hôpitaux  les  plus  vastes  et  les  mieux  situés 
en  sanatoria  pour  phtisiques,  en  y  ajoutant  des  vérandas  pour 
la  cure  de  repos  et  en  y  instituant  le  traitement  hygiénique 
et  diététique  ;  que  si  l'on  créait  en  province,  dans  les  lieux 
où  l'atmosphère  a  une  pureté  relative,  quelques  sanatoria  pour 
y  envoyer  des  malades  choisis  dans  les  sanatoria  urbains 
parmi  ceux  qui  ont  le  plus  besoin  de  changement  d'air,  la 
mortalité  par  la  tuberculose,  dans  les  grandes  villes,  diminue- 
rait d'une  façon  inespérée. 

Mais  on  me  dira  que  c'est  impossible  à  réaliser;  un  sanato- 
rium pour  les  tuberculeux  serait  trop  coûteux,  surtout  si  l'on 
songe  au  nombre  considérable  de  phtisiques  qu'il  faudrait 
traiter  dans  les  grandes  capitales. 

Je  vais  étayer  mon  opinion  sur  des  chiffres,  en  prenant 
Paris  pour  exemple. 

DÉPENSE  PAR  JOUR  POUR  CHAQUE  MALADE  DANS  LES  HOPITAUX  DE 

Paris.  — Comme  nous  l'avons  déjà  dit,  M.  le  professeur  Gran- 
cher  a  calculé,  il  y  a  quelques  années,  que  l'Assistance  pu- 
blique dépensait   par  jour   et  par    tuberculeux  i  fr.  i>5. 


(i)  Ces  infirmiers  sanitaires  seront  choisis  parmi  les  agents  les  plus  instruits 
et  les  plus  sûrs,  chargés  de  maintenir  partout  la  bonne  règle,  de  veiller  à  1  exé- 
cution des  mesures  prescrites  et  ayant  sur  le  personnel  des  infirmiers  et  des 
malades  une  autorité  suffisante  pour  se  faire  respecter.  (Grancher.  Rapport 
à  l'Académie  de  Médecine.  1898,  3  mai.) 


DÉPENSE  JOURNALIERE  PAR  MALADE  477 

Mais  depuis  cette  époque,  d'après  une  statistique  que  j'ai  pu 
obtenir  grâce  à  l'extrême  bienveillance  de  M.  le  docteur 
Napias,  alors  inspecteur  général  des  services  administratifs  du 
ministère  de  l'Intérieur,  les  dépenses  journalières  des  malades 
dans  les  différents  hôpitaux  semblent  devenues  encore  plus 
élevées  (i). 

Voici  ce  qu'elles  sont  pour  les  établissements  ci-dessous  : 

Hôtel-Dieu 2,97 

Pitié 2,90 

Charité 3, 08 

Necker 2,93 

Saint-Antoine 3, 14 

Beaujou 3,27 

Lariboislère ...  2,78 

Tenon 3, 14 

Laënnec 2,97 

Bichat 3,84 

Saint-Louis 3,66 

En  prenant  la  moyenne,  on  trouve  que  la  dépense  journalière 
d'un  malade  est  de  3  fr.  i5. 

D'après  le  travail  très  intéressant  de  M.  le  docteur  L. -II.  Petit, 
intitulé  :  «  De  l'hospitalisation  des  tuberculeux  d'après  les  opi- 
nions des  médecins  des  hôpitaux  de  Paris  »,  il  existe  à  Paris  : 

4  services  où  les  tuberculeux  occupent  1/2  des  lits, 
9  -  i/3        - 

4  —  ^  i/5       — 

En  prenant  la  moyenne  de  cette  statistique,  on  voit  que  les 
tuberculeux  occupent,  non  pas  seulement  le  i/o,  comme  le 
disait  M.  Letulle,  mais  le  i/3  des  lits  des  hôpitaux  pendant 
toute  Tannée. 

Voici  une  statistique  qui  donne  à  peu  près  le  nombre  de 
lits  des  services  généraux  de  médecine  où  les  phtisiques  peu- 
vent être  admis  : 

Hôpital  Andral ioo 

—       Beaujou ioo 

A  reporter.    .    .  200 


(1)  Ces  chiffres    sont  ceux  qu'a  fournis  1  Assistance  publique   à  l'Exposition 
de  i88q. 


478  SANATORIA  POUR  LES  PAUVRES 

Report .    .  200 

Hôpital  Bichat ni 

—  Broussais 198 

—  de  la  Charité    .    .    .  374 

—  Cochin ïoï 

Maison  Dubois 200 

Hôpital  Hérold  .....  100 

Hôtel-Dieu 337 

Hôpital  Laénnec 670 

—  Lariboisièrc.    .    .    .  3y8 

—  Necker 224 

—  de  la  Pitié 5i3 

—  Saint-Antoine  .    .    .  55o 

—  Tenon 549 

Total.    .    .    .       4629 
Ajoutons  à  cela 961   brancards  environ. 

Ce  qui  porte  le  total  à  .     .    .       5  r>90  lits,    dont  1    3  est  occupé  par- 
les tuberculeux. 

Les  fréquents  changements  d'hôpital  que  font  les  phtisiques 
rendent  très  difficile  l'évaluation  de  la  durée  exacte  de  leur 
séjour. 

Pendant  plus  de  cinq  ans  j'ai  fréquenté  divers  services  de 
Paris  :  j'ai  pu  constater,  et  je  ne  crois  rien  exagérer  en  l'avait 
çant,  que  la  durée  moyenne  du  temps  que  passe  un  phtisique 
dans  nos  salles,  en  allant  de  l'une  à  l'attire  jusqu'à  la  fin  de  sa 
maladie,  est  île  90 jours  au  moins.  M.  Letulle,  avec  sa  bienveil 
lance  habituelle,  m'a  permis  de  relever  dans  ses  registres  de 
l'hôpital  Saint-Antoine  une  statistique  qui  prouve  combien  est 
grand  le  nombre  des  tuberculeux  qui  demeurent  dans  le  même 
service  plus  de  5o  jours,  et  il  n'y  a  guère  de  malade  qui  ne 
reste  au  moins  dans  deux  services  avant  de  mourir. 

Voici  la  statistique  des  detix  salles  Barth  (femmes)  et  Louis 
(hommes)  de  l'hôpital  Saint-Antoine,  pendant  l'année  i8y3  : 

11    phtisiques   sont    restés    à     l'hôpital   entre      5o et 5g jours 

8  Go-  69     — 

7  7°-  79 

3  8e-  89     — 
a  90-  99 

G  100-109     — 

1  110-119     — 

4  1-20-129     — 


DÉPENSE  JOURNALIERE  rAR  MALADE  4/9 

3    phtisiques    sont  restés    à    l'hôpital    entre    i3o-i3g  jours 
i  i4o-i49     — 

1  —  —  160-169     — 

1  170-179  — 

1  : —                           —                            220-229  — 

1  —                            230-239  — 

1  25o-25g  — 

1  370-379 

1  94o-949  — 

D'autre  part,  comme  nous  l'avons  dit  dans  notre  chapitre 
sur  la  curabilité  de  la  phtisie,  pour  obtenir  une  moyenne  de 
3o  p.  100  de  guérisons  et  de  4o  p.  100  d'améliorations,  il  faut 
à  Falkenstein  une  moyenne  de  séjour  de  90  jours. 

D'après  les  chiffres  ci-dessus,  on  peut  affirmer  qu'un  phti- 
sique passe  en  moyenne  90  jours  à  l'hôpital,  en  1,  2,  3  séjours 
successifs. 

Les  1,860  lits  sont  donc  occupés  toute  l'année,  et  il  passe  par 
les  hôpitaux  4  X  1,860  =  ^,44o  tuberculeux  à  tous  les  degrés, 
qui  coûtent  par  an  1,860  X  365x3  fr.   i5  =  2, i38, 535  francs. 

El  personne  n'est  guéri  ! 

Voyons  à  présent  quelle  serait  la  dépense  dans  un  sanato- 
rium. 

J'ai  cru  que  personne  ne  serait  plus  compétent  pour  répondre 
à  cette  question  qu'un  médecin  dirigeant  un  sanatorium  pour 
phtisiques,  c'est-à-dire  un  établissement  fermé,  construit 
d'après  les  conceptions  modernes  de  la  phtisio-thérapie. 

J'ai  donc  adressé  la  question  suivante  à  plusieurs  direc- 
teurs : 

«  Quelle  sera,  d'après  vous,  la  dépense  journalière  du  trai- 
tement hygiéno-diététique  dans  un  sanatorium  pour  les  pau- 
vres, bien  construit,  et  remplissant  toutes  les  conditions 
voulues  pour  la  phtisio-thérapie  ?  » 

M.  le  docteur  Dettweiler  m'a  répondu  que  dans 

son  deuxième   sanatorium  pour  les   pauvres, 

près  de  Falkenstein,  le  prix  de  revient  est  de.        3   fr.   06 
Et  il  ajoute  que  ses  sanatoria  se  trouvent  dans  la 

région   de  l'Allemagne  où  la  vie  est   le    plus 

chère. 
D'après  M.  le  docteur  Meissen,  de  Hohenhonnef, 

la  dépense  sera  de 2  fr.    5o  à   3   fr.  12 

Achtermann  et  Rœmpler,  de  Goerbersdorf.    .    .        3  fr.    12  à  3  Ir.  75 


/,8o  SÂNATORIA  POUR  LES  PAUVRES 

D'après  Sabourin,  du  Cariigou 3  IV. 

Turban,  de  Davos 3  — 

—  Trudeau,  d'Adirondack  Cottage  Sanato- 

rium    5  — 

Von   Ruck,   d'Asheville 3  IV.  6o 

—  Paul  Gibier,  de  New- York 3  IV.  r>o  à   r>  IV. 

—  Wolf,  do  Reiboldsgrûn i  IV.  50  à  3  fr.  is 

—  Andvord,  de  Tonsaasen i  IV.  70 

D'après  le   rapport  de   M.  Paul  Strauss,  fait  eu 

vue  du   projet   île   sanatorium   à    Angicourt,   le 
prix  de  revient  serait  de  (pour  5o  malades).    .        .}   fr.   10 
Et  quand  rétablissement  serait  au  complet  avec 

200  malades,  il  serait  seulement  de 3   IV.  21 

Etant  données  la  compétence  et  l'expérience  de  M.  Paul 
Strauss  et  de  ses  collaborateurs,  je  crois  que  les  calculs  laits 
pour  Angicourt  sont  aussi  exacts  que  possible. 

Si  nous  traitons  tous  les  phtisiques  dans  les  sanatoria,  il  y 
aura  une  différence  de  o  fr.  06  par  malade  et  par  jour,  et  les 
résultats  seront  les  suivants  (ces  chiffres  ne  sont  pas  des 
maxima,  mais  des  minima)  : 

Guérisons  absolues '4  P-  IO° 

—  relatives 1  \      — 

Améliorations 42      — 

Dire  que  «  la  phtisie  des  classes  pauvres  est  plus  grave  que 
celle  des  classes  riches  »  ne  repose  sur  aucun  fondement. 

RÉSULTATS    OBTENUS    DANS   LES    SANATORIA    POUR  LES    PHTISIQUES 

pauvres.  —  Je  puis  opposer  à  cette  assertion  :  i°  les  résultats 
obtenus  dans  le  deuxième  sanatorium  de  Falkenstein  pour  les 
pauvres,  oit  ils  se  montrent  aussi  satisfaisants  que  dans  le 
premier  sanatorium  payant  ; 

a0  Aux  Etats-Unis,  les  résultats  obtenus  (20  à  l<">  p.  100)  par 
le  docteur  Trudeau,  à  Adirondacks  Cottage  Sanatorium; 

3°  En  Finlande,  dans  le  sanatorium  «  Alexandre  »  pour  les 
pauvres,  les  résultats  sont  :  MJ,"  p.  100  de  guérisons. 

Résultats  obtenus  a  l'hôpital  Boucicaut.  —  A  l'hôpital 
Boucicaui  qui,  comme  nous  l'avons  vu,  n'est  pas  encore 
tout  à  fait  ce  que  devrait  être  un  sanatorium  pour  tuberculeux, 


s 


0< 


-a 
O 


Ksopf.  Sanaloria. 


CAISSE  DE  SECOURS  483 

M.  Letulle  pouvait  présenter,  après  un  fonctionnement  de 
six  mois  seulement,  la  statistique  suivante  : 

«  Sur  les  125  tuberculeux  qui  ont  été  soignés  clans  ce  ser- 
vice, 38  sont  morts,  l'état  de  60  autres  est  resté  stationnaire, 
enfin  27  malades  se  sont  sensiblement  améliorés,  et  je  ne  com 
prends  dans  cette  dernière  catégorie  que  ceux  qui  ont  présenté 
une  augmentation  de  poids  notable  variant  de  2  à  10  kilos.  Si 
l'on  retranche  de  cette  statistique  les  tuberculeux  entrés  mori- 
bonds à  l'hôpital,  on  voit  qu'environ  un  tiers  de  malades  a  été 
amélioré.  » 

M.  Letulle  a  bien  raison  quand  il  ajoute  que  ces  résultats 
paraissent  absolument  différents  de  ceux  qu'on  observe  géné- 
ralement dans  les  hôpitaux  où  les  tuberculeux  sont  soignés 
dans  les  salles  communes  (1). 

En  rendant  égales  les  conditions  hygiéniques,  les  phtisiques 
pauvres  doivent  guérir  tout  comme  les  riches,  et  le  fait  curieux 
signalé  par  Cazin  à  l'hôpital  de  Berck,  et  cité  par  Plicque,  peut 
même  faire  pressentir  qu'ils  guériront  mieux  que  les  riches. 
C'est  que,  chez  eux,  la  tuberculose  est  en  quelque  sorte  acci- 
dentelle, créée  artificiellement  par  le  manque  d'air  et  de  soleil, 
par  une  nourriture  insuffisante  (2),  et  nous  pouvons  ajouter 
par  l'alcoolisme. 

Je  crois  avoir  démontré,  non  seulement  pour  la  France, 
mais  aussi  pour  l'Amérique,  l'Allemagne,  la  Suisse,  etc.,  que 
le  traitement  des  phtisiques,  quel  que  soit  le  degré  de  la 
maladie,  ne  coûte  pas  plus  cher  dans  les  sanatoria,  où  les 
malades  ont  28  p.  100  de  chances  de  guérison  absolue  ou  rela- 
tive, et  cela  en  supprimant  pour  toujours  des  millions  de 
foyers  d'infection,  que  dans  les  hôpitaux  généraux,  où  ils  sont 
un  danger  permanent  pour  les  autres  malades  et  pour  la  com- 
munauté en  général,  et  où  ils  meurent  tous. 

Caisse  de  secours.  —  Le  devoir  de  ceux  qui  prennent  soin 
des  tuberculeux  pauvres   est  de  s'assurer  que   la   famille  du 


(1)  Letulle.  L'état  actuel  de   l'hospitalisation  des  tuberculeux    à    Paris  (4e 
Congrès  de  la  Tuberculose). 

(2)  Plicque.    Le    Sanatorium  d'Angicourt  et  le  traitement   hospitalier   de  la 
Phtisie. 


484  SANATORIA  POUR  LES  PAUVRES 

malade  ne  soutire  pas  pendant  son  séjour  au  sanatorium.  Une 
caisse  de  secours  pour  la  famille  îles  tuberculeux  pendant  leur 
séjour  dans  un  sanatorium  est  donc  de  nécessité  absolue. 

Sanatoria  pour  les  gens  d'aisance  moyenne.  —  Nous  avons 
dit  dans  le  chapitre  précédent  qu'en  l'état  actuel  des  choses  il 
est  impossible  de  traiter  les  tuberculeux  dans  les  établisse- 
ments fermés.  Mais  il  est  à  espérer  que  dans  tous  les  pays 
civilisés  on  continuera  à  créer  des  sanatoria  gratuits  pour 
les  pauvres,  ainsi  que  des  établissements  où  les  malades  de 
fortune  moyenne  pourront  recevoir  le  traitement  en  payant 
suivant  leurs  ressources. 

Assurance  volontaire.  —  Pour  ces  derniers,  je  me  suis 
demandé  souvent  si  par  une  assurance  placée  sous  la  .surveil- 
lance de  l'Etat  —  non  pas  obligatoire  pour  les  ouvriers, 
comme  en  Allemagne,  mais  volontaire  pour  tout  le  monde,  — 
on  n'arriverait  pas  à  diminuer  la  tuberculose  pulmonaire  d'une 
façon  très  notable.  Supposons  que  dans  une  famille  où  il  existe 
une  tare  tuberculeuse  on  craigne  que  les  enfants  ne  deviennent 
un  jour  victimes  de  la  phtisie.  Grâce  à  une  assurance  datant 
de  la  naissance  de  l'enfant,  ce  dernier  obtiendra  le  droit  d'en- 
trer dans  un  sanatorium  à  n'importe  quelle  époque  de  sa  vie, 
dès  que  la  tuberculose  commencera  à  se  manifester  chez  lui. 

Nous  ne  pouvons  exposer  ici  les  détails  d'une  pareille  entre- 
prise ;  nous  voulons  seulement  dire  que  moralement  il  y 
a  là  un  avantage  évident  :  beaucoup  de  gens  hésiteraient  à 
entrer  dans  un  établissement  public  créé  pour  des  malades 
indigents,  qui  n'hésiteront  pas  à  rechercher  le  traitement 
dans  un  sanatorium  s'ils  savent  qu'ils  doivent  payer  pour  y 
être  admis. 

Les  Sociétés  d'assurances  ouvrières  et  le  Sanatorium  han- 
séatique  d'Oderberg. — En  Allemagne,  les  Sociétés  d'assurances 
ouvrières  ont  bien  compris  la  valeur  des  sanatoria  pour  les 
ouvriers  tuberculeux.  Elles  ont  contribué  largement  au  main- 
tien de  ces  établissements.  Elles  envoient  leurs  clients  au  sana- 
orium  dès  les  premiers  signes  de  la  maladie.  En  1897,  ces 
Sociétés  ont  dépensé    1  3oo  000   marks    pour  le    maintien   des 


ŒUVRE  DE  LA  SOCIÉTÉ  DE  LA   CROIX-ROUGE  D'ALLEMAGNE  485 

tuberculeux  dans  les  sanatoria,  et,  pour  Tannée  1898,  il  a  été 
prévu  un  fonds  de  3  à  4  millions  destiné  à  cet  usage  en  même 
temps  qu'à  la  création  de  sanatoria  qui  appartiendront  à  ces 
Compagnies. 

Nous  reproduisons  la  photographie  du  premier  sanatorium 
de  ce  genre.  C'est  le  sanatorium  hanséatique  d'Oderberg,  près 
Saint-Andreasberg,  érigé  par  la  Compagnie  d'assurances  contre 
l'invalidité  et  la  vieillesse  de  la  ville  de  Lùbeck.  Le  bâtiment 
est  construit  selon  les  conceptions  modernes  de  l'hygiène  et 
de  la  phtisio-thérapie.  Il  a  été  inauguré  le  12  août  1897.  La 
figure  ci-jointe  (fig.  92)  est  suffisante  pour  donner  une  idée 
des  dimensions  de  ce  beau  bâtiment  où  120  malades  peuvent 
être  reçus. 

Il  n'est  pas  douteux  que,  prenant  l'initiative  de  la  création 
d'institutions  de  ce  genre,  les  gouvernements  ne  parviennent 
à  rendre  la  tuberculose  de  plus  en  plus  rare  parmi  les  classes 
inférieures. 

L'œuvre  de  la  Société  de  la  Croix-Rouge  d'Allemagne. 
—  La  Société  de  la  Croix-Rouge  en  Allemagne  se  propose  de 
créer  3o  sanatoria  populaires,  dont  le  tiers  fonctionne  déjà 
actuellement.  Les  professeurs  von  Leyden  et  von  Ziemssen 
sont  à  la  tête  de  ce  mouvement,  avec  le  Dr  Pannwitz.  Un  sana- 
torium important  de  cette  société  est  celui  de  Grabowsee,  à 
quelques  lieues  de  Berlin.  Les  malades  passent  d'abord  par  la 
clinique  du  professeur  Gerhardt,  qui  les  examine  tous  les 
quinze  jours.  L'entretien  revient  à  environ  3  fr.  5o  par  jour. 
Les  malades  payants  donnent  par  jour  3  fr.  73  (3  marks).  On 
constate  un  grand  nombre  d'améliorations  dès  la  quatrième 
semaine. 


CONCLUSIONS 


Nous  ne  pouvons  nous  étendre  plus  longuement  sur  le  côté 
social  de  cette  cpiestion  de  la  tuberculose.  Nous  avons  essayé  de 
donner  un  aperçu  aussi  complet  que  possible  de  ce  qui  cons- 
titue le  traitement  et  la  prophylaxie  moderne  de  la  phtisie 
pulmonaire.  Nous  sommes  convaincu  que  cette  maladie  est 
évitable  et  guérissable,  et  nous  serions  heureux  d'avoir  réussi 
à  faire  partager   noire  conviction  à  ceux  qui  ne  l'avaient  pas. 

Que  ce  livre  que  nous  présentons  au  inonde  médical  soit 
imparfait,  nous  ne  le  savons  que  trop.  Nous  espérons  néan- 
moins qu'il  sera  bien  accueilli  et  que  dans  une  certaine 
mesure  il  aidera  l'hygiéniste  dans  ses  efforts  pour  le  main- 
tien de  la  santé  publique,  qu'il  facilitera  au  médecin  le  traite- 
ment complexe  de  la  tuberculose,  qu'il  donnera  aux  hommes 
d'Etat  quelques  indices  pour  combattre  la  phtisie  en  tant  que 
maladie  sociale,  et  qu'enfin  il  montrera  aux  philanthropes  le 
bien  qu'ils  pourraient  faire  en  s'unissant  aux  médecins, 
aux  hygiénistes  et  aux  hommes  d'Etat  dans  cette  grande 
œuvre  dont  le  but  n'est  rien  moins  que  de  faire  disparaître  la 
tuberculose  parmi  les  nations  civilisées.  Tel  est  le  vœu  par 
lequel  nous  conclurons  notre  travail,  en  nous  associant  de 
tout  cœur  à  l'opinion  de  l'immortel  Pasteur  : 

«  //  est  dans  le  pouvoir  de  l'homme  de  frire  disparaître 
toutes  les  maladies  parasitaires  du  monde  ». 


TABLE   DES   CHAPITRES 


Préface   a    la   deuxième   édition vu 

Préface   a   la   première   édition xi 

CHAPITRE    PREMIER 

HISTORIQUE  I 

CHAPITRE   II 

MORTALITÉ    PAR    PHTISIE    PULMONAIRE  16 


CHAPITRE    III 

PREUVES    ANATOMO-PATHOLOGIQUES    DE    LA    CURABILITÉ 
DE    LA    TUBERCULOSE    PULMONAIRE 

Opinion  d'Hippocrale,  de  Celse,  de  Galien,  de  Laënnec,  de  Hérard,  de 
Cornil,  de  Carswell,  de  Cruveilhier,  de  Charcot,  de  Grancher. —  Tableau 
statistique  des  nombres  d'individus  morts  d'autres  affections  que  la 
tuberculose  ayant  présenté  à  l'autopsie  des  lésions  tuberculeuses  cica- 
trisées. —  Réponses  reçues  de  MM.  Brouardel,  Letulle,  Strassmann, 
Goodhart,  Whittaker  et  Nicolas.  —  Recherches  de  Kurbow  et  de  Déje- 
rine  sur  la  présence  des  bacilles  tuberculeux  virulents  dans  les  foyers 
calcifiés 


CHAPITRE    IV 

PREUVES    CLINIQUES    DE    LA    CURABILITE    DE    LA    TUBERCULOSE 
PULMONAIRE 

Opinion  de  Bouchard,  de  Jaccoud,  de  Weber,  de  Leyden.  — Tableau  statis- 
tique de  Manasse.  —  Tableau  statistique  de  Knopf.  —  Concept  de  «  gué- 


/,88  TABLE  DES  MATIÈRES 

rison  »  selon  Daremberg. —  Guérison  absolue,  guérison  relative  (Dett- 
weiler). — Guérison  dans  le  sens  de  restitutio  ad  integrum.  — Nombre 
îles  invalides  hospitalisés  par  200  sanaloria.  —  Durée  dos  guérisons.   .       2H 


CHAPITRE    V 

LA    CONTAGION    DE    L.V   TUBERCULOSE    ET    LES    MOYENS    d'ÉVITEB 
SA    PROPAGATION.    —    PROPHYLAXIE    INDIVIDUELLE 

I.  Contagion  par  inhalation.  Nombre  de  bacilles  expectorés  quotidienne- 
ment par  un  phtisique.  —  Expériences  de  divers  auteurs  sur  le  danger  des 
crachats  desséchés.  —  La  virulence  et  la  fréquence  du  bacille  de  la 
tuberculose.  —  Crachoir  de  poche  de  Dettweiler.  —  Crachoir  de  poche 
de  Knopf.  —  Désinfection  des  crachoirs.  —  Crachoirs  fixes.  —  La 
résistance  du  bacille  au  froid.  —  Dissémination  des  bacilles  par  les 
mouches.  —  Crachoir  de  Proedohl.  —  Le  mouchoir,  la  barbe  et  les 
linges    des    tuberculeux.  —  Propagation  de  la  tuberculose  par  les  vers 

de  terre 3; 

II.  Contagion  par  ingestion.  Fréquence  de  la  tuberculose  par  ingestion. 
—  Le  danger  des  laits  non  stérilisés.  —  Infection  intestinale  par  des 
crachats  avalés.  — ■  La  salive  bacillifère. —  La  nécro-tuberculose. —  La 
tuberculose  parmi  les  petits  animaux  domestiques.  —  Infection  des 
nouveau-nés  par  l'ancienne  méthode  de  la  respiration  artificielle.   ...       /\ti 

III.  Contagion  par  inoculation.  Auto-inoculation.  —  Inoculation  par  cra- 
choirs cassés  ou  par  pans -ment  des  plaies  tuberculeuses  ou  piqûre 
anatomique.  —  Transmission  de  la  tuberculose  d'enfant  à  nourrice.  — 
Dangers  de  la  circoncision  selon  les  rites  Israélites  orthodoxes.  —  Infec- 
tion tuberculeuse  par  voie  génitale.  —  Infection  par  les  dents  malades, 
parla  vaccination.  —    Infection  par  tatouage 54 


CHAPITRE    VI 

LES    LOIS    SANITAIRES    ET    LA    LUTTE    CONTRE    LA   TUBERCULOSE 
DANS    LES    DIVERS    PAYS 

Allemagne,  Angleterre,  Australie,  Autriche,  Belgique,  Canada.  Chili, 
Danemark,  Espagne,  Etats-Unis,  France,  Hollande,  Hongrie,  Italie, 
Japon,  Norvège  et  Suéde,  Portugal,  Russie,   Suisse,  Turquie 60 


CHAPITRE    VII 

PROPHYLAXIE    PUBLIQUE    DE    LA    TUBERCULOSE    DANS    LA    RACE    BOVINE 

Distribution  géographique  de  la  tuberculose  des  bovidés  :  France,  Bel- 
gique. Prusse,  Saxe,  Angleterre,  Danemark,  Russie  Algérie,  Japon, 
Etats-Unis.  —  Entente  internationale tp 


TABLE  DES  MATIÈRES  /fi$ 

CHAPITRE    VIII 

PROPHYLAXIE    PUBLIQUE    DE    LA.    TUBERCULOSE    HUMAINE 

Transmission  cl  prédisposition.  —  Ecoles  spéciales  pour  enfants  tuber- 
culeux. —  Hygiène  scolaire.  —  Repas  aux  écoliers  pauvres.  —  Règle- 
ment du  travail  des  enfants  et  des  femmes  dans  les  manufactures, 
magasins  et  locaux  publics.  —  Surveillance  de  tous  ces  établissements 
au  point  de  vue  de  la  ventilation  et  de  l'hygiène  générale.  —  Professions 
particulièrement  dangereuses  aux  prédisposés.  —  Désinfection  des 
théâtres,  salles  de  concert,  etc.,  après  chaque  représentation.  —  Le 
danger  du  transport  des  phtisiques  par  chemin  de  fer  (sleeping  cars). 

—  Logements  insalubres.  —  La  question  de  la  déclaration  obligatoire 
de  la  tuberculose  comme  maladie  contagieuse.  —  Désinfection  de  l'ap- 
partement des  tuberculeux  pendant  la  maladie  et  après  la  mort.  — 
Inspection  par  les  autorités  publiques  de  tous  établissements  où  se 
trouvent  des  tuberculeux  comme  malades  et  pensionnaires  (sanatoria, 
hôpitaux,  maisons  de  santé,  asiles,  hôtels,  etc.).  —  Sur  la  défense  de 
cracher  par  terre  dans  les  lieux  publics.  — ■  Expérience  personnelle  avec 
un  crachoir  de  poche.  —  Surveillance  des  boulangeries.  —  Enveloppe- 
ment du  pain.  —  Balayage  des  rues.  —  Le  danger  d'un  seul  calice  pour 
tous  les  communiants.  —  La  tuberculose  dans  l'armée.  —  La  crémation. 

—  L'intempérance,  l'abus  de  l'alcool,  la  pauvreté  et  la  misère 99 

CHAPITRE    IX 
TRAITEMENT    PRÉVENTIF    DE    LA   PHTISIE    PULMONAIRE 

Qualités  bactéricide  et  ph  igocytique  de  l'organisme  humain.  —  Le  phy- 
sique et  le  caractère  d'un  individu  prédisposé  à  la  tuberculose.  —  Cause 
des  rhumes.  —  Conseils  aux  femmes  tuberculeuses  enceintes.  —  Aéro- 
thérapie  comme  moyen  prophylactique.  —  Exercices  respiratoires  pour 
développer  les  poumons  et  les  muscles  de  la  respiration.  —  Chant  et 
déclamation  à  l'air  libre.  —  Inhalation,  exhalation  et  deuxième  elfort 
expiratoire.  —  Exercice  pour  empêcher  les  enfants  de  se  tenir  courbés. 

—  Vie  à  l'air  libre.  —  Hydrothérapie  comme  moyen  d'endurcissement. 

—  Education  de  la  peau  et  du  système  nerveux  à  l'eau  froide.  —  Instal- 
lation de  l'hydrothérapie  dans  la  chambre  du  malade.  —  De  la  gymnas- 
tique,   du  sport   et  du   surmenage.   —  Maladies  phtisio-génétiques.  — 

—  Mauvais  mangeurs.  —  Enseignement  de  l'hygiène  et  de  la  physio- 
logie élémentaires  dans  les  écoles  publiques.  —  Choix  d'une  profession.      1 15 

CHAPITRE    X 

DES    SANATORIA    ET    DU    TRAITEMENT    HYGIENO-DIÉtÉTIQUE    EN    GÉNÉRAL 

Définition.  —  Etablissement  des  sanatoria.  —  Pas  de  danger  pour  le  voisi- 
nage ou  pour  les  infirmiers.  — Réduction  de  la  mortalité  par  tuberculose 


i90  TABLE  DES  MATIERES 

dans  les  villages  dcGoerbersdorf  il  de  Falkenstein, — Opinion  du  pro- 
fesseur von  Leyden  sur  le  traitement  des  tuberculeux  dans  les  sana- 
toria 128 


CHAPITRE    XI 
VISITES   AUX    SANATOBIA 

Allemagne    :   Falkenstein,   Ruppertshain,    Brehmer,   Rômpler,   Comtesse 
Pûckler,    Hohenhonnef,     Reiboldsgrùn ,    Alberlsberg,     Bad-Laubbach, 

Saint-Blasien,  Nordrach,  Lehrecke,  Schômberg 1 33 

Angleterre  :  Ventnor,  Brompton,   Craigleitb 182 

Autriche- Hongrie  :  Alland,  Neu  Schmecks 192 

Danemark  :  Vcjlefjords 201 

États-Unis    :    Adirondack,     Loomis,    Sharon,     Pasteur,    Denver    Home, 

Winyah,  Asheville,  Citronelle 20Ï 

Canada  :    Muskoka,    I.aurentidcs 23o 

France        Canigou,    Château   de   Durtol,    ïrespoye,    Villiers-sur-Marne, 

Berck-sur-Mer 236 

Norvège  :  Tonsaasen >'>' 

Russie  :  Halila 2Ô3 

Suisse  :  Davos,  Arosa,  Leysin 264 


CHAPITRE    XII 

LISTE    DES    SAXATORIA    ACTUELLEMENT    EX    FONCTIONNEMENT    OU    EX    PROJET 
DAXS    LES    PAYS    DIVERS    DU    MONDE 

Allemagne.  Angleterre,  Ecosse.  Irlande.  Autriche,  Hongrie,  Belgique, 
Danemark,  France,  Hollande,  Italie,  Norvège,  Russie,  Suisse,  Australie, 
Japon,  Afrique,  Etats-Unis,  Canada 280 


CHAPITRE    XIII 

DESCRIPTION    DUN    SANATORIUM    IDEAL 

Emplacement.  —  Climat.  —  Altitude.  —  Système  des  grands  pavillons 
réunis  par  des  galeries  vitrées.  —  Pavillons  pour  médecins  et  pour 
visiteurs.  —  Pavillon  pour  isolement.  —  Pavillon  de  jeu.  —  Vacheries.  — 
Ecuries.  —  Des  constructions  pour  étuve  autoclave  et  autopsie.  —  Mai- 
sonnette pour  jardinier  et  concierge.  —  Grande  véranda.  —  Salle 
d'hydrothérapie.  —  Construction  des  murs.  —  Equipement  intérieur. 
Ventilation.  —  Chauffage.  —  Eclairage.  —  Eventails,  etc.  —  Sonnettes 
électriques 290 


TAULE  DES  MATIERES  49 I 


CHAPITRE    XIV 

l'hygiène  spéciale  dans  un  sanatorium;  des  crachoirs; 
i  des  crachats  ;   leur  desinfection 

Instructions  aux  malades.  —  Crachoirs  de  poche  de  Dettweiler,  de  Knopf, 
de  Petit,  de  Vaquicr  et  de  Liebe.  —  Crachoir  de  cure. — Tasse-crachoir 
hygiénique.  —  Crachoir  élevé  de  Knopf.  —  Nettoyage  et  désinfection 
des  crachoirs. —  Chiffons  mouillés.  —  Mouchoirs  japonais.  —  Destruc- 
tion des  crachats.  —  Désinfection  du  service  de  table,  des  cuillers,  four- 
chettes, verres,  etc.  —  Soins  à  prendre  avec  les  linges  en  général.  — 
Désinfection  des  chambres  par  la  vapeur  de  formaldéhyde  (Expériences 
de  Nicollc,  de  Walther  et  de  Schlossmann).  —  Glycoformal.  —  Net- 
toyage dans  un   sanatorium  sans  balai  ni  plumeau 3oo 


CHAPITRE    XV 

l'aÉROTHÉRAPIE    DANS    LE    TRAITEMENT    DE    LA    PHTISIE    PULMONAIRE 

a.  Repos  prolongé  sur  la  chaise  longue  :  Défenseurs  de  la  cure  à  l'air 
libre.  —  L'air  pur  est  contraire  aux  associations  microbiennes.  —  L'aéro- 
thérapie  pour  les  malades  fiévreux.  —  Le  jour  médical.  —  Accou- 
tumance étonnante  des  phtisiques  aux  variations  de  la  température 
(Daucrluftkur).  ■ —  L'aérolhérapie  pour  les  malades  alités.  —  Protection 
de  la  tète  contre  le  soleil.  —  Danger  de  la  position  demi-assise  trop 
prolongée.  —  La  construction  d'une  chaise  longue.  —  Lit  de   camp  du 

D1  Weickcr  pour  la  cure  au  dehors 3  ï  i 

b.  Aération  des  chambres  des  malades  :  Ventilation.  —  Aérolhérapic 
pendant  la  nuit 3i6 

c.  Exercices  respiratoires  :  Le  but  de  ces  exercices.  —  Gradation  des 
exercices  nos  II,  III,  IV,  V,  VI.  —  Règle  générale.  —  Exercices  res- 
piratoires dans  la  symphyse  pleurale 3 17 

d.  Promenades  graduées  :  Précautions  à  prendre.  —  Contre-indications. 

—  Traitement   dans  le  cas  où   le  malade   revient    en  transpiration.   — 
Exercices  pour  les  tuberculeux  fiévreux 32 1 

e.  Cabinet  pneumatique  :  Défenseurs  du  traitement  par  cabinet  pneuma- 
tique. —  Description  du  cabinet.  —  Résultats  du  traitement.  —  Tableau 
de  Quimby.  —  Modification  du  traitement  par  l'auteur.  —  Durée  des 
séances.  —  Expérience  personnelle  pendant  une  séance  dans  le  cabinet. 

—  Protection  contre  les  microbes  pendant  l'inspiration  profonde  dans 

le  cabinet 3a3 


CHAPITRE    XVI 

L'HYDROTHÉRAPIE    DANS    LE    TRAITEMENT    DE    LA    PHTISIE    PULMONAIRE 

Opinion  de  Valleix,  de  Flcury,  de  Peler.  —  Température.  —  Gradation 
dans  l'application  de  l'eau  froide  pour  malades  alités.  —  Drap 
mouillé.  —  Exercice  pendant  la  douche.  —  Réaction.  —  Préaction. 
—  Surveillance  médicale 33î 


492  TABLE  DES  MATIÈRES 

CHAPITRE   XVII 
HYGIÈNE    DU    CORPS,    VÊTEMENTS,    ETC. 

Bains  hygiéniques.  —  Barbe.  —  Désinfection  dos  vêtements.  — ■  Le  con- 
fort dans  l'habillement.  —  Gilet-bretelles.  —  Chemise-négligé  pour 
hommes.  —  Toilette  naturelle  pour  femmes  (Dressreform) .  —  Respira- 
tion costo-supérieure  et  respiration  abdominale.  — Robes  traînantes. 

—  Chaussures,  —  Coiffures.  —  Tabac 338 

CHAPITRE    XVIII 

T  R  A  I T  E  M  E  X  T    DIÉTÉTIQUE 

a.  De  l'alimentation  :  Considérations  générales.  —  L'appétit  d'un  phti- 
sique. —  Des  viandes  à  recommander.  —  La  préparation  de  viande 
de  bœuf  crue.  —  Les  céréales.  —  Riz.  —  Cacao.  —  Œufs.  —  Prépa- 
ration des  légumes.  —  Pain  de  seigle.  —  Pain  complet.  —  Ration 
minimum  pour  un  homme  sain.  —  Menu  quotidien  dans  un  sanatorium. 

—  Nombre  des  calories  par  jour.  —  Recelte  pour  gelée   d'os  de  veau  ; 
gelée  de  lait.  — Bouillon  en  bouteille 343 

b.  Du  lait  :  Quantité  et  qualité.  —  Kouinys.  — Képhyr.  —  Façon   de  boire 

le  lait.—  Petit-lait 35o 

c.  De  l'alcool  :  Effets  physiologiques. — Alcool  dilué. — Surveillance  néces- 
saire. —  Le  café  et  le  thé 352 

d.  Quelques  conseils  généraux  sur  l'alimentation  des  phtisiques.  —  Den- 
tifrice  353 

CHAPITRE    XIX 

TRAITEMENT    SYMPTOMATIQUE 

Toux.  —  Vomissements.  —  Dyspnée.  —  Emphysème.  —  Bronchorrhée.  — 
Douleurs  thoraciques.  —  Révulsifs.  —  Fièvre  chronique.  — ■  Fièvre  sep- 
tique  et  expérience  avec  le  sérum  de   Marmorek.  —  Sueurs  nocturnes. 

—  Frissons. — Anorexie.  —  Dyspepsie  nerveuse. — La  poudre  de  viande 
de  Debove.  —  «  Egg-nog  ».  —  Hyperchlorhvdrie.  —  Le  «  Winternitz  ». 

—  Crymothérapio.    —  Dyspepsie  alcoolique.   —   Hypochlorhydrie.    — 

—  Dilatation  stomacale.   —  Constipation.   —  Diarrhée.   —  Hémoptysie 
aiguë. —  Collapsus.  —  Traitement  psychique. — ■  Hémoptysie  chronique. 

—  Les  hémophiliqucs.  —  Faiblesse  générale  alarmante.  —  Insomnie.      35f> 

CHAPITRE   XX 

DES  MALADIES  INTERCURRENTES  ET  DES  COMPLICATIONS 

Coryza  et  bronchites.  —  Congestions  pulmonaires.  —  Splénopneu- 
monie.  — Pleurésie   sérofibrineusc  primitive.  — Pleurésie  tuberculeuse 


TABLE  DES  MATIÈRES  493 

secondaire. —  Pneumothorax.  —  Hydropneumothorax.  —  Pyopneumo- 
thorax.  —  Gangrène  pulmonaire.  —  Le  phtisique  obèse.  —  Diabète.  — ■ 
Goutte.  —  Néphrites  chroniques.  —  Pityriasis.  —  Tuberculose  mi- 
liaire.  —  Tuberculoses  locales 384 


CHAPITRE   XXI 

LA    TUBERCULOSE    LARYNGEE 

Prophylaxie.  —  Hygiène.  —  Aérothérapie  et  Cabinet  pneumatique.  — 
Toux.  —  Dysphagic.  —  Alimentation.  —  Traitement  local  par  l'acide 
lactique.  —  Traitement  chirurgical.  —  Indications.  —  Contre-indications.     3g'2 

CHAPITRE    XXII 

TRAITEMENT    MORAL    ET    PEDAGOGIQUE 

Occupations  du  malade.  —  Rôle  du  médecin.  —  Pronostic.  —  Discipline. 

—  Les  malades  de  nationalités  diverses  dans  un  sanatorium.  —  Ins- 
tructions pour  éviter  les  rhumes.  —  Les  devoirs  du  malade  envers  le 
médecin.  —  Conférences  et  causeries.  —  Mariage.  —  Grossesse.  — 
Allaitement.  —  Opinion  de  Tarnier,  de  Pinard,  de  Cornil,  d  Hérard,  de 
Ribemont,  de  Lepage,  de  Hergolt,  de  Lusk  et  de  Gaulard.  —  Résultats 
obtenus  par  le  traitement  hygiéno-diététique  chez  les  femmes  enceintes. 

—  Décalogue  pour  phtisiques.  —  Ecoles  spéciales  pour  les  infirmiers. 

—  Choix  des  gardes-malades  pour  tuberculeux.  —  L'hypurgie.    .    .    .      397 

CHAPITRE    XXIII 

CLIMAT,    ALTITUDE    ET    MEDICAMENTS    SPECIAUX 

Considérations  générales  sur  la  phtisio-climato-thérapie.  —  Home  ch- 
inâtes. —  Huile  de  foie  de  morue.  —  Tropon.  ■ —  Somatosc.  —  Les 
phosphates,  les  préparations  martiales,  la  strychnine.  —  Créosote.  — 
Créosotal.  —  Gaïacol.  —  Iodoforme.  — Chlorure  de  sodium.  —  Essence 
de  menthe 4  1 1 

CHAPITRE    XXIV 

DU      SÉRUM     ANTITUBERCULEUX,      DE     LA     TUBERCULINE, 

DE      LANTIPHTISINE,      ETC.  \io 

CHAPITRE  XXV 

LE    TRAITEMENT    DE    LA    PHTISIE    PULMONAIRE    DANS    LES    STATIONS    LIBRES 
ET    DANS    LES    COLONIES.     DIVERTISSEMENTS    ET    SPORTS    DIVEHS 

La  vie  d'un  tuberculeux  dans  les  stations  et  dans  les  colonies.  —  Le  dan- 
ger   de  la  propagation  de  la  tuberculose.  —  Canotage,  golf,  croquet, 


494  TABLE  DES  MATIERES 

bicyclette.  —  Réponses  de  MM.  les  D"  Balcstrc  cl  Alkins.  — 
Quelle  classe  de  malades  doit-on  envoyer  aux  stations  libres.  —  Pour 
un  phtisique  en  voie  d'évolution  le  traitement  dans  les  stations 
libres  est  illusoire \i\ 


CHAPITRE    XXVI 

le  traitement  des  tuberculeux  non"  ambulants  chez  eux 
(sanatorium  a  domicile) 

La  cure  d'air  au  repos  chez  soi 432 


CHAPITRE   XXVII 

LE    TRAITEMENT    DU    TUBERCULEUX    AMBULANT 
DANS    LES    DISPENSAIRES    ET    DANS    LA    CLIENTELE    PRIVEE  ,  1  "> 


CHAPITRE    XXV11I 

LE    TRAITEMENT    DE    LA    TUBERCULOSE    PULMONAIRE    EX    VILLE, 

DANS       LES       ÉTABLISSEMENTS      POUR       RECEPTION      ET       ISOLEMENT 

(HOPITAUX    SPÉCIAUX) 

Le  but  de  ces  établissements.  —  Effets  physiques  du  mot  sanatorium.  — 
Où  faut-il  construire  le  sanatorium  urbain.  —  Hôpital  Boucicaut  à 
Paris.  —  Description.  —  Crachoir  individuel.  —  Grand  crachoir  de 
Thoinot.  —  Instructions  de  M.  le  Dr  Letulle.  —  Chambres  séparées 
à  préférer  dans  l'hospitalisation  des  phtisiques.  —  Quelques  sugges- 
tions an  point  de  vue  des  crachoirs  à  «  Boucicaut  ».  —  Atmosphère 
artificielle  des  forêts  de  pins  dans  les  salles  d'hôpitaux.  —  Pro- 
duction d'ozone  dans  les  chambres  de  phtisiques 44° 


CHAPITRE   XXIX 

DES    MATERNITÉS-SAXATORIA,     DES    HOPITAUX    ET    DES    ÉCOLES 
POUR    ENFANTS    TUBERCULEUX 

La  femme  tuberculeuse  enceinte  peut  guérir.  —  Ecole  de  propreté  et  de 
santé  pour  les  mères.  —  Infection  tuberculeuse  post-natale.  —  Les 
enfants  tuberculeux  et  les  écoles  publiques.  —  Statistique  de  quelques 
sanatoria  pour  enfants  tuberculeux 46a 


TABLE  DES  MATIERES  49  5 


CHAPITRE    XXX 

SANATORIA  POUR  LES  PAUVRES.  LA  TUDEUCULOSE  PULMONAIRE  COMME 
PROBLÈME  SOCIAL.  CAISSE  DE  SECOURS.  ASSURANCE  CONTRE  LA  PHTISIE 
PULMONAIRE 

Le  tuberculeux  pauvre  chez  lui.  —  Difficulté  pour  l'admission  à  l'hôpital. 

—  Traitement  insuffisant  dans  l'hôpital  général.  —  Résultats  obtenus 
et  dépense  par  jour  pour  chaque  malade  dans  quelques  hôpitaux  prin- 
cipaux du  monde. —  Défenseurs  de  la  cause  des  tuberculeux  pauvres. 

—  Colonisation  des  tuberculeux.  —  Travail  pour  tuberculeux  peu 
atteints.  —  Sanatorium  d'Angicourt.  —  Dépense  par  jour  pour  chaque 
malade  dans  les  hôpitaux  de  Paris.  —  Escouade  d'infirmiers  sanitaires. 

—  Dépense  pour  tuberculeux  à  Paris.  —  Dépense  par  jour  dans  un  sana- 
torium pour  les  pauvres.  —  Résultats  obtenus  dans  les  sanatoria 
pour  les  phtisiques  pauvres.  —  Résultats  obtenus  à  l'hôpital  Douci- 
caut.  —  Caisse  de  secours.  —  Sanatoria  pour  les  gens  à  moyens  modé- 
rés. —  Assurance  volontaire.  —  Sociétés  d'assurances  ouvrières  en 
Allemagne.  ■ —  Sanatorium  Oderberg  érigé  par  la  Société  d'assurance 
ouvrière  de  Lùbcck.  —  L'œuvre  de  la  Société  de  la  Croix-Rouge  de 
l'Allcmague.  —  Conclusion.  — •  Axiome  de  Pasteur 466 


EVKEUX,      IMPRIMERIE     DE     CHARLES     HERISSE Y 


/ 


Accession  no. 

14149 

Author 

Enopf}   S.   A*  _ 

Le£  stnatoria 

traitement  . • • 

aiino./qc3/j 
I  9ûôK 

19th  CENT.'